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poète, dramaturge, peintre, pianiste et compositeur espagnol De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Federico García Lorca est un poète et dramaturge espagnol, également prosateur, peintre, pianiste et compositeur, né le à Fuente Vaqueros près de Grenade et exécuté sommairement le entre Viznar et Alfacar par des milices franquistes. Il est l'un des poètes européens les plus importants du début du XXe siècle.
Naissance |
Fuente Vaqueros (Province de Grenade, Espagne) |
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Décès |
(à 38 ans) Entre Víznar et Alfacar (Province de Grenade, Espagne) |
Nationalité | Espagnol |
Activité principale |
Langue d’écriture | espagnol |
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Mouvement | Génération de 27 |
Genres |
Federico García Lorca, de son nom complet : Federico del Sagrado Corazón de Jesús García Lorca (« Frédéric du Sacré Cœur de Jésus García Lorca »), est l'aîné d'une fratrie de cinq enfants nés de Federico García Rodríguez (1859-1945), propriétaire terrien aisé, et de Vicenta Lorca Romero (1870-1959), maîtresse d'école, qu'il avait épousée en secondes noces (de son premier mariage avec Matilde Palacios Ríos, il n'avait eu aucun enfant[1]). En 1900 naît son premier frère Luis, qui mourra de pneumonie à deux ans[2]. Viendront ensuite : son frère Francisco[3] (1902-1976, poète, historien de la littérature, professeur et diplomate, membre comme son aîné du mouvement littéraire de la Génération de 27), et ses sœurs María de la Concepción (Concha ou Conchita, 1903-1962[2],[4],[5]), puis Isabel[6] (1909-2002, elle aussi professeure et écrivaine)[2]. La mère de Federico possédait une sensibilité affirmée à la poésie et à la musique, et contribuera à former le goût de ses enfants[7],[8]. Federico Garcia Lorca développe très vite une passion pour le dessin.[réf. nécessaire]
Federico passe son enfance à la campagne, près de Grenade où son père possède une grande propriété, la Huerta de San Vicente. Revenant sur cette période de sa prime enfance, il déclarera en 1934 à Buenos Aires dans une interview : « Enfant j’ai vécu de plain-pied avec la nature. Comme tous les enfants, j’attribuais (conférais) à chaque chose, meuble, objet, arbre, pierre, sa personnalité. Je conversais avec eux, et je les aimais[9] ». Cette sorte d'animisme infantile est fréquent[10], mais chez Lorca, il resurgira par bouffées créatives dans sa poésie et son théâtre. D'ailleurs, beaucoup plus tard, même après avoir beaucoup voyagé et avoir vécu de longues périodes en ville, notamment à Madrid, Federico se souviendra à quel point la vie et l'ambiance rurales de la Vega de Granada l'avait imprégné et avait influencé son œuvre :
« J’aime la terre. Je me sens lié à elle dans toutes mes émotions. Mes plus lointains souvenirs d’enfant ont la saveur de la terre. Les bestioles de la terre, les animaux, les gens de la campagne, inspirent, suggèrent de secrets messages qui parviennent à très peu d’entre nous. Je les capte aujourd’hui avec le même esprit que celui de mes plus jeunes années. Sans cela, je n’aurais jamais pu écrire Noces de sang[11]. »
C'est pourtant sans complaisance aucune envers lui-même et le petit garçon qu'il était qu'il interprète sa position sociale de premier-né d'une famille aisée, adulé par sa famille et tout son entourage : en 1928, dans une interview publiée dans La Gaceta Literaria (« La Gazette Littéraire ») d’Ernesto Giménez Caballero, il a en effet résumé ainsi ses premières années à Fuente Vaqueros : « Mon enfance est traversée par l’obsession d’être de ceux qui sont couverts d’argent, ainsi que celle de quelques portraits de cette autre femme qui aurait pu être ma mère, Matilde Palacios [NdT : la première épouse de son père, morte sans enfant]. Mon enfance c’est surtout apprendre les lettres et la musique avec ma mère, être un gosse de riches parmi le peuple, un petit monsieur impérieux[12]. » C’est d’ailleurs à Fuente Vaqueros que Lorca éprouve pour la première fois le sentiment de l’injustice sociale : dans Mi amiguita rubia (« Ma petite amie blonde »), chapitre de Mi pueblo (à la fois « Mon village » et « Mon peuple », écrit en 1915-1916[2]), Federico se remémore l’histoire d’une famille pauvre de Fuente Vaqueros, et en particulier, de la mère qu’il qualifie de « martyr de la vie et du travail[12] ». Federico commence l’école à quatre ans avec son maître des premières classes, Antonio Rodríguez Espinosa, à qui l’unira dès lors une amitié qui durera toute sa vie[12].
Vers l’âge de huit ans, l’enfant qu’il est alors déménage avec sa famille, laquelle s’installe à Asquerosa, petit village depuis rebaptisé Valderrubio. Comme le dit Jocelyne Aubé-Bourligueux : « de santé fragile, mais habitué à vivre librement en pleine campagne, il est depuis sa naissance très entouré de soins par les femmes de son entourage (sa grand-mère Isabel Rodríguez, ses tantes dont la "tía Isabel", ses nourrices, comme la fameuse Dolores) qui veillent sur lui avec tendresse (...) l’initiant, les unes au solfège, à la guitare, ou aux poèmes de Victor Hugo, les autres à la culture orale des berceuses ou des vers de romances. Il pourra bientôt en faire de petits spectacles, par lui créés à travers son premier vrai jouet : un théâtre de marionnettes miniature[7] ». Les vieux tissus et vêtements conservés dans les malles du grenier serviront à vêtir la troupe des personnages de carton et de chiffon, cousus avec sollicitude sur ses instructions par ses tantes, cousines et nourrices qui l'adoraient, pour les saynètes qu'il imagine et fait jouer, ou encore les messes avec sermons qu'il invente en un rituel larmoyant[8]! Cet amour du théâtre de marionnettes ne le quittera jamais et nourrira son imagination de futur dramaturge. De même que son amour précoce pour la musique, comme l'évoque sa mère Vicenta Lorca qui avait pris conscience très tôt des talents de son fils aîné : « avant même de parler, il fredonnait déjà les chansons populaires et s'enthousiasmait pour la guitare[8] ».
Puis il est d’abord envoyé par sa famille à Almería, pour y commencer des études secondaires, logé chez son instituteur Antonio Rodríguez Espinosa : bref séjour interrompu par une grave maladie de gorge qui le met à l’article de la mort et l’oblige à rentrer d’urgence chez ses parents. En 1909, sa famille s’installe définitivement à Grenade, où il reprend ses études secondaires et deviendra bachelier en 1914[7].
Il suit ensuite des études de lettres, de philosophie et de droit à l'université de Grenade, surtout « pour faire plaisir à son père[13], mais c’est vers la musique que va d’abord sa passion, accompagnée du rare talent qui est le sien[7] ». Dès l’âge de dix ans, il avait travaillé le piano et l’harmonie avec son vieux maître don Antonio Segura, disciple de Verdi. Plus tard il « composera brillamment pour sa part, se faisant entendre de ses amis du Rinconcillo[14], qu’il enchante de ses improvisations à longueur de nuits[7] ». C'est à l'université de Grenade qu'il devient l'ami de Manuel de Falla qui exerce une forte influence sur lui[15]. En 1922, les 13 et 14 juin, il organise en lien avec lui le premier Concurso de Cante Jondo de Granada (es) (Concours de Cante Jondo de Grenade).
Après plusieurs années passées à Grenade, il décide d'aller vivre à Madrid pour rencontrer le succès[15]. Il y devient l'ami de Luis Buñuel, Salvador Dalí, Rafael Alberti, José Bergamín, Guillermo de Torre et Sánchez Mejías, parmi ceux qui deviendront des artistes influents en Espagne[15]. Il avait fait aussi la rencontre, décisive pour lui, de ses grands devanciers de la Generación del 98 (Génération de 98), les poètes Antonio Machado et Miguel de Unamuno, rencontre qu'il raconte dans son premier livre publié en 1918: Impresiones y paisajes (« Impressions et paysages »), dont son ami Ismael de la Serna illustre la couverture[16] et lui fait rencontrer Emilia Llanos[17], l'une des "muses" du café Alameda. C'est aussi entre 1919 et 1921 qu'il fait la rencontre d'un autre de ses grands prédécesseurs dont il a reconnu sans partage l'influence sur sa pensée et sur son écriture : Juan Ramón Jiménez[2],[7], de la génération de 14 et futur Prix Nobel de Littérature 1956. Lui et son épouse, Zenobia Camprubí, feront partie du cercle d'amis qui fréquente la Huerta de San Vicente[18]. Il se liera d'amitié aussi avec des poètes plus jeunes que lui : Gabriel Celaya et Pablo Neruda[19]. D'ailleurs, Lorca sera l'un des représentants les plus éminents de Generación del 27 (Génération de 27), à laquelle appartenaient nombre de ses amis poètes, comme une relève de celle de 98. Il participe également, avec Dalí, Maruja Mallo et Margarita Manso, ses camarades à l'Académie des Beaux-Arts de San Fernando, à l'épisode d'ôter son chapeau en public à la Puerta del Sol, geste alors réservé aux hommes, qui inspirera le mouvement artistique des Las Sinsombrero[20].
À Madrid, il rencontre aussi Gregorio Martínez Sierra, le directeur du Teatro Eslava (es), à l'invitation duquel il écrit et met en scène sa première pièce en vers, El maleficio de la mariposa (Le Maléfice du papillon), en 1919-1920. Elle met en scène l'amour impossible entre un cafard et un papillon, avec de nombreux insectes en support. Elle est malheureusement l'objet de moquerie du public, et s'arrête après quatre représentations. Cela refroidit la passion de Lorca pour le théâtre pour le reste de sa carrière, il se justifie plus tard en 1927 au motif que Mariana Pineda, drame patriotique, était sa première pièce véritable. C'est aussi son premier grand succès au théâtre, peu après son accession à la célébrité avec la publication à Malaga, en 1927, de ses Chansons[15].
Pendant les quelques années qui suivent il s'implique de plus en plus dans son art et dans l'avant-garde espagnole. Il publie trois autres recueils de poèmes, dont Romancero Gitano (1928), son recueil de poèmes le plus connu[15].
Cependant, vers la fin des années 1920, Lorca est victime d'une dépression, exacerbée par une angoisse due à la difficulté grandissante de cacher son homosexualité à ses amis et sa famille. Cette disparité entre son succès comme auteur et la souffrance de sa vie privée atteint son paroxysme lors de la collaboration des deux surréalistes, Dalí et Buñuel, pour le film Un chien andalou (1929) que Lorca interprète, comme une allusion, voire une attaque à son encontre[21]. En même temps, sa relation intense, passionnée, mais non réciproque, avec Salvador Dalí s'effondre quand ce dernier rencontre sa future épouse[22].
Consciente de ces problèmes (mais peut-être pas de leurs causes), la famille de Lorca s'arrange pour lui faire faire un long voyage aux États-Unis d'Amérique en 1929-1930[15], pour accompagner le diplomate Fernando de los Ríos, le grand ami de la famille[23]. Ce séjour américain, qui l'amène notamment à New York dans le quartier d'Harlem[24], permet au poète de prendre du recul après sa séparation récente d'avec le sculpteur Emilio Aladrén[25] et d'écrire le chef-d'œuvre Poeta en Nueva York[26].
Son retour en Espagne en 1930 coïncide avec la chute de la dictature de Miguel Primo de Rivera et la proclamation de la République. En 1931, Lorca est nommé directeur de la société de théâtre étudiante subventionnée, La Barraca, dont la mission est de faire des tournées dans les provinces essentiellement rurales pour présenter et diffuser le grand répertoire classique espagnol[15] au plus grand nombre, et notamment auprès des couches sociales les plus déshéritées qui n'y ont habituellement pas accès[27]. C'est ainsi que La Barraca monte, sous la direction de Lorca, des pièces de Lope de Vega, Calderón de la Barca, Tirso de Molina et Cervantes[15]. Comme l'écrit Claude Couffon, l'un de ses traducteurs en français, dans sa préface à «Impressions et Paysages» , La Barraca était « un théâtre du peuple, ambulant et gratuit[28] ». Il écrit alors la trilogie rurale de Bodas de sangre (« Noces de sang »), Yerma et La casa de Bernarda Alba (La Maison de Bernarda Alba)[15]. En 1933-1934, son théâtre rencontre un grand succès, notamment lors d'une tournée triomphale de « Noces de sang » en Amérique latine[15] d'octobre 1933 à mars 1934[29]. C'est à La Barraca qu'il rencontre le footballeur Rafael Rodríguez Rapún, qui évolue à l'Atlético de Madrid, club dont Federico est supporter[30], qui devient son compagnon[31].
Selon Claude Couffon, « depuis longtemps violemment antifasciste (il a signé dès 1933 un manifeste contre l'Allemagne d'Hitler), García Lorca salue la victoire du Front populaire en 1936 [en France] »[28]. Quand la Guerre civile espagnole éclate en juillet 1936, il quitte Madrid pour Grenade, malgré les risques qu'il court dans une ville réputée pour avoir l'oligarchie la plus conservatrice d'Andalousie. Un soulèvement franquiste éclate justement à Grenade où il vient d'arriver. Ses idées et son personnage étaient connus de tous, et « bien que n'ayant jamais participé à la moindre action politique [au sens strict du terme], il est arrêté chez le poète Luis Rosales, où il a cherché un refuge clandestin » (Robert Maillard[15]). Rosales était phalangiste, mais cette protection est insuffisante : Ramón Ruiz Alonso, député de la CEDA, vient arrêter Lorca près d'un mois après le soulèvement[32]. « Arrêté le 16 août, il est fusillé le 19 tout près de la Fuente Grande [lieu-dit "la Grande Fontaine"], que les Maures appelaient [joliment et en prémonition...] la "Source aux Larmes" » (Claude Couffon[28]).
La date et le lieu exacts de sa mort ont fait l'objet d'une longue polémique, mais il semble définitivement établi que Federico García Lorca a été fusillé à 4h45 du matin le 19 août, sur le chemin qui va de Víznar à Alfacar par des rebelles anti-républicains[33]. Son corps serait toujours enterré dans une fosse commune anonyme, quelque part dans la zone, aux côtés du cadavre du maître d'école Dióscoro Galindo, et ceux des anarchistes de la CNT, les toreros Francisco Galadí et Joaquín Arcollas Cabezas, exécutés en même temps que lui[34].
Le régime de Franco décide l'interdiction totale de ses œuvres jusqu'en 1953, quand Obras completas est publié dans une version très censurée.
L'un des premiers hommages à García Lorca est l'œuvre pour orchestre de chambre de Silvestre Revueltas, compositeur mexicain, intitulée Homenaje a Federico García Lorca (« Hommage à Federico García Lorca », 1936). L'œuvre fut jouée au Palais des beaux-arts de Mexico.
En 1956, on érige le premier monument à García Lorca. C'est bien sûr loin de l'Espagne de Franco, dans la ville de Salto, en Uruguay, grâce à l'initiative de son ami américain, l'écrivain Enrique Amorim. Sur la rive du fleuve Uruguay, un mur porte le poème d'Antonio Machado qui regrette la mort de García Lorca à Grenade.
Ce n'est qu'avec la mort de Franco en 1975 que la vie et la mort de Lorca peuvent être évoqués librement en Espagne. Le Monument à Federico García Lorca, statue de bronze de Julio López Hernández, est érigé sur la place madrilène de Sainte-Anne face au Teatro Español- l'œuvre est devenue un haut lieu du tourisme à Madrid[35]-, et un parc porte son nom à Séville, le parc Federico García Lorca. L'aéroport Federico-García-Lorca dessert les villes de Grenade et de Jaén[36].
En France, le jardin Federico-García-Lorca, sur les quais de la Seine (bas du quai de l'Hôtel-de-Ville) à Paris, dans le quartier du Marais, ou la médiathèque Federico García Lorca à Montpellier[37] ainsi qu'aux États-Unis une plaque sur le Castro Rainbow Honor Walk[38], à San Francisco, dans le quartier du Castro lui rendent aussi hommage.
De même, la chanson Take this waltz[39] extraite de l'album I'm Your Man de Leonard Cohen en 1988, adaptée par Cohen à partir d'un texte de García Lorca, est considérée comme un hommage du poète et chanteur canadien au grand poète martyr andalou ; d'ailleurs, une des filles de Leonard Cohen porte le prénom inhabituel de « Lorca » (voir la section Ses compagnes de l'article consacré au chanteur) : Lorca Cohen, née en 1974[40].
L'écrivaine néerlandaise Annemarie Prins écrit la pièce Een zaak Lorca is ons niet bekend en 1965, pièce qui traite de la mort du poète[41].
Jean Picart Le Doux a créé en sa mémoire la tapisserie titrée Hommage à Garcia Lorca présentant un front de taureau et trois étoiles sur fond rouge avec les mots « a las cinco de la tarde » (« à cinq heures de l'après-midi/du soir »), répétés trois fois. L'œuvre, tissée — à Aubusson ? — par le licier René Baudonnet, non datée mais référencée au dos 44/6/6, a figuré dans la vente mobilière aux enchères publiques par l'étude Tajan à Paris le 19/05/1999 (numéro 184 du cat. - reprod. coul.).
Léo Ferré, au sujet de Franco dans sa chanson Franco la muerte, écrite en 1964, chantera : « T'es pas Lorca, mais sa rature ! ».
Jean Ferrat lui rend hommage en décembre 1960 dans sa chanson "Federico García Lorca", pour laquelle Claude-Henri Vic compose la musique, et c'est inhabituel, tandis que Ferrat signe le texte (ce qui en indique l'importance pour lui). De même, Ferrat met en musique en 1967 le poème d'Aragon Un jour, un jour dont les deux premiers quatrains se présentent aussi comme un hommage à Lorca (extrait du recueil Le Fou d'Elsa) :
« Tout ce que l'homme fut de grand et de sublime / Sa protestation ses chants et ses héros / Au-dessus de ce corps et contre ses bourreaux / A Grenade aujourd'hui surgit devant le crime
Et cette bouche absente et Lorca qui s'est tu / Emplissant tout à coup l'univers de silence / Contre les violents tourne la violence / Dieu le fracas que fait un poète qu'on tue
[Refrain] : Un jour pourtant un jour viendra couleur d'orange / Un jour de palme un jour de feuillages au front / Un jour d'épaule nue où les gens s'aimeront / Un jour comme un oiseau sur la plus haute branche »
En 1977, Louis Le Brocquy réalisa son portrait (Paris, galerie Jeanne Bucher en 1979)[42].
L'écrivain chilien Pablo Neruda lui rend également hommage dans son poème J'explique certaines choses, publié dans le recueil España en el corazón.
À Grenade, la Huerta de San Vicente, dans le parc Federico García Lorca, est devenue une maison-musée, grâce au legs d'Isabel García Lorca[43]. Le domaine est géré par sa nièce Laura García Lorca[44].
De nombreux hommages sont dédiés à la figure et à l'œuvre de Federico García Lorca. Pour le 87e anniversaire de sa mort, le journal numérique La gaRceta de la Ribera a invité tous ceux qui le souhaitaient à participer à l'hommage en récitant ou en chantant l'un de ses poèmes, et le résultat est LorcaS.
L'astéroïde (212991) Garcíalorca est nommé en son honneur.
Depuis 2004, la ville de Grenade décerne le Prix international de poésie Federico García Lorca[45].
La recherche de la dépouille du poète a été l'une des obsessions d'Agustín Penón, l'un des spécialistes de son assassinat[46].
La fosse dans laquelle reposerait le poète est située non loin de Fuente Grande, localité de la commune d'Alfacar[47]. En 2008, la justice espagnole accepte qu'elle soit ouverte dans l’intimité, en présence de la seule famille. Toutefois, de nombreuses controverses existent sur la présence de la dépouille du poète dans cette fosse commune[48]. En effet, des recherches, effectuées pendant plusieurs semaines, en vue d'une exhumation, sont abandonnées le 18 décembre 2009. Une autre équipe délimite en 2015 une zone de 10 mètres sur 28 qui pourrait contenir la dépouille de Lorca et de trois autres hommes fusillés avec lui, mais attend le visa des autorités andalouses pour procéder à l'exhumation[49]. On ignore si le poète a effectivement été assassiné dans le champ d'Alfacar ou s'il a été transféré dans un lieu inconnu.
Le poète, pianiste et compositeur puisa une grande partie de son inspiration dans la tradition folklorique andalouse.
García Lorca rencontra très jeune Manuel de Falla à Grenade et développa une amitié profonde avec le compositeur du ballet Le Tricorne. Ils firent tous deux partie de Génération de 27, un mouvement littéraire qui revendiquait l'usage des traditions espagnoles savantes et populaires projetées dans un horizon moderniste flirtant avec l'avant-garde. À Madrid, García Lorca fit la connaissance de Luis Buñuel et Salvador Dalí, dont il devint très proche, et qui lui jouèrent un mauvais tour en s'inspirant de son intimité pour leur premier film , Un chien andalou dont le titre le visait ironiquement selon lui[50],[51],[52].
À côté de ces personnalités, il tenta de trouver sa voie par la poésie, avec son retentissant Romancero gitano, mais aussi par la musique. Dès l'âge de dix ans, « l'Andalou professionnel », comme le surnommait perfidement Jorge Luis Borges, composa des petits airs, mais ses parents s'opposèrent à ce qu'il poursuive des études musicales. Ainsi bifurqua-t-il vers les lettres.
Or, il continuera à écrire toute sa vie des mélodies, de nombreuses chansons, souvent dans un registre flamenco. « Nana de Sevilla » chantée par Victoria de los Ángeles[53], « Las Morillas de Jaen » par Ginesa Ortega[54], « Los Pelegrinitos » par Teresa Berganza[55], trois mélodies éblouissantes de García Lorca parmi d'autres, qui associent l'expressivité populaire du flamenco avec un lyrisme intense propre à son univers.
C'est bien dans la tradition folklorique du flamenco que le poète, pianiste et compositeur puise l'essentiel de sa matière. Il avait organisé avec Manuel de Falla en 1922 El Concurso del Cante Jondo (Concours du chant profond)[56] pour célébrer ce chant flamenco primitif dont l'interprétation archétypale suscite le trouble : est-ce une véritable douleur qu'éprouve le chanteur ? Arrangeur doué de cette tradition andalouse, García Lorca sera emporté par la guerre d'Espagne. Fervent républicain, il fut exécuté par les troupes franquistes près de Grenade, sur sa terre natale si chérie, dans la nuit du .
La souffrance tragique du cante jondo était bien réelle cette fois-ci[57].
Vuelta de Paseo (« Retour de promenade ») est composé en 1929 puis publié en 1930[73].
Ce court poème, paru dans le recueil Poeta en Nueva York, en tête du Chapitre "Poemas de la soledad en la Universidad Columbia" (« Poèmes de la solitude à l'Université Columbia ») témoigne d'une facette particulière de la personnalité de Lorca. Ses promenades nocturnes dans une ville en pleine métamorphose lui ont fait ressentir un dégoût profond pour l'oppression, l'angoisse venue du ciel (avec l'édification des gratte-ciels dans la New York florissante des années 1930 aux États-Unis).
Les couleurs de son Andalousie natale, qui constituaient un motif récurrent dans le style versifié des poèmes du "Romancero Gitano" et du "Cante Jondo", disparaissent ici pour laisser place au gris de la mégalopole, coloris unique qui semble envahir les rues et les esprits. En guise de contre-attaque, Lorca opte pour des vers rythmés, presque chantants, qui se défont des contraintes classiques inhérentes à la pratique des alexandrins dans toutes ses œuvres de jeunesse. Pour finir, même la Nature ("los animalitos de cabeza rota") est détruite et devient inerte comme les matériaux de construction de la cité.
Le poète n'envie en rien les pauvres habitants de la mégalopole, qui semble avoir été recouverte du voile permanent de l'hiver ("el árbol de muñones", "el cristal" -images métaphoriques renvoyant à cette déshumanisation du milieu urbain, à cet affront permanent du citadin face à sa mère, la nature-) Son complexe lié à la grandeur de la ville sera assimilé par certains critiques à une forme coextensive d'agoraphobie. L'oxymore "Assassiné par le ciel", en vers 1, puis répétée au vers final avec une ponctuation exclamative, détermine aussi ce sentiment violent de l'artiste face à tout ce qui s'oppose à la poésie.
Enfin, ce poème symbolise sa ferme opposition au modernisme, à cette quasi-sécularisation qui semble s'emparer d'un monde que le jeune homme (F.G. Lorca n'a alors que 31 ans) trouve industriel, nuisible à l'Homme, en bref trop creux. Le vers "Asesinado por el cielo", répété en début et en fin de strophe, rappelle aussi une fresque socio-politique récurrente dans ce recueil de voyage : les immeubles, la ville, tuent la poésie que peut fournir la Nature.
"Dejare crecer mis cabellos" : ce vers montre que le fléau de la folie et de la vieillesse menace les êtres mortels qui évoluent dans cet environnement disproportionné. Le lectorat pourra par la suite faire de ce vers la métaphore de l'incompréhension et du rejet qui conduisent à la pauvreté, avec un délaissement total des préoccupations corporelles. Car, comme l'écrira l'auteur dans la préface du recueil, "C'est dans son imperfection surréaliste, atypique, que la Nature puise sa poésie. L'exactitude, la rigueur démesurée de la ville font disparaître le sens." (Préface, Poeta en Nueva York, 1930)
Ce poème est donc largement caractéristique de tout le recueil, car il reflète des thématiques variées, comme le vertige du poète aux prises avec la ville, l'homosexualité, ou encore le vieillissement inexorable de l'Homme. Il ouvre d'ailleurs le premier chapitre du recueil, et il est possible de faire de cette œuvre complexe le manifeste d'un surréalisme engagé qui signale son dégoût face au déclin de la vie citadine, et à l'écrasement du paysage par l'industrie...
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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