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pays d'Amérique du Sud De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le Pérou, en forme longue la république du Pérou (en espagnol : Perú et República del Perú ( audio) ; en quechua : Piruw et Piruw Ripuwlika ; en aymara : Piruw et Piruwxa Ripuwlika), est un pays de l'ouest de l'Amérique du Sud. Il est bordé au nord par l'Équateur et la Colombie, à l'est par le Brésil, au sud-est par la Bolivie, au sud par le Chili, et au sud et à l'ouest par l'océan Pacifique. Le Pérou est un pays mégadivers avec des habitats allant des plaines arides de la région côtière du Pacifique à l'ouest aux sommets des montagnes des Andes s'étendant du nord au sud-est du pays à la forêt tropicale du bassin amazonien à l'est avec le fleuve Amazone[10]. Le Pérou compte 34 millions d'habitants[11] et sa capitale et plus grande ville est Lima. Avec 1,28 million de km2, le Pérou est le 20e plus grand pays du monde et le troisième d'Amérique du Sud.
République du Pérou
(es) República del Perú
(qu) Piruw Ripuwlika
(ay) Piruwxa Ripuwlika
Drapeau du Pérou |
Armoiries du Pérou |
Devise | en espagnol : Firme y feliz por la unión[1],[2] (« Fort et heureux par l'union »), non officielle |
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Hymne |
Himno nacional del Perú (« Hymne national du Pérou ») |
Fête nationale | |
· Événement commémoré |
Indépendance vis-à-vis de l'Espagne () |
Forme de l'État | République présidentielle |
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Présidente de la République | Dina Boluarte |
Président du Conseil | Gustavo Adrianzén |
Parlement | Congrès de la République |
Langues officielles | Espagnol, quechua et aymara[3] |
Capitale | Lima |
Plus grande ville | Lima |
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Superficie totale |
1 285 216 km2 (classé 21e) |
Superficie en eau | 0,4 % |
Fuseau horaire | UTC -5 |
Entité précédente | |
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Indépendance | Espagne |
Date |
Gentilé | Péruviens |
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Population totale (2020[4]) |
31 914 989 hab. (classé 44e) |
Densité | 25 hab./km2 |
PIB nominal (2022) |
240,346 milliards de $ + 6,95 %[5] |
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PIB (PPA) (2022) |
513,715 milliards de $ + 9,41 %[5] |
PIB nominal par hab. (2022) |
7 034,448 $ + 5,89 %[6] |
PIB (PPA) par hab. (2022) |
15 035,404 $ + 8,33 %[6] |
Taux de chômage (2022) |
9,3 % de la pop. active - 14,67 % |
Dette publique brute (2022) |
Nominale 329,204 milliards de S/ + 5,07 % Relative 34,364 % du PIB - 4,36 % |
Monnaie |
Sol (PEN ) |
IDH (2021) | 0,762[7] (élevé ; 84e) |
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IDHI (2021) | 0,635[7] (70e) |
Coefficient de Gini (2021) | 40,2 %[8] |
Indice d'inégalité de genre (2021) | 0,380[7] (90e) |
Indice de performance environnementale (2022) | 39,8[9] (101e) |
Code ISO 3166-1 |
PER, PE |
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Domaine Internet | .pe |
Indicatif téléphonique | +51 |
Organisations internationales | G24FPEG(observateur)APSCOOEIINBARCIRGroupe de CairnsG33 |
Le territoire péruvien abritait plusieurs cultures au cours des périodes antique et médiévale et possède l'une des plus longues histoires de civilisation de tous les pays, retraçant son héritage au 10e millénaire avant notre ère. Les cultures et civilisations précoloniales notables incluent la civilisation Caral-Supe (la plus ancienne civilisation des Amériques et considérée comme l'un des berceaux de la civilisation), la culture Nazca, les empires Huari et Tiwanaku, le royaume de Cuzco et l'empire Inca, le plus grand État connu des Amériques précolombiennes qui à son apogée a réussi à s'étendre sur 2 500 000 km2[12].
Son territoire est composé de paysages variés : les vallées, plateaux et hauts sommets des Andes se déploient à l'ouest vers le côte désertique, du nord au sud-est du pays et à l'est vers l'immense Amazonie. C'est l'un des pays avec la plus grande diversité biologique[13] et le plus de ressources minérales de la planète[14]. Il englobe une section de la forêt amazonienne et du Machu Picchu, une ancienne ville inca aux hauteurs des Andes. La région autour du Machu Picchu, y compris la Vallée Sacrée, le Chemin de l'Inca et la ville coloniale de Cuzco, est riche en sites archéologiques.
Au siècle suivant, la conquête du Pérou a eu lieu, après quoi le territoire a été configuré comme le vice-royauté du Pérou de l'Empire espagnol articulé autour de l'exploitation de l'argent et de l'or avec le travail forcé des indigènes et des esclaves africains dans les mines et les fermes. Bien qu'ils aient également laissé un héritage culturel, représenté dans l'art et l'architecture baroques. En 1551, la couronne espagnole fonda officiellement l'Université nationale principale de San Marcos à Lima, la première et la plus ancienne université du Nouveau Monde[15]. Les Réformes bourboniennes du XVIIIe siècle ont donné lieu à divers soulèvements contre l'autorité coloniale, dont le plus grand représentant fut la Révolte de Túpac Amaru II[16].
Le sol est la monnaie nationale péruvienne depuis 1991, en remplacement de l’inti[17],[18]. La Constitution instaurée en 1993 sous le régime autoritaire d'Alberto Fujimori oriente l'économie péruvienne vers le néolibéralisme[19]. Le Pérou est l'un des pays les plus inégalitaires au monde, 1 % de la population détenant 30 % des richesses[19].
Le Pérou est un pays membre du Forum de coopération économique pour l'Asie-Pacifique (APEC) et de la Communauté andine des nations (CAN). Il est aussi un membre actif de l'Alliance du Pacifique, de l'Accord de partenariat transpacifique et de l'Organisation mondiale du commerce; et est considéré comme une puissance moyenne[20].
Le Pérou a une population qui comprend des Mestizos, Amérindiens, Européens, Africains et Asiatiques. La principale langue parlée est l'espagnol, bien qu'un nombre important de péruviens parlent les langues quechuan, aymara, ou d'autres langues indigènes. Ce mélange de traditions culturelles a donné lieu à une grande diversité d'expressions dans des domaines tels que l'art, la cuisine, la littérature et la musique.
Le nom « Pérou » dérive de Birú, dénomination d’un cacique qui vivait près de la baie de San Miguel (Panama), au début du XVIe siècle[21]. Une autre version signale que Birú viendrait du nom d'un fleuve d'une région explorée par le conquistador Francisco Pizarro lors de sa première expédition[22]. Lorsque des aventuriers espagnols les ont parcourus en 1552, les territoires du chef local étaient la partie la plus méridionale du Nouveau Monde. Les indigènes de la zone rapporteront quelques vagues informations sur l’existence d’un riche et lointain royaume[23]. Le nom est rapidement passé dans le langage courant de l’époque pour désigner un territoire légendaire situé tout au sud de l’isthme de Panama. Par la suite, Francisco Pizarro et ses hommes, lors de l’occupation de l’empire inca en 1532, emploieront le nom Péru pour désigner les nouvelles terres conquises.
Le plus ancien document juridique attestant la dénomination Pérou est la Capitulation de Toledo rédigée en 1529. Dans ce texte, le roi Charles Quint concède les territoires à conquérir à Francisco Pizarro avec le titre de « gouverneur de terres et provinces du Pérou et de la ville de Tumbes »[24].
Les premiers documents historiques présentent diverses graphies du mot Perú : Virú, Berú ou Pirú. Durant quelques décennies, ces diverses formes coexistent et sont employées d’une manière interchangeable, parfois dans le même texte.
Les premiers vestiges de présence humaine au Pérou ont été découverts dans la grotte Pikimachay et dateraient pour les couches les plus anciennes de 19 000 ans avant notre ère[25]. Les populations sont alors pour la plupart nomades, vivant de la chasse de camélidés et de la cueillette et s’abritant dans des grottes[26].
La culture du maïs a joué un rôle déterminant dans le passage vers un modèle de subsistance fondé sur l’agriculture. La première preuve que le maïs est un aliment de base provient de Paredones, sur la côte nord du Pérou, où les isotopes alimentaires des dents humaines suggèrent que le maïs est passé d'un aliment de sevrage à une consommation de base entre 4 000 et 3 000 avant notre ère[27].
Durant la période archaïque tardive, les premiers villages et organisations sociales complexes apparaissent. Ils permettent l’apparition de la plus vieille ville du continent et l’une des plus anciennes du monde : Caral[28]. La cité de Caral, un grand centre urbain doté de pyramides tronquées au sommet, appartenait à un ensemble de sites archéologiques qui aurait abrité la première civilisation américaine : Caral-Supe ou Norte Chico (entre 2627 et 2100 avant notre ère[29]). Lors de fouilles, divers objets ont été exhumés, tels que des figurines anthropomorphiques en argile crue, des flûtes traversières taillées dans des os de pélican ou de condor[30], ou des cordelettes à nœuds (probablement des quipus).
Caractérisées par une nouvelle complexification de l’organisation sociale et des technologies, les cultures de la période dite « horizon de formation » (2700-200 av. notre ère) développèrent la céramique, le tissage, l’usage de l’or et du cuivre ainsi que la construction de canaux d’irrigation et la culture en terrasse, facteurs déterminants pour l’accroissement du pouvoir étatique. Dans la culture de Chavín (~1800-300 av. notre ère), la vie sociale, économique et rituelle s’organise autour de dieux féroces représentant les grands prédateurs locaux comme le jaguar, le serpent ou le caïman. Le centre cérémoniel, Chavín de Huántar, est un réseau complexe de galeries décorées par d'immenses mégalithes ornés. Sur le plan iconographique, les divinités de la cosmogonie chavín seront présentes dans presque toutes les manifestations artistiques postérieures. Paracas (~800-200 av. notre ère), une culture située sur une péninsule désertique portant le même nom, se distingue par ses textiles de grande valeur esthétique et scientifique.
L'effondrement de la culture chavín ira de pair avec l’affirmation de pouvoirs régionaux, caractérisés par un relatif isolement local. Chaque région abrite alors de petites entités politiques qui adoptent leurs propres modèles de développement culturel, n’ouvrant leurs frontières qu’aux échanges commerciaux. À cette période appartiennent notamment la culture nazca (~200 av. notre ère - 600), la culture huari (600-1000) et la culture mochica (~100-700), l’une des plus importantes organisations politiques de l’ancien Pérou.
La Période impériale, aussi appelée Règne des belligérants, succède au déclin de la civilisation huari, dernière entité politique régionale. Divers États locaux tentent alors de dominer politiquement la région et parmi ces États nous retrouvons la culture chimú, la culture chanca, la culture chincha et enfin, la plus célèbre, la culture inca. Les origines des Incas se mêlent à la légende. Ils étaient probablement une tribu guerrière quechua du sud de la Sierra. Entre 1100 et 1300, ils se déplacent peu à peu vers le nord de la région jusqu’à la vallée fertile de Cuzco, occupée alors par des peuples aymaras[31]. L’empire naissant se distinguait par sa condition d’État agraire, au sommet duquel se trouvait l’Inca[32].
Cependant, la véritable expansion des Incas commence en 1438, avec Pachacutec (1438-1471), qui entreprend de conquérir les terres voisines. Durant les 70 dernières années de cette période, le royaume de Cuzco forme un vaste empire qui s’étend sur toutes les Andes. Le génie de Pachacútec se manifeste avant tout dans la législation et l’administration qu’il établit dans l’Incanat[34],[35]. Il aboutit à accomplir l’unité d’un vaste empire grâce à trois mesures principales. Il préserva l’unité géographique de l’empire en développant un gigantesque réseau de routes (le Chemins incas) ; puis il fit son unité linguistique en imposant le runa simi ou quechua comme langue officielle ; enfin, grâce à une organisation centrale absolue, il forma l’unité politique impériale[36]. En même temps, il créa une élite capable de l’assister dans son œuvre : les curacas. Pour faciliter la transmission des ordres et le renseignement sur l’état des provinces, on établit un système de « chasquis » ou « coureurs messagers », qui parcouraient les chemins de l’empire.
À la fin du XVe siècle, l’Inca Pachacutec transmet le pouvoir à son fils Tupac Yupanqui († 1493), qui étend l’empire jusqu’à l’actuel territoire équatorien. Sous le règne de son fils, Huayna Capac († 1527), les frontières de l’empire inca sont repoussées jusqu’à la frontière de l’actuelle Colombie. Une guerre de succession éclate entre les deux fils de Huayna Capac, Huascar et Atahualpa. Ce dernier est parvenu à battre les troupes de son frère, au moment où les conquistadors arrivent au Pérou.
Lorsque les troupes de Francisco Pizarro arrivèrent en 1531, l’Empire inca était déchiré par une guerre civile. Le , durant la bataille de Cajamarca, Pizarro captura l'empereur Atahualpa et le fit exécuter. Il faudra cependant plus de quarante ans pour briser les dernières tentatives de résistance : le dernier Inca de Vilcabamba, Túpac Amaru, fut capturé et exécuté en 1572.
Les Espagnols instituèrent le système de l’encomienda : les Amérindiens devaient payer un tribut, dont une partie allait à Séville. Les encomenderos étaient chargés également de les christianiser. En tant que gouverneur du Pérou, Pizarro abusa de l'encomienda en accordant à ses soldats et compagnons un pouvoir quasi illimité sur les populations indigènes qui furent obligées de travailler sans rétribution dans des mines et des champs. Pizarro fut assassiné en 1541 par une faction menée par Diego de Almagro le jeune, surnommé « el Mozo ». En 1543, le roi Charles Quint, pour réagir aux luttes intestines entre les conquistadores, envoya Blasco Núñez Vela en tant que premier vice-roi. Celui-ci sera à son tour tué par Gonzalo Pizarro, le frère du premier Pizarro. Finalement, un nouveau vice-roi, Pedro de la Gasca, parvint à restaurer l'ordre et exécuta Gonzalo Pizarro après la capture de celui-ci. 39 vice-rois ont succédé à Núñez Vela et ont gouverné la vice-royauté entre 1544 et 1824.
Francisco de Toledo (1569-1581) fut celui qui organisa l'État colonial et fonda les « réductions » ou cités d'Indiens regroupant ceux-ci. Au niveau local, les encomenderos étaient maintenant sous l'autorité des curacas. Une pyramide hiérarchique permit ainsi de contrôler toutes les villes et villages. Le recensement sous le dernier Quipucamayoc ou « maître du quipu » indiquait qu'il y avait 12 millions d'habitants dans l’empire inca. Quarante-cinq années plus tard, le recensement du vice-roi Toledo montrait qu'il en restait 1,1 million[37]. Les villes incas reçurent des noms catholiques et furent reconstruites selon le modèle espagnol. Elles comportaient une place centrale et une église ou cathédrale en face d'un bâtiment officiel. Quelques villes, telles Cuzco, gardèrent leurs fondations d'origine inca. Certains sites incas, tels Huánuco Viejo, furent abandonnés au profit de villes à plus basse altitude.
Après l'établissement de la vice-royauté, le Pérou devint l'une des premières sources de la richesse pour l'Espagne. La ville de Lima, fondée par Pizarro le sous le nom de Ciudad de los Reyes (« la Ville des Rois »), devint la capitale et une ville puissante qui avait sous sa juridiction toute l'Amérique du Sud à l'exception du Brésil dominé par les Portugais. Au XVIIe siècle, Lima abritait une université et était la principale place forte de l'Espagne sur le continent américain. Toutes les richesses coloniales passaient par Lima, puis par l'isthme de Panama avant d'arriver à Séville, en Espagne.
De nombreux navires marchands venaient du monde entier faire escale dans le port de Lima. Début 1700, les traités interdisaient aux Français de venir commercer avec le Pérou. Malgré ses accords, de nombreux navires décidaient de braver ces interdictions pour faire fortune. C'est le cas de Le Gentil de La Barbinais, le premier Français à avoir fait le tour du monde. Le récit de son escale de trois mois au Pérou, en 1714, montre l'état de pillage et de dépravation qui existait alors à Lima[38].
Au XVIIIe siècle, devant la difficulté de l'administration d'un territoire immense, seront réalisées des réformes dans la structure politique coloniale (« les réformes bourboniennes »). En 1717, la vice-royauté de Grenade fut formée : elle regroupa la Colombie, l'Équateur, le Panama et le Venezuela. En 1776, une nouvelle vice-royauté vit le jour, la vice-royauté du Río de la Plata : elle regroupait l'Argentine, la Bolivie, le Paraguay et l'Uruguay.
Entre 1780 et 1781, la vice-royauté du Pérou connut la plus violente insurrection de son histoire[39]. Dirigée par Túpac Amaru II, un cacique du Cuzco, l’insurrection était à l’origine une révolte fiscale mais, très vite, se transforma en un mouvement qui revendiquait l’autonomie du territoire par rapport à la Couronne espagnole[40]. Túpac Amaru arriva à réunir une armée de près de 50 000 hommes, composée majoritairement d’Amérindiens et de métis. Après quelques batailles, la révolte fut écrasée de manière extrêmement violente. Le 18 mai 1781, José Gabriel Túpac Amaru II fut écartelé et décapité à Cuzco mais il devint pendant le XIXe siècle une figure importante de la lutte pour l'indépendance et de la liberté.
Le processus d’indépendance prit définitivement son élan avec le soulèvement des propriétaires terriens d'origine espagnole. José de San Martín et Simón Bolívar étaient à la tête des troupes rebelles. Après avoir débarqué dans la baie de Paracas, San Martín s'empara de Lima et déclara, le , l'indépendance du Pérou par rapport à l'Espagne. L'émancipation devint effective en décembre 1824 lorsque le général Antonio José de Sucre battit les Espagnols dans la bataille d'Ayacucho le 9 décembre 1824. Après cette victoire, une scission sépara le pays en un Haut Pérou resté fidèle à Bolivar (maintenant la Bolivie) et un Bas Pérou (le Pérou actuel). Comme le Chili, la Bolivie, le Mexique, ou la Grande-Colombie, le pays fait appel à la Bourse de Londres pour financer des sociétés minières[41] : des centaines de techniciens anglais traversent l’océan, avec leurs machines à vapeur, pour les moderniser.
Après la guerre Grande Colombie-Pérou (1828-1829), les conflits frontaliers entre le Pérou et l'Équateur débutèrent à partir des années 1830. Quatre guerres éclatèrent entre ces pays entre 1858 et 1995, guerre de 1858-1860 ; guerre de 1941-1942 ; la guerre du Paquisha en 1981 et la guerre du Cenepa en 1995.
Malgré la domination d'une oligarchie de propriétaires terriens, l'esclavage des Noirs et le tribut des Indiens furent abolis par le caudillo Ramón Castilla (1845-1851 et 1855-1862). Entre 1840 et 1879, le guano du Pérou, récolté par des compagnies privées ou publiques sur les côtes, généra d’énormes richesses car le pays bénéficia pendant cette période du monopole mondial de ce fertilisant. La vie politique fut alors une alternance de périodes démocratiques, de coups d'État et de dictatures.
L'Espagne n'abandonna pas complètement ses ambitions coloniales et fit encore de vaines tentatives comme lors de la guerre hispano-sud-américaine. Après la bataille de Callao, elle reconnut l’indépendance du pays en 1880, établit des relations diplomatiques et signa un traité de paix et d’amitié définitif la même année. La fin de la guerre contre l’Espagne marquait pour le Pérou la consolidation de son indépendance.
Entre 1879 et 1883, le Pérou mena aux côtés de la Bolivie la guerre du Pacifique, qui éclata lorsque le Chili envahit le port bolivien d’Antofagasta. La Bolivie déclara la guerre au Chili et le Pérou, par un traité réciproque de défense, entra à son tour dans le conflit. Malgré l'infériorité navale, le capitaine du navire Huascar, Miguel Grau, maintint sous pression la flotte chilienne pendant plusieurs mois. Le Huascar fut finalement pris par les Chiliens en octobre 1879. Pendant la campagne terrestre, le Pérou connaîtra quelques victoires mais en 1881, les troupes chiliennes entrèrent dans Lima. La guerre prit fin le 20 octobre 1883 par le traité d'Ancón et fit perdre au pays la région de Tarapacá.
En 1924, depuis Mexico, des meneurs de la réforme universitaire au Pérou, contraints à l'exil par le gouvernement, fondent l'Alliance populaire révolutionnaire américaine (ou APRA), qui exercera une influence majeure sur la vie politique du pays. L'APRA est ainsi en grande partie une expression politique de la réforme universitaire et des luttes ouvrières menées dans les années 1918-1920. Le mouvement puise ses influences auprès de la révolution mexicaine et de la constitution de 1917 qui en est issue, notamment sur les questions de l'agrarisme et de l'indigénisme et, à un degré moindre, de la révolution russe. Proche du marxisme (son dirigeant, Haya de la Torre, déclare en effet que « l'APRA est l'interprétation marxiste de la réalité américaine »), elle s'en éloigne pourtant sur la question de la lutte des classes et sur l'importance donnée à la lutte pour l’unité politique de l’Amérique latine. En 1928 est fondé le parti socialiste péruvien notamment sous l'impulsion de José Carlos Mariátegui, lui-même ancien membre de l'APRA. Le parti crée peu après, en 1929, la confédération générale des travailleurs. L'APRA, gagnant rapidement en popularité, est mise hors la loi en 1933 par le régime d'Oscar R. Benavides, qui restera président jusqu'en 1939.
La constitution de 1933 réservait le droit de vote aux citoyens alphabétisés lesquels, en 1960, ne représentaient encore que le tiers de la population adulte. Les Indiens, presque la moitié de la population, restaient des exclus et vivaient de façon misérable. Entre 1932 et 1933 aura lieu la guerre avec la Colombie. En outre, une guerre opposera le Pérou et l'Équateur entre le 5 juillet et le 31 juillet 1941. Durant cette guerre, le Pérou occupera les provinces occidentales de Loja et el Oro. Les États-Unis, le Brésil, l'Argentine et le Chili proposèrent leur médiation et un protocole de paix fut finalement signé. Néanmoins, un nouveau conflit éclatera entre les deux pays un demi-siècle plus tard.
À nouveau autorisée en 1945, l'Alliance populaire révolutionnaire américaine soutint le président José Luis Bustamante y Rivero (1945-1948) qui, renversé par le coup d'État militaire du général Manuel A. Odría d'octobre 1948, augura du début d'une dictature. Des élections sont pourtant organisées en 1962 et remportées par le candidat apriste Víctor Raúl Haya de la Torre. Toutefois, un coup d'État militaire dirigé par le général Ricardo Pérez Godoy empêcha le respect de la légalité. La junte organisa à nouveau des élections l'année suivante, élections qui furent remportées par Fernando Belaúnde Terry, fondateur de l'Action populaire, qui demeura en place jusqu'en 1968.
Au début des années 1960, alors que près de 70 % des terres sont possédées par 2 % des propriétaires, le Pérou connaît une forte mobilisation paysanne et indigène visant à obtenir une réforme agraire. Les paysans, en grande majorité des travailleurs agricoles indigènes, formèrent alors la base de syndicats ruraux engagés face à la détérioration de leurs conditions de travail et de vie. Les paysans eurent recours à des tactiques allant de l'occupation pacifique des terres à l'affrontement violent avec les grands propriétaires et les forces armées. Plusieurs petits mouvements de guérilla se constituent mais sont rapidement écrasés par le gouvernement[42].
Le 3 octobre 1968, le coup d’État réformiste mené par un groupe d’officiers dirigés par le général Juan Velasco Alvarado amène l'armée au pouvoir dans le but d’appliquer une doctrine de « progrès social et de développement intégral », nationaliste et réformiste, influencée par les thèses de la CEPAL sur la dépendance et le sous-développement. Six jours après le golpe, Velasco procède à la nationalisation de l’International petroleum corporation (IPC), la société nord-américaine qui exploitait le pétrole péruvien, puis lance une réforme de l’appareil d’État, une réforme agraire. Il s'agit alors de la plus grande réforme agraire jamais entreprise en Amérique latine : elle abolit le système de latifunda et modernise l'agriculture par une redistribution plus équitable des terres (90 % des paysans forment des coopératives ou des sociétés agricoles d'intérêt social). La terre devant être possédée par ceux qui la cultivent, les grands propriétaires sont expropriés. Les seules grandes propriétés permises sont de type coopératif. Entre 1969 et 1976, 325 000 familles reçoivent de l'État une terre ayant une surface moyenne de 73,6 acres[43]. Le « gouvernement révolutionnaire » projette aussi des investissements massifs dans l'éducation, élève la langue quechua - parlée par près de la moitié de la population mais jusque-là méprisée par les autorités - à un statut équivalent à celui de l'espagnol et instaure l'égalité des droits pour les enfants naturels.
Le Pérou souhaite s’affranchir de toute dépendance et mène une politique extérieure tiers-mondiste. Les États-Unis répondent par des pressions commerciales, économiques et diplomatiques. En 1973, le Pérou semble triompher du blocus financier imposé par Washington en négociant un prêt auprès de la Banque internationale de développement afin de financer sa politique de développement agricole et minier. Les relations avec le Chili se tendent fortement après le coup d’État du général Pinochet. Le général Edgardo Mercado Jarrin (Premier ministre et commandant en chef de l’armée) et l’amiral Guillermo Faura Gaig (ministre de la marine) échappent tour à tour, à quelques semaines d'intervalle, à des tentatives d'assassinats. En 1975, le général Francisco Morales Bermúdez Cerruti s’empare du pouvoir et rompt avec la politique de son prédécesseur. Son régime participe ponctuellement à l'Opération Condor en collaboration avec d'autres dictatures militaires américaines.
Le Sentier lumineux apparaît dans les universités dans les années 1970. Ces étudiants, pour beaucoup d'origines paysannes, retournent ensuite dans leurs communautés et y organisent des comités locaux du parti. L'abandon par l’État de certaines régions rurales favorise l’implantation du parti. En juin 1979, des manifestations pour la gratuité de l’enseignement sont sévèrement réprimées par l’armée : 18 personnes sont tuées selon le bilan officiel mais des estimations non-gouvernementales évoquent plusieurs dizaines de morts. Cet événement entraîne une radicalisation des contestations politiques dans les campagnes et aboutit finalement au déclenchement de la lutte armée. Après le début de celle-ci, les nouvelles recrues du Sentier lumineux sont généralement des paysans peu politisés, plutôt que des militants réellement politisés[44].
En 1980, Fernando Belaúnde Terry retrouve le pouvoir en remportant l'élection présidentielle. Alan García, candidat du parti Alliance populaire révolutionnaire américaine, lui succéda le 28 juillet 1985. C'était la première fois en 40 ans qu'un président démocratiquement élu remplaçait un autre président démocratiquement élu.
En 1990, inquiets des attaques terroristes du Sentier lumineux et des scandales de corruption, les électeurs choisirent Alberto Fujimori. Pour lutter contre l'inflation, Fujimori adopta des mesures d'austérité très sévères. La monnaie fut dévaluée de 200 %, des centaines d'entreprises publiques furent privatisées et 300 000 emplois supprimés. Il parvint à faire baisser l'inflation de 2 700 % en 1990 à 139 % en 1991 mais la pauvreté ne recula pas[45].
En raison de l'opposition des députés à certaines réformes, Alberto Fujmori dissout le 4 avril 1992 le Congrès, modifie la Constitution, fait incarcérer un certain nombre d'adversaires politiques et prend le contrôle des médias. Sa présidence est fortement marquée par l'autoritarisme, l'usage d'escadrons de la mort pour conduire des opérations antiguérilla, la répression politique et la corruption[46]. Alberto Fujimori fait démarrer une campagne de stérilisations forcées dans certaines régions rurales du pays. Empreint d'eugénisme, le programme est essentiellement dirigé contre les populations indigènes : 330 000 femmes et 25 000 hommes en seront victimes selon un rapport du ministère de la Santé. L'objectif aurait été de juguler la démographie afin de bénéficier d'une aide économique accrue promise par les États-Unis mais également de réduire des populations fortement défavorisées et suspectes de sympathies pour la guérilla du Sentier lumineux[47].
Son bras droit Vladimiro Montesinos entretient des liens étroits avec la CIA. Les services secrets que Montesinos dirige auraient reçu 10 millions de dollars de l'agence américaine pour soutenir les activités de contre-guérilla du gouvernement. Les ventes d'armes des États-Unis au Pérou ont par ailleurs quadruplé sous la présidence de Fujimori[48]. Les membres de la police et de l'armée impliqués dans des crimes dans le cadre du conflit contre les guérillas sont amnistiés. Alberto Fujimori se fait réélire en 1995.
La guerre civile péruvienne fait quelque 70 000 morts et s'achève dans les années 2000 avec la défaite des guérillas d'extrême gauche. Les gouvernements successifs ont eu recours à des pratiques répressives extrêmes pour répondre au terrorisme des groupes insurgés. Les enquêtes menées à la fin du conflit concluent à une « pratique systématique » de la disparition forcée comme arme de lutte antisubversive ; les fouilles révèlent aussi l'existence de fours crématoires « visant à occulter les traces d'exécution ». Près de 80 % des victimes sont originaires des régions rurales et 75 % sont de langue autochtone. En ville, les dirigeants de quartier, les syndicats, les étudiants aux affinités politiques de gauche sont particulièrement visés, et les mineurs ne sont pas épargnés. Les pressions politiques empêchent cependant la justice de condamner les soldats responsables de violations des droits humains[49].
En novembre 2000, destitué pour corruption, Fujimori s'enfuit au Japon. Valentín Paniagua Corazao est nommé pour le remplacer provisoirement et des élections sont organisées en avril 2001. Alejandro Toledo les remporte et devient président le 28 juillet 2001.
Des manifestations hostiles au projet de privatisation de deux compagnies d'électricité tournent à l'émeute à Arequipa, deuxième ville du pays, en juin 2002. L'état d'urgence est déclaré par le gouvernement. L'état d'urgence est à nouveau proclamé en mai 2003 alors que le Pérou connaît une vague de protestations sociales. Alan Garcia, déjà président entre 1985 et 1990, revient au pouvoir en 2006. En , une intervention de police contre des indigènes qui bloquent un axe routier conduit à des dizaines de morts[50].
Le Pérou est le deuxième plus grand producteur de cocaïne au monde, après la Colombie. Selon les autorités américaines, la superficie en 2019 des plantations de coca illégales était de 73 000 hectares[51].
À la fin des années 2010 et au début des années 2020, le Pérou est l'objet d'une certaine instabilité avec plusieurs motions de destitution du président par le parlement, allant en décembre 2022 jusqu'à une dissolution du parlement par le président Pedro Castillo en parallèle d'une nouvelle motion de destitution du président par le parlement[52]. L'arrestation et la destitution de Pedro Castillo entainent un large mouvement de protestation. Les mobilisations touchent particulièrement les zones pauvres du pays, celles-là mêmes qui avaient massivement voté pour Pedro Castillo en 2021. L'état d'urgence, permettant notamment le déploiement de l'armée face aux manifestants et la suspension des garanties constitutionnelles et des droits fondamentaux, est décrété dans tout le pays, bientôt suivi d'un couvre-feu dans quinze provinces[53]. En toile de fond de ces mobilisations figure la fracture sociale historique vécue par des populations victimes du mépris, du racisme, et de la discrimination des élites traditionnelles. Fortement exposées à la pauvreté, elles vivent dans des régions où les services publics sont défaillants, sinon absents, alors que les sous-sols regorgent de minerais et de gaz, exploités par des multinationales. À Cuzco, Puno, Ayacucho, Apurimac, les départements les plus pauvres du Pérou, 80 % des électeurs ont soutenu Pedro Castillo, espérant « un contrat social qui bénéficie à tous »[54]. La répression des manifestations fait une soixantaine de morts et des milliers de blessés, le plus souvent par balles[19].
Le Pérou est une république « démocratique, sociale, indépendante et souveraine » (article 43 de la Constitution de 1993). La Constitution de 1993 consacre le principe de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire et fonde un régime présidentiel monocaméral :
L’Assemblée constituante de 1822 est la première assemblée constituante péruvienne, instituée par 79 députés élus proportionnellement selon la population de chaque département. Lors de la première séance, les députés prêtèrent le serment de défendre l’intégrité territoriale du pays et « de le libérer de ses oppresseurs ». L’achèvement de l’Acte constitutionnel fut difficile : la première Constitution fut adoptée le 12 novembre 1823. Les premières constitutions établirent une démocratie nominale et censitaire, où les analphabètes et les femmes n’étaient pas habilités à voter. Le 7 septembre 1955, le Congrès de la République promulgua une loi, qui donnait pour la première fois aux femmes péruviennes le droit de voter et d’être élues.
Le Pérou est considéré comme étant le quatrième pays le plus dangereux au monde pour les défenseurs de l'environnement, après le Brésil, le Honduras et les Philippines. Les assassinats de militants écologistes y sont en augmentation ces dernières années[55].
La corruption est très présente dans la vie politique péruvienne. L’affaire Odebrecht est l’affaire la plus médiatisée. 28 millions de dollars ont été versés par la multinationale brésilienne à quatre présidents péruviens (Alejandro Toledo, 2001-2006 ; Alan Garcia, 2006-2011 ; Ollanta Humala, 2011-2016 ; Pedro Pablo Kuczynski, 2016-2018) pour obtenir des chantiers considérables comme celui de la route interocéanique entre le Pérou et le Brésil[56].
Le pouvoir judiciaire est atteint en 2018 par des révélations concernant un vaste réseau de corruption lié à l’organisation criminelle Les Cols blancs du port, qui a infiltré les plus hautes sphères de la justice. « Une organisation qui commettait des délits d’extorsion, des assassinats et qui cherchait la protection de l’appareil judiciaire pour garantir son impunité », explique l'avocat Rafael Chanjan, spécialisé sur la lutte contre la corruption. De hautes personnalités sont concernées : le procureur général du Pérou, Pedro Chavarry, des juges, des procureurs, des personnalités politiques (essentiellement liées au parti Force populaire) et des chefs d’entreprises[57].
À la suite de la destitution de Martín Vizcarra, Manuel Merino prend le pouvoir en novembre 2020 mais est contraint de démissionner cinq jours plus tard à la suite de la mort de deux manifestants à Lima. Francisco Sagasti devient ensuite Président de transition du Pérou le 17 novembre 2020. Le 28 juillet 2021, Pedro Castillo devient président de la République[58]. Ce dernier a été destitué le 7 décembre 2022 à la suite d'une tentative d'auto-coup d'état[59]. Dina Boluarte est devenue Présidente du Pérou par succession constitutionnelle.
Il n'est pas prévu d'avancer la date des élections générales à avril 2024 malgré plusieurs tentatives, le Congrès ayant refusé toutes les demandes d'élections anticipées[60]. Les prochaines élections sont donc maintenues à l'année 2026.