Louis XIV
roi de France et de Navarre de 1643 à 1715 / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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Louis XIV, dit « le Grand » ou « le Roi-Soleil », né le au château Neuf de Saint-Germain-en-Laye et mort le à Versailles, est un roi de France et de Navarre. Son règne s'étend du — sous la régence de sa mère Anne d'Autriche jusqu'au — à sa mort en . Son règne d’une durée de 72 ans est l'un des plus longs de l'histoire d'Europe et le plus long de l'histoire de France.
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Pour les autres significations, voir Louis XIV (homonymie) et Louis le Grand.
Né Louis, surnommé Dieudonné, il monte sur le trône de France au décès de son père, Louis XIII, quelques mois avant son cinquième anniversaire, ce qui fait de lui l'un des plus jeunes rois de France. Il devient ainsi le 64e roi de France, le 44e roi de Navarre et le troisième roi de France issu de la dynastie des Bourbons.
S'il n'aime guère que son principal ministre d'État, Colbert, fasse référence à Richelieu, ministre de Louis XIII et partisan intransigeant de l'autorité royale, il s'inscrit néanmoins dans son projet de construction séculaire d'un absolutisme de droit divin. Usuellement, son règne est divisé en trois parties : la période de sa minorité, troublée par la Fronde, de à , durant laquelle sa mère et le cardinal Mazarin gouvernent ; la période allant de la mort de Mazarin, en , au début des années 1680, pendant laquelle le roi gouverne en arbitrant entre les grands ministres ; et enfin la période allant du début des années à sa mort, où le roi gouverne de plus en plus seul, notamment après la mort de Colbert (ministre clé de 1661 à ), puis de Louvois, en . Cette période est aussi marquée par un retour du roi à la religion, notamment sous l'influence de sa seconde épouse, Madame de Maintenon. Son règne voit la fin des grandes révoltes nobiliaires, parlementaires, protestantes et paysannes qui avaient marqué les décennies précédentes. Le monarque impose l'obéissance à tous les ordres et il contrôle les courants d'opinion (y compris littéraires ou religieux, tels que Port-Royal et les Jansénistes) de façon plus prudente que Richelieu.
La France est, pendant son règne, le pays le plus peuplé d'Europe avec environ vingt millions d'habitants, ce qui lui confère une certaine puissance d'autant que, jusque dans les années 1670, l'économie se porte bien grâce notamment au dynamisme économique du pays et à des finances publiques tenues en bon ordre par Colbert. Du point de vue climatique, le règne coïncide avec le minimum de Maunder (1645- 1715), une période extrêmement froide qui produit d'importantes disettes, plusieurs épidémies et épizooties; en 1693-1694, le printemps très pluvieux suivi d'un échaudage l'été provoque une famine suivie d'une épidémie qui tuent 1 300 000 personnes ; lors du « grand hiver » 1708-1709 le froid a tué directement environ deux cent mille personnes, et indirectement quatre cent mille par famine et épidémie[2].
Par la diplomatie et la guerre, Louis XIV affirme sa puissance en particulier contre la maison de Habsbourg, dont les possessions encerclent la France. Sa politique du « pré carré » cherche à agrandir et rationaliser les frontières du pays, protégées par la « ceinture de fer » de Vauban, qui fortifie les villes conquises. Cette action lui permet de donner à la France des frontières approchant celles de l'ère contemporaine, avec l'annexion du Roussillon, de la Franche-Comté, de Lille, de l'Alsace et de Strasbourg. Toutefois, les guerres pèsent sur les finances publiques et Louis XIV s'attire la méfiance des autres pays européens, qui s'allient souvent, à la fin de son règne, pour contrer sa puissance. C'est aussi le moment où, après la Glorieuse Révolution, l'Angleterre commence à affirmer sa puissance, notamment maritime et économique, grâce en partie aux Huguenots chassés de France, sous le règne d'un adversaire déterminé de Louis XIV, Guillaume d'Orange.
D'un point de vue religieux, le XVIIe siècle est complexe et ne se limite pas à l'opposition entre catholiques et protestants. Parmi les catholiques, la question de la grâce suscite une forte opposition entre les jésuites et les jansénistes. Louis XIV doit trancher entre les divers courants de pensée religieuse, en tenant compte non seulement de ses propres convictions, mais aussi de considérations politiques. Ainsi, s'il fait condamner les jansénistes, c'est aussi parce qu'il se méfie de leur anti-absolutisme.
Concernant les protestants, la révocation de l'édit de Nantes en a des conséquences économiques et démographiques lourdes pour la France, et les réactions en Europe et à Rome sont défavorables. Les relations avec les papes sont en général mauvaises, particulièrement avec Innocent XI. En effet, le roi entend préserver son indépendance et celle de son clergé face à Rome, ce qui ne l'empêche pas de se méfier des gallicans, souvent imprégnés par le jansénisme. À la fin du règne, la querelle du quiétisme entraîne également des tensions avec Rome.
À partir de , Louis XIV dirige son royaume depuis le vaste château de Versailles, dont il a supervisé la construction, et dont le style architectural a inspiré d'autres châteaux européens. Sa cour soumet la noblesse, étroitement surveillée, à une étiquette très élaborée. Le prestige culturel s'y affirme grâce au mécénat royal en faveur d'artistes tels que Molière, Racine, Boileau, Lully, Le Brun et Le Nôtre, ce qui favorise l'apogée du classicisme français, qualifié, dès son vivant, de « Grand Siècle », voire de « siècle de Louis XIV ».
Sa fin de règne, très difficile, est marquée par l'exode de dizaines de milliers de protestants persécutés, par des revers militaires, par les famines de et de , par la révolte des Camisards et par les nombreux décès de ses héritiers royaux.
Tous ses enfants et petits-enfants dynastes sont morts avant lui, et son successeur, son arrière-petit-fils Louis XV, n'a que 5 ans lorsqu'il meurt. Pourtant, même après la régence assez libérale de Philippe d'Orléans, l'absolutisme perdure, attestant ainsi de la solidité du régime construit.
Après la disparition de Louis XIV, Voltaire s'inspire en partie de lui pour élaborer le concept de despotisme éclairé. Au XIXe siècle, Jules Michelet lui est hostile et insiste sur le côté sombre de son règne (dragonnades, galères, disettes, etc.). Ernest Lavisse sera plus modéré, même si ses manuels scolaires insistent sur le despotisme du roi, et sur certaines décisions tyranniques.
Dans la seconde moitié du XXe siècle, Marc Fumaroli considère Louis XIV comme le « saint patron » de la politique culturelle de la Cinquième République en France. Michel de Grèce pointe ses insuffisances, tandis que François Bluche et Jean-Christian Petitfils le réhabilitent.
Naissance de Louis-Dieudonné
Fils de Louis XIII et d'Anne d'Autriche, Louis est le fruit de l'union des deux dynasties les plus puissantes de ce temps : la maison capétienne de Bourbon et la maison de Habsbourg[3].
Au traditionnel titre de Dauphin de Viennois est ajouté à sa naissance celui de Premier fils de France. Intervenue après presque vingt-trois années de mariage stérile, ponctuées de plusieurs fausses couches, la naissance inattendue de l'héritier du trône est considérée comme un don du ciel, ce qui lui vaut d'être aussi prénommé Louis-Dieudonné[4],[n 1] (et non pas -Désiré).
Si certains historiens ont avancé que le véritable père est Mazarin, cette hypothèse a été infirmée par un examen ADN[5],[6]. Si l'historien Jean-Christian Petitfils propose la date du 23 ou du , semaine où le couple royal séjournait à Saint-Germain, comme date de la « conception du dauphin »[7], d'autres auteurs affirment que le dauphin a été conçu le , dans le palais du Louvre[n 2] (le tombe d'ailleurs pile neuf mois avant sa naissance, le )[8],[9].
Pour le roi Louis XIII comme pour la reine (et plus tard leur fils lui-même), cette naissance tant attendue est le fruit de l'intercession faite par le frère Fiacre auprès de Notre-Dame de Grâces, auprès de laquelle le religieux réalise trois neuvaines de prières afin d'obtenir « un héritier pour la couronne de France ». Les neuvaines sont dites, par le frère Fiacre du au [10],[n 3].
En , la reine prend conscience qu'elle est à nouveau enceinte. Le , le roi et la reine reçoivent officiellement le frère Fiacre pour s'entretenir avec lui sur les visions qu'il dit avoir eu de la Vierge Marie[11] et de la promesse mariale d'un héritier pour la couronne. À l'issue de l'entretien, le roi missionne officiellement le religieux pour aller à l'église Notre-Dame-de-Grâces de Cotignac, en son nom, faire une neuvaine de messes pour la bonne naissance du dauphin[10],[12],[13],[n 4].
Le , en remerciement à la Vierge pour cet enfant à naître, le roi signe le Vœu de Louis XIII, consacrant le royaume de France à la Vierge Marie, et faisant du un jour férié dans tout le royaume[14]. En 1644, la reine faisant venir auprès d'elle le frère Fiacre lui dira : « Je n'ai pas perdu de vue la grâce signalée que vous m'avez obtenue de la Sainte Vierge, qui m'a obtenu un fils ». Et à cette occasion, elle lui confie une mission personnelle : porter un présent (à la Vierge Marie) dans le sanctuaire de Cotignac, en remerciement de la naissance de son fils[14],[10]. En 1660, Louis XIV et sa mère se rendront en personne à Cotignac pour y prier et remercier la Vierge[15], puis en 1661 et 1667, le roi fera porter des présents à l'église de Cotignac, par le frère Fiacre, en son nom[16],[n 5]. À l'occasion de son passage en Provence (en 1660), le roi et sa mère se rendent en pèlerinage à la grotte de la Sainte-Baume, sur les pas de sainte Marie-Madeleine[17].
La naissance de Louis[n 6], le [18], est suivie deux ans plus tard par celle de Philippe. La naissance tant espérée d'un dauphin écarte du trône le comploteur impénitent qu'était Gaston d'Orléans, le frère du roi.
Éducation
En plus de ses fonctions ministérielles, Mazarin, parrain de Louis XIV (choisi comme tel par Louis XIII à la mort de Richelieu, le [19]), se voit attribuer par la reine, en , la responsabilité de l'éducation du jeune monarque et celle de son frère le duc Philippe d'Orléans (dit « le Petit Monsieur »). L'usage est que les princes élevés par des gouvernantes « passent aux hommes » à l'âge de 7 ans (l'âge de raison à l'époque), pour être confiés aux soins d'un gouverneur assisté d'un sous-gouverneur[20]. Mazarin devient donc « surintendant au gouvernement et à la conduite de la personne du roi ainsi que de celle de M. le duc d'Anjou », et confie la tâche de gouverneur au maréchal de Villeroy. Le roi et son frère vont souvent à l'hôtel de Villeroy, non loin du Palais-Royal. C'est alors que Louis XIV se lie d'une amitié à vie avec le fils du maréchal, François de Villeroy. Le roi a eu différents précepteurs, notamment l'abbé Péréfixe de Beaumont en et François de La Mothe Le Vayer.
À partir de , son meilleur éducateur est sans doute Pierre de La Porte, son premier valet de chambre et celui qui lui fait lecture de récits historiques[21]. Malgré leurs efforts pour lui prodiguer des cours de latin, d'histoire, de mathématiques, d'italien et de dessin, Louis n'est pas un élève très travailleur. Par contre, suivant l'exemple du grand collectionneur d'art qu'est Mazarin, il se montre très sensible à la peinture, à l'architecture, à la musique et surtout à la danse qui est, à l'époque, une composante essentielle de l'éducation d'un gentilhomme[22]. Le jeune roi apprend aussi à jouer de la guitare auprès de Francesco Corbetta[23].
Louis aurait bénéficié également d'une éducation sexuelle particulière, sa mère ayant demandé à la baronne de Beauvais, surnommée « Cateau la Borgnesse », de le « déniaiser » à sa majorité sexuelle[n 7].
« Miraculé »
Dans son enfance, Louis XIV échappe à plusieurs reprises à la mort. À 5 ans, il manque de se noyer dans un des bassins du jardin du Palais-Royal. Il est sauvé in extremis. À 9 ans, le , il est atteint de la variole[24]. Dix jours plus tard, les médecins n'ont plus aucun espoir, mais le jeune Louis se remet « miraculeusement ». À 15 ans, il a une tumeur au sein[24]. À 17 ans, il souffre de blennoragie[24].
L'alerte la plus sérieuse pour le Royaume a lieu le : le roi, à 19 ans, est victime d'une grave intoxication alimentaire (à cause de l'infection des eaux) et de fièvre typhoïde[24], diagnostiquée comme un typhus exanthématique, lors de la prise de Bergues dans le Nord. Le , il reçoit les derniers sacrements et la cour commence à préparer la succession.
Mais François Guénaut, le médecin d'Anne d'Autriche, lui donne un émétique à base d'antimoine et de vin, qui guérit encore une fois « miraculeusement » le roi. Selon son secrétaire Toussaint Rose, c'est à cette occasion qu'il perd une bonne partie de ses cheveux et se met à porter temporairement[n 8] la « perruque à fenêtre », dont les ouvertures laissent passer les quelques mèches qui lui restent[26].