Hyperacousie
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L'hyperacousie est une maladie généralement incurable qui se caractérise par un dysfonctionnement de l'audition qui occasionne une hypersensibilité de l'ouïe. Dans de rares cas, l'hyperacousie peut être sévère auquel cas elle est généralement incurable.
Une personne victime d'hyperacousie souffre quand elle est exposée au bruit ou à certains sons ou certains environnements bruyants. Les souffrances décrites les plus fréquemment sont des douleurs (otalgies) et une intensification d'acouphènes préexistants. Ces souffrances sont proportionnelles à l'intensité du bruit et à la durée d'exposition.
Les fréquences touchées et le seuil de tolérance à l'intensité acoustique varient d'une personne à l'autre sur une échelle de 1 à 10[réf. souhaitée] [1] Au niveau 1, un hyperacousique est simplement gêné par certains bruits. Au niveau 10, un patient hyperacousique a des douleurs et une augmentation de ses acouphènes avec le bruit de sa propre voix et le bruit de ses pas sur le sol ou le bruit d'un simple ventilateur par exemple.
Selon les spécialistes des acouphènes, des prises en charge existent [2] :
- la thérapie sonore : TRT (écoute de bruit blanc) ; exposition progressive à des bruits appelée "enrichissement sonore",
- la thérapie psychologique appelée TCC (consultation d'un psychologue),
- la sophrologie (respiration, concentration).
Mais leur efficacité est controversée[3],[4],[5]. Ainsi, l'écoute des bruits blancs endommagerait l'intégrité fonctionnelle et structurelle du système auditif central et du cerveau en général [6],.
Le terme d'hyperacousie est issu des travaux de Henry B. Perlman en [7].
Il existe dans la littérature scientifique diverses définitions et types d'hyperacousie. Aucune ne fait encore consensus dans la communauté scientifique.
Il ne faut pas confondre hyperacousie et intolérance ou hypersensibilité au bruit. La confusion et le rapprochement sont fréquents.
Il ne faut pas confondre hyperacousie et phonophobie/misophonie. La confusion et le rapprochement de ces pathologies sont fréquents.
- Face au bruit, un patient hyperacousique aura des douleurs (otalgies), des acouphènes et une aggravation de l'hyperacousie proportionnels au bruit entendu. Modérée, face aux bruits modérés ( bruit de la ville, ventilateur, bruit à l'intérieur d'une voiture, etc) ; forte, face aux bruits agressifs (écoute de musique au casque, écoute de musique amplifiée, concerts, discothèques, machines-outils...).
- Face au bruit, un patient ayant une phonophobie ou une misophonie aura peur et/ou sera gêné ; il ressentira un inconfort mais n'aura ni douleurs, ni acouphènes. La phonophobie et la misophonie comme leur nom l'indique sont des peurs et donc d'origine psychologique. Elles se traitent comme des phobies, par consultation d'un psychologue (TCC).
L'hyperacousique évite le bruit non par peur mais pour éviter des douleurs (acouphènes, otalgies) d'autant plus redoutables qu'elles ne se guérissent pas dans le cas des acouphènes.
Il ne faut pas confondre l'hypersensibilité auditive (gêne face à un bruit précis uniquement) avec l'hyperacousie (douleurs, acouphènes, diminution du seuil de tolérance aux bruits). L'hyperacousie, comme toute maladie, comporte différents niveaux de gravité. L'hyperacousie peut être présente dès la naissance de l'individu (auquel cas, celui-ci sera touché par une des formes les plus graves de l'hyperacousie[réf. nécessaire]). Cette forme d'hyperacousie ne touche que 2 à 3 % de la population mondiale. La plupart des cas apparaissent souvent à la suite d'un traumatisme sonore ou d'expositions répétées à des bruits de forte intensité (dans environ 50 % des cas)[8].
L'hyperacousie est une pathologie mal connue, les explications proposées ne sont que des hypothèses. Les individus sont inégaux face au bruit : certains individus peuvent s'exposer toute leur vie dans n'importe quel état et ne jamais développer d'hyperacousie tandis que d'autres développeront une hyperacousie après un seul concert. Les conséquences varient également d'un individu à l'autre.
Évolution du trouble
- La phase de refus : dans un premier temps, les patients refusent d'admettre leur hyperacousie et continuent à vivre normalement, pensant que le problème va se résoudre avec le temps. En croyant que leur oreille va s'habituer très progressivement au bruit comme des yeux privés de lumière se réhabituent rapidement à la lumière. Un faux espoir entretenu par de fausses informations qu'on peut trouver sur internet notamment les sites marchands qui donnent de faux espoirs en prétendant guérir l'hyperacousie.[non neutre] [réf. nécessaire].
- La phase d'acceptation : ce n'est qu'après un certain temps, constatant que plus ils enrichissent très progressivement leur environnement sonore, plus leur hyperacousie s'aggrave très progressivement, qu'ils acceptent leur hyperacousie ainsi que l'absence de thérapie réellement efficace et l'obligation de se protéger face aux bruits qui augmentent leurs douleurs ainsi que d'être limités dans leurs actions, activités professionnelles, sorties, loisirs et relations sociales. La consultation de plusieurs médecins ne venant que confirmer que, pour l'instant, il n'existe pas de thérapie digne de ce nom, face à l'hyperacousie [9]
Généralités
En , Vernon définit l'hyperacousie comme une intolérance marquée d'une personne à un environnement sonore ordinaire, alors qu'en fait ses seuils d'audition sont normaux (pas de perte auditive significative)[10].
En , Klein et al. l'ont décrite comme une réponse exagérée ou anormale face à des sons ni menaçants ni inconfortables pour une personne saine[11].
En , Preves définit hyperacousie comme une intolérance rare de l'intensité des sons ordinaires de l'environnement qui peuvent survenir chez les personnes ayant des seuils d'audition normales ou élevées, et est généralement accompagnée par des acouphènes[12].
En , Anari et al. la définissent comme une hypersensibilité aux sons impliquant une perception de malaise ressenti à des niveaux inférieurs au volume de gêne normale[13].
En , Margaret M. Jastreboff et Pawel J. Jastreboff définissent l'hyperacousie comme « une activité, dans les voies auditives, anormalement amplifiée par les sons[14]. »
En , pour Anderssonn et al., il s'agit d'une intolérance inhabituelle aux sons environnementaux ordinaires.
En , pour Héber, Fournier et Noreña, c'est « une augmentation de la sensibilité auditive[15]. »
Il faut différencier :
- l'hyperacousie qui est une diminution de la tolérance au bruit ;
- la phonophobie qui est une peur irrationnelle du bruit, terme qui a été proposé Dennis P. Phillips et Michele M. Carr en [16] ;
- la misophonie qui est une réponse émotionnelle à certains sons, terme qui a été proposé par Pawel J. Jastreboff et al. en [17] ;
- le recrutement qui est une hypersensibilité sonore chez les patients atteints de perte auditive neurosensorielle.
Autres classifications
Tyler et al. de l'université de l'Iowa aux États-Unis ont proposé une autre classification de la sensibilité aux sons[18] :
- hyperacousie d'intensité : les sons modérés sont perçus comme très bruyants ;
- hyperacousie de gêne : certains sons même modérés sont gênants ;
- hyperacousie de peur : les patients ont peur de certains sons (modérés ou forts) ;
- hyperacousie de douleur : la douleur accompagne la perception sonore.
Le Dr Johnson (Oregon Tinnitus & Hyperacusis Treatment Clinic) propose de distinguer[19] :
- hyperacousie cochléaire : la plus courante, à savoir l'intolérance aux sons ;
- hyperacousie vestibulaire : la personne peut éprouver des sentiments de vertige, des nausées ou une perte d'équilibre face au bruit.
Synonymes
On peut retrouver dans la littérature d'autres termes ou expressions synonymes de l'hyperacousie : « odynacousie », « hyperesthésie auditive », « dysacousie », « dysesthésie auditif » ou encore « allodynie auditive »[20].
L'hyperacousie se caractérise par un seuil de tolérance au bruit anormalement bas ; certains sons ou niveaux sonores, qui ne sont pas perçus comme forts ou désagréables par les personnes présentant une audition normale, sont pénibles et/ou douloureux pour l'hyperacousique. Ces sons peuvent, en outre, aggraver le niveau d'hyperacousie, créer des acouphènes ou augmenter leur intensité s'ils sont déjà présents. L'hyperacousie est le plus souvent bilatérale mais dans 10 % des cas, elle ne touche qu'une seule oreille[21][source insuffisante]. L'hyperacousie peut être associée à des acouphènes, nausées, à des vertiges, à des douleurs neurogènes permanentes, otalgie, céphalées, ou à de la fatigue permanente. Ces souffrances sont généralement soulagées par le repos dans un environnement sonore modéré.
Certains sujets présentent par ailleurs une difficulté à échantillonner les sons : un faible bruit perturbe la perception d'un bruit pourtant plus fort. Ainsi, par exemple, il leur est difficile de suivre une conversation dans un environnement bruyant, comme un restaurant. Les personnes atteintes d'hyperacousie présentent généralement un audiogramme tout à fait normal.
Elle a longtemps été considérée comme rare par les professionnels de santé. Mais dans une société où le bruit est maintenant quasi omniprésent, elle devient de plus en plus fréquente en consultation et touche des personnes de plus en plus jeunes. L'hyperacousie devient un problème de santé publique de plus en plus préoccupant. Les données épidémiologiques récentes le confirment. Environ 40 % des gens souffrant d'acouphènes souffrent également d'hyperacousie, ce qui représente des millions de personnes.
Données générales
Peu d'études épidémiologiques à grande échelle ont été effectuées mais l'hyperacousie pourrait toucher 9 % des Suédois[22] et 15,2 % des Polonais[23],[24].
L'hyperacousie dans ses formes plus sévères atteindrait 2 % de la population[25].
Le patient typique atteint d'hyperacousie est relativement jeune, en effet, l'âge moyen étant d'environ 10 ans de moins que pour une population de patients souffrant d'acouphènes ou de perte auditive due au bruit[13].
L'hyperacousie chez les musiciens
L'hyperacousie est fréquente chez les musiciens professionnels. S'ils peuvent continuer à pratiquer leur métier, il s'agit d'hyperacousie légère. S'ils ne peuvent plus continuer à pratiquer leur métier, il s'agit d'hyperacousie sévère. L'hyperacousie devient sévère lorsqu'au fil des petits traumatismes, elle empire. L'aggravation peut être telle que le musicien doit arrêter son métier :
- une étude chez les musiciens, par l'association des orchestres anglais, a révélé que 25 % d'entre eux souffrent ou ont souffert d'hyperacousie[26] ;
- une étude a montré que 32 % des personnes touchées d'hyperacousie sont des musiciens professionnels[27] ;
- au Brésil, une étude menée auprès de musiciens d'orchestre militaire a montré que 37 % d'entre eux souffraient d'hyperacousie[28].
L'hyperacousie chez l'enfant
- La prévalence de l'hyperacousie dans la population des enfants (mesuré sur 7 097 individus) de 11 ans du Royaume-Uni est estimé à 3,7 %[29].
- Une étude menée au Brésil sur 506 enfants âgés de sept à douze ans a montré que 3,2 % étaient atteints d'hyperacousie[30]. Cette pathologie peut être difficile à détecter chez l’enfant. Elle peut aussi être associée à d'autres états ou symptômes comme les acouphènes, l'autisme, le syndrome de fatigue chronique, la dépression, le syndrome de Williams…
L'étude du comportement de l'enfant permet de détecter l'hyperacousie car ils peuvent manifester des comportements de gêne aux bruits (colère, angoisse, panique...). Ils se bouchent souvent les oreilles et/ou évitent les endroits bruyants. Dans leur scolarité, ils peuvent manifester des difficultés d'attention dans une salle de classe bruyante. Pour les cas sévères, cela peut aller au refus d'aller à l'école. L'hyperacousie doit donc être détectée et l'enfant suivi par un médecin spécialiste afin d'en identifier les causes et de mettre en place un traitement adapté[31].
L'hyperacousie chez les personnes atteintes d'acouphènes
L'hyperacousie est accompagnée dans 86 % des cas d'acouphènes[32]. La présence d'acouphènes précède l'hyperacousie dans 78 % des cas[33].
Prévalence (%) | Échantillons (n) | Auteurs/Pays |
---|---|---|
40 % | 500 | Jastreboff PJ et al. 1996, États-Unis[34]. |
60 % | 189 | Andersson et al. 2001, Suède[35]. |
34 % | 47 | Guzek et al. 2002, Pologne[36]. |
60 % | 250 | Herráiz et al. 2003, Espagne[37]. |
79 % | 249 | Dauman R & Bouscau-Faure F. 2005, France[38]. |
Les proportions sont différentes selon les auteurs, cela s'explique surtout par le choix des paramètres retenus pour caractériser l'hyperacousie. D'après le tableau, la prévalence moyenne de l'hyperacousie chez les acouphéniques est de 54 %. Elle est donc une pathologie qui atteint fréquemment les personnes acouphèniques.
D'après une étude de l’American Tinnitius Association conduite auprès de 112 personnes atteintes d'acouphènes et d'hyperacousie : 53 % trouvent l'hyperacousie plus difficile à vivre que les acouphènes, 36 % les mettent sur un pied d'égalité dans la gêne occasionnée et 16 % trouvent les acouphènes moins gérables que l'hyperacousie, 6 % restent incertains[39].
L'hyperacousie peut être invalidante, selon le niveau de gravité. Elle peut rendre difficile ou empêcher les activités bruyantes ou les gestes de la vie quotidienne. Comme pour tout handicap, elle peut être source d'exclusion et de fragilité face aux abus.
Mal connue, la maladie peut entraîner de la part de l'entourage incompréhension et négligence grave pouvant aggraver le niveau d'hyperacousie.
L’hyperacousie est une maladie qui a pour caractéristique d’être constamment douloureuse (notamment à travers des acouphènes aigus), cette douleur lancinante d'intensité variable a des conséquences importantes sur le moral du patient et sur sa vie sociale. Cette pathologie est mal comprise du corps médical et de la société en général : ce handicap étant invisible, il est souvent minimisé.
État des lieux
L'hyperacousie est mal comprise par le corps médical et scientifique, son étiologie, son évolution, mais aussi sa simple définition. Dans un tel contexte, la reconnaissance du handicap et l'ouverture de droits éventuellement associés sont particulièrement difficiles.
La méconnaissance de la maladie, y compris chez les ORL, et la non-disponibilité de tests mesurant objectivement l'hyperacousie amènent souvent des praticiens à attribuer celle-ci, à tort, à des problèmes psychologiques, tels que dépression, anxiété, phobie. La perturbation du schéma auditif n'étant pas encore expliquée, les médecins se proposent fréquemment de résoudre le problème par autosuggestion ou renvoient leurs patients vers la psychothérapie[40], l'écoute de bruit blanc, la stimulation sonore appelées "thérapies sonores"[41].
Comme toutes les personnes atteintes d'affections chroniques ou de handicap, la personne hyperacousique peut être plus sujette à la dépression que le reste de la population[réf. souhaitée][42] de par les contraintes qu'elle doit endurer en raison des douleurs que lui causent le bruit : évitement de certains bruits, réduction des contacts sociaux, bannissement contraint de certains loisirs qui sont pourtant sa passion (musique, concerts, walkman, danse, discothèques, écoute). La dépression et l'anxiété peuvent être des conséquences de l'hyperacousie.
Les thérapies psychologiques sont efficaces pour traiter les problèmes psychologiques (déprime, dépression) qui peuvent être occasionnés par l'hyperacousie chez certains sujets mais elles ne permettent pas de traiter l'hyperacousie. Pour autant, les thérapies comme la TCC (thérapie cognitive comportementale) ne sont pas à exclure car elles apportent un réconfort au malade et l'aident à mieux accepter les contraintes de ce handicap : douleurs face à certains bruits, impossibilité de s'exposer à des niveaux sonores extrêmes : les concerts, les discothèques, machines-outils, récréations d'écoles, aéroports, etc.
Un rapport d'une enquête nationale sur la détresse psychologique des personnes sourdes, malentendantes, devenues sourdes et/ou acouphéniques a été présenté à Paris en 2011[42]. Il montre l'importance des conséquences de l'hyperacousie sur la détresse psychologique. L'INPES a publié des rapports soulevant le problème de l'hyperacousie sur la souffrance psychique[43].
Une étude suédoise de 2013, a montré que sur 62 patients hyperacousiques, 47 % avaient un trouble anxieux. Une autre étude allemande menée en 2008 a montré une association de troubles psychiatriques (dépression, phobie sociale, anxiété…) dans 60 % des cas d'hyperacousie sévère[44]. Cela démontre que l'hyperacousie, en empêchant les patients de vivre normalement, a bien des conséquences psychologiques.
La phonophobie
La phonophobie est un phénomène distinct de l'hyperacousie. La phonophobie — une peur injustifiée des sons — est de nature psychologique, sans lien avec l’ouïe. L'hyperacousie, pour sa part, résulte d'une atteinte effective du système auditif : cette dégradation de l’ouïe pousse l'individu à éviter les sons de manière purement rationnelle, ceci pour éviter la souffrance et préserver son audition. En Suède, une étude à l'université d'Uppsala sur 62 patients atteints d'hyperacousie a montré que 89 % évitent les endroits bruyants et 82 % portent des bouchons d'oreilles dans leur quotidien[45].
Ainsi, la phobie du son n'est ni une cause ni une conséquence de l'hyperacousie, mais l'hyperacousie entraîne elle aussi un évitement du bruit. La confusion entre ces deux pathologies reste malheureusement fréquente[46].
Prise en compte gouvernementale de l'hyperacousie
Entre 1997 et 2002, seules deux questions au gouvernement ont été formulées en France sur la problématique de l'hyperacousie. Entre 2002 et 2007, 51 questions concernant l'hyperacousie ont été posées[47]. Une question du au gouvernement français de la 13e législature sur la prise en charge de l'hyperacousie a fait l'objet d'une réponse publiée au journal officiel le [48]. Il y est indiqué : « La situation des personnes atteintes d'hyperacousie et plus précisément les conditions de vie des personnes atteintes de ce handicap est une préoccupation du Gouvernement. Le plan « Amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques » (2007-2011), présenté par le ministre de la santé et des solidarités en avril 2007, peut participer à l'amélioration de la prise en charge des patients atteints de cette pathologie. Ainsi, s'agissant d'une maladie chronique, l'hyperacousie pourra bénéficier de toutes les mesures prévues dans ce plan concernant la recherche, la coordination et la prise en charge des malades et l'insertion sociale. Le coût total du plan représente 726,7 millions d'euros pour la période 2007-2011. Enfin, comme pour toutes les pathologies pouvant entraîner une invalidité, les personnes atteintes de formes invalidantes d'hyperacousie peuvent bénéficier de prestations au titre des mesures figurant à l'article L. 114-1-1 du code de l'action sociale et des familles relatif à la prestation de compensation du handicap. »
Causes recensées non exhaustives induisant de l'hyperacousie
Le bureau international d’audiophonologie (BIAP) a établi une démarche diagnostique[49] des causes de l'hyperacousie. Elles incluent, mais ne sont pas limitées à :
Causes liées à des traumatismes
Traumatisme ou choc sonore
- Exposition actuelle ou ancienne à des bruits trop élevés (traumatisme sonore)[50] : par exemple, cinq ans après l’explosion de l'usine AZF à Toulouse, une étude de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) et de l'Institut de Veille Sanitaire (InVS) effectuée sur un échantillon de 3 600 personnes impactées a montré que 26 % des hommes et 35 % des femmes exposés souffrent d'hyperacousie[51]
- Accumulation d'agressions sonores ou de petits traumatisme sonores qui provoquent acouphènes et hyperacousie passagers. Le patient croit qu'il s'en sort indemne une fois que les acouphènes ou l'hyperacousie passagers disparaissent. Mais il n'en est rien. L'oreille a une mémoire. Au fil du temps, le patient évolue vers les acouphènes et/ou l'hyperacousie qui s'installent et ne sont plus passagers. Là encore, les individus sont inégaux, certains ne développeront jamais d'hyperacousie ou d'acouphènes. Alors que d'autres oui. Pour des raisons génétiques ou héréditaires, certains ont des ouïes plus fragiles que d'autres et plus sujettes aux acouphènes et à l'hyperacousie.
- Syndrome du choc acoustique[52]
Le syndrome du choc acoustique est une entité clinique à part entière et défini en anglais par le terme d’Acoustic shock. Par exemple, il fait suite à de nombreuses pathologies auditives observées avec la croissance des centres d'appels téléphoniques. Beaucoup d'opérateurs téléphoniques rapportent divers symptômes auditifs liés à leur métier. Les symptômes comprennent : otalgie, audition altérée, la plénitude de l'oreille, déséquilibre, acouphènes, hyperacousie, aversion ou même peur des bruits forts, et l'anxiété et/ou dépression. Généralement les symptômes démarrent après un incident acoustique, mais, s'ils sont de courte durée pour certains, ils peuvent devenir chroniques et invalidants pour d'autres. Les mécanismes proposés comprennent la participation du muscle tenseur du tympan, l'hyperexcitabilité des voies auditives centrales et un état d'anxiété[52]. D'après une étude en 2013, l'hyperacousie est présente dans 32 % des cas du syndrome du choc acoustique[53]. Le syndrome du choc acoustique est un traumatisme qui peut présenter des similitudes cliniques avec l’hyperacousie.
Autres traumatismes
Causes liées aux systèmes nerveux centraux, au système nerveux périphérique
- Syndrome tonique du muscle tenseur du tympan (STMTT)[58]
- Dysfonctionnement du nerf facial
- Chirurgie : par exemple une compression microvasculaire du 8e nerf du tronc cérébral[59].
- Sclérose en plaques[60]
- Autisme[61] : la prévalence de l'hyperacousie est évaluée à 18 %[62]
- Syndrome d'asperger où la prévalence de l'hyperacousie est de 69 %[63].
- Paralysie faciale périphérique[64],[65]
- Migraine ; la prévalence de l'hypersensibilité aux bruits peut atteindre de 60 à 100 % durant la crise[66].
- Syndrome d'alcoolisme fœtal (SAF)[67]
- Anévrisme cérébral[68]
- Syndrome de Landau et Kleffner[69]
- Syndrome de stress post-traumatique
- Algoneurodystrophie[70]
- Démence sémantique[71]
- La maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) : dans un cas l'hyperacousie a été la première manifestation de la maladie[72]
- Hémorragies : hémorragie pontique unilatérale[73], hémorragie au niveau du corps géniculé médian[74]
- Intolérance environnementale Idiopathique aux rayonnements électromagnétiques (IEI-CEM)[75]
- Syndrome de douleurs faciales atypiques : un cas est présenté dans une étude scientifique avec amélioration de l'hyperacousie à la suite d'un traitement associant des médicaments[76]
- Épilepsie[77].
Causes liées à la consommation de médicaments, de stupéfiants et produits dopants
- Effet lié à la consommation de stupéfiants comme la phéncyclidine[78] (PCP)
- Prise de médicaments ayant pour effet secondaire l'hyperacousie (avéré ou non)
- Syndrome de sevrage aux benzodiazépines (après arrêt ou entre deux doses)[79],[80]
- la strychnine, qui est un poison alcaloïde.
Causes liées à des maladies génétiques
- Syndrome de Williams : la prévalence de l'hyperacousie est évaluée à 95 %[11]
- Anomalies chromosomiques touchant les chromosomes 1 et 6[81]
- Syndromes d'Ehlers-Danlos[82] : il s'agit de maladies génétiques rares, caractérisée par un manque de production de collagène. Quatre-vingt neuf pour cent des malades ayant un des syndromes d'Ehler-Danlos font de l'hyperacousie[83]. Les syndromes d'Ehler-Danlos se reconnaissent entre autres par une étirabilité de la peau un peu supérieure voire très supérieure à la normale, la présence de luxation dans la vie du patient ainsi qu'une souplesse passée ou encore présente, les muscles se rétractant avec l'âge.
- Syndrome de Lowe[84]
- Syndrome de l'X fragile[85]
- Maladie de Tay-Sachs[86].
Causes liées à des maladies infectieuses
- Surdité brusque (si d’origine virale)
- Maladie de Lyme[87],[88]
- Syndrome de Ramsay Hunt[89]
- toxoplasmose cérébrale chez l'enfant avec maux de tête[90].
Causes liées à des malformations osseuses
- Syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur (SDCSS) associé à d'autres symptômes caractéristiques[91]
- dysplasie du canal semi-circulaire latéral[92]
- Syndrome algo-dysfonctionnel de l'appareil manducateur (SADAM)[93],[94],[95] l'American Tinnitus Association a étudié un échantillon 112 personnes atteintes d'hyperacousie, 65 ont indiqué des symptômes de trouble de l'appareil manducateur. Ils se sont exprimés de la façon suivante : 58 % ont signalé des problèmes de la mâchoire, 43 % des douleurs à la mâchoire, 51 % de la malocclusion, 52 % du bruxisme ou des grincement des dents, 5 % une sensation de déclic dans l'articulation de la mâchoire[39]
- Malformation de Chiari : l'hyperacousie est présente comme symptôme dans 1 % des cas[96].
Causes liées à l'oreille interne et moyenne
- Fistule périlymphatique[97]
- Maladie de Menière[98]
- Otites moyennes récurrentes durant l'enfance[99]
Autres causes
Proportion des principales causes (et/ou prédispositions) à l'hyperacousie
Il existe très peu d'études publiant des proportions des différentes causes induisant de l'hyperacousie. Elles sont souvent établies à l'aide de questionnaires ou lors du bilan clinique.
Acouphènes récents | Stress | Exposition sonore aigüe | Aversion chronique aux bruits | Exposition sonore chronique | Phobie | Environnement calme | Hydrops | Infection de l'oreille | Traumatismes crâniens | Autres | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
% | 21,39 | 17,11 | 11,23 | 10,70 | 10,16 | 4,81 | 4,81 | 3,74 | 3,74 | 3,21 | 9,09 |
Il est intéressant de constater qu'il existe une confusion entre les causes, les conséquences et les symptômes associés à l'hyperacousie dans le tableau ci-dessus.
Traumatisme sonore | Apparition progressive | Surdité brusque | Syndrome de Menière | autres | |
---|---|---|---|---|---|
% | 40 | 29 | 7 | 4 | 20 |
Il n'y a aucune procédure de diagnostic normalisée faisant consensus pour l'hyperacousie[104].
En France, les tests mesurant l'hyperacousie ne sont malheureusement pas effectués par des ORL ordinaires car ils ne possèdent pas les instruments prévus à cet effet. Certains tests sont toutefois pratiqués dans des plateformes spécialisées.
Les tests subjectifs
La recherche des niveaux d'inconfort
Elle consiste à faire sur l'audiogramme du patient une mesure conjointe de ses seuils d'audition et de ses niveaux d'inconfort pour chacune des fréquences testées. Il s'agit des niveaux que le patient pourrait écouter sur une assez longue période de temps mais avec un inconfort.
Formby, Payne, Yang, Wu et Parton (2017)[105] et Sherlock et Formby (2005)[106] ont démontré qu’il n’y a pas de différence significative entre la méthode de mesure des seuils d’inconfort (mesure absolue) et celle avec une échelle de catégories de jugements d’inconfort à la sonie (mesure relative) pour refléter les seuils subjectifs auxquels l'intensité des sons devient inconfortable.
Méthodologie
La recherche de ses niveaux d'inconforts doit s'effectuer par une augmentation très progressive de l'intensité du son (1 à 2 dB par palier) afin de ne pas entraîner des douleurs ou pire aggraver la situation du patient. Elle permet de rapidement connaître le niveau de décibels pour lequel l'individu ressent un inconfort. Le niveau d'inconfort moyen dans la population générale est fixé à 85 dB[107]. Dans le cas de l'hyperacousie, il n'est pas rare que les niveaux d'inconfort soient réduits à des niveaux faibles comme 40 dB, voire 10 dB dans certaines fréquences pour les individus les plus touchés. Il ne faut pas confondre les niveaux d'inconfort avec les seuils de douleur qui, eux aussi, sont réduits dans le cas de l'hyperacousie. Les seuils de douleur sont de l'ordre de 120 dB pour une personne normale, mais, dans le cas de l'hyperacousie, ces seuils sont bien inférieurs et, pour les plus touchés, ils sont de l'ordre des bruits de la vie quotidienne.
Limite de la mesure
Ces tests donnent une indication précieuse mais ils ne traduisent pas forcément la réalité car ils s'effectuent sur des fréquences précises et sur une courte durée. En effet, C'est une mesure qui doit être faite avec beaucoup de rigueur et par un professionnel spécialiste de l'hyperacousie: il peut arriver que le patient indique un seuil qu'il peut supporter quelques secondes mais absolument pas sur quelques minutes, dans ce cas les résultats peuvent donc indiquer un seuil bien supérieur à la réalité et ne pas être compris par le patient lui-même.
Le calcul du JHQ (Johnson Hyperacusis Dynamic Range Quotient)
Il est un bon outil de mesure de l'hyperacousie. Il faut mesurer le niveau d'inconfort (en dB) pour chaque fréquence testée. Ensuite pour chaque fréquence mesurée on soustrait les niveaux des seuils d'audition préalablement mesurés. On obtient la plage dynamique de l'hyperacousie pour chaque fréquence. Pour obtenir le JHQ, toutes les plages doivent être ajoutées et divisées par le nombre de fréquences testées pour obtenir une plage dynamique moyenne. Le JHQ ne peut être mesuré que dans le cas d'une personne présentant des seuils d’audition normaux[108] ;
75-90 dB | 50-75 dB | 30-49 dB | 0-29 dB | |
---|---|---|---|---|
Hyperacousie | légère | moyenne | sévère | profonde |
Les tests de psychoacoustique
Un médecin spécialiste de l'hyperacousie pourra lors de ces tests distinguer les seuils d'inconfort liés à une hyperacousie de ceux liés à une réaction émotive aux bruits. Par exemple, ils peuvent ainsi davantage différencier une hyperacousie totalement indépendante du psychisme d'une phonophobie[109].
L'utilisation de divers questionnaires
Ils permettent d'évaluer le degré de la souffrance liée à l'hyperacousie[110]. Ils accompagnent et complètent les tests audiométriques.
Questionnaire | Description | (n) patients testés | Origine | Auteurs |
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Hyperacusis Intake Questionnaire[111] | 23 items | États-Unis | Tyler, 2007 | |
MASH : Multiple Activity Scale of Hyperacusis[38] | 14 items sur des situations de la vie quotidienne. | 249 | France | Dauman & Bouscau-Faure, 2005 |
GÜF : Geräuschüberempfindlichkeits-Fragebogen[112] | 27 items sur les réactions cognitives, les émotions et les changements de comportements. | 226 | Allemagne | Nelting & Finlayson, 2004 |
Khalfa’s hyperacusis questionnaire[113] | 14 items sur des dimensions émotionnelles, sociales et de l'attention | 201 | France | Khalfa S. et al. 2002 |
Une mesure précise et rigoureuse de l'hyperacousie reste une problématique importante. En 2010, Une étude scientifique a montré qu'une corrélation entre les mesures audiométriques et les questionnaires d'impacts sur le confort de vie est difficile à mettre en évidence[114].
Autres tests
Le Test de mesure de l’hyperacousie à partir d’une série de suggestions imagées destiné aux personnes présentant une hypersensibilité aux sons a été développé par ANGERMULLER Désirée en 2014 dans un mémoire soutenu en vue de l’obtention du Diplôme d’État d’Audioprothésiste[115].
Les tests objectifs
Les tests objectifs sont encore à l'état de recherche :
- une augmentation de l'amplitude des DPOAE (Distortion product otoacoustic emissions)[116] en cas d'hyperacousie a été montrée par des chercheurs polonais en 2006.
- un dysfonctionnement de la fonction du système efférent olivocochléaire médian a été montré par l'étude des oto-émissions acoustiques sur 2 cas atteint d'hyperacousie en Chine[117].
Les activités de recherche
Pour mesurer l'activité de la recherche, on peut noter que:
- moins de 600 publications scientifiques citent l'hyperacousie dans leurs travaux et moins de 110 publications citent l'hyperacousie dans leurs titres. Ceci reste encore très faible comparé à d'autres pathologies auditives, il existe par exemple un peu plus de 9 000 publications scientifiques citant les acouphènes.
Durant les 5 dernières années, il y a en moyenne et par an publication de huit articles scientifiques exclusivement consacrées à l'hyperacousie. Ce chiffre est à comparer au 8 193 articles/an publiés sur le VIH ou au 38 468 articles/an publiés sur le cancer sur la même période[118].
Cependant, depuis les années 2010, les activités de recherche s'amplifient sur l'hyperacousie impulsées par des découvertes majeures : les neuropathies du nerf auditif sans pertes auditives[119], le rôle probable des fibres afférentes de type II dans la transmission d'une douleur auditive. Des chercheurs réputés (par exemple les professeurs Richard Salvi et Fan-Gang Zeng), font maintenant partie de comités scientifiques d'associations très actives comme "hyperacusis research" aux États-Unis[120]. Ces dernières années, l'hyperacousie est activement abordée au sein de congrès comme celui de l'ARO aux États-Unis[121] autour de chercheurs du monde entier.
Intérêt de l'hyperacousie pour la recherche
Longtemps sous-estimé, la recherche sur l'hyperacousie a bondi depuis quelques années. Elle offre de l'espoir pour les malades, mais aussi pour comprendre d'autres pathologies associées (acouphènes, douleurs, Ménière...).
Elle permettra :
- de mieux comprendre les facteurs inflammatoires de l'oreille moyenne et leurs actions sur la cochlée (par exemple : l'action de certains proinflammatoires sur le potentiel endocochléaire) ;
- de mieux comprendre le rôle du système trigéminé sur l'oreille moyenne et interne, et particulièrement le concept d'inflammation neurogène ;
- de mieux comprendre les systèmes nocifensifs (comportement de protection face à stimulus douloureux) réflexes du système auditifs ;
- de mieux comprendre le traitement cognitif du bruit et ses interactions avec le système autonome (voie classique et non classique).
Les potentiels de découverte en recherche sont considérables, à l'image du concept de synaptopathies et du rôle des voies afférentes de type II qui ont été découverts dernièrement et en lien avec l'hyperacousie.
En France
En France, les activités de recherche s'intensifient sur l'hyperacousie au sein des unités CNRS comme le Laboratoire de Neurosciences Intégratives et Adaptatives (UMR 7260) de l'Université d'Aix-Marseille[122]. Le Colloque AFrEPA[123], qui a eu lieu à Lyon en , a consacré une demi-journée pour faire le point sur le thème « L’hyperacousie dans tous ses états : Des bases physiopathologiques aux remédiations disponibles en 2017 »[124].
Conférences internationales sur l'hyperacousie
Sous l'impulsion de chercheurs et médecins du monde entier, la mise en place de conférences internationales sur l'hyperacousie marque la reconnaissance de cette pathologie trop longtemps ignorée ou sous-estimée. Elles offrent un espoir très important pour toutes les personnes touchées.
- Les 1er et a eu lieu à Londres la première conférence internationale sur l'hyperacousie[21]. Près d'une centaine de chercheurs du monde entier se sont réunis pour faire le point sur les causes et les traitements possibles de l'hyperacousie[18].
- La deuxième conférence internationale sur l'hyperacousie a eu lieu les 9 et à Londres, des chercheurs du monde entier y étaient encore présents[118].
- La troisième conférence internationale sur l'hyperacousie a eu lieu les 6 et à Guildford en Grande-Bretagne[125]
Association de recherche sur l'hyperacousie
Aux États-Unis, une association, Hyperacusis research, milite activement pour favoriser la recherche scientifique sur des traitements et l'identification de causes de l'hyperacousie. Son président, lui-même atteint d'hyperacousie, est intervenu en 2014 lors d'un important congrès de l'ARO (Americain research for otolaryngology) où il put rencontrer des chercheurs. En partenariat avec la Hearing Health Foundation[126], elle a financé à hauteur de 10 000 $ leur premier projet : analyser la littérature scientifique sur l'hyperacousie[127] : un préalable indispensable avant de lancer des recherches plus poussées. L'ensemble de cette étude très importante a été publié en deux parties en [128],[129].
La recherche dans le domaine de l'hyperacousie demande une parfaite maîtrise de la physiologie auditive, à la fois au niveau moléculaire, périphérique et central, mais aussi au niveau de la psychoacoustique. Les équipes de recherche doivent donc maitriser des techniques très complexes de l'analyse du signal neuronal (étude des synchronies, décharges spontanées...) et ce, tout au long des voies auditives.
Les mécanismes de l’hyperacousie d’intensité ne sont pas encore complètement élucidés, plusieurs hypothèses sont formulées :
- une augmentation du gain central en réponse à une diminution des entrées sensorielles auditives (pertes auditives)[130] ;
- une augmentation dans la synchronie centrale neuronale ;
- une dysfonction des systèmes olivocochléaires (en) médian ou latéral ;
- un déséquilibre entre les voies excitatrices et inhibitrices centrales (GABA, noradrénaline….)[131] ;
- une réorganisation synaptique dans les voies auditives et changeant les aiguillages du signal sonore en faveur d’autres circuits centraux (système limbique, mémoire…).
Les mécanismes périphériques
Dysfonction du système de l'amplificateur cochléaire (cellules ciliées externes)
Au niveau périphérique, il est possible d'émettre l'hypothèse que la mise en valeur anormale de signaux vibratoires à l'intérieur de la cochlée par les cellules ciliées externes (CCE) peut entraîner une stimulation excessive des cellules ciliées internes (CCI) conduisant à l'hyperacousie. En effet, dans certains cas, il est possible d'observer forte amplitude des émissions otoacoustiques Distortion produit (DPOAE) et DPOAE évoqués par stimulation acoustique de faible niveau. La présence de l'hyperacousie asymétrique pourrait soutenir une origine périphérique, alors que les mécanismes centraux doivent avoir une incidence sur les deux côtés[132].
Une dégénérescence du nerf cochléaire sans perte d’audition
L’exposition aux bruits traumatiques peut rapidement induire une lente dégénérescence des fibres nerveuses cochléaires, et ce, même si les cellules ciliées internes sont redevenues intactes après une exposition sonore intense (Kujawa et Liberman, 2009[119]). Il semble que les fibres à seuil élevé soient les plus fragiles (Furman et al., 2013[133]). Les seuils auditifs restent normaux. Cette découverte majeure change les idées reçues : la récupération des seuils auditifs ne suffit plus à écarter une pathologie cochléaire.
En effet, des souris de laboratoire, après une forte exposition aux bruits forts ayant induit une dégénérescence du nerf cochléaire sans perte d’audition significative, ont montré un comportement d'hyperacousie. En réponse à cette désafférentation, les auteurs ont suggéré une augmentation de l’excitabilité neuronale au niveau du système nerveux central contribuant à cette hypersensibilité auditive. Cette hyperexcitabilité semble toucher particulièrement le colliculus inférieur, un noyau important du tronc cérébral dans le traitement du son par le cerveau[134]
Un modèle propose qu'une grande étendue de désafférentation puisse déclencher des acouphènes alors qu'une désafférentation modérée devrait plutôt être liée à de l'hyperacousie. Dans ce modèle, le stress et les mécanismes d'adaptation centraux auraient aussi un rôle prépondérant dans la genèse de ces troubles auditifs (Knipper et al., 2013[135]). Dans ce sens, une autre étude avait montrée que le stress induit une libération d’endorphines qui pourrait potentialiser les effets neurotoxiques du glutamate et favoriser l'hyperacousie[136].
Les mécanismes centraux
L'utilisation des IRM fonctionnelles
L'utilisation des dernières techniques d'imagerie médicale notamment les IRM fonctionnelles de l'encéphale permettront de mieux comprendre le dérèglement du fonctionnement du système nerveux central dans le cas de l'hyperacousie. Des recherches sont effectuées dans ce sens, en effet, Hwang et al (2009) ont comparé l'activation du cerveau de trois patients atteints d'hyperacousie avec celle de trois sujets sains sans hyperacousie, à l'aide d'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf). Le motif d'activation dans le cerveau en réponse à l'écoute d'un bruit blanc était nettement différent entre les participants avec et sans hyperacousie. Pour les personnes qui n'ont pas d'hyperacousie, l'activation est située principalement dans le gyrus temporal supérieur droit (comme prévu, puisque les lobes temporaux contiennent le cortex auditif primaire). Toutefois, pour les sujets atteints de l'hyperacousie, une activation a aussi été observée dans le lobe frontal et dans le lobe occipital, ce qui indique que des systèmes extérieurs aux voies auditives ont été activés par le son[137].
Une autre étude par IRMf en 2010 montre que les sujets présentant une légère diminution de la tolérance au niveau du bruit ont montré une activation élevée dans le mésencéphale auditif, le thalamus et le cortex auditif primaire par rapport aux sujets présentant une tolérance normale[138].
En Corée du Sud, une étude en 2009 avec IRMf a montré une augmentation de l'activation du collicus inférieur par rapport à un groupe normal en réponse à un son de 50 dB. Les deux groupes avaient des seuils d'audition normale (<20 dB HL) à toutes les fréquences testées
Shuang Li, Veronica Choi et Thanos Tzounopoulos (2013) ont fait une découverte très importante : la réduction de l'activité des canaux Kv7.2 / 3 est essentielle pour l'induction des acouphènes et pour l'hyperactivité du noyau cochléaire qui y est associé[139]. Ainsi, la réduction de ce type de canaux peut induire une augmentation de l'hyperactivité neuronale. Il existe des cibles thérapeutiques possibles pour augmenter l'action de ces canaux comme la Rétigabine[140]. L'hypothèse que la réduction de l'activité de ces canaux existe pour l'hyperacousie est potentiellement intéressant.
Les mécanismes émotionnels
Le système limbique contrôle la plupart des émotions au niveau central. Une connexion entre les voies auditives et ce système expliquerait donc les réactions émotionnelles aux bruits : dans le thalamus, la voie auditive classique utilise la partie ventrale en direction du cortex auditif alors que la voie auditive non classique utilise la partie dorsale en direction du cortex secondaire et d'association. Les connexions auditives à l’amygdale suivent deux routes :
- une « high route » du cortex à l’amygdale ;
- une « low route » plus directe par la voie non classique qui part directement du thalamus dorsal à l’amygdale.
Cette « low route » pourrait contribuer à des réactions émotionnelles aux bruits, comme la phonophobie (Møller, 2007). Dans ce sens, une étude chez l'animal a montré une augmentation de l'activité de l’amygdale dans le cas de l'hyperacousie[141].
Étude sur l'animal de l’hyperacousie
Modèles animaux de l'hyperacousie
La mise au point d'un modèle animal fiable permettra de tester des traitements et de mieux comprendre la pathologie[142]. On sait déjà qu'une injection d'une forte dose de salicylate chez des rats entraîne pour 40 % d’entre eux, un comportement que l'on peut apparenter à de l'hyperacousie[143]. Des études sur l'animal ont aussi montré qu'une alimentation trop riche en oméga-3 (huile de poisson) durant la lactation peut modifier le développement des voies auditives et induire un comportement d'hyperacousie chez les progénitures[144].
La première revue scientifique des modèles animaux incluant l'hyperacousie et les acouphènes vient d'être publiée en , il s'agit d'étudier et de faire le point sur les différents modèles animaux existants[145] :
- l'étude du réflexe de sursaut acoustique permet de mettre en évidence une hyperacousie chez l'animal mais la validité reste assez limitée ; Fournier et Hébert (2012) ont montré que l'amplitude du réflexe de sursaut acoustique était généralement plus fort chez les personnes atteintes d'acouphènes, ce qui pourrait être un indice d'une hyperacousie associée[146] ;
- les méthodes de conditionnement avec mesures des temps de réaction semblent être la plus efficaces.
Effets de molécules chez l'animal sur l'hyperacousie
Une étude sur le rat a montré qu'après une exposition sonore traumatique, l'utilisation du sildénafil réduirait une réaction de sursaut apparentée à une hyperacousie de l'animal[147]. De même chez le rat, il a été montré que le bacloféne agissait sur l'hyperactivité du colliculus inférieur dans le cas de l'hyperacousie[148]. Le baclofène réduit aussi l'hyperacousie induite par une forte dose de salicylate chez le rat[149].
Recherches futures, pistes de recherche et perspectives
Une analyse d'une base de données de médicaments ayant pour effet secondaire de l'hyperacousie a été réalisée. Comme ces médicaments agissent sur des récepteurs moléculaires identifiés, les chercheurs ont pu identifier ceux pouvant induire de l'hyperacousie. Il a été montré l'intervention[150] :
- des récepteurs monoaminergiques (SAR, adrénergiques, 5HT, dopaminergiques) particulièrement impliqués dans la régulation des états de vigilance et de l'humeur ;
- des récepteurs cholinergiques muscariniques ;
- les transporteurs de neurotransmetteurs SLC6 : ils sont des cibles pour une large gamme de médicaments thérapeutiques utilisés dans le traitement des maladies psychiatriques, dont la dépression majeure, les troubles anxieux, le trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attention et de l'épilepsie[151].
Ces études pharmacométriques sont très utiles pour élaborer une stratégie thérapeutique médicamenteuse.
Des travaux montrent que l'hyperacousie pouvait résulter de pertes auditives (même très faible ou concernant des fréquences non testées dans les audiogrammes ordinaires), ce qui entraînerait en réaction une augmentation du gain central. Cette approche est controversée : des travaux ont montré que la privation de son à des individus diminuerait de 7 dB[152],[153] les seuils d'inconfort, or chez les personnes hyperacousiques cette diminution atteint fréquemment les 40 à 50 dB[18].
Les recherches actuelles ont maintenant prouvé le renforcement de l'activité neuronale au niveau sub-cortical et cortical dans le cas de l'hyperacousie[154]. Une autre étude a montré que la suractivation du colliculus inférieur dans le cas de l'hyperacousie provient d'un sous-ensemble particulier de neurones, ceux qui sont très synchronisés. Comme les études chez l'animal ont identifié les substances (neurotransmetteurs) qui contrôlent l'activité de la plupart de ces types de neurones fortement synchronisées présents dans cette zone (le glutamate et l'acide γ-aminobutyrique), une voie de recherche est donc de montrer que ces deux substances sont sécrétées de manière déséquilibrée dans le cas de l'hyperacousie. Par exemple, d'après une autre étude, une altération précoce de la membrane tympanique chez le rat entraîne pour 80 % d'entre eux un comportement d'hyperacousie après 2 semaines. Les chercheurs ont montré qu'une fois de plus le colliculus inférieur est suractivé et qu'une injection de vigabatrine semble supprimer la crise audiogène. Or, on sait que cette molécule inhibe la catalyse du GABA[155]. Ces différentes études offrent les espoirs de futurs nouveaux traitements[156].
La douleur ressentie au niveau des oreilles par les personnes atteintes d'hyperacousie est souvent très mal comprise par le corps médical. Pourtant, l'hyperacousie peut être douloureuse et entraîner des otalgies aigües et chroniques. La prévalence de la douleur est de 45 % dans l'hyperacousie[157].
Les hypothèses
Pour expliquer les douleurs ou otalgies des hypothèses sont avancées :
- Soit la douleur provient des voies afférentes de type II[158]
- soit elles proviennent d'une hyper-tonicité chronique du muscle tenseur du tympan (syndrome tonique du muscle tenseur du tympan)[159].
Le syndrome tonique du muscle tenseur du tympan (STMTT)
Le syndrome tonique du muscle tenseur du tympan (STMTT) est une piste importante dans la compréhension du phénomène douloureux[58] : il s'agit d'une réduction des seuils réflexes de l'activité du muscle du marteau (muscle tenseur du tympan). Cela peut déclencher des tensions musculaires et une irritabilité du nerf trijumeau. Seul un médecin spécialiste sera à même de poser le diagnostic du syndrome tonique du muscle tenseur du tympan après un examen clinique complet.
Westcott et al (2013) ont défini le syndrome tonique du muscle tenseur du tympan comme « une condition fondée sur l’anxiété involontaire où le seuil réflexe de l’activité musculaire du tenseur du tympan est réduite, provoquant un spasme fréquent ». Ils ont publié une étude multiclinique pour étudier les effets de ce syndrome dans le cas des acouphènes et de l'hyperacousie. Ils ont recensé les symptômes suivants compatibles avec le trouble[159]:
Douleurs
- Douleur aigüe dans l'oreille et sourde dans l'oreille
- Une sensation de plénitude sonore ou de « blocage »
- Une sensation de flottement du tympan
- Une sensation d'engourdissement autour de l'oreille
- Une sensation de brûlure autour de l'oreille
- Douleur dans la joue et dans la région de l'ATM (articulation temporo-mandibulaire)
- Engourdissement / brûlure / douleur sur le côté du cou
- Maux de tête
Troubles vestibulaires
- Trouble de l'équilibre / vertige doux
- Nausées
Troubles auditifs
- Sensation d'audition étouffée Audition déformée
Quatre-vingt-un pour cent des personnes souffrant d'hyperacousie présentent au moins un de ces symptômes associés à ce syndrome[159].
Mécanismes proposés du STMTT
Le muscle du marteau a pour fonction d'empêcher une lésion de l'oreille interne dans les bruits forts mais encore d'atténuer les sons produits pendant le processus de mastication ou lorsque l'on parle. Il peut aussi se contracter par anticipation à des bruits forts (Borg et al, 1984) et par la stimulation tactile du conduit auditif (Klockhoff, 1961) . Sa contraction dépend donc du niveau sonore avec une composante réflexe, mais il existe aussi des cas de contraction volontaire de ce muscle[160].
Le système de commande de ces muscles comprend la voie dite sérotoninergique (c'est-à-dire le système des émotions dans le circuit limbique). Ainsi, le stress ou l'angoisse générés par l'hyperacousie peut moduler l'activité du muscle de l'oreille moyenne et peut également jouer un rôle dans le réflexe acoustique lui-même[58],[161].
Le muscle tenseur du tympan n'a été que très peu étudié (moins de 375 articles scientifiques où il est cité), ses différentes voies nerveuses commencent juste à être connues et sont en fait très diverses: gabaminergique, glutamate, sérotominergique, tyrosine hydroxylase, substance P[162]... Ce muscle joue un rôle important dans les douleurs liées aux Syndrome algo-dysfonctionnel de l'appareil manducateur avec beaucoup de similitude dans les symptômes douloureux[163],[164]. L'exploration de ce syndrome tonique du muscle tenseur du tympan, par exemple la mise en évidence de la réduction des seuils réflexes, est une piste pour objectiver une hyperacousie douloureuse[165]. L'analyse plus approfondie sur le rôle des muscles de l’oreille moyenne sur la protection de la cochlée et un réexamen de la théorie de la pression intralabyrinthique pourrait être très fructueuse[166].
En , une étude japonaise a décrit la présence de facteurs nerveux impliqués dans ces douleurs: substance P et les peptides liés au gène de la calcitonine au niveau du muscle tenseur du tympan, de la membrane tympanique et à la jonction du muscle tenseur du voile du palais[167]. Compte tenu de la nature particulière du muscle tenseur du tympan, un mécanisme d'inflammation neurogène initié par une tonicité anormale pourraient être possible[168]. Une hypothèse à vérifier.