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organisme savant français faisant autorité sur les questions relatives à la langue française De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'Académie française, fondée en et officialisée en par le cardinal de Richelieu, est une institution culturelle française dont la mission est de « contribuer à titre non lucratif au perfectionnement et au rayonnement des lettres » et a pour fonction de tenir à jour un dictionnaire de référence du français, et d'approuver la publication au Journal officiel d'équivalents francophones de termes techniques étrangers dans la langue française[2]. Elle se compose de quarante membres élus par leurs pairs, et est la première des cinq académies de l'Institut de France.
« À l'immortalité » |
Fondation |
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Type | |
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Forme juridique |
Personne morale de droit public à statut particulier |
Domaine d'activité | |
Objectif |
« Veiller sur la langue française et accomplir des actes de mécénat. » |
Siège | |
Pays | |
Langue | |
Langue de travail |
Membres |
40 membres élus par leurs pairs |
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Fondateur | |
Secrétaire perpétuel | |
Protecteur | |
Branche | |
Affiliation | |
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Annuaire du service public |
La mission qui lui est assignée à l’origine, et qui sera précisée par lettres patentes de Louis XIII le , est de travailler à « donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences ». Dans cet esprit, elle compose un Dictionnaire de l'Académie française, dont la première édition est publiée en 1694 et la neuvième est en cours d'élaboration. Elle attribue également des prix littéraires, dont le plus renommé est le Grand prix de littérature de l'Académie française.
L'Académie française rassemble des personnalités qui ont illustré la langue française : poètes, romanciers, dramaturges, critiques littéraires, philosophes, historiens, scientifiques, et, par tradition, des militaires de haut rang, des hommes d’État et des dignitaires religieux.
Il n'existe aucune condition de titres ou de nationalité pour entrer dans la Compagnie, sinon celle d'avoir illustré la langue française.
L'utilité de l'Académie française, qui n'a plus d'autorité normative mais seulement morale aujourd'hui, est parfois contestée[2]. Sa légitimité est aussi remise en question[3] : un seul linguiste a compté parmi les membres (qui sont pour la plupart écrivains), Gaston Paris, mort en 1903[4]. Les critiques concernent également l'éthique de l'institution, qui offre de nombreux avantages à ses membres[5].
Les origines de l'Académie se trouvent dans les réunions informelles d'un groupe littéraire, le « cercle Conrart », qui se rassemblait depuis 1629 au numéro 135 de la rue Saint-Martin, domicile de Valentin Conrart, protestant calviniste et néanmoins conseiller de Louis XIII et habitué de l'hôtel de Rambouillet où se rencontraient déjà ces hommes de lettres. Ces réunions littéraires secrètes (comme auparavant l’Académie de musique et de poésie fondée en 1570 par Jean-Antoine de Baïf et Joachim Thibault de Courville sous le règne de Charles IX et qui, tout en restant secrète, devient en 1574 l’Académie du palais sous Henri III) inspirent à Richelieu, dont les idées prennent un caractère de grandeur, le projet de créer l'Académie française en transformant ces réunions en une compagnie littéraire sous l'autorité royale, prenant pour modèle l’Accademia della Crusca fondée à Florence en 1582 et ayant déjà publié son Vocabolario en 1612[6]. Les registres des réunions sont tenus par Conrart dès le [7],[8].
Les statuts sont élaborés durant toute l'année 1634[9], statuts à caractère prescriptif visés par le Cardinal en 1635[10]. Conrart en dresse les lettres patentes signées par Louis XIII le (date traditionnellement attribuée pour la naissance officielle de l'Académie française)[1] et enregistrées par le Parlement de Paris en 1637[11]. Les statuts et règlements sont signés le [12]. Treize nouveaux membres, appelés jusqu’en 1636 du nom d’« Académistes » (« académiciens » à partir du ), sont admis à siéger avec le groupe initial des neuf membres. Valentin Conrart en devient le premier secrétaire perpétuel de 1634 à 1675, Richelieu est nommé « père et protecteur » de ces lettrés au départ quelque peu rétifs (depuis le protectorat de Louis XIV, chaque chef de l'État français demeure le protecteur de l'Académie, approuvant ou non l'élection d'un membre)[13]. Un des premiers travaux de cette Académie est d'arbitrer la querelle entre Georges de Scudéry et Pierre Corneille concernant Le Cid. En 1637, sur l'insistance de Richelieu, Jean Chapelain rédige Les sentiments de l'Académie Française sur la tragi-comédie du Cid[14],[15].
Le livre Histoire de l'Académie françoise[16] (premier volume paru en 1653) écrit par un de ses membres, Paul Pellisson (le second de l'abbé d'Olivet relatant son histoire est paru en 1729), rédigé à partir des registres de l'Académie française et sous l'influence des académiciens (d'autant plus que Pellisson souhaite intégrer la compagnie), est la source unique sur la fondation de l'Académie. Pellisson considère qu'elle n'a aucune finalité savante — comme l'académie de Baïf fondée en 1570 et l'académie de Mersenne — ou finalité politique — comme l'académie des frères Dupuy[17] —, mais son récit omet que le cercle Conrart réunit des hommes de plume, de grands aristocrates et a aussi pour vocation de s'échanger des informations pour offrir au groupe une position privilégiée sur l'espace socio-politique de l'époque[18]. De plus, l'Académie donnant son avis sur les œuvres littéraires (voir son intervention dans la « querelle du Cid »), Richelieu y voit un moyen de contrôle sur la vie intellectuelle et littéraire française. Dans sa volonté de rassembler, Richelieu veut que la langue française soit l'affaire des représentants des divers domaines du savoir (ecclésiastiques[N 1], militaires — le premier est le duc Armand de Coislin en 1652 —, diplomates, puis écrivains et philosophes — le premier est Montesquieu en 1727 — sous Louis XV qui menace de supprimer l'Académie qui prend son indépendance grâce aux Lumières) et décide que l'Académie s'ouvre à quarante membres égaux et indépendants, donc qu'elle ne soit pas subventionnée[19].
Le caractère officiel de cette compagnie de « beaux esprits » étant établi, elle se réunit d’abord chez tel ou tel de ses membres, puis chez le chancelier Pierre Séguier, rue du Bouloi, à partir de 1639. Elle est hébergée à la mort de Richelieu en 1642 par Anne d'Autriche grâce à l'intervention de l'académicien Vincent Voiture, interprète de la reine mère[20], sur les conseils de Colbert elle est transférée au Louvre à partir de 1672.
En 1694 paraît la première édition du Dictionnaire de l'Académie française.
En 1793, par décret daté du , la Convention supprime toutes les académies royales (« royaume des lettrés, titrés, mitrés » selon la formule de Chamfort), y compris l'Académie française, et confirme l'interdiction d'élire de nouveaux membres pour remplacer ceux décédés. Pendant la Terreur, l'abbé Morellet sauve les archives de l'Académie en les cachant chez lui. En 1795, par décret daté du , ces Académies sont remplacées par une seule entité : l'Institut de France, dont la loi Daunou arrête l'organisation[N 2].
En 1803, par arrêté du 3 pluviôse an XI (), le Premier consul Bonaparte décide de restaurer les anciennes académies, mais simplement comme classes (divisions) de l'Institut de France. La seconde « classe de langue et littérature françaises » correspond de facto à l'ancienne Académie française. Bonaparte avait en 1800 opposé un refus à son frère Lucien, alors ministre de l'Intérieur et rêvant d'être académicien, qui lui avait suggéré de restaurer l'Académie[N 3].
En 1805, l'Académie s'installe enfin au collège des Quatre-Nations — devenu Institut de France en 1795 —, où elle demeure toujours[21].
Le patriotisme issu de la Première Guerre mondiale favorise l'élection de plusieurs maréchaux, dont le premier est le maréchal Lyautey en 1912.
Sous l'Occupation, certains membres de l'Académie s'engagent dans la collaboration (Charles Maurras, Abel Bonnard, Abel Hermant, et le maréchal Pétain). Élu provisoirement secrétaire perpétuel en 1942, Georges Duhamel fait suspendre les élections, comme en 1790, évitant ainsi la subordination de l'Académie au régime de Vichy[22]. Une légende veut que François Mauriac ait été l'âme de la Résistance académique. À la Libération, le monde intellectuel est dans les mains du Comité national des écrivains qui est actif dans l'Épuration et souhaite supprimer l'Académie. Georges Duhamel défend avec succès la cause de l'institution auprès du général de Gaulle, la loi d'indignité nationale prévoyant que toute personne frappée d'indignité nationale et appartenant à un corps constitué soit automatiquement exclue, excluant de fait les collaborateurs de l'Académie.
L'Académie s'est longtemps montrée très réticente à permettre à des femmes de la rejoindre. En 1980, l'historien Pierre Gaxotte va jusqu'à affirmer : « Si on élisait une femme, on finirait par élire un nègre... » La majorité de ses collègues partageait cette position, sans pour autant l'exprimer aussi crûment. Cette même année l'Académie a élu Marguerite Yourcenar, puis Léopold Sédar Senghor en 1983.
Dans les années 1980, l'institution refuse la féminisation des noms de métier, jugeant le genre féminin « discriminatoire »[23].
L'Académie retrouve sa pleine indépendance (politique et financière)[24] vis-à-vis de l'Institut de France par la loi de programme pour la recherche de 2006[19].
La création de l'Académie française s'inscrit dans la continuité de l'institution du français comme langue officielle de la nation, traduite en particulier par l'ordonnance de Villers-Cotterêts édictée par François Ier en 1539, dont les articles 110 et 111 sur la langue française sont toujours en vigueur. Son rôle est de contribuer à l'harmonisation de la langue française, pour qu'elle soit compréhensible par tous les Français et aussi par tous les Européens qui l'adoptent alors comme langue commune. L'Académie est donc garante de la précision de la langue française, en ayant pour objectif d'éviter qu’une confusion dans les mots n'entraîne une confusion dans les idées[25].
L’article 24 de ses Statuts précise que « la principale fonction de l’Académie sera de travailler avec tout le soin et toute la diligence possible à donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences ».
L'accomplissement de cette mission de normalisation de la langue française se traduit par trois principales actions :
L’article 26 des Statuts demande que soient composés « un Dictionnaire, une Grammaire, une Rhétorique et une Poétique sur les observations de l’Académie ». Le Dictionnaire a été et continue d'être édité, la Rhétorique et la Poétique n'ont jamais été publiés. Une première Grammaire de l'Académie française a été publiée en 1932. La rédaction a été dirigée par Abel Hermant, aidé de prêtes-plumes inconnus. Vivement critiquée, notamment par le linguiste Ferdinand Brunot dans son ouvrage Observations sur la grammaire de l'Académie française, l'Académie réagit en publiant une seconde édition corrigée et quelque peu augmenté dès l'année suivante[26],[27]. L'Académie a par ailleurs entrepris un projet de Dictionnaire historique de la langue française. En ont été publiés quatre tomes entre 1865 et 1894, mais le projet est resté inachevé sans aller au-delà de la lettre A.
L'Académie française exerce sa mission de normalisation de la langue en recueillant les us et coutumes et en les codifiant en lois sans se donner le droit d'en changer les dispositions, et en participant à la création de nouveaux mots dans les commissions de terminologie, mais elle s'est toujours défendue d'être la créatrice de la langue[21]. Toutefois, la langue étant vivante et donc en constante évolution, l'Académie est aussi parfois perçue comme une autorité déterminant le bon usage de la langue[28]. Cette autorité est concurrencée par les ministères français tels que celui de l'Éducation nationale qui a autorité pour définir les usages acceptés aux examens, par les autorités d'autres pays francophones tels que le Canada et son Office québécois de la langue française, très vigilant à l'usage des anglicismes, voire par une conception libérale qui donne une égale autorité linguistique à tous les éditeurs privés[réf. souhaitée].
En 2019, l'Académie met pour la première fois son Dictionnaire à disposition du public sur un site Internet dédié[29], en accès gratuit. Son ambition première est de rendre accessible sa dernière édition, la neuvième, en cours d'achèvement[30]. Ce site permet aussi de parcourir l'intégralité des neuf éditions du dictionnaire[31].
La seconde mission de l'Académie est l'illustration de la langue française. Elle est accomplie notamment à travers le mécénat, non prévu dans les statuts d'origine, qui procède de l'exécution des dons et legs qui lui ont été faits et ce dès l'Ancien Régime[N 5].
Chacun dans sa spécialité, les membres de l'Académie ont contribué par leurs ouvrages à l'illustration et au prestige de la langue définie par la Compagnie, tels que Corneille, Racine, La Fontaine ou Bossuet[32].
C'est en 1671 que pour la première fois sont attribués des prix par l'Académie : un prix d'éloquence et un prix de poésie[32].
L’Académie française décerne actuellement chaque année environ soixante prix littéraires, dont les dotations sont financées par des donateurs souvent en exécution de legs, parmi lesquels :
L’Académie attribue des subventions à des sociétés littéraires ou savantes, des œuvres de bienfaisance, des aides à des familles nombreuses, aux veuves, aux personnes défavorisées ou qui se sont distinguées par l’accomplissement d’actes de dévouement ainsi qu’un certain nombre de bourses d'études : Zellidja, Neveux, Corblin, Damade.
L'Académie française est une personne morale de droit public à statut particulier gérée par ses membres en assemblée[N 6], c'est-à-dire une institution publique centrale de l'État français.
Elle élit son secrétaire perpétuel qui, comme son nom l'indique, le reste jusqu'à son décès ou à sa démission. Cette permanence en fait le personnage le plus important de l'institution. Après la mort d'Hélène Carrère d'Encausse le , le poste a été confié à Amin Maalouf le .
Elle élit également, tous les trois mois, un président chargé de présider les séances.
D'après l'annotation des statuts et règlements de l'Académie française[N 7],[33], l'Académie comporte cinq commissions :
L’Académie française se compose de 40 membres élus par leurs pairs. Depuis sa fondation, elle a reçu en son sein plus de 700 membres (733 membres en 2019[35]). Elle rassemble des poètes, des romanciers, des dramaturges, des philosophes, des historiens, des médecins, des scientifiques, des ethnologues, des critiques d’art, des militaires, des hommes d’État et des hommes d’Église.
L'origine des fauteuils de l'Académie française est racontée ainsi par l'académicien Charles Pinot Duclos :
« Il n'y avait anciennement dans l'Académie qu'un fauteuil, qui était la place du directeur. Tous les autres académiciens, de quelque rang qu'ils fussent, n'avaient que des chaises. Le cardinal d'Estrées, étant devenu très infirme, chercha un adoucissement à son état dans l'assiduité à nos assemblées : nous voyons souvent ceux que l'âge, les disgrâces, ou le dégoût des grandeurs forcent à y renoncer, venir parmi nous se consoler ou se désabuser. Le cardinal demanda qu'il lui fût permis de faire apporter un siège plus commode qu'une chaise. On en rendit compte au roi Louis XIV, qui, prévoyant les conséquences d'une telle distinction, ordonna à l'intendant du garde-meubles de faire porter quarante fauteuils à l'Académie, et confirma, par là et pour toujours, l'égalité académique. La compagnie ne pouvait moins attendre d'un roi qui avait voulu s'en déclarer le protecteur[36]. »
En 1639, les académiciens passent de 39 à 40 fauteuils.
Surnommés « les immortels », les académiciens doivent ce surnom à leur devise « À l’immortalité ». Celle-ci figure sur le sceau donné à l’Académie par son fondateur, le cardinal de Richelieu, et vise à l'origine la langue française et non les académiciens. Rapidement, cette notion s'est étendue aux académiciens pour leur gloire posthume, l'immortalité littéraire étant conférée par le roi en échange de l'unification linguistique du royaume et son autonomisation par rapport à l'Église. À partir du XVIIIe siècle, les académiciens comme tous les écrivains développent une éthique qui ne se veut plus être au service du pouvoir mais gardent ce titre d'« immortels »[37].
La qualité d’académicien est une dignité inamovible. Celui qui se déclare démissionnaire n’est pas remplacé avant son décès : Pierre Benoit, Pierre Emmanuel et Julien Green en sont des exemples. Des exclusions peuvent être prononcées par l'Académie pour de graves motifs, notamment des motifs entachant l’honneur. Ces exclusions au cours de l’histoire ont été rarissimes. Plusieurs furent mises en œuvre après la Seconde Guerre mondiale pour faits de collaboration, à l'endroit de Philippe Pétain, Charles Maurras, Abel Bonnard et Abel Hermant. Les fauteuils de Pétain et Maurras ne furent pas pourvus avant leur mort, à l'inverse de ceux de Bonnard et Hermant, par mesure exceptionnelle[38].
Au premier acte (sc. II) de Cyrano de Bergerac, Edmond Rostand (qui entrera lui-même à l'Académie trois ans après la première de la pièce) se moque de cette « immortalité » en mettant dans la bouche d'un bourgeois nommant à son fils les spectateurs du théâtre de l'hôtel de Bourgogne :
c'est-à-dire une série d'académiciens de l'époque où se passe l'action, tombés dans un oubli total depuis lors.
Quand un fauteuil est laissé vacant par la mort de son titulaire, l'Académie déclare la vacance à l'issue d'un délai de décence de plusieurs mois, et une élection est alors organisée dans les trois mois qui suivent. Les candidatures sont déposées par les candidats avec un courrier adressé au secrétaire perpétuel, ou sont présentées par un ou plusieurs académiciens. Les aspirants à une élection peuvent déclarer leur candidature à la date de leur majorité et au-delà, sans restriction.
L'élection est effectuée à bulletins secrets, et requiert la majorité absolue des suffrages exprimés. Un quorum de 20 votants est fixé. Les votes blancs ne sont pas pris en compte pour l'établissement de la majorité absolue, à l'inverse des bulletins blancs marqués d'une croix[39].
L'élection ne devient définitive qu'après l'approbation du protecteur de l'Académie, le roi puis le président de la République, qui manifeste celle-ci en donnant audience au nouvel élu. C'est ainsi que l'élection de Paul Morand a été différée jusqu'en 1968, car le général de Gaulle s'y était jusqu'alors opposé en raison des postes occupés par l’intéressé sous le régime de Vichy.
Le nouvel élu est alors installé dans une cérémonie à huis clos. Une semaine après, il est officiellement reçu dans la Compagnie en habit vert, qu'il se sera fait confectionner. Au cours de cette cérémonie publique, il prononce un discours de remerciement où il fait l'éloge de son prédécesseur, auquel répond le directeur du trimestre où la vacance a été notifiée. Cette tradition remonte à Olivier Patru, reçu en 1640 :
« À sa réception, rapporte Pellisson, Patru prononça un fort beau remerciement dont on demeura si satisfait qu’on a obligé tous ceux qui ont été reçus depuis d’en faire autant. »
— René de La Croix de Castries, La Vieille Dame du Quai Conti[39].
L'habit des académiciens, avec bicorne, cape et épée, qu'ils revêtent lors des séances solennelles sous la Coupole, a été dessiné sous le Consulat. Grand amateur d'uniformes, Bonaparte avait d'abord pensé à un habit jaune, mais c'est un uniforme noir avec des broderies vertes en forme de rameaux d'olivier qui fut finalement choisi par une commission de trois membres : Houdon, Vincent et Chalgrin, sur un dessin attribué au peintre Jean-Baptiste Isabey.
Cet uniforme est commun à tous les membres de l’Institut de France.
Les femmes et les ecclésiastiques sont dispensés du port de l'uniforme et de celui de l'épée. Mmes de Romilly, Carrère d'Encausse, Delay, Veil, Sallenave, Bona et Cassin ont cependant opté pour l'« habit vert » lors de leur réception. Mme Carrère d'Encausse a été la première femme à porter l'épée, arme créée pour l'occasion par l'orfèvre géorgien Goudji. Les femmes élues ensuite ont opéré le même choix, à l'inverse de Jacqueline de Romilly, qui avait cependant reçu une broche symbolique après son élection à l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1975.
La première femme élue à l'Académie française est Marguerite Yourcenar, en 1980. Elle a été suivie par Jacqueline de Romilly en 1988 et Hélène Carrère d'Encausse en 1990, qui fut secrétaire perpétuel de l'institution jusqu'à son décès[40],[41], puis par d'autres. En 2019, l’Académie compte cinq femmes[42].
Le premier homme noir élu est Léopold Sédar Senghor, en 1983[43]. Il est suivi par Dany Laferrière en 2015[43].
La nationalité française n'est pas formellement une obligation pour être élu à l'Académie, rien n'étant prévu à ce sujet dans le règlement de l'institution. Plusieurs académiciens sont ainsi originaires d'autres pays que la France. Si la plupart d'entre eux ont été naturalisés avant leur élection — comme Joseph Kessel ou Eugène Ionesco —, certains ont été élus avec une autre nationalité — comme Julien Green. Peu de temps avant son élection en 1980, Marguerite Yourcenar, devenue citoyenne des États-Unis en 1947, avait repris la nationalité française. Des académiciens français sont également nés dans un pays étranger, sans toutefois avoir la nationalité de ce pays — comme Valéry Giscard d'Estaing, né en 1926 en Allemagne.
Année d'élection | Académiciens | Nationalités autres que française | Situation relative à la nationalité française |
---|---|---|---|
1881 | Victor Cherbuliez (1829-1899) | Suisse | Acquisition par naturalisation en 1880. Premier académicien ayant eu une nationalité étrangère. |
1894 | José Maria de Heredia (1842-1905) | Espagne | Né à Cuba, citoyen de l'Espagne, naturalisé français en 1893. |
1931 | Gal Maxime Weygand (1867-1965) | Belgique | Naturalisé français en 1888. |
1959 | Henri Troyat (1911-2007) |
Russie | Russe d'origine arménienne, naturalisé français en 1935. |
1962 | Joseph Kessel (1898-1979) | Russie | Né en Argentine, citoyen de Russie, naturalisé français en 1919. |
1970 | Eugène Ionesco (1909-1994) | Roumanie | Naturalisé français en 1950. |
1971 | Julien Green (1900-1998) |
États-Unis | Le président Georges Pompidou lui propose en 1972 la nationalité française, mais il décline la faveur. Premier académicien à n’avoir jamais possédé la nationalité française. |
1973 | Jean d'Ormesson (1925-2017) | Liban | A obtenu la nationalité libanaise en 1989 lors d'un séjour durant la guerre civile libanaise. |
1975 | Félicien Marceau (1913-2012) | Belgique | Naturalisé français en 1959. |
1980 | Marguerite Yourcenar (1903-1987) | États-Unis | Née en Belgique d'un père français, elle est naturalisée américaine en 1947 et renonce à sa nationalité française. Elle la recouvre en 1980[44]. Première femme élue à l'Académie. |
1983 | Léopold Sédar Senghor (1906-2001) | Sénégal | Indigène sujet français à sa naissance, puis pleinement citoyen français à partir de 1933 et enfin citoyen sénégalais à partir de 1960. Il ne possédait plus la nationalité française au moment de son élection. Premier Africain élu à l'Académie. |
1996 | Hector Bianciotti (1930-2012) | Argentine | Naturalisé français en 1981. |
1999 | René de Obaldia (1918-2022) | Panama | Né à Hong Kong de parents panaméens : père consul du Panama à Hong Kong et mère, née picarde, ayant perdu sa nationalité française par son mariage[45]. Lui-même, donc panaméen, arrivé en France en bas âge en 1919 avec sa mère, optant aussi pour la nationalité française à sa majorité, fin 1939 (malgré la conséquence d'être incorporé dans l'armée française)[46]. |
2002 | François Cheng (né en 1929) |
République de Chine | Naturalisé français en 1971. |
2005 | Assia Djebar (1936-2015) |
Algérie | Née en Algérie française, sujet colonial français puis citoyenne de l’Algérie à l'indépendance de celle-ci en 1962. Elle ne possédait plus la nationalité française au moment de son élection. |
2009 | François Weyergans (1941-2019) | Belgique | Né en Belgique d'un père belge et d'une mère française, possède donc la double nationalité. |
2011 | Amin Maalouf (né en 1949) |
Liban | Chrétien maronite réfugié en France en 1975, naturalisé français en 1981. |
2012 | Jules Hoffmann (né en 1941) |
Luxembourg | Naturalisé français en 1970, ce qui lui fit perdre sa nationalité luxembourgeoise. |
2013 | Michael Edwards (né en 1938) |
Royaume-Uni | Naturalisé français en 2003. |
2013 | Dany Laferrière (né en 1953) |
Haïti et naturalisé Canada |
Naturalisé canadien, il vit au Québec. Deuxième académicien après Julien Green à n'avoir jamais possédé la nationalité française. |
2016 | Andreï Makine (né en 1957) |
Union soviétique puis Russie | Naturalisé français en 1996 après avoir remporté le prix Goncourt. |
2020 | Maurizio Serra (né en 1955) |
Italie | Né au Royaume-Uni. Troisième académicien après Julien Green et Dany Laferrière à n’avoir jamais possédé la nationalité française. |
2021 | Mario Vargas Llosa (né en 1936) |
Pérou et naturalisé Espagne |
Né au Pérou et naturalisé espagnol. Prix Nobel de littérature en 2010. Possède la particularité de n’avoir jamais écrit d’œuvre en français. Quatrième académicien après Julien Green, Dany Laferrière et Maurizio Serra à n'avoir jamais possédé la nationalité française. |
2022 | Antoine Compagnon (né en 1950) |
Belgique | Né en Belgique de père français et de mère belge. Possède de fait la double nationalité. |
Cette liste recense les académiciens citoyens d’un pays autre que la France à un moment quelconque de leur vie (que cette nationalité soit par la naissance ou par la naturalisation et même s’ils ne l'avaient plus au moment de leur élection, leur entrée à l’Académie ou leur décès) :
L'âge moyen d'entrée à l'Académie, d'après les calculs du démographe Jacques Véron, était de 44 ans entre 1635 et 1757, de 50 ans pour les promotions de 1758 à 1878 et de 60 ans pour les promotions de 1880 à 1983[47]. L'âge moyen d'entrée des 19 académiciens élus entre 2005 et est de 68 ans[47]. Depuis 2010, l'âge limite d'entrée à l'Académie est de 75 ans à la date du dépôt de la candidature[48], mais une exception a été faite pour Mario Vargas Llosa.
Fauteuil | Membre | Nationalité | Date d'élection | Réception | ||
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Date | Discours | Réponse | ||||
1 | Claude Dagens | France | [*] | Florence Delay : [*] | ||
2 | Dany Laferrière | Canada Haïti |
[*] | Amin Maalouf : [*] | ||
3 | Vacant | |||||
4 | Jean-Luc Marion | France | [*] | Claude Dagens : [*] | ||
5 | Andreï Makine | France Russie |
[*] | Dominique Fernandez : [*] | ||
6 | Christian Jambet | France | ||||
7 | Jules Hoffmann | France | Yves Pouliquen : [*] | |||
8 | Daniel Rondeau | France | [*] | Danièle Sallenave : [*] | ||
9 | Patrick Grainville | France | [*] | Dominique Bona : [*] | ||
10 | Florence Delay | France |