roman de Léon Tolstoï De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Anna Karénine (en russe : Анна Каренина, Anna Karenina) est un roman de Léon Tolstoï paru en 1877 en feuilleton dans Le Messager russe. Il est considéré comme un chef-d'œuvre de la littérature. L'auteur y oppose le calme bonheur d'un ménage honnête formé par Lévine et Kitty Stcherbatskï aux humiliations et aux déboires qui accompagnent la passion coupable d'Alexis Vronski et d'Anna Karénine ; les premiers brouillons étaient d'ailleurs intitulés Deux mariages, deux couples[1].
Anna Karénine | |
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Auteur | Léon Tolstoï |
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Pays | Empire russe |
Genre | Roman |
Version originale | |
Langue | Russe |
Titre | Анна Каренина |
Éditeur | Rousky vestnik (Le Messager russe) |
Lieu de parution | Saint-Pétersbourg |
Date de parution | 1877 |
Version française | |
Éditeur | Hachette |
Lieu de parution | Paris |
Date de parution | 1885 |
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Paru en France pour la première fois en 1885[2], Anna Karénine marque l'entrée triomphale de la littérature russe dans la culture européenne[3], à condition d'ignorer Crime et Châtiment de Dostoïevski, publié en 1866.
Ce roman est tout d'abord paru sous forme de feuilleton dans le périodique Rousky vestnik (Le Messager russe ou Le Courrier russe), mais Tolstoï entra en conflit avec le rédacteur en chef Mikhaïl Katkov à propos du contenu du dernier épisode. Le roman ne parut donc dans son intégralité qu'à sa publication sous forme de livre. Le feuilleton connaît néanmoins un grand succès dans la Russie du XIXe siècle, certaines femmes du monde allant jusqu'à envoyer leurs domestiques à l'imprimerie afin de connaître la teneur des prochains épisodes[4].
Anna Karénine met en scène la noblesse russe, sur laquelle Tolstoï porte un regard critique. Le personnage d'Anna Karénine aurait été en partie inspiré de Maria Hartung (1832–1919), la fille aînée du poète Alexandre Pouchkine. Pour la fin tragique du roman, l’auteur s'est inspiré d’un fait divers : la maîtresse de son voisin Bibikov s’est jetée sous un train en ; il est allé voir le corps de la malheureuse[5].
En , Tolstoï commence l'écriture d'Anna Karénine. La rédaction en est achevée en [6] ; cependant, Tolstoï écrit l'épilogue en seulement[7],[8]. La publication du roman commence dans Le Messager russe en et se poursuit jusqu'en [6]. En , la direction de la revue, en désaccord avec l’auteur sur la fin de l’ouvrage, publie une note de la rédaction résumant la fin d’Anna Karénine. L’auteur fait publier séparément la fin de l’ouvrage. Le roman est publié pour la première fois en édition séparée en janvier 1878[6].
Le roman est divisé en huit parties et 239 chapitres. Son épigraphe est « « Je me suis réservé à la vengeance », dit le Seigneur. », tirée de Romains 12:19, qui cite à son tour Deutéronome 32:35. Le roman commence par les lignes suivantes devenues un principe :
Все счастливые семьи похожи друг на друга, каждая несчастливая семья несчастливая по-своему. Vse schastlivyye sem'i pokhozhi drug na druga, kazhdaya neschastlivaya sem'ya neschastliva po-svoyemu. Toutes les familles heureuses se ressemblent, mais chaque famille malheureuse l'est à sa façon.
Anna Karénine est une jeune femme mariée à Alexis Karénine, fidèle et mère d'un jeune garçon, Serioja. Anna Karénine se rend à Moscou chez son frère Stiva Oblonski. En descendant du train, elle croise le comte Vronski. Anna tombe amoureuse de Vronski, cet officier brillant, mais frivole. Elle lutte contre cette passion et finit pourtant par s'abandonner avec un bonheur coupable au courant qui la porte vers ce jeune officier. Puis Anna tombe enceinte. Se sentant coupable et profondément déprimée par sa faute, elle décide d'avouer son infidélité à son mari.
Elle songe un moment à abandonner mari et enfant et à fuir avec son amant. Mais une lettre de son mari parti en voyage, en réponse à son aveu, où il ne lui demande que de respecter les apparences, la décide à rester. La grossesse se déroule mal. Après avoir mis au monde une fille, Anna contracte la fièvre et risque de mourir. Elle envoie un télégramme à son mari, lui demandant de rentrer et de lui pardonner. Elle se repent et appelle la mort comme une libération pour tous. Ému par le remords de sa femme et sa mort imminente, Alexis consent à lui pardonner.
Puis quelque temps plus tard, une rencontre inopinée avec Vronski suffit à faire voler en éclats la décision d'Anna. Elle se jette dans ses bras et ils décident de fuir ensemble à l'étranger. C'est pour Anna un moment de joie et de délivrance. Ils passent leur lune de miel en Italie, mais peu à peu Vronski s’ennuie et regrette d’avoir abandonné sa carrière militaire. De retour en Russie, Anna et Vronski vivent en marge de la société. Ils suscitent à la fois admiration et réprobation d'avoir ainsi bravé les conventions de la haute société russe. La fortune de Vronski leur permet d'avoir une existence indépendante et ils parviennent à recréer autour d'eux une micro-société, en marge du grand monde. Mais Anna ne supporte pas d'avoir abandonné son enfant et trahi son mari.
Ce climat pesant provoque une incompréhension réciproque qui obscurcit leur union. Anna, en proie aux plus vifs tourments et prise dans un engrenage dont elle ne peut se délivrer, met fin à sa vie en se jetant sous un train.
En parallèle à leur aventure, Tolstoï brosse le portrait de deux autres couples : Kitty et Lévine, ainsi que Daria (dans le livre plus communément appelée Dolly) et Oblonski.
Kitty est une belle adolescente qui, à dix-huit ans, fait son entrée dans le monde. Lévine lui fait une demande en mariage en bonne et due forme, mais elle la repousse car elle est tombée amoureuse de Vronski. Ce dernier lui échappe lors d'un bal où il succombe à la fascination d'Anna. Kitty sombre dans la honte et la maladie. Elle va se soigner en faisant une cure en Allemagne.
Plusieurs mois après ce sinistre bal, Kitty rencontre à nouveau Lévine, auprès duquel elle ressent un mélange d'effroi et de bonheur. Elle se rend compte qu'elle n'a aimé que lui. Kitty et Lévine comprennent que le passé n'a été qu'une épreuve destinée à consolider leur amour. Ils décident de se marier. Lévine se met à étudier l'agronomie et travaille lui-même dans ses champs au grand étonnement de ses paysans afin de réformer la gestion de ses propriétés et accorder plus de droits à ses paysans.
Daria, épouse soumise et résignée, mais surtout épuisée par les tâches de la vie quotidienne, est la femme de Stiva Oblonski. Malgré son infidélité, Oblonski prodigue à sa femme des marques de tendresse réconfortantes. Daria est marquée par un doute permanent et se fait conseiller par Anna afin de sauver son couple.
Le personnage du banquier Boulganirov (inspiré en réalité du banquier juif Poliakov) dans Anna Karénine témoigne de l'antisémitisme présent dans l'ouvrage, selon l'historien Léon Poliakov[9],[10].
« Toutes les familles heureuses se ressemblent ; chaque famille malheureuse est malheureuse à sa façon »
« Les gens de son monde [celui de Vronski] divisent l'humanité en deux catégories opposées. La première, tourbe insipide, sotte et surtout ridicule, s'imagine que les maris doivent être fidèles à leur femme, les jeunes filles pures, les femmes chastes, les hommes courageux, fermes et tempérants, qu'il faut élever ses enfants, gagner sa vie, payer ses dettes, et autres fariboles : c'est le vieux jeu. La seconde au contraire - le « gratin » à laquelle ils se vantent tous d'appartenir, prise l'élégance, la générosité, l'audace, la bonne humeur, s'abandonne sans vergogne à toutes ses passions et se moque du reste. »
— Léon Tolstoï, Anna Karénine, première partie, chapitre 34[11].
Le roman a été adapté à maintes reprises au cinéma et à la télévision.
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