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encyclique publiée le 15 mai 1891 par le pape Léon XIII (1810-1903) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Rerum novarum (littéralement : « des choses nouvelles », et, selon la traduction du Vatican, « des innovations »[1]) est une encyclique publiée le par le pape Léon XIII. Elle commence ainsi : Rerum novarum semel excitata cupidine (« la soif d'innovations une fois suscitée »). Elle constitue le texte inaugural de la doctrine sociale de l'Église catholique.
Rerum novarum | ||||||||
Encyclique du pape Léon XIII | ||||||||
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Date | ||||||||
Sujet | Texte inaugural sur la doctrine sociale de l'Église catholique | |||||||
Chronologie | ||||||||
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S'inspirant des réflexions (notamment les travaux de l'union de Fribourg) et de l'action des « chrétiens sociaux », l'encyclique, écrite face à la montée de la question sociale, condamne « la misère et la pauvreté qui pèsent injustement sur la majeure partie de la classe ouvrière » tout autant que le « socialisme athée ». Elle dénonce également les excès du capitalisme et encourage de ce fait le syndicalisme chrétien et le catholicisme social.
Plusieurs principes de Rerum novarum sont complétés par des encycliques ultérieures, en particulier Quadragesimo anno de Pie XI (1931), Mater et magistra de Jean XXIII (1961) et Centesimus annus de Jean-Paul II (1991), qui chacune célèbrent un anniversaire de la parution de Rerum novarum.
La période de parution de l'encyclique est marquée par l'émergence et le développement, principalement en Europe, de l'industrialisation. Cette industrialisation voit apparaître une nouvelle classe, celle des ouvriers. Les ouvriers deviennent une réalité sociale, mais aussi une source de contestation : les bouleversements politiques de l'année 1848, la Commune de Paris (1871), les manifestations violentes (par exemple, à Fourmies), les émeutes de Chicago en 1886...
Dans le même temps, le mouvement ouvrier commence à s'organiser et à développer une pensée propre, du nom de socialisme[Note 1]. Des penseurs comme Pierre-Joseph Proudhon, Karl Marx, Ferdinand Lassalle développent leurs théories. Le syndicalisme s'étend à de nombreux pays, de même que le chartisme, les chevaliers du travail, la CGT, et on voit apparaître les premiers syndicats « internationaux ».
Pendant cette période, la question sociale fait l'objet de réflexions de chrétiens et d'hommes d'Église[2]. Wilhelm von Ketteler en Allemagne, le cardinal Manning en Grande-Bretagne, et le cardinal de Bonald en France, développent une pensée chrétienne sociale. Ils contribuent à encourager les mouvements d'action des chrétiens laïcs, favorisant l'émergence des « catholiques sociaux »[2].
Ketteler exprime une conception plus doctrinale dans son œuvre, La Question ouvrière et le christianisme (1864). Il y met en cause la structure du libéralisme et propose l'intervention forte de la législation, ainsi que l'autonomie des ouvriers. Il influence Karl von Vogelsang en Autriche, développant ainsi les idées corporatistes[2].
Gaspard Mermillod, évêque de Genève, joue un rôle essentiel. Avec son ami René de La Tour du Pin, il fonde l'Union catholique d'études sociales et économiques, appelée aussi union de Fribourg, où se retrouvent quelques-uns des plus grands noms du catholicisme social de l'époque (le Suisse Gaspard Decurtins, les Français Armand de Melun, Albert de Mun, Louis Milcent et Henri Lorin, les Autrichiens Karl von Vogelsang et Gustave Blome (de)…). L'union de Fribourg développe ainsi une pensée dans de nombreux domaines comme le syndicalisme, le régime corporatiste, l'organisation industrielle, la question agraire, le salaire, les assurances ouvrières, la réglementation internationale de la production industrielle[2]. Ces travaux sur la « question sociale » constitueront la base de l'encyclique de Léon XIII Rerum novarum[3].
L'engagement d'hommes d'Église dans le domaine social joue un rôle important dans l'émergence de l'encyclique. Ainsi, le cardinal Gibbons défend auprès de Léon XIII la cause des chevaliers du travail[4]. En 1889, le cardinal Manning défend la grève des dockers et participe aux négociations qui aboutissent à l'accord du . Cette intervention est suivie de près par Léon XIII[2]. L'empereur Guillaume II d'Allemagne demande le soutien du pape afin de convoquer une conférence internationale sur le travail à Berlin en 1890[5].
La rédaction de l'encyclique commence en 1890. Le père Matteo Liberatore, jésuite italien[6], disciple de Luigi Taparelli d'Azeglio et membre de l'Union de Fribourg, le cardinal Tommaso Maria Zigliara et le cardinal Camillo Mazzella contribuent à cette rédaction[2], qui est traduite en latin[2] par Volpini après la relecture de Léon XIII.
Avant Léon XIII, les autorités de l’Église avaient mené une guerre contre les « libertés modernes » de la Révolution française. Afin d’établir ces « libertés modernes » d’expression, de presse et de religion, le parti libéral visait à créer un ordre social et politique dans lequel l’Église n’avait plus de privilèges et de pouvoirs spéciaux. Plusieurs libéraux souhaitaient éliminer son influence, qu’ils estimaient incompatible avec la raison et le progrès socio-politique. Les réformes anticléricales effectuées depuis la Révolution ont ébranlé fortement l’Église catholique. Ces sentiments anticléricaux sont répandus dans toute l’Europe. Dans la dernière moitié du XIXe siècle, les gouvernements de l’Italie, l’Espagne, la Belgique, l’Autriche, la France et l’Allemagne ferment les écoles catholiques, dissolvent les ordres monastiques, suppriment les privilèges du clergé, et saisissent les biens de l’Église. Une autorité morale comme Victor Hugo oppose en 1850 le véritable enseignement religieux au cléricalisme même[Note 2]. Tout cela est aggravé par la disparition progressive des « États du Pape » à partir de 1860. En 1870, le territoire géopolitique de l’Église est réduit à la petite cité du Vatican. Le pape de cette époque, Pie IX, prédécesseur de Léon XIII, a tenté de répondre à cette situation en publiant son encyclique Quanta Cura de 1864 suivie du Syllabus Errorum. Il y détaille les « erreurs » de la civilisation moderne, y compris presque tous les principes de base des démocraties libérales modernes[27],[28].
La même année de la publication de Rerum novarum, la Ligue démocratique belge est créée dans la lignée de l'encyclique. Cet événement est reçu différemment dans les milieux politiques : les milieux catholiques sociaux l'exaltent, tandis que les milieux conservateurs, eux, attendent le pape suivant. Les libéraux ne voient pas l'importance du document car il n'apporte aucune solution concrète. Selon eux, cette encyclique, qui analyse la situation réelle et cherche à donner des pistes concrètes, reste parfois moralisatrice et comporte des imprécisions sur des questions concrètes. On y retrouve une idéologie anti-socialiste très classique à l'époque[réf. souhaitée].
Rerum novarum, outre son influence dans différents pays lors de sa publication, est surtout le coup d'envoi de l'enseignement doctrinal de l'Église connu sous l'appellation de doctrine sociale de l'Église catholique. Elle marque le début de l'intérêt porté par les papes aux questions sociales, ce qui a fortement influencé les pays de tradition catholique dans leur législation, en exhortant les hommes politiques à une intervention plus forte de l'État dans les domaines sociaux : législation protégeant le travail (repos dominical), création des allocations familiales, émergence des associations de travailleurs (comme les syndicats chrétiens en France). À titre d'exemple, en 1895, année où la C.G.T. a été créée à Limoges, lors d'un congrès de tertiaires de Saint-François dans la même ville, à la demande de Léon Harmel, Henri Savatier présentait un rapport intitulé Les légitimes revendications des travailleurs dans le cadre des orientations de l'Église à la suite de Rerum Novarum[29]. De cette manière, on peut dire que l'encyclique a été à l'origine de la constitution de la démocratie chrétienne.
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