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reine des Iceni De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Boadicée (ou Boudicca ou Boadicea en latin, Boudica en anglais, Βουδουικα, Βουνδουικα, ou Βοδουικα en grec)[1], née vers 30 et morte en 61, était une reine des Iceni, un peuple celte qui vivait dans la région du Norfolk, dans le sud-est de l'actuelle Grande-Bretagne.
Boadicée | |
Statue de Boadicée, héroïne de la patrie, érigée à Londres, œuvre de Thomas Thornycroft (1815–1885). | |
Titre | |
---|---|
Reine des Iceni | |
Prédécesseur | Prasutagos (roi des Iceni) |
Biographie | |
Titre complet | Reine des Iceni |
Date de naissance | Vers 30 |
Lieu de naissance | Bretagne (province romaine) |
Date de décès | |
Lieu de décès | Grande-Bretagne |
Nature du décès | Maladie ou suicide par empoisonnement |
Conjoint | Prasutagos (Roi des Iceni) |
Enfants | Julia
Comorra |
Religion | Paganisme celtique |
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Boadicée était l'épouse de Prasutagos, un roi celte qui avait prêté allégeance à Rome, dans l'espoir de préserver ainsi l'indépendance de son peuple. À sa mort, les Romains annexèrent néanmoins la totalité du royaume et confisquèrent les biens de la famille royale.
Boadicée, sa veuve, fut fouettée en place publique, un châtiment réservé habituellement aux esclaves. Humiliée, elle déclencha alors un soulèvement contre l'occupation romaine. À la tête d'une coalition de tribus bretonnes, elle lança une campagne militaire au sud de l'île, pillant et brûlant plusieurs villes dont Camulodunum et Londinium. Après avoir écrasé les Romains à la bataille de Camulodunum, l'armée bretonne fut cependant défaite de manière décisive à la bataille de Watling Street, et Boadicée mourut peu de temps après.
Encore aujourd'hui, elle est considérée comme une héroïne populaire britannique[2]. Une statue la représentant sur son char fut érigée à proximité du pont de Westminster.
L'histoire de Boadicée ne nous est connue que par les sources littéraires. Il en existe trois. Deux de celles-ci sont de Tacite : la Vie d'Agricola et les Annales. La troisième est l’œuvre de Dion Cassius.
Aucun de ces récits n'est contemporain de la rébellion de 60-61 apr. J.-C. La Vie d'Agricola, le plus ancien des trois, est daté de 98 apr. J.-C., c'est-à-dire environ trente-sept ans après les faits[3]. La révolte est décrite de manière assez circonstanciée, Tacite présente les protagonistes, les causes et l'enchaînement des événements. Les chercheurs ont comparé maintes fois les textes de Tacite et de Dion Cassius. Sans ces sources littéraires, les tenants et aboutissants de la révolte nous demeureraient inconnus, l'archéologie confirmant seulement la réalité matérielle de ces récits par les différents vestiges qu'elle a mis au jour.
D'autres sources littéraires, bien que ne faisant pas mention de Boadicée, sont également instructives. Ainsi dans la Vie des douze Césars de Suétone, une phrase fait-elle vaguement allusion à une rébellion en Bretagne sous le règne de Néron. Une première mention des Iceni[4] est faite dans La Guerre des Gaules, lorsque César désigne les « Cenimagni »[5].
Il est possible également qu'au VIe siècle, le moine breton Gildas fasse allusion à elle, sans toutefois mentionner son nom, dans son De Excidio Britanniae.
L'épopée de Boadicée est également attestée par les fouilles archéologiques. Ce sont les fouilles de Colchester, Londres et St Albans qui ont révélé le plus d'informations au sujet de la révolte (cf. infra). Selon les sources littéraires, ces villes ont été saccagées et brulées par Boadicée et son armée. Les archéologues ont découvert que ces villes avaient bien été incendiées à l'époque où Tacite situe les faits. Par endroits, un renforcement du système défensif a été constaté, les Romains ayant donc tiré les leçons de ces événements[6].
Cette reine est connue sous différents noms, qui ont été utilisés successivement au cours de l'Histoire.
L’historien romain Tacite la désigne dans ses écrits sous le nom de Boudicca[7]. D’après le linguiste Kenneth Jackson, le nom serait dérivé de l’adjectif proto-celtique boudīkā, qui signifie « Victorieuse », lui-même dérivé du mot celtique boudā (« La victoire »)[8].
À l’époque de la dynastie des Tudors, de nouvelles appellations apparaissent. En 1612, le poète anglais Edmund Spenser lui dédie une tragi-comédie, dans laquelle il la prénomme Bunduca[9]. Au XVIIe siècle, un autre poète britannique, William Cowper, compose un poème intitulé Ode à Boadicée, qui popularise une nouvelle appellation, celle de Boadicée[10].
Par la suite, Boadicée devient l’orthographe la plus couramment utilisée, du XIXe siècle jusqu’à la fin du XXe siècle, comme en témoigne la statue érigée en l’honneur de la reine, à proximité du pont de Westminster et sur laquelle est gravée le nom de Boadicée[7].
L’appellation Boadicée est restée la norme jusqu’à ce que les universitaires et enseignants ne reviennent récemment aux sources antiques et à l’appellation de Boudicca[7].
L'historien grec Dion Cassius est le seul à avoir brossé un portrait de Boadicée : « grande, terrible à voir et dotée d'une voix puissante. Des cheveux roux flamboyants lui tombaient jusqu'aux genoux, et elle portait un torque d'or décoré, une tunique multicolore et un épais manteau retenu par une broche. Elle était armée d'une longue lance et inspirait la terreur à ceux qui l'apercevaient. »[11]. Il est impossible de dire si cette description correspond à la réalité[12].
Les éléments biographiques sont particulièrement maigres. Les versions de Tacite et de Dion Cassius divergent sur plusieurs points. Pour Tacite, Boadicée est la reine des Iceni ; Dion Cassius, quant à lui, dit simplement qu'elle est de race royale. Selon Tacite, elle est la mère de deux filles ; Dion Cassius n'en souffle mot. Les deux auteurs divergent également sur la cause de sa mort : suicide par le poison s'il faut en croire Tacite, de maladie selon Dion Cassius. Pour ce dernier, elle agit non seulement en chef de guerre mais également en prêtresse, pratiquant la divination au moyen d'un lièvre et invoquant une divinité nommée Andraste (ou Andate), connue par ce seul texte.
Vers l'an 60, pensant garantir l'avenir de son peuple tout en se ménageant les bonnes grâces de l'empereur Néron, le roi Prasutagos légua son royaume-client à l'Empire romain, tout en faisant de ses filles ses cohéritières, selon Tacite[13].
Cette double dévolution se révéla malheureuse, faisant entrer le droit coutumier icène en conflit ouvert avec le droit romain, d'un empire ne dissimulant pas sa rapacité :
Rome incorpora donc le royaume icène dans l'Empire romain en tant que province. C'est pourquoi Catus Decianus, procurateur romain chargé de l'exécution testamentaire, réclama aux nobles Icéniens des sommes qui leur avaient été données par le précédent empereur, Claude. Au même moment, le philosophe Sénèque, qui leur avait prêté dix millions de drachmes, en réclama le remboursement immédiat. Devant leurs protestations, il augmenta les impôts, voire préleva des biens et des terres, pour les attribuer aux vétérans de l'armée romaine qui s'établissaient dans cette colonie et traitaient les autochtones en esclaves. Tout ceci fut interprété comme un enchaînement d'humiliations envers les Icéniens. Devant la montée des tensions, le Romain alla jusqu'à faire flageller Boadicée avec des verges devant son peuple et laisser ses deux filles, encore très jeunes, se faire violer par des légionnaires — châtiments habituellement réservés aux esclaves.
Pour venger les humiliations et les atrocités infligées à sa famille et son peuple, Boadicée prit les armes contre les Romains. Tacite rapporte comment, debout sur un char, elle harangue les soldats en leur disant qu’« elle ne venait pas, fière de ses nobles aïeux, réclamer son royaume et ses richesses ; elle venait, comme une simple femme, venger sa liberté ravie, son corps déchiré de verges, l'honneur de ses filles indignement flétri » et concluait que « femme, c'était là sa résolution : les hommes pouvaient choisir la vie et l'esclavage. »[14] Constituant une armée, elle chercha des alliés chez ses voisins, les Trinovantes (dans l'actuel Suffolk), et d'autres nations.
Les circonstances étaient favorables, car le gouverneur romain, Suetonius Paulinus, à la tête des quatorzième et vingtième légions, menait une expédition dans l'île de Mona (l'actuelle Anglesey), au nord du pays de Galles et se trouvait trop loin pour intervenir. Boadicée avait réuni une armée de 120 000 hommes. Les Bretons s'en prirent d'abord à la nouvelle colonie de Camulodunum, dont le sanctuaire consacré à l'empereur Claude constituait une source d'irritation. Comme la ville ne disposait pas d'enceinte, elle était une proie facile. Les habitants demandèrent des secours au procurateur Catus Decianus, qui ne leur envoya que deux cents hommes mal armés. Lors de l'attaque de la ville, seuls ceux qui s'étaient retranchés dans le temple de Claude résistèrent deux jours. Petilius Cerialis, à la tête de la neuvième légion, se porta à la rencontre de l'armée bretonne, mais ses troupes furent anéanties dans une embuscade.
Devant la tournure des événements, le procurateur Catus Decianus s'enfuit en Gaule. Suetonius Paulinus, revenu en Bretagne, se refusa à livrer immédiatement bataille et, malgré les lamentations des habitants, abandonna la ville de Londinium (Londres) à son sort. Tous ceux qui n'avaient pas quitté la ville furent massacrés. Le municipe de Verulamium subit le même sort. Les fouilles archéologiques ont permis de dégager sur les trois sites la même couche épaisse de cendres rougeâtres. Le nombre de victimes parmi les Romains et leurs alliés se serait élevé à 70 000 selon Tacite et à 80 000 selon Dion Cassius. Celui-ci n'est pas avare de détails effrayants à propos du sort des Romains qui eurent le malheur de tomber entre les mains des révoltés : les femmes romaines furent pendues nues, après leur avoir coupé les seins et les avoir cousus sur la bouche. Puis elles furent empalées pendant que les vainqueurs se livraient à des orgies sacrées dans leurs temples en plein air[15].
Le gouverneur Suetonius, ayant réuni les quatorzième et vingtième légions, affronta les troupes de Boadicée. Tacite ne fournit aucune indication sur le lieu précis de la bataille, qui eut lieu à proximité de la chaussée romaine connue sous le nom de Watling Street, sans doute une plaine à Mancetter dans le Warwickshire. Tacite dit cependant que Suetonius livra combat à l'endroit de son choix. L'armée de Boadicée, bien qu'elle fût largement supérieure en nombre, subit des pertes effroyables : quelque 80 000 hommes, alors que les Romains n'en perdaient que quatre cents.
Les sources fournissent deux versions sur la mort de Boadicée : dans la première, Tacite raconte qu'en voyant la partie perdue, elle avale du poison pour ne pas tomber aux mains de l'ennemi ; dans l'autre, fournie par Dion Cassius, elle meurt de maladie avant de pouvoir reprendre le combat.
L’emplacement de la tombe de Boadicée fait l'objet d'une controverse. Plusieurs lieux, de Stonehenge à Colchester en passant par Londres, ont été proposés mais sans qu'aucun ne permette d'identifier formellement qu'il s'agit du lieu où son corps a été déposé[7].
Une légende, sans le moindre fondement historique mais reprise épisodiquement par la presse[16], voudrait que sa tombe se trouve sous l'actuel quai no 9 ou no 10 de la gare de King's Cross[17],[18]. Pour l'écrivain et conférencier Matt Brown, il s'agit d'un mythe inventé au cours du XXe siècle[7], probablement forgé après la Seconde Guerre mondiale.
Une autre légende voudrait que son tombeau se trouve sous un tumulus se trouvant à quelques kilomètres au nord du grand parc de Hampstead Heath. Pour Brown, il est possible qu'il s'agisse d'un monticule funéraire. Cependant aucun signe d'inhumation, royale ou autre, n'a été retrouvé lors de la fouille réalisée dans les années 1890[7].
L'épopée de Boadicée fut passée sous silence pendant tout le Moyen Âge, et c'est sous le règne d'une femme de pouvoir qu'elle réapparut. Au XVIe siècle, au moment où l'Angleterre commençait à s'affirmer sur les mers, Élisabeth Ire se servit de l'exemple et du courage de cette reine pour asseoir son autorité et renforcer l'identité nationale[19]. Boadicée était devenue un siècle plus tard une figure connue du passé, inspirant de nombreux récits. Au XIXe siècle, ce fut Victoria, cette fois, qui la prit pour référence. On demanda alors au sculpteur Thomas Thornycroft (en) de représenter la reine des Iceni, en sorte que depuis 1902 on peut admirer devant le Parlement une sculpture de Boadicée conduisant son char, en compagnie de ses deux filles[20].
Depuis le XXe siècle, les études sur Boadicée se sont multipliées et diversifiées. Les récits de Tacite et Dion Cassius furent passés au crible. On s'intéressa aux sources dont disposaient ces deux auteurs, ainsi qu'au déroulé exact des événements. Les fouilles de Colchester, Londres et St Albans, qui apportèrent de nouveaux éléments sur la révolte, furent à l'origine de ces publications.
Pendant la deuxième moitié du XXe siècle, le mouvement féministe fut séduit par cette reine qui, un moment, tint en échec un monde d'hommes (alors que les colons romains étaient des deux sexes et l'armée de Boadicée tout aussi masculine que les troupes romaines). L'historiographie féministe s'empara du personnage de Boadicée, au même titre que d'autres reines guerrières[21]. On assista à la publication d'ouvrages comme celui d'Antonia Fraser : Boadicea's chariot. The warrior queens (1988). Aujourd'hui, Boadicée figure dans quasi tous les dictionnaires de femmes célèbres.
Elle reste de nos jours un mythe national au Royaume-Uni et chaque année apporte son flot régulier de publications sur la reine. Les événements de 60-61 gardent de leur mystère, tel le site encore inconnu de l'affrontement final entre les insurgés et l'armée romaine commandée par Paulinus.
En Angleterre, la redécouverte de Tacite à la Renaissance entraîne un intérêt pour Boadicée.
À l'époque victorienne, le mythe nationaliste prend forme : le sexe de Boadicée n'est plus un enjeu et elle devient le symbole du courage anglais. Pour les historiens britanniques, Boadicée est considérée comme la Vercingétorix bretonne[23]. La révolte de Boadicée est encore de nos jours un symbole de courage et de résistance des populations bretonnes contre l'envahisseur romain.
Personnage romanesque, Boadicée a inspiré les auteurs de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle.
En 1978, Rosemary Sutcliff rédige une fiction historique, intitulée Song for a Dark Queen, dans lequel Boadicée incarne le personnage principal.
De 2005 à 2008, l'auteur britannique d'origine écossaise Manda Scott lui consacre une tétralogie, intitulée La Reine celte, et composée de 4 tomes :
Boadicée est également le personnage central du roman d'aventures Le Dernier Évangile de David Gibbins, publié en 2008, où elle est assimilée au personnage d'Andraste.
En 2020, Par le sang de la louve de Yann Trebaol aux éditions Publishroom Factory.
Dans la série de romans de fantasy Le Trône de fer, le personnage de Daenerys Targaryen est inspiré de la reine Boadicée[24]. Tout comme cette dernière, Daenerys nourrit une profonde haine pour l’esclavage. Ayant rassemblé une puissante armée, elle s’empare de la ville d’Astapor, libère les esclaves et ordonne de tuer leurs maîtres[25]. À l’image de Boadicée, elle se montre impitoyable, n’hésitant pas à brûler les villes qui lui résistent et à massacrer ses habitants. Au cours de leur campagne, les forces de Boadicée ont en effet brûlé certaines villes, comme Camulodunum (Colchester), Londinium (Londres) et Verulamium (St Albans). Dans Le Trône de fer, Daenerys fait de même en utilisant un dragon pour brûler la ville de Port-Réal, et par là-même ses habitants et soldats[26].
Boadicée est également le personnage central du roman de fantasy historique Boudicca de Jean-Laurent Del Socorro, paru en 2017 aux éditions ActuSF.
Tony Valente s'en inspire également dans sa série de mangas Radiant au travers du personnage de Queen Boadicée[réf. nécessaire], une reine forte qui ne se laisse abattre par aucun obstacle (première apparition chapitre 35).
Deux statues, dénuées de toute vraisemblance historique[23] , ont également contribué à donner forme au mythe.
L'épopée de Boadicée a fait l'objet de plusieurs longs-métrages. La reine celte a notamment été interprétée par :
Le film La Reine des Vikings sorti en 1966 est par ailleurs inspiré de l’épopée de la reine des Iceni.
Boadicée apparaît également plusieurs fois à la télévision, comme dans la série télévisée Warrior Queen en 1978, où elle est interprétée par l'actrice Siân Phillips. Elle apparaît aussi par exemple dans l'épisode 4 de la saison 3 de Xéna, la Guerrière, sous les traits de l'actrice néo-zélandaise Jennifer Ward-Lealand.
Symbole de la reine guerrière, Boadicée fait partie des personnages que les jeux vidéo se sont rapidement appropriés.
Boadicée est ainsi présente dans plusieurs jeux de stratégie comme la série Civilization et Total War. Elle est présente en particulier dans Civilization II, Civilization IV et Civilization V: Gods and Kings, dans lesquels le joueur peut la choisir comme dirigeante celte[29], ainsi que dans Civilization VI, où elle est cette fois un général. Dans le jeu Total War : ARENA, elle fait partie des commandants barbares[30].
Elle est également évoquée dans le jeu Red Dead Redemption II, où le premier cheval du protagoniste Arthur Morgan se prénomme Boadicea.
Boudicca apparaît également dans plusieurs jeux de rôle comme Dragon Nest et Fate/Grand Order[31].
Enfin, elle est présente dans plusieurs jeux d’aventure comme Ryse: Son of Rome, dans lequel elle incarne la dirigeante des Celtes en révolte contre l'Empire romain, et Darkest Dungeon dans lequel elle inspire l'une des classes de personnages jouables : la Furie (appelée Boudicca)[32].
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