Polynôme homogène

En mathématiques, un polynôme homogène, ou forme algébrique, est un polynôme en plusieurs indéterminées dont tous les monômes non nuls sont de même degré total. Par exemple le polynôme ${\displaystyle X^{5}+2X^{3}Y^{2}+9XY^{4}}$ est homogène de degré 5 car la somme des exposants est 5 pour chacun des monômes ; les polynômes homogènes de degré 2 sont les formes quadratiques. Les polynômes homogènes sont omniprésents en mathématiques et en physique théorique.

Définitions

Soit ${\displaystyle K}$ un corps commutatif. Un polynôme homogène de degré ${\displaystyle d}$ en ${\displaystyle n}$ indéterminées est un polynôme de ${\displaystyle K[X_{1},\dots ,X_{n}]}$ qui est somme de monômes de degré ${\displaystyle d}$.

Caractérisation : un polynôme ${\displaystyle P}$ de ${\displaystyle K[X_{1},\dots ,X_{n}]}$ est homogène de degré ${\displaystyle d}$ si et seulement si^[1] ${\displaystyle P(XX_{1},...,XX_{n})=X^{d}P(X_{1},...,X_{n}).}$

L'implication directe provient essentiellement de la commutativité de la multiplication.

Démonstration de la réciproque

En regroupant les termes par degrés, ${\displaystyle P=\sum _{i=0}^{d}P_{i}}$, avec ${\displaystyle P_{i}}$ un polynôme homogène de degré i. L'hypothèse ${\displaystyle P(XX_{1},\ldots ,XX_{n})=X^{d}P(X_{1},\ldots ,X_{n})}$ se réécrit alors : ${\displaystyle \sum _{i=0}^{d}X^{i}P_{i}(X_{1},\ldots ,X_{n})-X^{d}P(X_{1},\ldots ,X_{n})=0,}$ soit ${\displaystyle X^{d}(P_{d}-P)+\sum _{i\neq d}X^{i}P_{i}=0}$. Ce polynôme est donc nul, en particulier ${\displaystyle P_{d}-P=0}$, ainsi ${\displaystyle P=P_{d}}$ est homogène de degré ${\displaystyle d}$.

La fonction polynomiale associée à un tel polynôme est donc homogène de degré d, c'est-à-dire que pour tous λ, x₁, … , x_n de ${\displaystyle K}$ on a : ${\displaystyle P(\lambda x_{1},...,\lambda x_{n})=\lambda ^{d}P(x_{1},...,x_{n}).}$La réciproque n'est alors vraie que si le corps est infini.

Structure

L'ensemble des polynômes homogènes de degré ${\displaystyle d}$ dans ${\displaystyle K[X_{1},\dots ,X_{n}]}$ forme un K-espace vectoriel. (En particulier, le polynôme nul est homogène de degré ${\displaystyle d}$, pour tout entier naturel ${\displaystyle d}$ ; c'est le seul polynôme homogène dont le degré n'est donc pas défini.)

Sa base canonique est l'ensemble des monômes

${\displaystyle X_{1}^{\alpha _{1}}X_{2}^{\alpha _{2}}...X_{n}^{\alpha _{n}}~\mathrm {o{\grave {u}}} ~\alpha _{1}+\alpha _{2}+...+\alpha _{n}=d.}$

Sa dimension est donc le nombre de d-combinaisons avec répétition de l'ensemble ${\displaystyle \{1,2,\dots ,n\}}$ :

${\displaystyle \Gamma _{n}^{d}={n+d-1 \choose d}.}$

Formes

Les formes algébriques généralisent les formes quadratiques au degré 3 et plus, et étaient aussi connues par le passé sous le nom de « quintiques ». Pour désigner le type d'une forme, il faut à la fois donner son degré et le nombre de variables ${\displaystyle n}$. Une forme est « sur » un corps ${\displaystyle K}$, si elle applique ${\displaystyle K^{n}}$ dans ${\displaystyle K}$.

Une forme ${\displaystyle f}$ à ${\displaystyle n}$ variables sur un corps ${\displaystyle K}$ « représente 0 » s'il existe un élément ${\displaystyle (x_{1},\dots ,x_{n})}$ dans ${\displaystyle K^{n}}$ tel que ${\displaystyle f(x_{1},\dots ,x_{n})=0}$ et qu'au moins l'un des ${\displaystyle x_{i}}$${\displaystyle (i=1,\dots ,n)}$ est non nul. Par exemple, une forme quadratique représente 0 si et seulement si elle n'est pas définie.

Une forme de degré ${\displaystyle d}$ est dite diagonale (en) si elle s'écrit ${\displaystyle a_{1}x_{1}^{d}+\cdots +a_{n}x_{n}^{d}}$.

Utilisation en géométrie algébrique

De même qu'une variété algébrique affine sur ${\displaystyle K}$ est le lieu d'annulation, dans un espace affine ${\displaystyle K^{n}}$, d'une famille de polynômes à ${\displaystyle n}$ variables à coefficients dans ${\displaystyle K}$, une variété projective sur ${\displaystyle K}$ est le lieu d'annulation, dans un espace projectif ${\displaystyle P_{n}(K)}$, d'une famille de polynômes homogènes à ${\displaystyle n+1}$ variables à coefficients dans ${\displaystyle K}$.

Par exemple, on peut définir une courbe algébrique affine dans ${\displaystyle K^{2}}$ comme le lieu d'annulation d'un polynôme à deux variables à coefficients dans ${\displaystyle K}$. Si l'on veut définir une courbe algébrique dans le plan projectif ${\displaystyle P_{2}(K)}$, on voudrait de même la définir comme le lieu d'annulation d'un polynôme ${\displaystyle P}$ à trois variables. Mais dans le plan projectif, (λx : λy : λz) = (x : y : z), pour tout ${\displaystyle \lambda \neq 0}$. On veut donc nécessairement que ${\displaystyle P(x,y,z)=0\Leftrightarrow P(\lambda x,\lambda y,\lambda z)=0}$, pour que le lieu d'annulation ne dépende pas du ${\displaystyle \lambda }$ choisi. C'est pour cela qu'on demande au polynôme ${\displaystyle P}$ d'être homogène.