Empire britannique
ensemble des territoires conquis, exploités et dominés par l'Angleterre puis le Royaume-Uni, du début du XVIIe à la fin du XXe siècle / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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L'Empire britannique (en anglais : British Empire), ou Empire colonial britannique, est l'ensemble des territoires qui, sous des statuts divers (colonies, protectorats, dominions, mandats, tutelles) ont été gouvernés ou administrés du début du XVIIe à la fin du XXe siècle par l'Angleterre, puis le Royaume-Uni (créé en 1707)[3].
British Empire
Union Flag |
Hymne | God Save the King |
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Statut | Monarchie parlementaire |
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Capitale | Londres |
Langue(s) | Anglais et langues locales |
Religion | Anglicanisme, protestantisme et religions locales |
Monnaie | Livre sterling |
Population (1939[1],[2]) | 450 000 000 hab. |
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Superficie (1939[1],[2]) | 33 700 000 km2(ensemble) 26 000 000 km2 |
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1707 | L'Acte d'Union est signé. |
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1770 | James Cook arrivé en Australie. |
1791 | L'Acte constitutionnel instaure le Haut et le Bas-Canada. |
1815 | Les Britanniques s'imposent contre Napoléon. |
1837 | La reine Victoria commence son règne. |
1882 | Le canal de Suez passe sous contrôle britannique. |
1914 | L'Empire se bat au côté de la Triple-Entente. |
1921 | L'État libre d'Irlande est formé. |
1926 | La déclaration Balfour annonce la naissance du Commonwealth. |
1931 | Le statut de Westminster reconnaît la souveraineté externe de tous les dominions de l'Empire. |
1947 | Fin du Raj britannique. |
1997 | Le Royaume-Uni cède Hong Kong à la république populaire de Chine. |
Entités précédentes :
Entités suivantes :
- Royaume-Uni
- États-Unis (1776)
- Canada (1867)
- Australie (1901)
- Nouvelle-Zélande (1907)
- Union d'Afrique du Sud (1910)
- Royaume d'Égypte (1922)
- État libre d'Irlande (1922)
- Inde (1947)
- Pakistan (1947)
- Soudan (1956)
- Kenya (1963)
- Seychelles (1976)
- Hong Kong (1997)
À son apogée, en 1922, il s'agit de la première puissance mondiale[4] avec un quart de la population mondiale, environ quatre cents millions d'habitants[5] et une superficie de 33,7 millions de km² (environ 22 % des terres émergées)[6],[7]. Il s'agit aussi du plus grand empire jamais créé au cours de l'histoire humaine[8]. Son héritage dans les domaines politique, juridique, linguistique et culturel est immense.
Il a son origine dans les comptoirs commerciaux, puis les colonies fondés par l'Angleterre à partir de la fin du XVIe siècle. Dès l'époque des grandes découvertes (XVe et XVIe siècles), le Portugal et l'Espagne fondent de vastes empires. L'Angleterre, la France et les Provinces-Unies commencent un peu plus tard à établir des colonies et comptoirs commerciaux en Amérique et en Asie[9]. L'Empire britannique s'établit notamment en Amérique du Nord, dans les Treize Colonies, alors que la France y contrôle le Canada et la Louisiane. Comme les autres empires coloniaux européens, l'Empire britannique pratique l'esclavage, cause de la déportation de près de 3,5 millions d'Africains vers l'Amérique anglaise dans le cadre du commerce triangulaire.
En 1763, à la suite de la guerre de Sept Ans, les Anglais s'emparent du Canada et évincent les Français de l'Inde, qui devient ensuite la principale colonie britannique. Mais en 1783, ils perdent les Treize colonies, soutenues par la France, qui deviennent les États-Unis (toujours esclavagistes) en 1787. Le Royaume-Uni interdit la traite des Noirs en 1808, pour ses ressortissants comme pour ceux des autres pays, et abolit l'esclavage dans l'Empire en 1833.
À la suite de la défaite de la France de Napoléon en 1814-1815, la Grande-Bretagne devient la première puissance mondiale et, au cours du XIXe siècle, étend ses possessions dans le monde entier, principalement en Afrique, en Asie et dans le Pacifique, concurrencée cependant par la France qui crée un nouvel empire colonial en Afrique et en Indochine. La Grande-Bretagne accorde des degrés divers d'autonomie aux colons d'origine européenne dans certaines colonies (Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud) : c'est le système des dominions, caractérisé par le self-governement.
La montée en puissance économique de l'Allemagne et des États-Unis à la fin du XIXe siècle remet en cause la domination britannique sur le monde. Les tensions entre la Grande-Bretagne et l'Allemagne sont une des causes de la Première Guerre mondiale, au cours de laquelle le Royaume-Uni fait largement appel à son empire. Bien que vainqueur, le Royaume-Uni sort affaibli du conflit, de même que la France. Dans l'entre-deux-guerres, leurs empires coloniaux commencent à être ébranlés par des mouvements indépendantistes dont certains sont très puissants (le Parti du Congrès en Inde, notamment, avec Gandhi et Nehru).
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, l'armée coloniale anglaise d'Asie du Sud-Est est vaincue par celle du Japon, qui occupe plusieurs colonies, ce qui affaiblit encore le prestige britannique. Dans un discours à l'université de Zurich du , Winston Churchill prône la formation d'« un genre d'« États-Unis d'Europe » », mais sans le Royaume-Uni[pas clair].
Dès 1947, le gouvernement travailliste au pouvoir depuis 1945 à Londres accorde l'indépendance à l'Inde britannique, qui se divise entre deux États, l'Inde et le Pakistan. Les autres colonies deviennent indépendantes au cours des décennies suivantes. Le terme du processus de décolonisation pour le Royaume-Uni est la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997, date prévue par le traité sino-britannique à l'origine de cette colonie.
À l'heure actuelle, quatorze territoires restent sous souveraineté britannique. La plupart des anciennes colonies font partie du Commonwealth, association libre d'États souverains. Quinze de ces États (Canada, Australie, etc.) conservent le monarque britannique comme chef d'État en tant que royaumes du Commonwealth. Une exception notable : le dominion d'Afrique du Sud, qui afin de pouvoir pratiquer librement sa politique d'apartheid, coupe totalement les liens avec la métropole en 1961 en proclamant la République.
Durant cette période, l'Angleterre et l'Écosse sont des royaumes séparés.
Les expéditions de Jean Cabot (1497-1498)
En 1496, à la suite des succès outre-mer des Espagnols (arrivée de Christophe Colomb dans les Caraïbes en 1492, qu'il identifie à des îles inconnues des « Indes ») et des Portugais (découverte du cap de Bonne-Espérance en 1488), le roi d'Angleterre Henri VII charge Jean Cabot d'explorer l'Atlantique Nord afin de découvrir une route vers les Indes[10].
Cabot quitte l'Angleterre en 1497 et atteint les côtes de Terre-Neuve, croyant comme Christophe Colomb, avoir atteint l'Asie[11], sans essayer d'établir une colonie. Cabot lance une nouvelle expédition l'année suivante, mais disparait en mer[12], sans qu'une suite soit donnée à cet échec.
Ce n'est que sous le règne d'Élisabeth Ire que les expéditions maritimes reprennent[13].
Le règne d'Élisabeth (1558-1603)
Le début du règne d'Élisabeth (1533-1603) en Angleterre est très proche du début de celui de Philippe de Habsbourg (1527-1598), fils de Charles Quint, aux Pays-Bas (1555), puis en Espagne (1556), où il règne sous le nom de Philippe II.
À cette date, l'Espagne est solidement implantée en Amérique (Caraïbes, Mexique, Pérou) ; le Portugal a établi des comptoirs commerciaux et des forts sur les côtes d'Afrique, du Brésil et des Indes orientales ; la France est présente le long du fleuve Saint-Laurent, dans ce qui va devenir la Nouvelle-France[14].
En 1562, la Couronne britannique autorise les corsaires John Hawkins et Francis Drake à mener des attaques contre les navires négriers portugais le long de la côte de l'Afrique du Nord[15].
Deux échecs : Gilbert à Terre-Neuve (1583) et Raleigh en Caroline (1584)
En 1578, Élisabeth Ire missionne par lettres patentes Humphrey Gilbert pour explorer les territoires[16] d'Amérique du Nord dans le but d'y établir une colonie, mais l'expédition échoue avant même d'avoir franchi l'océan Atlantique[17],[18].
Mais il repart quelques années plus tard et, en 1583, débarque à Terre-Neuve dont il revendique la possession au nom de la couronne anglaise, sans laisser de colons sur place. Il ne survit pas au voyage de retour.
Élisabeth accorde alors des lettres patentes au demi-frère de Gilbert, Walter Raleigh (1584). Celui-ci fonde la colonie de Roanoke, sur la côte de l'actuelle Caroline du Nord, mais le manque de provisions entraîne l'échec de la colonie[19].
La guerre anglo-espagnole (1585-1604)
Les relations entre l'Angleterre et l'Espagne se tendent ensuite en relation avec l'insurrection des Pays-Bas contre Philippe II commencée en 1568, surtout après la création des Provinces-Unies en 1581, par l'acte de La Haye. C'est la reprise d'Anvers par les troupes espagnoles (17 août 1585) qui pousse l'Angleterre protestante à s'allier avec les Provinces-Unies (aussi protestantes) par le traité de Sans-Pareil, signé dès le 10 août 1585, début d'une guerre anglo-espagnole qui va durer jusqu'en 1604. Élisabeth en effet ne veut pas que Philippe reprenne le contrôle des sept provinces du nord des Pays-Bas. L'antagonisme anglo-espagnol atteint son apogée avec l'expédition de l'Armada de 1588, qui est une défaite pour Philippe II.
Tout en intervenant directement aux Pays-Bas en y envoyant un corps expéditionnaire et son ami Robert Dudley, Élisabeth Ire autorise les attaques contre les ports espagnols en Europe ou en Amérique et contre les convois de galions transportant les richesses du Nouveau Monde vers l'Espagne[20]. L'Angleterre protestante est maintenant ennemie de l'Espagne catholique[10]
Au même moment, des écrivains comme Richard Hakluyt et John Dee, le premier à employer le terme d' « Empire britannique »[21], commencent à faire pression pour la fondation d'un empire anglais.
L'expression « Premier Empire britannique »[22] correspond à la période qui s'étend des premières implantations en Amérique sous le règne de Jacques Ier à la perte des Treize Colonies d'Amérique à la suite de la guerre d'indépendance des États-Unis (1776-1783).
L'avènement de Jacques Ier et la paix avec l'Espagne
En 1603, le roi d'Écosse Jacques VI monte sur le trône d'Angleterre sous le nom de Jacques Ier. C'est le début du processus qui aboutit en 1701 à la création du Royaume-Uni de Grande-Bretagne.
Jacques Ier est moins anticatholique et antiespagnol qu'Élisabeth et le royaume est las de la guerre, d'autant plus que les Provinces-Unies sont maintenant devenues une puissance coloniale (création de la VOC en 1602) dont l'existence n'est plus menacée.
En 1604, l'Angleterre et l'Espagne signent traité de Londres qui met fin aux hostilités.
Dorénavant en paix avec son principal rival, l'Angleterre se concentre sur la construction de son propre empire colonial au lieu de s'attaquer aux colonies étrangères[23] et sur la création de compagnies commerciales, dont la plus notable est la Compagnie britannique des Indes orientales (1600-1875), afin d'administrer les colonies et de développer le commerce avec la métropole.
Amérique, Afrique et commerce triangulaire
Les possessions dans les Caraïbes représentaient initialement les colonies anglaises les plus importantes et les plus lucratives[24] mais leur création avait été difficile. Une tentative pour implanter une colonie en Guyane en 1604 ne dura que deux ans et ne parvint pas à découvrir les gisements d'or qui avaient motivé sa création[25]. Les colonies de Saint Lucia (1605) et de Grenade (1609) déclinèrent rapidement, mais d'autres implantations à Saint Kitts (1624), Barbade (1627) et Niévès (1628) eurent plus de succès[26]. Elles adoptèrent rapidement le système des plantations de sucre, développé par les Portugais au Brésil, qui reposait sur l'esclavage[27]. Initialement, le commerce était assuré par des navires hollandais qui transportaient les esclaves d'Afrique et acheminaient le sucre américain jusqu'en Europe. Pour s'assurer que les importants revenus de ce commerce se fassent au profit des Anglais, le parlement décréta que seuls les navires anglais auraient le droit de commercer avec les colonies anglaises. Cela entraîna une série de guerres avec les Provinces-Unies tout au long du XVIIe siècle qui permirent à l'Angleterre de renforcer sa position en Amérique aux dépens des Pays-Bas[28]. En 1655, l'Angleterre annexa l'île de la Jamaïque appartenant à l'Espagne et, en 1666, elle s'implanta avec succès dans les Bahamas[29].
La première colonie anglaise permanente établie en Amérique fut créée à Jamestown en 1607 par John Smith sous l'impulsion de la Virginia Company. Les Bermudes furent revendiquées par l'Angleterre en 1609 lorsque le navire amiral de la Virginia Company y fit naufrage et, en 1615, elles furent accordées à la nouvelle Somers Isles Company[30]. La charte de la Virginia Company fut révoquée en 1624 et un contrôle direct de la Virginie fut assumé par la Couronne britannique, ce qui permit la fondation de la colonie de Virginie[31]. La colonie de Terre-Neuve fut créée en 1610 avec l'objectif d'implanter des peuplements permanents sur l'île[32]. En 1620, Plymouth fut créée en tant que refuge pour les puritains anglais[33]. D'autres colonies furent progressivement fondées le long de la côte atlantique : le Maryland en 1634, Rhode Island en 1636, le Connecticut en 1639 et la province de Caroline en 1663. Après la chute de Fort Amsterdam en 1664, l'Angleterre s'empara de la colonie hollandaise de Nouvelle-Néerlande, qui fut renommée New York. Cette annexion fut formalisée par le traité de Bréda dans lequel les Provinces-Unies échangeaient la Nouvelle-Néerlande contre le Suriname[34]. En 1681, la province de Pennsylvanie fut fondée par William Penn. Les colonies américaines étaient moins profitables que les colonies sucrières des Caraïbes mais elles disposaient de vastes étendues de terres et attiraient massivement les émigrants anglais[35].
En 1670, Charles II d'Angleterre accorda une charte à la Compagnie de la Baie d'Hudson qui lui offrait le monopole sur le commerce des fourrures dans la Terre de Rupert, une vaste étendue recouvrant une large part du Canada actuel. Les forts et les comptoirs commerciaux créés par la Compagnie étaient régulièrement la cible d'attaques des Français qui pratiquaient également le commerce des fourrures depuis la Nouvelle-France[36].
Deux ans plus tard, la Royal African Company fut créée et reçut le monopole de l'approvisionnement en esclaves des colonies anglaises dans les Caraïbes[37]. Dès le départ, l'esclavage était la base de l'Empire britannique dans les Indes occidentales. Jusqu'à son abolition en 1807, la Grande-Bretagne fut responsable de la déportation de près de 3,5 millions d'Africains vers l'Amérique, soit un tiers de tous ceux victimes du commerce triangulaire[38]. Pour faciliter ce commerce, des forts furent établis sur les côtes de l'Afrique de l'Ouest comme à l'île James, à Jamestown et à l'île de Bunce. Dans les Caraïbes britanniques, le pourcentage de Noirs dans la population passa de 25 % en 1650 à environ 80 % en 1780 et dans les Treize colonies, le nombre passa de 10 % à 40 % sur la même période (la majorité se trouvant dans les colonies du Sud)[39]. Pour les commerçants européens, le commerce était extrêmement profitable et devint la base de l'économie pour de nombreuses villes comme Bristol ou Liverpool, qui formaient le troisième angle du commerce triangulaire avec l'Afrique et l'Amérique. Les conditions épouvantables du voyage faisaient qu'un esclave sur sept mourait lors de la traversée de l'Atlantique[40].
En 1695, le Parlement écossais accorda une charte à la Compagnie écossaise des Indes et d'Afrique qui fonda une colonie dans l'isthme de Panama en 1698 avec l'ambition de construire un canal dans la région. Assiégée par les colons espagnols de Nouvelle-Grenade et décimée par la malaria, elle fut abandonnée deux ans plus tard. Le projet Darién fut un désastre économique pour l'Écosse et mit fin aux ambitions écossaises de rivaliser avec l'Angleterre dans l'aventure coloniale[41]. L'épisode eut également de larges répercussions politiques, car il convainquit les gouvernements écossais et anglais des mérites d'une union des deux pays au lieu d'une simple union des couronnes[42]. En 1707, l'Écosse et l'Angleterre étaient intégrées au sein de le Royaume-Uni de Grande-Bretagne après l'Acte d'Union.
Rivalité avec les Pays-Bas en Asie
À la fin du XVIe siècle, l'Angleterre et les Pays-Bas commencèrent à menacer le monopole portugais pour le commerce avec l'Asie en formant des sociétés par actions pour financer les expéditions. La Compagnie britannique des Indes orientales et la Compagnie néerlandaise des Indes orientales furent respectivement fondées en 1600 et en 1602. L'objectif principal était de participer au prospère commerce des épices en s'implantant là où elles étaient produites. Les trois nations furent quelque temps en compétition pour la suprématie commerciale dans la région[43], mais le système financier plus avancé des Pays-Bas[44] et leurs victoires dans les trois guerres anglo-néerlandaises du XVIIe siècle leur permirent d'obtenir une position dominante en Asie. Les hostilités cessèrent après la Glorieuse Révolution de 1688 qui vit Guillaume III d'Orange-Nassau, stathouder des Provinces-Unies, devenir roi d'Angleterre, d'Écosse, et d'Irlande. Un accord entre les deux nations laisse le commerce des épices aux Pays-Bas et le commerce des textiles à la Grande-Bretagne. Cependant, le commerce du thé et du coton supplante rapidement le commerce des épices et en 1720, la Compagnie anglaise, aidée par la puissante Royal Navy, commence à prendre le dessus sur la Compagnie néerlandaise[44].
Lutte mondiale contre la France
Au début du XVIIIe siècle, avec la stagnation de l'Empire espagnol et le déclin de la puissance hollandaise, le Royaume-Uni devenait la puissance coloniale dominante. Néanmoins, la France fut sa grande rivale tout au long du siècle[45].
La mort de Charles II d'Espagne en 1700 et sa succession par Philippe d'Anjou, un petit-fils de Louis XIV de France, laissait présager une unification de l'Espagne, de la France et de leurs colonies respectives, une possibilité inacceptable pour l'Angleterre et les autres puissances européennes[46]. En 1701, l'Angleterre, le Portugal et les Pays-Bas s'allièrent au Saint-Empire romain germanique contre la France et l'Espagne lors de la guerre de Succession d'Espagne qui dura jusqu'en 1714. Lors du traité d'Utrecht, qui mit fin à la guerre, Philippe renonça à ses droits de succession au trône de France[46]. L'Angleterre reçut Gibraltar et Minorque de la part de l'Espagne, l'Acadie de la part de la France et sa domination sur Terre-Neuve fut renforcée. De plus, la Grande-Bretagne obtint le monopole sur l'asiento qui désigne la fourniture d'esclaves à l'Amérique latine. Gibraltar, qui reste un territoire britannique aujourd'hui, devint une base navale stratégique et permit au Royaume-Uni de contrôler l'entrée et la sortie de la Méditerranée[47].
La guerre de Sept Ans, qui débuta en 1756, fut le premier conflit d'envergure mondiale, car les combats eurent lieu en Europe, en Inde et en Amérique du Nord. Le traité de Paris de 1763 eut des conséquences immenses pour le futur de l'Empire britannique. En Amérique du Nord, la France abandonna ses revendications sur la Terre de Rupert[36], céda la Nouvelle-France (et une importante population francophone) à la Grande-Bretagne et la Louisiane à l'Espagne. L'Espagne céda la Floride à la Grande-Bretagne. En Inde, la guerre carnatique laissait seulement à la France le contrôle de ses comptoirs commerciaux (mais avec des restrictions militaires) et surtout mettait fin aux espoirs français de dominer le sous-continent[48]. La défaite de la France et la destruction de son empire colonial à la suite de la guerre de Sept Ans firent de la Grande-Bretagne la première puissance maritime au monde[49].
Règne de la Compagnie en Inde
Durant son premier siècle d'existence, la Compagnie britannique des Indes orientales se concentra sur le commerce avec le sous-continent indien, car elle n'était pas en position de rivaliser avec le puissant Empire moghol qui lui avait accordé des droits commerciaux en 1617[50]. La situation évolua au XVIIIe siècle avec le déclin des Moghols et la Compagnie britannique des Indes orientales affronta son équivalent français, la Compagnie française des Indes orientales durant les guerres carnatiques lors des années 1740 et 1750. La bataille de Plassey de 1757, qui vit la victoire des Britanniques menés par Robert Clive sur le Bengale et ses alliés français, permit à la Compagnie de devenir la puissance militaire et politique dominante en Inde[51]. Dans les décennies qui suivirent, elle s'empara progressivement de nombreux territoires qu'elle administrait soit directement soit par l'intermédiaire des dirigeants locaux. Elle organisa sa propre armée principalement composée de Cipayes indiens[52]. L'Inde britannique devint finalement la plus profitable des possessions britanniques, le « joyau de la couronne », et permit au Royaume-Uni de s'élever au rang de plus puissante nation au monde[53].
Perte des treize colonies américaines
Au cours des années 1760 et 1770, les relations entre la Grande-Bretagne et les Treize Colonies se détériorèrent en particulier du fait de la volonté du parlement britannique de taxer les colons américains sans leur accord[54]. En effet, les colons n'étaient pas représentés au parlement de Westminster. Le mécontentement déclencha la révolution américaine et la guerre d'indépendance des États-Unis en 1775. L'année suivante, les colons proclamèrent leur indépendance. Avec l'aide de la France, de l'Espagne et des Pays-Bas, les États-Unis gagnèrent la guerre en 1783.
La perte des Treize colonies, à l'époque la possession la plus peuplée de la Grande-Bretagne, est considérée par les historiens comme l'événement marquant la transition entre le « premier » et le « second » empire[55] au cours de laquelle le Royaume-Uni se détourne de l'Amérique au profit de l'Asie, de l'Afrique et du Pacifique. Dans son ouvrage La Richesse des Nations, publié en 1776, l'économiste Adam Smith avançait que les colonies étaient superflues et que le libre-échange allait remplacer les politiques mercantilistes qui avaient caractérisé la première période de l'expansion coloniale[49],[56]. L'augmentation du commerce entre les États-Unis et le Royaume-Uni après 1783 semblait confirmer l'idée de Smith selon laquelle le contrôle politique n'était pas nécessaire au succès économique[57],[58]. Les tensions entre les deux nations s'aggravèrent toutefois lors des guerres napoléoniennes, car la Grande-Bretagne tentait de couper le commerce américain avec la France et arraisonnait les navires américains à la recherche de déserteurs. Les États-Unis déclenchèrent la guerre de 1812, mais aucun des deux camps ne parvint à prendre l'ascendant sur l'autre. Le traité de Gand de 1815 confirma donc les frontières d'avant-guerre[59].
Les événements en Amériques influencèrent la politique britannique dans la province de Québec où entre 40 000 et 100 000[60] loyalistes avaient fui après la perte des Treize colonies[61]. Les 14 000 loyalistes qui s'installèrent dans les vallées de la Sainte-Croix et du Saint-Jean, faisant alors partie de la Nouvelle-Écosse, étaient mécontents d'être gouvernés depuis le gouvernement provincial de Halifax. Londres détacha alors le Nouveau-Brunswick de la Nouvelle-Écosse en 1784 pour en faire une colonie séparée[62]. L'Acte constitutionnel de 1791 créait les provinces du Haut-Canada (principalement anglophone) et du Bas-Canada (principalement francophone) pour apaiser les tensions entre les deux communautés et implanter un système de gouvernement similaire à celui utilisé en Grande-Bretagne avec l'intention de renforcer l'autorité impériale et de ne pas laisser une sorte de contrôle populaire du gouvernement qui avait été accusé d'avoir mené à la révolution américaine[63].
Exploration du Pacifique
Depuis 1718, la déportation dans les colonies américaines était la peine pour divers actes criminels en Grande-Bretagne et environ un millier de condamnés étaient exilés en Amérique chaque année[64]. À la suite de l'indépendance des Treize colonies, le gouvernement britannique se tourna vers l'Australie[65]. La côte occidentale de l'Australie avait été explorée pour la première fois par l'explorateur hollandais Willem Janszoon en 1606 et fut nommée Nouvelle-Hollande par la Compagnie néerlandaise des Indes orientales[66] mais aucune tentative de colonisation ne fut entreprise. En 1770, James Cook explora la côte orientale de l'Australie lors d'un voyage scientifique dans le Pacifique sud et revendiqua la Nouvelle-Galles du Sud au nom du Royaume-Uni[67]. En 1778, Joseph Banks, le botaniste de l'expédition de Cook, convainc le gouvernement britannique de la possibilité d'établir une colonie pénitentiaire à Botany Bay et les premiers condamnés arrivèrent en 1788[68]. La Grande-Bretagne continua à exiler des condamnés en Nouvelle-Galles du Sud jusqu'en 1840[69]. Les colonies australiennes devinrent rentables grâce aux exportations de laine et d'or[70]. Les ruées vers l'or eurent principalement lieu dans la colonie de Victoria et firent de la capitale Melbourne l'une des villes les plus riches du monde[71] et la deuxième plus grande ville de l'Empire britannique après Londres[72].
Durant son voyage, Cook explora également la Nouvelle-Zélande, explorée pour la première fois par l'explorateur hollandais Abel Tasman en 1642. Cook revendiqua l'île du Nord et l'île du Sud au nom de la Couronne britannique respectivement en 1769 et en 1770. Initialement, les interactions entre les indigènes maoris et les Européens se limitèrent à l'échange de biens. Les implantations européennes s'étendirent rapidement durant les premières décennies du XIXe principalement dans l'île du Nord. En 1839, la Compagnie de Nouvelle-Zélande annonça son intention d'acheter de larges bandes de terres et d'établir des colonies en Nouvelle-Zélande. Le , le capitaine William Hobson et environ quarante chefs maoris signent le traité de Waitangi qui est considéré comme l'acte fondateur de la Nouvelle-Zélande[73],[74]. Cependant, les différentes interprétations du texte suivant les versions britanniques ou maories[75] entraînèrent des tensions qui culminèrent lors des guerres maories et le traité reste encore aujourd'hui un sujet de débat[76].
Guerre avec la France napoléonienne
Le Royaume-Uni investit des ressources considérables pour vaincre la France napoléonienne, mais en vain. Le Royaume-Uni organise de nombreuses coalitions qui se font écraser. Incapable de rivaliser avec la puissance française en Europe continentale, la Grande-Bretagne se concentra sur le contrôle des mers. Les ports français furent mis sous blocus par la Royal Navy qui remporta une victoire décisive sur la flotte franco-espagnole à Trafalgar en 1805. Les colonies des autres puissances européennes furent occupées, dont celles des Pays-Bas qui avaient été annexés par Napoléon Ier en 1810. La France fut finalement battue par la 6e coalition des armées européennes en 1815[77]. Les traités de paix furent à nouveau en faveur de la Grande-Bretagne : la France cédait les îles Ioniennes, l'île Maurice, Sainte-Lucie et Tobago ; l'Espagne cédait Trinidad ; les Pays-Bas abandonnaient la Guyane, la Colonie du Cap et Ceylan et l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem ne recouvre pas Malte. De son côté, le Royaume-Uni rendait la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et La Réunion à la France et Java et le Suriname aux Pays-Bas[78].
Abolition de l'esclavage
Selon l'historienne Aline Helg, plusieurs événements ont conduit à l'abolition de l'esclavage : « il y a d’abord la grande révolution haïtienne (1791-1804), celle qui a secoué toutes les puissances coloniales, et qui fait peur à tout le monde ». Dans la population européenne, l’idée qu’il faut mieux traiter les esclaves progresse. Sous la pression du mouvement abolitionniste, le gouvernement britannique adopte le Slave Trade Act de 1807 qui met fin au commerce des esclaves dans l'Empire[79].
En 1815, le Parlement de Londres décide d’établir un registre officiel des esclaves. « À chaque avancée permise par Londres, il y a une forte résistance des planteurs. Avec toujours Haïti en toile de fond… » Les révoltes d'esclaves à la Barbade (1819) et en Jamaïque (1832) et leur répression sanglante troublent l'opinion publique en métropole. Le mouvement abolitionniste de masse se lève et des pétitions sont signées par des centaines de milliers de personnes, principalement des ouvriers[79].
Le Slavery Abolition Act de 1833 met fin à l'esclavage dans l'Empire britannique à l'exception de Sainte-Hélène, de Ceylan et des territoires administrés par la Compagnie britannique des Indes orientales même si ces exemptions furent par la suite supprimées. D'après l'Acte, les esclaves étaient totalement émancipés après une période d'« apprentissage » de 4 à 6 ans, au cours de laquelle ils ont obligation de continuer à travailler pour leur maître, lequel bénéficie également d'une indemnisation[80].