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Patrik (Patrick) Ourednik est un écrivain tchèque et français né en 1957 à Prague.
Naissance |
Prague Tchécoslovaquie |
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Activité principale |
Roman, Essai, Poésie, Dramaturgie, Traduction |
Distinctions |
Prix national de littérature (2014) Prix Tom Stoppard (2013) Prix Montesquieu (2009) Livre de l'année, La Stampa (2007) The Decade's Best Books, The Guardian (2006) Top Shelf, The Village Voice (2005) Livre de l'année, Lidové noviny (2001) Prix Jungmann (1995) Prix de la Radio tchèque (1992) |
Langue d’écriture | Tchèque, français |
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Œuvres principales
Compléments
Il est l'auteur d'une vingtaine de livres et le traducteur en tchèque de Rabelais, Jarry, Queneau, Beckett, Michaux, Simon et Vian. Il publie en 2001 un livre qui fera le tour du monde, Europeana. Une brève histoire du XXe siècle.
Patrik Ourednik passe sa jeunesse dans la Tchécoslovaquie des années 1970, en pleine « normalisation » qui avait mis fin aux espoirs du Printemps de Prague. Signataire de la Pétition pour la libération des prisonniers politiques[1] et éditeur de samizdats, il se voit exclu des études universitaires pour « non-conformité idéologique ». En 1984 il s'exile en France où il vit depuis.
Toute l'œuvre de Patrik Ourednik — dictionnaires « non conventionnels », essais, romans, poésies, pastiches – est marquée par l'intérêt pour les idées reçues, les préjugés et les stéréotypes, examinés à travers le langage, l'expression, pour lui, de « la vérité d'une époque » : « Quant à moi, j'essaie d'appliquer un principe un peu différent, en partant de la prémisse qu'il est possible de prendre comme synonyme de la “vérité d'une époque” la langue de cette époque, autrement dit de s'emparer d'un certain nombre de tics langagiers, de stéréotypes et de lieux communs et de faire en sorte qu'ils agissent et qu'ils se confrontent au même titre que les personnages d'un récit traditionnel. »[2].
Année vingt-quatre (1995) renoue avec les « jeux de mémoire » de Joe Brainard (1970) et de Georges Perec (1978). La base de ces « descentes » dans la mémoire de l’auteur est constituée par des souvenirs fragmentaires, introduits par la formule « je me souviens ». Par ces bribes de souvenir, qui concernent les années 1965 à 1989, l’auteur fait ressurgir des instantanés tirés soit de sa propre vie, soit de ce qu’il est convenu d’appeler des « grands » faits de société. On entrevoit des clichés propres à une situation particulière, des détails éternels, des fragments de discours, des truismes, des tics à travers le prisme du sujet et du « vécu » de l’auteur. Le regard d’Ourednik reste individualisé, caractérisé, sans pourtant qu’il ne pose le moindre jugement sur les évènements. L’époque se démasque d’elle-même, par sa langue, qui se trouve soudain, sous le microscope de l’auteur, arrachée à son contexte de communication située dans le temps.
Europeana (2001) propose, comme le dit son sous-titre, une « brève histoire du vingtième siècle », racontée non pas d’un point de vue objectif, mais comme « par en dessous ». Le récit ne respecte aucune linéarité chronologique, il ne fait pas de hiérarchie entre les évènements de l’époque, il ne cherche pas de lien de cause à effet, enfin il ne personnifie pas l’histoire. Dans la droite ligne de Bouvard et Pécuchet [3], c’est bien la « langue du XXe siècle » qui est au cœur d’Europeana : discours diffus et indifférenciés, concentrés et mis en système, et qui convoquent, indistinctement, dans un inventaire absurde qui va de la Première Guerre Mondiale jusqu’au bug du millénaire, la mort de Dieu et la télévision, Buchenwald et le positivisme, l’émancipation de la femme et l’invention de l’escalator. (Voir l'article détaillé : Europeana. Une brève histoire du XXe siècle.)
Instant propice, 1855 (2006). On retrouve le même projet d’écriture – la restitution de la « vérité d’une époque » par l’adoption de sa « langue » spécifique, qui seule la rend audible – dans Instant propice, 1855, librement inspiré d'une expérience anarchiste tentée en 1890 au Brésil, récit polymorphe d’une utopie libertaire qui s’épuise en parlotte. Tout comme Europeana, Instant propice balaie les manifestations de la bêtise humaine en se plaçant en leur sein : raccourcis de pensées et formules toutes faites, manifestations idéologiques d’un temps, truismes universels.
Dans Classé sans suite (2006), qualifié par son postfacier de « faux polar mais vrai thriller métaphysique » [4], Ourednik revient à Prague, capitale d'un « nouveau pays sans nom ». Débutant à la façon d'un texte de Queneau, le roman s'avère peu à peu un piège pour le lecteur : frustrant les attentes ouvertes par un “roman”, Classé sans suite déjoue le conformisme romanesque. Toujours selon le postfacier, « Ourednik a réussi à accomplir (...) le projet tout flaubertien d’écrire un livre sur rien »[5]. Ourednik lui-même avait donné quelques pistes dans un entretien accordé en 2007 à la revue Labyrint : « Comment écrire sur rien ? Qu'est-ce rien ? Un vacuum rempli du langage au sens propre comme au sens figuré. L'illusion d'une existence digne d'être exprimée, l'illusion d'une histoire digne d'être racontée, l'illusion d'une cohérence digne d'être démontrée. La vie humaine dans ses trois formes : j'existe (existence), je progresse d'un point à un autre (histoire), un sens s'en dégage (cohérence). Ce livre-là aurait pu aussi bien s'intituler Si seulement »[4].
La fin du monde n'aurait pas eu lieu (2017) est le deuxième livre d'Ourednik écrit en français. Le roman se déroule dans un avenir proche, « après la fin du monde ». Le héros, Gaspard Boisvert, traducteur de littérature américaine, devient à la suite d'un quiproquo conseiller du « président américain [non nommé] le plus bête de l'histoire du pays ». Le destin de Gaspard, d'origine judéo-ukrainienne côté mère, mais peut-être également le petit-fils d'Adolf Hitler côté père, permet à Ourednik de développer des réflexions sur le monde contemporain et de « régler ses comptes à une certaine manière de raconter l’histoire et de dire le présent » (comme l'écrit Jean Montenot dans la postface), tout en « subvertissant les codes de l’écriture, multipliant les jeux de distanciations, les scies, les clichés, les phrases toutes faites, mêlant ici les vérités aux demi-vérités, voire aux franches absurdités, forçant le trait là, le tout au service d’une ironie des plus réjouissantes et des plus dévastatrices ». À la fin du roman, Gaspard est atteint d'amnésie, et cette perte de mémoire est sans doute valable, par analogie, pour le monde occidental dans son ensemble.
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