InSight
mission d'exploration de la planète Mars / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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InSight (acronyme de l'anglais Interior Exploration using Seismic Investigations, Geodesy and Heat Transport ; en français : « Exploration interne par les sondages sismiques, la géodésie et les flux thermiques ») est une mission d'exploration de la planète Mars développée par l'agence spatiale américaine, la NASA, et qui a décollé le pour atterrir à la surface de la planète le .
Sonde spatiale
Organisation | DLR |
---|---|
Constructeur | Lockheed Martin |
Programme | Discovery |
Domaine | Étude de la structure interne de Mars. |
Type de mission | Atterrisseur |
Statut | Mission achevée (21 décembre 2022) |
Autres noms | GEMS |
Lancement | 5 mai 2018 |
Lanceur | Atlas V 401 |
Durée |
4 années terrestres (mission primaire+extension) |
Identifiant COSPAR | 2018-042A |
Site | https://mars.nasa.gov/insight/ |
Masse au lancement |
694 kg dont atterrisseur 358 kg |
---|---|
Masse instruments | 50 kg |
Ergols | Hydrazine |
Masse ergols | 67 kg |
Source d'énergie | Panneaux solaires |
Puissance électrique |
600-700 watts (atterrisseur sur Mars) |
Atterrissage | 26 novembre 2018 |
---|---|
Localisation |
Elysium Planitia 4,5° N, 135° E |
SEIS | Sismomètre passif |
---|---|
HP3 | Capteur de flux de chaleur |
APSS | Station météorologique |
La mission InSight est la première entièrement consacrée à l'étude de la structure interne de cette planète. Pour y parvenir, elle emporte deux instruments scientifiques : le sismomètre SEIS et HP3, instrument de mesure des flux de chaleur en provenance du cœur de la planète. L'objectif scientifique principal de la mission est de disposer d'une meilleure connaissance de la structure interne de la planète, dont les caractéristiques sont mal connues, dans le but de reconstituer l'histoire de Mars. Les données collectées permettront également d'améliorer les modèles de formation et d'évolution des planètes rocheuses du Système solaire — Mercure, Vénus, la Terre, Mars — ainsi que de la Lune.
Lorsque la mission InSight est sélectionnée en 2012, dans le cadre du programme Discovery de la NASA, elle constitue l'aboutissement de plusieurs projets proposés sans succès au cours des deux décennies qui ont précédé. Le programme Discovery regroupe des projets spatiaux américains caractérisés par un coût modéré et un cycle de développement court. Pour rentrer dans cette contrainte budgétaire, la mission repose sur l'envoi d'une station au sol unique contrairement aux projets précédents. La sonde spatiale réutilise l'architecture de la mission Phoenix, qui s'était posée en 2007 dans la région polaire de Mars. C'est un engin de relativement petite taille (moins de 700 kilogrammes, au lancement). La charge utile est fournie par des partenaires européens. L'instrument principal, le sismomètre SEIS est conçu par l'Institut de physique du globe de Paris et fourni sous maîtrise d’œuvre de l'agence spatiale française (CNES), tandis que HP3 est développé par l'Allemagne.
Un problème de mise au point sur l'instrument SEIS repousse le lancement de la mission, prévu initialement en 2016, à la fenêtre de lancement suivante vers Mars en 2018. InSight se pose à la surface de Mars le dans une région de plaine baptisée Elysium Planitia et située près de l'équateur de cette planète. La phase d'étude scientifique doit durer deux années terrestres. Le sismomètre SEIS entre en service début et pour la première fois dans l'histoire de l'exploration de Mars, un séisme est détecté le . L'instrument HP3, qui nécessite l'enfoncement d'une sonde dans le sol, rencontre un problème lié à la nature du sol, que l'équipe sur Terre tente de résoudre avant de renoncer à faire fonctionner l'instrument en . La mission est prolongée de deux ans pour durer théoriquement jusqu'à fin 2022, et l'accumulation de la poussière sur les panneaux solaires fait que la NASA annonce effectivement la fin de la mission le , après deux tentatives infructueuses d'entrer en contact avec la sonde.
Les séismes détectés par l'instrument SEIS se révèlent plus nombreux que prévu mais d'une intensité plus faible (magnitude de 4 au maximum). Malgré la faiblesse des signaux sismiques, les scientifiques déterminent que la croûte de la planète a une épaisseur comprise entre 24 et 72 kilomètres et que le rayon du noyau métallique, évalué à 1 830 kilomètres, se situe à la limite supérieure des prévisions. La mission révèle ainsi une caractéristique importante, la minceur de la couche située entre le noyau et la croûte (le manteau), qui a dû entraîner le refroidissement rapide de la planète.
L'importance du sismomètre pour l'étude in situ des planètes est identifiée dès le début de l'ère spatiale. Cet instrument, qui mesure les mouvements internes d'une planète[alpha 1], permet d'obtenir des informations sur sa structure : caractéristiques et taille du noyau de la planète, de son manteau, etc. Celles-ci permettent à leur tour de reconstituer l'histoire de ses origines et de son évolution, et à travers celle-ci fournissent des indices sur la formation du Système solaire.
Étude sismique de la Lune au début de l'ère spatiale (1961-1973)
Les sondes spatiales Ranger 3 à 5 (1961-1965) de l'agence spatiale américaine (NASA), premiers engins à tenter de se poser sur un autre corps du Système solaire (la Lune), sont équipées de sismomètres. Les missions Apollo (1969-1972) développées par la NASA installent également des sismomètres très performants à la surface de la Lune[1].
Sismomètres des sondes martiennes Viking (1976)
En ce qui concerne la planète Mars, les sondes spatiales Viking 1 et 2, premiers engins de la NASA à effectuer un atterrissage à la surface de la planète (1976), emportent également des sismomètres, mais l'objectif principal de ces missions porte sur la recherche de traces de vie passée ou actuelle sur la planète. Le sismomètre, qui pèse 2,2 kg et consomme 3,5 watts, est peu sophistiqué et d'une sensibilité de l'ordre du nanomètre, dix fois moins bonne que celle des instruments installés sur la Lune au cours des missions Apollo. Les géophysiciens concepteurs de l'expérience ont été contraints d'accepter que l'instrument soit installé sur le pont de l'atterrisseur au lieu d'être en contact direct avec le sol. Les données collectées doivent être fortement compressées avant d'être transmises vers la Terre et donc dégradées, car le débit de la liaison avec la Terre est réduit. Le premier sismomètre embarqué à bord de Viking 1 arrive sur le sol martien le , mais les opérateurs sur Terre ne parviennent pas à mettre l'instrument en état de marche. Pour le protéger des chocs durant les différentes phases du vol où le sismomètre est soumis à de fortes accélérations, sa partie mobile est verrouillée jusqu'à l'arrivée au sol. Les opérateurs ne parviennent pas à débloquer ce verrou et le sismomètre sera le seul instrument non opérationnel de tout le programme Viking. Le , c'est au tour de Viking 2 de se poser sur le sol martien. Cette fois le sismomètre peut être activé, mais les scientifiques constatent rapidement que les données collectées n'ont rien à voir avec des mouvements sismiques. Solidaire du pont de l'atterrisseur, l'instrument enregistre tous les mouvements mécaniques affectant celui-ci : rotation de l'antenne grand gain orientable, déplacement du bras robotique, fonctionnement du magnétophone et surtout action du vent qui fait vibrer la plateforme. Seules les mesures faites de nuit, caractérisées par une diminution du vent et l'absence d'activité des instruments, sont éventuellement exploitables. Mais la faible sensibilité de l'instrument, conjuguée avec les doutes sur l'origine des mouvements enregistrés, ne permettent pas d'en tirer des données réellement utilisables. Par la suite, aucun sismomètre n'est installé sur les sondes spatiales à destination de la surface de Mars, bien que de nombreuses missions soient proposées dans ce but[2].
Projets de réseau de sismomètres martiens
Au début des années 1990, la mission Mars Network prévoit l'installation d'une douzaine de stations sismiques à la surface de Mars. Ce projet n'aboutissant pas, MESUR (Mars Environmental SURvey), puis MarsNet sont proposées et enfin, en collaboration avec l'Agence spatiale européenne, InterMarsNet. Ce dernier projet prévoyait le déploiement, au cours des années 2001-2003, de 16 à 20 stations fixes, comprenant à la fois un sismomètre et une station météorologique. Le coût élevé du projet et la priorité accordée à la recherche des formes de vie sur Mars aboutissent à l'annulation en 1996 de la mission. À la même époque, la Russie prépare une mission ambitieuse, Mars 96, qui doit déposer des sismomètres à la surface de Mars, mais la sonde spatiale est perdue lors du lancement (). L'agence spatiale française, le Centre national d'études spatiales (CNES), propose à la fin des années 1990 NetLander, un projet comprenant quatre stations fixes équipées de capteurs sismiques. Ces instruments sont d'abord proposés pour le projet de l'Agence spatiale européenne Mars Express, avant d'être incorporés dans la mission de retour d'échantillons martiens que le CNES élabore en 2003 avec la NASA. Mais ce projet très coûteux est également abandonné. Il est brièvement envisagé d'inclure le sismomètre SEIS, développé par le CNES pour les missions précédentes, dans le programme ExoMars de l'Agence spatiale européenne[1].
Adoption d'une architecture à sismomètre unique
Jusque-là, l'installation de plusieurs stations largement espacées était jugée nécessaire pour pouvoir collecter des données pertinentes. Face au coût important de cette architecture, qui avait fait obstacle à sa réalisation, un groupe de géophysiciens choisit au milieu des années 2000 de mettre au point une nouvelle technique de mesure reposant sur un sismomètre unique à trois composants large bande. La solution adoptée permet de déterminer la structure interne de la planète avec une seule station de mesure en analysant et rapprochant les différents types de signaux générés par les événements sismiques. La mission InSight, dont l'instrument principal est le sismomètre SEIS, est l'aboutissement de cette approche[1].
Sélection d'InSight, douzième mission du programme Discovery
InSight est à l'origine une proposition de mission spatiale pour le programme New Frontiers de l'agence spatiale civile américaine, la NASA. Ce programme regroupe des projets d'environ 1 milliard US$. La proposition avait pour objectif de poser sur le sol martien trois engins similaires à l'atterrisseur Phoenix pour établir un réseau de stations fixes, afin de mener une étude géophysique coordonnée de la planète Mars. Le projet n'ayant pas été retenu, il est remodelé, en supprimant deux des trois engins prévus, pour pouvoir être proposé dans le cadre du programme Discovery, tout en entrant dans l'enveloppe financière deux fois plus faible des missions de ce programme[3].
En , la NASA lance un appel à propositions pour sélectionner la douzième mission du programme Discovery. L'agence spatiale reçoit 28 propositions et sélectionne en trois d'entre elles. InSight, proposée par le Jet Propulsion Laboratory (JPL) avec la participation d'équipes scientifiques de plusieurs pays, fait partie des projets retenus. Les deux autres missions pré-sélectionnées sont[4] :
- Titan Mare Explorer (TiME) : c'est la première mission d'exploration directe d'un environnement océanique extraterrestre, en amerrissant et en flottant sur une mer d'éthane et de méthane liquide de Titan, la lune de Saturne ;
- Comet Hopper (CHopper) : c'est une sonde spatiale qui doit effectuer plusieurs atterrissages à la surface d'une comète et étudier les changements provoqués par le Soleil lors de son passage à son périhélie.
Les trois équipes finalistes reçoivent chacune trois millions de dollars pour réaliser une étude de conception détaillée. En , la NASA choisit sur la base de ces documents InSight. Le lancement est planifié pour . Conformément au cahier des charges du programme Discovery, la mission sélectionnée a un budget plafonné à 425 millions de dollars, hors coût de lancement[5] ,[6]. InSight était baptisée initialement GEMS (Geophysical Monitoring Station pour Station de surveillance géophysique), mais son nom est modifié début 2012, pour éviter une confusion avec l'observatoire spatial rayons X GEMS (Gravity and Extreme Magnetism SMEX), en cours de développement à la NASA[7].
Construction de la sonde spatiale
En , la NASA sélectionne comme lanceur une fusée Atlas V 401, qui doit décoller depuis la base de Vandenberg en Californie[8]. La fourniture du sismomètre SEIS par une équipe pilotée par le CNES, l'agence spatiale française, est formalisée le [9]. Parmi les trois autres expériences scientifiques embarquées, l'instrument HP3 est fourni par l'Agence spatiale allemande DLR, tandis que la station météorologique TWINS est fournie par l'Espagne. Ce choix massif d'une instrumentation étrangère, qui permet de réduire le budget, car leur coût n'est pas compté dans l'enveloppe budgétaire prise en charge par la NASA (les instruments sont financés par les différents pays contributeurs), soulève un tollé dans la communauté scientifique américaine. En réponse à cette réaction, la NASA introduit en 2014 une nouvelle règle dans la sélection des missions du programme Discovery. Celle-ci impose qu'au moins les deux tiers des instruments embarqués devront être américains[10]. Le , le projet passe avec succès la « Revue Critique de Définition »[11]. La construction de la sonde spatiale débute chez les différents participants du projet[12]. La phase d'assemblage s'engage dès à Denver, chez le constructeur Lockheed Martin[13]. En , commence la phase de tests de l'atterrisseur, qui doit durer sept mois[14].
Report du lancement de 2016 à 2018
Le , le constructeur français de l'instrument principal, le sismomètre SEIS, annonce qu'il n'arrive pas à régler les problèmes d'étanchéité de l'enceinte placée sous vide dans laquelle celui-ci est enfermé. Les tests qui avaient été réalisés avec succès à température ambiante, échouent lorsque la température descend à −100 °C. La fuite est localisée au niveau du passe-fils permettant de relier l'instrument à la sonde spatiale. Cette fuite est très faible, mais ne permet pas de respecter les contraintes nécessaires pour la précision des mesures[15]. Le lancement, planifié en , doit alors être reporté[16]. Le coût du report pour la NASA (maintien des équipes, opérations de stockage/déstockage) est évalué à 150 millions de dollars, entièrement pris en charge par la NASA. Bien que le coût résultant dépasse l'enveloppe budgétaire attribuée aux missions du programme Discovery, la NASA décide de poursuivre le projet. Le JPL prend en charge le développement d'une nouvelle enceinte. InSight doit donc utiliser la fenêtre suivante de lancement vers Mars, qui s'ouvre le [17],[18]. Des tests sont poursuivis pour s'assurer que les capteurs VLB de l'instrument SEIS, qui jouent un rôle capital dans la tenue des objectifs scientifiques et qui présentent un risque modéré, pourront fonctionner sur toute la durée de la mission primaire. Le report de la date de lancement est mis à profit pour modifier les connexions électriques à l'intérieur de la tête de la foreuse de l'instrument HP3, car les tests effectués ont montré une dégradation de celles-ci. Le projet décide d'abandonner le recours au nouveau type de nylon utilisé pour les suspentes du parachute, développé pour la mission Mars 2020 et de revenir au matériau mis en œuvre par la mission Phoenix. Il s'est avéré en effet que les opérations de stérilisation imposées par les règles de protection planétaire dégradaient la résistance du nouveau matériau[19].
Coût de la mission
Le coût de la mission pour la NASA est de 814 millions de dollars américains dont 160 millions pour le lancement. Ce budget englobe la conception, la fabrication, le lancement vers Mars et la gestion des opérations durant la mission primaire, d'une durée de deux ans. Il faut ajouter à cette somme les contributions des principaux partenaires européens, la France et l'Allemagne, qui ont consacré en tout 180 millions de dollars au développement des instruments SEIS et HP3. Enfin, le JPL et la NASA ont investi environ 18,5 millions de dollars dans le développement de deux nano-satellites Mars Cube One[20].
- Le plateau supérieur de l'atterrisseur, sur lequel est installée l'instrumentation scientifique jusqu'à l'atterrissage.
- Assemblage du compartiment du parachute et de l'atterrisseur.
- Le bouclier thermique arrière est abaissé sur l'atterrisseur et le compartiment parachute.
L'objectif principal d'InSight est d'étudier la structure interne de la planète Mars, qui partage de nombreuses caractéristiques avec les trois autres planètes telluriques (c'est-à-dire rocheuses) de notre Système solaire. Comme la Terre, Mars résulte de l'accrétion initiale de nombreux corps rocheux, qui a été suivie, lorsque la masse du corps en formation a dépassé une taille suffisante, d'un échauffement interne, entretenu par la chaleur dégagée du fait de la radioactivité naturelle de certains éléments. Cet échauffement a déclenché un processus de différenciation planétaire : les matériaux les plus denses se sont enfoncés vers le centre, tandis que les matériaux moins denses migraient vers la surface. Il en est résulté la formation d'un noyau planétaire, entouré d'un manteau et d'une croûte. Mars présente l'avantage par rapport à la Terre d'être géologiquement moins active (notamment absence de plaques tectoniques). Sa structure interne doit donc avoir conservé les traces de ce processus initial de formation. En étudiant la taille, l'épaisseur, la densité et l'ensemble de la structure de la planète Mars — noyau, manteau et croûte —, ainsi qu'en permettant d'estimer la vitesse à laquelle la chaleur s'échappe de l'intérieur de la planète, InSight fournira un aperçu original des processus évolutifs de toutes les planètes rocheuses, qui ont débuté il y a plus de quatre milliards d'années[21].
L'objectif secondaire de la mission est de mener une étude approfondie de l'activité tectonique, mais aussi des impacts de météorites sur Mars, ce qui pourrait accroître nos connaissances sur les processus similaires sur Terre[21].
Pour remplir sa mission, InSight doit collecter des données qui permettront d'effectuer six types de mesure[21] :
- déterminer la taille, la composition et l'état (solide ou liquide) du noyau planétaire ;
- déterminer l'épaisseur et la structure de la croûte ;
- déterminer la composition et la structure du manteau ;
- déterminer l'état thermique des structures internes de Mars ;
- mesurer la force, la fréquence et la distribution géographique de l'activité sismique interne de la planète ;
- mesurer la fréquence des impacts de météorites à la surface de Mars.
Les principales caractéristiques de la structure interne de Mars ont fait l'objet d'estimations, mais souvent de manière indirecte. La mission InSight devrait apporter des précisions très importantes, comme le montre le tableau ci-dessous.
Caractéristique | Valeur connue / imprécision | Précision attendue d'InSight | Facteur d'amélioration |
---|---|---|---|
Épaisseur de la croûte | 65 ± 35 km (déduit) | ±5 km | 7× |
Couches composant la croûte | pas d'information | identification des couches d'une épaisseur > 5 km | nouvelles données |
Vitesse de déplacement du manteau | 8 ± 1 km/s (déduit) | ±0,13 km/s | 7,5× |
Noyau liquide ou solide | sans doute liquide (déduit) | déterminé avec certitude | nouvelles données |
Rayon du noyau | 1 700 ± 300 km | précision portée à ±75 km | 4× |
Densité du noyau | 6,1 ± 1,0 g/cm3 | précision portée à ±0,3 g/cm3 | 3× |
Flux thermique | 30 ± 25 mW/m3 (déduit) | précision portée à ±0,3 mW/m3 | 8× |
Activité sismique | imprécision d'un facteur 100 | facteur 10 | 10× |
Localisation des séismes | pas d'information | localisés avec une précision inférieure ou égale à 10° | nouvelles données |
Taux d'impact des météorites | imprécision d'un facteur 6 | facteur 2 | 3× |
Évaluation de l'activité sismique de Mars
Aucune des deux missions martiennes dotées de sismomètres ayant précédé InSight n'a pu fournir d'informations sur l'activité sismique de Mars, du fait de la défaillance des instruments (Viking) ou de l'échec du lancement (Mars 96). L'activité sismique a fait néanmoins l'objet, pour la mission InSight, d'une évaluation basée sur plusieurs éléments : la masse de la planète, ses oscillations autour de son axe, l'observation des failles et des impacts de météorites à sa surface, ainsi que des modélisations du processus ayant donné naissance à la planète et qui a conduit à son refroidissement progressif. La source principale de l'activité sismique est la contraction de la planète liée au refroidissement de son noyau (séisme tectonique). Le moment cinétique libéré chaque année par ce processus aurait une valeur comprise entre 1017 et 1019 N m, qui situe Mars entre la Terre (1022 N m) et la Lune (1015 N m). Une large incertitude entoure également le nombre de séismes, il n'y a pas de modèle unique de distribution des séismes en fonction de leur intensité. À partir de plusieurs hypothèses, les spécialistes du domaine estiment qu'environ 100 séismes par an sont détectables au niveau du site d'atterrissage, c'est-à-dire caractérisés par un moment cinétique supérieur à 1013 N m, et par un épicentre situé à moins de 60 degrés d'écart sur la surface. Des sources secondaires de séismes sont les impacts de météorites. Ce type d'événement présente un grand intérêt scientifique car, contrairement aux séismes tectoniques, leur épicentre devrait pouvoir être localisé par les observations des engins spatiaux en orbite autour de Mars. Cette localisation permet de réduire l'incertitude concernant les déductions faites sur la structure interne de Mars à partir de ces ondes sismiques relevées. Le nombre d'impacts qui seront détectables chaque année présente de grandes incertitudes. Le responsable scientifique de l'instrument SEIS a proposé le chiffre de 10 événements détectables par an[23].
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Détection des impacts météoritiques
Une des applications secondaires d'InSight est la détection des impacts de météorites, appliquée à l'étude de la structure interne de la planète[24]. Le , Insight a enregistré un séisme de magnitude 4, qui s'est révélé causé par un impact de météorite[25], identifié visuellement seulement deux mois plus tard, sur des images de Mars Reconnaissance Orbiter (MRO). L'impact, situé dans la région Amazonis Planitia, a créé un cratère de 150 m de diamètres et 20 m de profondeur, pour un météorite estimé à 5 à 12 mètres de diamètre.
Parmi le millier de séismes enregistré par InSight, quatre sont pour l'instant attribués à des impacts météoritiques et celui du est considéré comme le plus important, mais surtout le seul à avoir créé des ondes de surface dans la partie supérieure de la croûte, dont l'exploitation des données a permis d'étudier mieux encore la structure de la croûte[26],[27].
Le site d'atterrissage retenu prend en compte les besoins scientifiques, mais également les capacités de l'atterrisseur. En ce qui concerne ce dernier critère, l'objectif est de garantir une probabilité de réussite de l'atterrissage de 99 %. Les critères de sélection du site suivants sont définis[28] :
- la latitude du site d'atterrissage doit être comprise entre 15°S et 5°N, pour que les panneaux solaires puissent fournir suffisamment d'énergie ;
- l'altitude doit être inférieure à −2,5 kilomètres (par rapport au niveau moyen de la surface martienne), pour que la sonde spatiale parvienne à être ralentie suffisamment avant l'arrivée sur le sol, compte tenu de sa capacité de freinage (puissance et carburant disponible pour les rétrofusées, forces de traînée) ;
- la zone d'atterrissage, dégagée d'incidents de terrain (listés ci-dessous), doit être suffisamment étendue pour prendre en compte l'absence de précision de la trajectoire de descente vers le sol de la sonde spatiale, compte tenu des incertitudes sur la densité de l'atmosphère ainsi que la force et la direction des vents. L'ellipse retenue doit faire au minimum 110 sur 25 kilomètres ;
- l'inertie thermique du sol, mesurée depuis une orbite supérieure, doit être d'environ 100–140 J m−2 K−1 s−½. Cette contrainte garantit que le sol ne sera pas trop mou. L'ordre de grandeur idéal est de 200 J m−2 K−1 s−½, valeur qui caractérise des terrains régolithiques peu ou pas indurés ;
- les rochers éparpillés en surface ne doivent pas représenter plus de 10 % de la surface, pour que l'atterrissage et le déploiement des panneaux solaires puissent s'effectuer correctement ;
- la zone d'atterrissage doit être dépourvue de reliefs de grande taille et ne comporter que des pentes inférieures à 15 % ;
- le régolite doit avoir au moins cinq mètres d'épaisseur, pour faciliter la pénétration du sondeur HP3, d'une longueur de 5 mètres.
La sélection du site est effectuée en utilisant, d'une part les mesures des caractéristiques thermiques du sol réalisées par l'instrument THEMIS de l'orbiteur Mars Odyssey, d'autre part les images prises par la caméra HiRISE de Mars Reconnaissance Orbiter dont la résolution permet d'identifier les rochers de grande taille. Peu de régions martiennes répondent aux critères de latitude, tout en se trouvant en dessous de l'altitude préconisée. En éliminant les terrains trop rocheux (comme Valles Marineris), l'équipe scientifique identifie une seule région éligible, située dans la plaine Elysium Planitia. Dans cette zone, vingt ellipses d'atterrissage, répondant aux critères d'inertie thermique, sont identifiées dans un premier temps. Après une étude plus approfondie, la sélection est réduite à quatre zones, comprises entre 3° et 5° de latitude nord et entre 134° et 140° de longitude est. Les sites choisis ne permettent toutefois pas d'éviter les risques subsistants dus aux roches ou à des pentes trop fortes de cratères secondaires. Le risque d'un échec de la mission résultant d'inégalités de terrain dans la zone d'atterrissage est évalué à 1,4-2,2 %[29]. Début , le site d'atterrissage est sélectionné[30]. Le site d'atterrissage final forme une ellipse s'étendant sur 130 km d'ouest en est et sur 27 km du nord au sud. Le centre de cette ellipse se situe à la latitude 4,5°N et à la longitude 135,9°E. La probabilité d'un atterrissage à l'intérieur de l'ellipse est évaluée à 99 %[31].
L'équipe scientifique chargée de la conception de la mission et des instruments d'InSight comprend des scientifiques de plusieurs pays : États-Unis , France, Allemagne, Autriche, Belgique, Canada, Pologne, Japon, Suisse et Royaume-Uni. Bruce Banerdt[32] est le responsable scientifique (Principal Investigator ou PI) du projet. Ce géophysicien planétaire a une longue carrière consacrée à l'étude des processus qui modifient la surface des planètes. Suzanne Smrekar[33], dont les recherches portent sur l'évolution thermique des planètes et qui a contribué au développement et au test de nombreux instruments conçus pour mesurer les propriétés thermiques et les flux de chaleur sur d'autres planètes, est la responsable scientifique adjointe. Philippe Lognonné, de l'Institut de physique du globe de Paris et de l'université Paris-Diderot, spécialiste en sismologie planétaire, est le responsable scientifique du sismomètre SEIS[34]. Tlman Spohn, spécialiste en géodynamique planétaire, est le responsable scientifique de l'expérience de flux de chaleur HP3. Sami Asmar, un spécialiste des ondes radio[35], est le responsable de l'instrument RISE. Le projet est piloté par le centre JPL, représenté par Tom Hoffman, assisté par Henry Stone[36].
Lancement ()
Le lancement d'un engin spatial vers Mars ne peut avoir lieu de manière optimale que tous les 26 mois, lorsque la Terre et Mars sont positionnées l'une par rapport à l'autre d'une manière favorable. En 2018, la fenêtre de lancement vers Mars s'ouvre le et se referme le . Durant cette période, le créneau quotidien permettant un décollage dure environ deux heures. InSight est la première sonde spatiale lancée depuis la base de lancement de Vandenberg. Depuis ce site, le lancement, qui doit obligatoirement se faire vers l'ouest, ne bénéficie pas comme à Cape Canaveral en Floride de la vitesse de rotation de la Terre. Ce choix étonnant fait par la NASA résulte du fait que le lanceur dispose d'une réserve de puissance suffisante pour compenser ce handicap (la sonde spatiale est relativement légère) et que par ailleurs le nombre élevé de lancements en Floride aurait créé des contraintes sur le déroulement du lancement. Quel que soit le jour de lancement, l'atterrissage aura lieu le , du fait des lois de la mécanique spatiale. Le lanceur est l'Atlas V 401, version la moins puissante de cette famille de fusées[alpha 2]. La sonde spatiale est placée sous une coiffe de 3,7 mètres de diamètre, dont le gabarit est donc suffisant pour que les panneaux solaires de l'étage de croisière puissent être en position déployée dès le lancement[37].
Le lancement d'InSight a lieu dès l'ouverture de la fenêtre le (11 h 5 UTC). Le premier étage fonctionne durant 244 secondes puis 16 secondes après son extinction, l'étage Centaur prend le relais. Celui-ci place la sonde spatiale sur une orbite de parking quasi circulaire, à 185 kilomètres d'altitude. Après une phase de navigation inertielle (sans propulsion) d'environ 60 minutes, l'étage Centaur est rallumé pendant environ cinq minutes, pour donner à la sonde spatiale une vitesse suffisante lui permettant d'entamer son transit vers Mars. Une fois que InSight s'est séparée du lanceur, les deux nano-satellites MarCO sont largués à leur tour et entament de manière autonome leur propre transit vers Mars[38].
Transit vers Mars (mai-)
Le transit vers Mars est de type 1, c'est-à-dire que la sonde spatiale effectue moins d'une demi-orbite autour du Soleil. Le trajet doit durer 205 jours. La sonde spatiale suit une orbite de Hohmann, qui lui fait parcourir 485 millions de kilomètres, alors que Mars se trouve à 121 millions de kilomètres de distance au moment du lancement. Durant son vol, la sonde spatiale est stabilisée 3 axes (son orientation est fixe). Six manœuvres de correction de trajectoire sont prévues durant le transit, pour permettre à la sonde spatiale d'arriver précisément à destination. Celles-ci sont réalisées à l'aide de quatre moteurs-fusées fixés sur l'atterrisseur, mais dont la tuyère émerge par des orifices dans le bouclier arrière. Quatre autres petits moteurs-fusées, couplés aux propulseurs précédents, sont utilisés pour corriger l'orientation lorsque les gyroscopes embarqués et les viseurs d'étoiles installés sur l'étage de croisière détectent une déviation par rapport à l'orientation souhaitée. Les deux premières corrections de trajectoire sont programmées le et le . Leur objectif est de corriger l'erreur introduite volontairement dans la direction initiale prise par la sonde spatiale afin d'éviter que l'étage Centaur, qui suit la même trajectoire, ne s'écrase sur le sol de Mars et ne vienne la contaminer avec des micro-organismes terrestres. Les trois autres corrections de trajectoire, programmées 45 jours, 15 jours et 22 heures avant l'arrivée sur Mars doivent permettre d'affiner celle-ci pour poser InSight précisément dans la région de Mars visée[39], [40].
Rentrée atmosphérique et atterrissage ()
47 minutes avant le début de la rentrée atmosphérique, des résistances sont mises en marche pour réchauffer les catalyseurs utilisés par le système de propulsion. 40 minutes plus tard, l'étage de croisière, qui a achevé sa mission, est largué. La sonde spatiale est désormais constituée de l'atterrisseur, enfermé dans son bouclier thermique. Trente secondes plus tard, InSight modifie son orientation, de manière à présenter vers l'avant de sa trajectoire en direction de la planète le bouclier thermique avant, le mieux protégé contre la chaleur. L'émetteur radio commence à transmettre des données sur le fonctionnement de la sonde spatiale en UHF (avec un débit de 8 kilobits par seconde), par le biais d'une antenne patch fixée sur le bouclier arrière. Les données transmises doivent permettre de vérifier le déroulement de la phase critique de la descente et, si un incident se produit, fournir les paramètres susceptibles de l'expliquer. Ces signaux sont captés à la fois par l'orbiteur martien Mars Reconnaissance Orbiter, déjà en poste, et par les nano-satellites MarCO, lancés avec InSight. Ces derniers retransmettent les données émises en temps réel vers la Terre, tandis que MRO les transmettra par la suite. Sur Terre, trois radiotélescopes sont mobilisés durant le déroulement de la descente sur le sol martien, pour recevoir les données qui arrient avec un décalage de huit minutes, proportionnel à la distance que le signal doit parcourir[40],[41].
InSight pénètre dans l'atmosphère martienne à une vitesse de 5,5 kilomètres par seconde. La chaleur produite par le frottement de l'atmosphère de Mars, pourtant très peu épaisse, porte le bouclier thermique avant à une température qui, 90 secondes après le début de la rentrée, culmine à 1 500 °C. Dix-sept secondes plus tard, la décélération causée par la friction de l'atmosphère atteint un pic à 9 g. Le signal radio est interrompu un court moment, à cause de l'ionisation des gaz provoquée par l'échauffement. L'ouverture du parachute s'effectue environ 3,5 minutes après le début de la rentrée atmosphérique alors qu'InSight ne se situe plus qu'à 13 kilomètres au-dessus du sol et que sa vitesse a chuté à 446 mètres par seconde. La vitesse de la rentrée a déjà été réduite de 9/10e. Le déploiement du parachute entraîne une brutale décélération. Dix secondes plus tard, l'ordinateur embarqué déclenche la phase finale de la descente : le radar et une batterie auxiliaire destinée à renforcer la batterie principale durant la phase critique de l'atterrissage sont mis en marche. InSight va descendre sous son parachute durant trois minutes. Au cours des 25 premières secondes, il éjecte son bouclier thermique avant, puis déplie son train d'atterrissage, qui était jusque-là en position repliée. Le radar est ensuite utilisé pour déterminer la distance au sol. Lorsque la vitesse de descente n'est plus que de 60 mètres par seconde, la sonde spatiale largue à la fois son parachute et le bouclier thermique arrière. Elle ne se trouve plus qu'à 1 200 mètres du sol et sa vitesse de descente a chuté à 60 mètres par seconde (200 km/h). Les communications passent désormais par l'antenne UHF installée sur le pont supérieur de l'atterrisseur. Les 12 moteurs-fusées sont mis en marche, pour poser en douceur l'atterrisseur. À une altitude de 50 mètres au-dessus du sol, la vitesse de descente est stabilisée à 2,4 mètres par seconde et une trentaine de secondes plus tard, l'atterrisseur touche le sol à cette vitesse (8,6 km/h)[40],[41].
Phase | Heure | Événement | Altitude | Vitesse | |
---|---|---|---|---|---|
Préparation de la rentrée atmosphérique | E-3 h. | Mise à jour des paramètres de rentrée | |||
E-10 min | Initialisation de la phase de rentrée | ||||
E-7 min | Largage de l'étage de croisière | ||||
E-6,5 min | Orientation de rentrée | ||||
Phase hypersonique | E | Début de la rentrée atmosphérique | 143 km | 5,5 km/s | |
E+218 s. | Déploiement du parachute | 13 km | Mach 1,66 | ||
Phase sous parachute | E+233 s. | Largage du bouclier thermique | 11 km | 485 km/h | |
E+243 s. | Déploiement du train d'atterrissage | ||||
E+276 s., T-119 s. | Activation du radar | 7 km | |||
T-60 s. | Premier écho radar | 2,7 km | |||
Phase terminale de la descente | T-41 s. | Largage du parachute | 1,3 km | 250 km/h | |
T-38 s. | Changement d'orientation | 1,1 km | |||
T-16 s. | Descente à vitesse constante | 52 m. | 31 km/h | ||
Atterrissage | T | Atterrissage | 0 m. | verticale = 10 km/h horizontale < 5,7 km/h | |
< T +15 min | La poussière s'est reposée | ||||
T+5 min | Détermination de la position | ||||
T+32 min | Déploiement des panneaux solaires | ||||
E = heure début rentrée atmosphérique - T = heure atterrissage . Remarque : les conditions atmosphériques martiennes peuvent modifier la durée de la descente. |
Retransmission des données par les CubeSats MarcO
Deux gros CubeSats expérimentaux baptisés MarCO (pour Mars Cube One[43]) ont été lancés avec InSight. Ils ont effectué un transit autonome vers Mars mais ne disposent pas de capacité de mise en orbite. Durant leur survol de Mars, ils ont assuré à titre expérimental le rôle de relais entre InSight et la Terre pour la phase d'atterrissage de la sonde spatiale permettant de disposer en quasi temps réel (compte tenu du délai imposé par la distance de la Terre et de Mars) du statut de la sonde spatiale aux moments clés de la descente ainsi que d'une première photo prise immédiatement après l'arrivée sur le sol martien. Le transfert des données est assuré en parallèle par l'orbiteur martien MRO mais avec un décalage de plusieurs heures. Les deux nano-satellites doivent par la suite poursuivre leur vol autour du Soleil. Chaque CubeSat a la forme d'un parallélépipède de 36,6 × 24,3 × 11,8 cm3. Ils disposent de deux panneaux solaires et de deux antennes, qui sont déployés en orbite. La charge utile est constituée par un émetteur/récepteur fonctionnant en UHF (réception) et en bande X (émission et réception). L'antenne utilisée pour les émissions en bande X est une antenne plate, qui permet de diriger les émissions, comme une antenne parabolique[44].