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Probiotique
micro-organismes vivants, bactéries ou levures De Wikipédia, l'encyclopédie libre
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Les probiotiques sont des micro-organismes vivants (bactéries ou levures) ajoutés à certains produits alimentaires comme les yaourts et vendus comme promoteurs de santé humaine. Une grande partie de leurs bienfaits allégués ne possède pourtant pas de réel fondement scientifique[1]. Les probiotiques représentent un marché mondial de quelque quarante milliards d'euros en 2018[2].

Les allégations nutritionnelles et de santé portant sur les probiotiques reposent actuellement sur un nombre insuffisant d'analyses statistiques robustes et sur des études hétérogènes qui diffèrent par la durée du traitement probiotique, le modèle utilisé (humain ou animal), la souche probiotique utilisée, son conditionnement (gélule, poudre, yaourt, boisson, crème pour la peau) et son mode d’administration, ainsi que la dose[3]. L'adéquation entre les tests in vitro et la réalité in vivo doit encore être démontrée (en termes de prédictibilité) et les études montrent que si les probiotiques semblent effectivement utiles en cas de déficit du microbiote intestinal, ils n'ont que très peu ou pas d'intérêt lorsque ce microbiote est déjà bien constitué[4]. Ce défaut de preuve a conduit l'Autorité européenne de sécurité des aliments à discréditer, fin 2009, toutes les allégations (« Renforce l'immunité », « Aide l'organisme à se défendre », « Active la santé », « Équilibre la flore intestinale ») mentionnées sur les produits enrichis en probiotiques[5].
Le concept de probiotique, redéfini en 1989 par le microbiologiste britannique Roy Fuller[6], s'applique également en alimentation animale[7]. Il a aussi été étendu à des traitements non alimentaires, en vue de soigner ou prévenir des affections cutanées ou vaginales, en particulier[8]. Enfin plus récemment, le concept a été étendu aux productions végétales[9].
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Définition institutionnelle
En 2001, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) ont donné une définition officielle des probiotiques qui sont des « micro-organismes vivants qui, lorsqu'ils sont ingérés en quantité suffisante, exercent des effets positifs sur la santé, au-delà des effets nutritionnels traditionnels »[10]. Par extension, il existe des définitions plus larges qui ne font pas référence à l'alimentation, et où le mot « ingérés » peut être remplacé par « administrés »[11].
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Historique
Résumé
Contexte
La notion de probiotique commence avec le scientifique français Henri Tissier, pédiatre de l’Institut Pasteur, qui en faisant des recherches sur la flore intestinale normale et pathologique du nourrisson, découvre le bifidobacterium bifidum en 1899 (premier probiotique découvert dans les selles humaines), le plus dominant, depuis l’enfance.
Ilya Ilitch Metchnikov, prix Nobel de physiologie ou médecine, en 1908 dans son ouvrage The Prolongation of Life: Optimistic Studies décrit comment la longévité de certaines populations en Bulgarie est liée à l'absorption de produits laitiers fermentés qui aurait pour effet de maintenir un équilibre adéquat entre la flore digestive pathogène et bénéfique[12]. Le ferment des produits laitiers est une bactérie lactique qui est baptisée Lactobacillus delbrueckii subsp. bulgaricus. Pendant la Première Guerre mondiale, un médecin observe dans les Balkans que les soldats souffrent beaucoup de diarrhées à cause des conditions hygiéniques désastreuses. En 1917, il isole une souche non pathogène d'Escherichia coli à partir des selles d'un soldat qui n'a pas développé de dysenterie lors d'une épidémie de shigellose[13]. Cette bactérie reçoit le nom de E. coli Nissle 1917 en l'honneur du médecin qui lance le concept de traitement des troubles intestinaux graves par des souches vivantes non pathogènes. Elle a depuis montré son intérêt pour induire ou maintenir une rémission de la maladie de Crohn et de la colite ulcéreuse[14].
L'origine du terme « probiotique », par opposition à antibiotique, est attribuée au bactériologue Werner Kollath (1953) cité par le chercheur allemand Ferdinand Vergin[15]. En 1965, Lilly et Stillwell proposent de définir les probiotiques comme des substances produites par des microorganismes qui favorisaient la croissance d'autres microorganismes[16].
Les scientifiques doutaient qu’un phénomène similaire puisse se produire lors de l’ingestion de probiotiques, les yaourts contiennent à peine un petit milliard de bactéries (109) face à la centaine de milliers de milliards (1014) présentes dans l’intestin, et l'acidité de l'estomac peut détruire une grande partie des bactéries ingérées.
Le microbiote intestinal humain (terme privilégié à celui de microflore) comprend de 800 à 1 000 espèces microbiennes connues[17] et sa diversité en espèces dominantes est propre à chacun. Au plan quantitatif, il se montre très stable dans le temps (pour un individu donné sur deux mois à deux ans), bien qu’il ne soit pas possible de définir un microbiote intestinal de l’espèce humaine par le profil d’espèces dominantes. C’est un consortium adapté à l'hôte, stable, c'est-à-dire résistant à la modification.
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Souches probiotiques et mise en œuvre
Résumé
Contexte
Pour avoir un effet bénéfique sur la santé, plusieurs conditions doivent être réunies[18] :
- êtres vivants (ou lyophilisés) ; une condition est nécessaire à la survie et l'efficacité des probiotiques : humidité relative résiduelle de moins de 4 % ;
- s'agir de souches sélectionnées pour l'effet recherché (ex. : dans Lactobacillus acidophilus, il existe des milliers de souches dont chacune a un effet différent) ;
- résister à l'acidité gastrique et à la bile ; « pour être efficaces sur la flore intestinale », il faut que les probiotiques parviennent vivants dans le côlon et « en nombre suffisant ». Ils ne doivent donc pas être dégradés à la suite de leur passage dans l'estomac et « doivent être capables de résister à l'acidité gastrique et aux sucs pancréatiques »[7] ;
- être utilisé en cure d'au moins dix jours par mois ;
- avoir bénéficié d'une démonstration d'efficacité tant chez l'être humain sain que chez le malade.
Parmi les microorganismes utilisés, les bactéries lactiques sont les plus utilisés. Ce sont des hôtes naturels du microbiote intestinal humain.
Les probiotiques les plus étudiés appartiennent à deux genres :
- Bifidobacterium spp., plus particulièrement les espèces Bifidobacterium bifidum (bifidus), Bifidobacterium lactis, Bifidobacterium longum, Bifidobacterium breve ;
- Lactobacillus spp., plus particulièrement Lactobacillus reuteri, Lactobacillus acidophilus, Lactobacillus casei, Lactobacillus plantarum, Lactobacillus rhamnosus.
La levure Saccharomyces boulardii a aussi été très étudiée comme probiotique (autorisée comme médicament).
Lactobacillus reuteri et Saccharomyces boulardii ont montré une efficacité préventive contre les diarrhées post-antibiotiques et les colites à Clostridium difficile[19],[20].
Les probiotiques contenus le plus souvent dans les yaourts sont :
- Lactobacillus bulgaricus ;
- Streptococcus thermophilus ;
- Lactobacillus bifidus (Bifidobacterium).
Des produits fermentés contenant des bactéries lactiques et acides, obtenus par fermentation lactique, sont :
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Intérêt pour la santé
Résumé
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Les études les plus récentes montrent que selon la souche et l'espèce animale testée, les effets diffèrent. Ils peuvent diminuer la durée d'une diarrhée infectieuse aiguë[77] ou d'une diarrhée persistante chez l'enfant[78]. Les probiotiques tendent à réduire l'inflammation intestinale[79].
Ils ont montré un intérêt dans nombre de pathologies intestinales d'origine infectieuse ou inflammatoire :
- gastro-entérite[80] ;
- ulcère gastro-duodénal[81] ;
- maladie de Crohn[82] ; résultats toutefois controversés[83] ;
- pour le diabète de type 2[84] et l'obésité[85] ; on observe également des flores intestinales spécifiques[86] ;
- obésité, prise de poids (avec des nuances : en 2012, une méta-analyse d'essais réalisée par le biologiste Didier Raoult a porté sur l'effet sur le poids chez l'être humain et des animaux de laboratoire. Elle suggère que Lactobacillus acidophilus entraîne une prise de poids chez l'être humain et chez l'animal, Lactobacillus fermentum et Lactobacillus ingluviei ayant le même effet uniquement chez l’animal. Inversement, Lactobacillus gasseri diminuerait le poids des êtres humains et animaux obèses et Lactobacillus plantarum a le même effet mais chez l’animal uniquement[87]) ;
- santé du nourrisson (en améliorant préventivement le système immunitaire, qui bloque ainsi mieux certaines septicémies néonatales[88] (encore source d'une morbidité et d'une mortalité importantes[89])) ;
- améliore les marqueurs biologiques dans la maladie du foie gras non alcoolique[90] ;
- diminue très légèrement la tension artérielle[91] ;
- réduit d'environ 40 % la probabilité d'avoir recours aux antibiotiques contre les infections aiguës des voies respiratoires supérieures[92] ;
- sclérose en plaques[93].
Les mécanismes d'action des probiotiques reposent sur un effet de symbiose en permettant au microbiote intestinal de conserver une dominante majoritairement non-pathogène. Ils moduleraient l’activité du système immunitaire intestinal, en renforçant l’immunité générale quand elle est faible, par exemple chez l'enfant, immature (chez le nouveau-né) ou la personne âgée. À contrario ils pourraient diminuer la sur-activation du système immunitaire, en cas d’allergies ou de maladies inflammatoires de l’intestin, donc en améliorant la fonction de barrière de la muqueuse intestinale par augmentation de la production et qualité du mucus et/ou des anticorps de type IgA[94]. Ils ont un effet anti-pathogènes direct (par compétition) en limitant l'adhésion des pathogènes aux parois intestinales.
Leur efficacité reste insuffisamment démontrée. Cependant la prescription de probiotiques reste peu coûteux et est accompagné de très faible risque[95].
Il semble que la manipulation de l'axe cerveau-intestin avec plusieurs souches de probiotiques puisse réduire la sévérité de la dépression chez les personnes atteintes très sévèrement, mais pas chez celles qui souffrent d'autres affections cliniques ni dans la population générale[96].
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Controverses
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Contexte
La Commission de la Transparence de la Haute Autorité de santé a rendu des avis mitigés, comme elle l'a fait pour la plupart des médicaments faisant l'objet d'un remboursement partiel de la part de la sécurité sociale (Service Médical Rendu), pour les spécialités pharmaceutiques bénéficiant d'AMM en France et ayant comme principe actif des probiotiques : Saccharomyces boulardii dans la spécialité Ultra-Levure[97], Lactobacillus fermentum et Lactobacillus delbrueckii dans la spécialité Lactéol[98].
Une demande déposée par Danone auprès de l'AESA pour citer les « bienfaits pour la santé » de ses produits Activia et Actimel, a finalement été retirée en par cette firme, le niveau de preuve de ces affirmations étant jugé non satisfaisant par l'Agence européenne de sécurité alimentaire[99].
Du point de vue réglementaire, dans l'Union européenne, l'indication « probiotique » pour des produits alimentaires est conditionnée à l'obtention d'une allégation de santé spécifique dans le cadre du Règlement 1924/2006. Jusqu'à maintenant aucun probiotique n'a été accepté dans le cadre de ce Règlement[100],[101]. Cependant des discussions sont en cours au niveau européen pour savoir si le terme « probiotique » peut avoir un sens plus générique.
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Risque pour la santé
Résumé
Contexte
La manipulation du microbiote intestinal est complexe et peut entraîner des interactions entre les bactéries et l'hôte[102]. Bien que les probiotiques soient considérés comme sûrs, certaines personnes s'inquiètent de leur sécurité dans certains cas[102],[103]. Certaines personnes, comme celles souffrant d'immunodéficience, de syndrome de l'intestin court, ayant un cathéter veineux central ou une valvulopathie, ainsi que les nourrissons prématurés, peuvent être plus à risque d'effets indésirables[104]. Chez les personnes gravement malades souffrant de maladie inflammatoire de l'intestin, il existe un risque de passage de bactéries viables du tractus gastro-intestinal aux organes internes (translocation bactérienne) en raison de la bactériémie, ce qui peut entraîner des conséquences néfastes pour la santé[102]. Rarement, la consommation de probiotiques par des enfants ayant un système immunitaire affaibli ou déjà gravement malades peut entraîner une bactériémie ou une fongémie (présence de bactéries ou de champignons dans le sang), pouvant conduire à une septicémie, une maladie potentiellement mortelle[105].
Les suppléments probiotiques contiennent généralement entre un et dix milliards d'unités formant colonie (UFC) par dose[106]. Un nombre plus élevé d'UFC n'apporte pas d'effets probiotiques supplémentaires, mais peut avoir des conséquences inattendues comme des troubles digestifs, tels que ballonnements, gaz et diarrhée[106],[107],[108]. Il a été suggéré que les espèces de Lactobacillus pourraient contribuer à l'obésité chez l'humain, mais aucune preuve de cette relation n'a été trouvée[109].
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Marché
Il est estimé à près de quatre milliards de dollars en 2007[110].
L'alimentation animale en inclut aussi[111],[112], comme améliorateur de la digestibilité de certains aliments[113], comme facteurs de croissance[114] et pour notamment répondre aux attentes des consommateurs et diminuer l'antibiorésistance[115] par exemple pour améliorer les performances ou la santé des bovins[116] et de l'industrie laitière[117] ou porcine[118],[119],[120] et la productivité des poules pondeuses[121] ou du poulet de chair[122].
L'un des premiers médicaments contenant des probiotiques est le Lacteol à la suite de la découverte de la bactérie Lactobacillus acidophilus par le docteur Pierre Boucard en 1907[123].
Dans l'alimentation, on en consomme au moins depuis la haute-Antiquité, avec par exemple le kéfir, le kombucha, le yaourt, le yakult ou le fromage. Nombre d'aliments couramment consommés contiennent des souches spécifiques[124].
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Notes et références
Annexes
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