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En dynamique des fluides, le coefficient de traînée, dont le symbole est Cx, CA ou CD ( en anglais[alpha 1], en allemand[alpha 2]) est un coefficient aérodynamique sans dimension utilisé pour quantifier la traînée, ou résistance d'un objet dans un fluide (comme l'air ou l'eau). Il est toujours associé à une surface particulière (selon le contexte, appelée maître-couple, surface alaire ou plus généralement surface de référence).
La définition adimensionnelle actuelle du coefficient de traînée a été proposée par Ludwig Prandtl sur une idée de Richard Knoller (de)[1],[2].
Un objet mobile se déplaçant dans un fluide pesant subit de la part de celui-ci une distribution de pression et un frottement visqueux (ou friction) dont la résultante s'oppose à sa marche. La composante de cette résultante selon la direction du mobile est la traînée. L'intensité de la force de traînée est exprimée en fonction de la vitesse, de la forme et de la taille du mobile, ainsi que du fluide avec lequel l'objet interagit.
Le coefficient de traînée de tout objet est la somme d'au moins deux effets : la traînée liée au frottement visqueux (ou friction) et la traînée liée à la pression (traînée de forme)[alpha 3]. Ces effets sont parfois découpés suivant les diverses parties de l'objet (par exemple ogive, fuselage et ailerons pour une fusée, ou, lorsque c'est possible, avant-corps et arrière-corps) et pour chacune d'entre elles, on définit une traînée ne tenant pas compte des autres. Lorsque l'on s'intéresse à la structure complète, on voit donc éventuellement apparaître des termes de couplage liés aux interactions entre les diverses parties.
Le coefficient de traînée est défini par[3] :
où :
La masse volumique et la vitesse sont prises à l'infini amont (ou en tout cas loin de toute perturbation locale due à l'objet).
Le numérateur et le dénominateur ont les dimensions d'une force. Au dénominateur, on retrouve l'expression de la pression dynamique donnée par , multipliée par la surface de référence . Cette dernière est choisie arbitrairement[4]. Souvent, on prend la surface du maître-couple, projection du solide sur un plan perpendiculaire au déplacement, sauf dans le cas des ailes en aéronautique, pour lesquelles on rapporte les forces à la surface alaire, projection des ailes sur un plan contenant la corde des profils, ce qui permet de comparer des profils indépendamment de leur épaisseur. Néanmoins pour des études particulières, d'autres surfaces de référence peuvent être utilisées.
Les coefficients de traînée des trois corps 2D[alpha 4] de même traînée montrés dans l'image ci-contre sont très différents[alpha 5]. Le corps bleu, le plus grand, possède un coefficient de traînée de 0,05 (c'est un corps de moindre traînée). Le petit tiret rouge vertical à peine visible devant la section du cylindre rouge possède, quant à lui, un coefficient de traînée de 2 (c'est ce que l'on nomme une palette infinie). Ce coefficient de traînée étant 40 fois plus fort que celui du corps de moindre traînée bleu, la surface frontale de cette palette doit être 40 fois plus faible pour susciter la même traînée que le corps bleu à vitesse d'écoulement égale.
Pour le coefficient de traînée du cylindre rouge voir les notes dans la page de définition de l'image.
Notée ou , la force de traînée s'exprime en newtons et dépend du coefficient de traînée et d'autres facteurs aérodynamiques cités plus haut. On peut l'exprimer par la formule suivante[5],[6] :
où est la masse volumique du fluide dans lequel a lieu le déplacement (en kg/m3), la surface de référence ayant été choisie lors de la détermination du coefficient de traînée (en m2), ledit coefficient de traînée (sans dimension), et la vitesse relative du mobile par rapport au fluide (en m/s).
Cette équation repose sur l'hypothèse que la force de traînée de tout objet est proportionnelle à la densité et au carré de la vitesse relative. En réalité, sauf pour quelques corps particuliers, le coefficient de traînée n'est pas constant mais varie légèrement en fonction de la vitesse du fluide, de la taille de l'objet et de la densité et viscosité du fluide. Par chance, la vitesse, la viscosité cinématique et une longueur caractéristique de l'objet peuvent être incorporées dans un unique paramètre sans dimension : le nombre de Reynolds . Le coefficient de traînée apparaît alors comme une fonction de ce seul nombre .
Le coefficient de traînée rend compte de la perturbation qu'impose le corps au fluide lors de son mouvement relatif dans ce fluide.
Une des méthodes possibles de détermination du coefficient de traînée est d'observer la diminution de quantité de mouvement du courant d'air d'une soufflerie causée par la présence du corps. Il s'avère que cette diminution, pour les corps abruptes causant un décollement de l'écoulement, est liée à l'angle avec lequel les filets fluides quittent le corps.
Le graphe ci-contre (d'après Hoerner[7]) dessine la valeur du coefficient de traînée frontal de corps abruptes 2D[alpha 4] (en référence à leur surface telle que vue par l'écoulement), selon le demi angle auquel se produit le décollement de l'écoulement que ces corps induisent (on pourrait appeler cet angle angle de décollement ou encore angle de projection de l'écoulement). Lorsque ce demi angle atteint °, le dièdre 2D est devenu une palette infinie et Hoerner continue le graphe en considérant que les ° dessinent des dièdres creux.
Dans le cas d'un fluide compressible à grande vitesse comme l'air[alpha 6], le coefficient de traînée est aussi fonction du nombre de Mach . Le graphe ci-contre à droite montre l'évolution du coefficient de traînée de sphères de différents diamètres (courbes bleues) en fonction de leur Reynolds : lorsque ce Reynolds augmente (et donc leur vitesse pour un diamètre donné), ces sphères connaissent les affres transsoniques et leur coefficient de traînée croît vertigineusement.
Il est remarquable que, pour les plus grosses sphères, le Reynolds peut augmenter sans que soit approché le mur du son[alpha 7]. La courbe pour ces grosses sphères est alors la courbe classique du coefficient de traînée selon le Reynolds en incompressible.
Le graphe ci-contre à gauche présente les choses d'une autre façon. On y observe que les courbes correspondant aux diamètres de 12,5 à 200 mm se rassemblent toutes au-dessus de Mach 0,85 pour faire cause commune. Plus à gauche sur le même graphe, on observe que les sphères de grands diamètres (diamètres égaux ou supérieurs à 50 mm) connaissent leur crise de traînée avant d'être confrontées au mur du son (les sphères de plus petits diamètres vivent le mur du son alors qu'elles sont encore en Reynolds sous-critiques et donc ne montrent aucune crise de traînée).
Bien que les coefficients de traînée soient le plus souvent donnés en référence à la surface frontale (sauf dans l'aviation où ils sont donnés en référence à la surface alaire), on trouve des coefficients de traînée donnés en référence à beaucoup d'autres surfaces. Dans la pratique, le coefficient de traînée d'un corps peut être établi en référence à n'importe quelle surface (même une surface qui n'appartient pas au corps) pourvu que cette surface de référence soit précisée[alpha 8].
Le coefficient de traînée est primordial dans le choix de la surface de référence. La première fonction de ce coefficient a été historiquement d'effectuer des comparaisons entre des corps de formes identiques mais d'échelles différentes et exposés aux courants de fluides différents. Ainsi le coefficient de traînée de la plaque carrée exposée normalement[alpha 9] a-t-il été mesuré assez tôt dans l'eau et dans l'air[alpha 10]. Cependant, les coefficients de traînée mesurés de la sorte ne concordaient pas tout à fait (du fait, essentiellement, du mode opératoire des mesures). De même, le coefficient de traînée de la sphère dans l'air et dans l'eau a été mesuré très tôt par Isaac Newton, avec une précision étonnante. Cependant, pour cette forme particulière qu'est la sphère, s'est développée une controverse portant sur les valeurs disparates dégagées par les mesures en soufflerie[alpha 11] : pour de tels corps « non abrupts », un nouveau critère, le nombre de Reynolds, caractérise l'écoulement, c'est-à-dire qu'il détermine des types d'écoulement différents, à savoir des lignes de courant autour du corps tout à fait différentes (voir par exemple cette image) et d'ailleurs deux coefficients de traînée très différents.
Ainsi, par exemple, le coefficient de traînée d'un cube exposé normalement vaut 1,05. Pour ce corps à arêtes vives, le nombre de Reynolds n'intervient pas sur le coefficient de traînée. On obtiendra donc, par des mesures, le même coefficient de traînée pour tous les cubes (exposés normalement) quelle que soit leur échelle (c.-à-d. : que ces coefficients de traînée aient été relevés sur des cubes de 10 cm ou de 10 m de côté) et quel que soit le fluide dans lequel ils se déplacent.
Pour d'autres corps, comme la sphère, le cylindre ou les corps profilés 2D[alpha 4] et 3D[alpha 12], le nombre de Reynolds a beaucoup d'influence sur le coefficient de traînée mesuré. Il conviendra donc de comparer les coefficients de traînée de tels corps à nombres de Reynolds proches. Pour la sphère et le cylindre, l'influence du nombre de Reynolds diamétral est même décisive dans la zone dite de crise de traînée (où une très petite variation du nombre de Reynolds pouvant produire une division du coefficient de traînée par un facteur 5 pour la sphère lisse, par exemple).
Le coefficient de traînée est cependant quasiment constant dans la plage de nombre de Reynolds diamétral courant de 40 000 à 300 000, tel que le montre le graphe ci-contre. Dans cette plage, nommée plage de Newton[alpha 13][réf. souhaitée], la comparaison du coefficient de traînée de sphères lisses de diamètres différents est donc aisée[alpha 14].
De la même façon, et même pour le cylindre et les corps profilés, le coefficient de traînée peut présenter des plages de relative invariance avec le nombre de Reynolds[alpha 15], ce qui facilitera la comparaison des coefficients de traînée de corps de tailles différentes.
Comme surface de référence, les ingénieurs choisissent la surface la plus significative pour les comparaisons entre des corps de mêmes formes ou de formes approchantes :
À titre d'exercice, on peut penser au coefficient de traînée de la voiture de Karl Schlör (image ci-contre) : Karl Schlör a en effet abaissé notablement la traînée de son véhicule en carénant presque totalement les roues avant. Mais, ce faisant, il a gagné sur les deux tableaux puisque le calcul du coefficient de traînée se fait à partir d'une traînée diminuée (ce qui est juste) mais aussi à partir d'une surface frontale augmentée de 14 % (ce qui cause des problèmes d'encombrement du véhicule), cette augmentation de la surface frontale diminuant d'autant le coefficient de traînée[réf. nécessaire].
Dans la pratique, on trouve dans les textes techniques toutes sortes de surfaces de référence. L'exemple du sous-marin Albacore (image ci-contre lors de tests dans la soufflerie grandeur nature de Langley en 1950) est instructif à ce sujet dans la mesure où la surface de référence adoptée par les ingénieurs de la NACA est le carré de la longueur du modèle[8]. Le coefficient de traînée annoncé (en référence à ) étant , on en tire facilement la traînée (, si est la pression dynamique). En divisant cette traînée par et la surface frontale , on écrit le coefficient de traînée frontal :
L'élancement du modèle étant 4,48, on obtient finalement le coefficient de traînée frontal très faible de 0,0295 pour ce corps profilé[alpha 21].
Même dans le cas apparemment simple du coefficient de traînée d'une automobile, la surface de référence choisie peut être virtuelle. Sur l'image ci-contre, la surface de référence choisie est la surface projetée sur un plan perpendiculaire à la vitesse ; or aucune section de la voiture ne dessine cette surface de référence. C'est sans importance parce que cette surface de référence est vraiment représentative de la grandeur de la voiture en tant qu'obstacle à l'écoulement et parce que ce choix de surface de référence sera précisé.
Le coefficient de traînée intervient dans le calcul de la finesse aérodynamique (c'est le rapport l'un et l'autre calculé sur base de la surface alaire). Cette finesse aérodynamique représente en quelque sorte le rendement de l'aérodyne (avion, planeur, hélicoptère) : plus la finesse d'un aérodyne est faible, plus son moteur devra apporter de puissance pour entretenir le vol horizontal.
La détermination du coefficient de traînée a été tentée très tôt (d'abord par Desaguliers et Newton) par l'observation de la chute des corps (dans l'air ou dans l'eau)[alpha 22]. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, des espoirs ont été placés dans des appareils de mesure rotatifs tels que celui de l'animation ci-contre[alpha 23],[alpha 24].
Pour certains corps simples non profilés (par exemple la plaque rectangulaire infinie ou palette, ou le disque circulaire face à l'écoulement, figures ci-dessous) le coefficient de traînée ne dépend pas du nombre de Reynolds de l'écoulement (l'intégration des coefficients de pression sur toutes les surfaces de ces deux corps donne donc le coefficient de traînée).
Cependant, pour la plupart des autres corps, le coefficient de traînée dépend du nombre de Reynolds de l'écoulement. De sorte que, pour tous ces autres corps, en plus de dépendre de leurs formes, le coefficient de traînée dépend du coefficient de friction, c.-à-d. de la forme du profil de vitesse dans la couche limite (profil « turbulent », profil laminaire), ainsi qu'éventuellement de la traînée induite par la portance, s'il en est.
Le coefficient de friction dépend du nombre de Reynolds de l'écoulement sur le corps et du degré de laminarité de la surface de ce corps (voir l'article Couche limite).
La sphère est une forme qui a été particulièrement étudiée en aérodynamique.
On peut résumer les principales variations du coefficient de traînée de la sphère comme suit :
Condition | Expression | |
---|---|---|
Stokes (écoulement de Stokes) | ||
H.S. Allen (écoulement intermédiaire) | ||
Newton (plage sous-critique) | ||
Plage supercritique |
Voir ci-contre à gauche le tableau de coefficient de traînée dû au mécanicien des fluides Sighard F. Hoerner (en)[11], ainsi que le tableau de droite.
Dans ces deux tableaux, les coefficients de traînée sont frontaux, c.-à-d. que leur surface de référence est la surface frontale des corps (à savoir la surface projetée sur un plan normal à la direction de l'écoulement loin du corps).
Toujours dans ces deux tableaux, certains corps, comme la sphère et le cylindre infini présenté en travers de l'écoulement, ont un coefficient de traînée très variable avec le Nombre de Reynolds. Cette variabilité du coefficient de traînée s'explique par ce que l'on appelle la crise de traînée.
Voir ci-contre à droite les coefficients de traînée frontaux de corps 3D[alpha 12] et leur adaptation à la route.
Pour un tableau de coefficients de traînée d'automobiles, voir Automobile_drag_coefficient#Typical drag coefficients (en).
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