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Artothèque

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Artothèque
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Une artothèque est une structure de diffusion de l’art contemporain dotée d’une collection d’œuvres d’art originales, enrichie chaque année et prêtée à un large public (particuliers, établissements scolaires, associations, entreprises, collectivités…), à la manière dont une bibliothèque prête des livres et diffuse la lecture.

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L'artothèque de Lyon au sein de la bibliothèque de la Part-Dieu.

Elle soutient également les artistes à travers des expositions, des résidences de création, des éditions, etc. L'artothèque est un outil culturel permettant d’offrir une rencontre privilégiée et directe entre une œuvre d’art et des individus, rencontre étayée par un travail de médiation. Cette rencontre avec l'emprunteur se distingue des activités de médiations publiques du fait qu'elle s'opère dans l'espace privé de la personne emprunteuse. En étant confronté à l'oeuvre d'art sélectionnée pendant une période s'étirant sur plusieurs semaines, généralement trois mois, la personne emprunteuse redéfinit son rapport à l'art de façon autonome et s'approprie l'oeuvre[1].

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Histoire

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Des origines allemandes

Les artothèques prennent racine à Berlin au début du XXe siècle, à l'initiative d'Arthur Seagal, artiste et graveur d'origine roumaine. Avec son groupe d'avant-garde allemande, ils décident de louer leurs œuvres afin de créer un chemin de traverse permettant la diffusion des œuvres et la visibilité des artistes[2].

Lucky Belder mentionne dans son article de 1987 « Art lending in the Netherlands » que des œuvres étaient louées au grand public à partir de 1955. Le groupe d’artistes au cœur de cette initiative avait un but similaire aux Allemands, soit de générer un intérêt pour l’art contemporain, mais aux Pays-Bas cette fois-ci. Après avoir constaté l’engouement pour cette initiative, le gouvernement s’est engagé financièrement pour que les artistes aient accès à une rémunération stable[3]. Évidemment, ce concept a vu le jour dans plusieurs pays au cours du XXe siècle et a évolué au fil des décennies. Cela a mené aux multiples formes d’artothèques que nous connaissons aujourd’hui. Un point fort, relevé à maintes reprises dans l’article de Belder, est l’impact de cette relation entre artistes, art et public : « The art lending system in the Netherlands described above is a unique institution. It meets the public's demand for a means of coming into contact with art, while for artists it constitutes a welcome addition to the opportunities for circulating their work and with that the chance of selling it[3]. »

Un développement progressif en France

Les artothèques, en France, sont nées d’une volonté politique de diffusion de l’art contemporain en région amorcée par André Malraux. Il inaugure la première artothèque au Havre en 1961 lors de l’ouverture de la maison de la culture. La première artothèque pérenne a ensuite vu le jour en 1976, dans la bibliothèque Grand’Place de la Villeneuve, à Grenoble. Cette initiative devient une référence pour les galeries de prêt d’œuvres d’art en bibliothèque[4]. Son objectif était de promouvoir la création artistique et de rendre l’art plus accessible au grand public

Visant à développer les pratiques culturelles des Français et à les initier à l’art contemporain, en suscitant notamment chez eux un comportement d’emprunt d’œuvres voire d’achat, le ministère de la Culture de l’époque s’inspire de ce qui existe en Allemagne depuis le début du XXe siècle et se développe dans les pays d’Europe du Nord dans les années 1950 : des galeries de prêt d’œuvres d’art[5].

Les artothèques telles qu'on les connaît actuellement ont été créées par le ministère de la Culture à partir de 1980[5].

Associatives, municipales, départementales ou régionales, les artothèques doivent répondre aux missions définies par la politique socialiste de l’époque à savoir : sensibiliser le public à l’art contemporain et promouvoir l'art contemporain par des actions de médiation, de diffusion et d’aide à la création. Une de ces actions de diffusion est le prêt d’œuvres d’art au public rendu possible par la constitution d’une collection composée le plus souvent d’œuvres originales à caractère multiple parmi lesquelles on retrouve généralement des estampes, des photographies et des sculptures mais également des vidéos et des cd-roms d’artistes.

Au début des années 1980, la constitution de la collection de chaque artothèque est largement conduite par le ministère de la Culture qui contribue à la création de galeries de prêt sous forme de subvention pour la constitution d’un fonds initial d’œuvres d’art contemporain, dont la moitié au minimum est obligatoirement constituée à partir d’une liste fournie par lui, après avis de la commission d’achats du Fonds national d’art contemporain[6]. L’autre moitié du fonds, destinée à la production locale et régionale, est établie sur propositions conjointes des structures bénéficiaires, des collectivités locales et du conseiller artistique régional. Visant l’application de ses directives, le ministère de la Culture met en place une convention type, signée par ses représentants et ceux de l’organisme gestionnaire. En octroyant une aide financière, versée afin de permettre la constitution d’un fonds initial d’œuvres, le ministère tente d'inciter, dès 1981, la création d’artothèques par le biais d’une convention qui engage, à parité, l’État et une structure décentralisée. En contrepartie de cette aide, l’organisme cosignataire doit prendre en charge le fonctionnement de la structure ainsi que l’enrichissement de la collection en y consacrant un budget annuel.

Née en 1999 pour rompre l’isolement des quelque 40 artothèques implantées en France, l’Association de développement et de recherche sur les artothèques, ADRA, s’est donné pour mission d’étudier toutes les questions relatives à ce qui fonde leur action ; à savoir : la recherche artistique, la diffusion et la médiation, mais aussi la formation du personnel et les problématiques juridiques liées au droit d’auteur. Au-delà de ces objectifs, l’ADRA est un réseau de personnes et de structures, conçu pour porter des projets communs, faire circuler des idées, partager des expériences, valoriser une profession. Un colloque intitulé « Les artothèques, des outils novateurs au service de l’art et du public » a constitué en octobre 1999 l’acte fondateur de l’ADRA. Il a été l’occasion de mettre au jour le bilan de 20 ans d’action et de dégager des perspectives de développement.

A titre d'exemple, en 2016, l'artothèque d’Annecy avait un budget d'environ 50 500 €, pour une collection d'environ 2 680 œuvres et 400 emprunteurs dont 350 individuels[7]. A cette même date, l'artothèque de Caen avait un budget de 355 000 €, et gère 2 600 œuvres empruntées par 600 abonnés dont 350 individuels[7]. L'artothèque de Vitré, avec un budget de 80 753 €, déclarait environ 130 abonnés pour 2030 œuvres, soit environ 400 prêts par an[7]. L'artothèque départementale du Lot fonctionnait avec un budget annuel de 34 000 €[7].

Une apparition récente en Amérique du Nord

Au Québec, une institution notable est L’Artothèque, ouverte depuis 1996. En tant qu’organisation sans but lucratif, et enregistré à la Société des musées du Québec, sa mission est pionnière dans le milieu culturel montréalais et québécois. Elle vise à faire connaître et à diffuser l’art grâce à sa collection, à des programmes de résidence et à des expositions. L’Artothèque joue ainsi un rôle de médiation et de démocratisation de l’art contemporain en créant un lien direct entre les artistes, leurs pratiques et le public. Ce service est plus coûteux que dans une bibliothèque publique, car les tarifs mensuels pour emprunter une œuvre d’art dépendent de sa valeur et nécessite une adhésion annuelle.

De plus, dans une initiative des dernières années, de nouvelles bibliothèques vont jusqu’à intégrer une artothèque à leur bâtiment et leur fonction. Un bon exemple est la bibliothèque Gabrielle-Roy, réouverte en mars 2024 après des rénovations et un agrandissement, se voit aujourd’hui dotée d’une artothèque où les usagers peuvent emprunter des reproductions d’œuvres pendant plusieurs mois, et ce, à prix modique.

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Singularités des artothèques

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Fonds publics destinés à investir l’espace privé, la singularité des collections d’artothèques rend vaine, les concernant, toute tentative de classification habituelle. Singulières collections, en effet, que celles-ci qui, bien que constituées de façon cohérente, ne sont jamais lisibles en tant qu’entités. Singulières encore, ces collections dont la vocation principale est la transmission aux individus, au point que finalement ce sont eux qui les activent, chaque fonds comportant autant de possibles que de parcours d’emprunteurs. Singuliers enfin ces fonds qui constituent un patrimoine actif, circulant et évolutif, participant ainsi à un renouvellement du modèle muséal.

Le travail d’une dimension jusqu’alors non prise en compte par les institutions ou les équipements inventés ces dernières décennies, celle de l’espace privé, conduit les artothèques à occuper une place significative et pertinente dans le paysage institutionnel français de l’art contemporain.

Les artothèques ne font pas toujours parties de bibliothèques et peuvent être installées dans leurs propres locaux ou au sein d’autres institutions tels des établissements culturels comme des musées, des théâtres ou des écoles d’art[8]. Définie comme étant « toute structure qui pratique le prêt d’œuvres d’art » par Meyer[9], l’artothèque a néanmoins habituellement davantage de succès lorsqu’elle est installée dans une bibliothèque car la dynamique d’emprunt et les politiques et activités liées au traitement et la conservation y sont déjà établies[10].

Les artothèques peuvent disposer de locaux spécifiques (comme à Caen, Angers ou Montréal) ou être abrités par des bibliothèques municipales (comme à Lyon, Villeurbanne ou La Roche-sur-Yon en France, ou Québec et Pointe-Claire), des musées (comme à Villefranche-sur-Saône) ou d'autres institutions (hôtel de Région à Limoges).

Outre l’attrait de complémenter sa collection d’œuvres d’art par sa collection documentaire, la bibliothèque se distingue des autres lieux hébergeant des artothèques par son public très hétérogène[11]. Compte tenu de la mission de démocratisation de l’art de l’artothèque, la bibliothèque est un milieu idéal car elle offre un premier contact déjà établis avec le grand public et permet de rejoindre celui-ci dans un contexte déjà familier et propice à l’échange.

D’ailleurs, les bibliothèques, de même que des organisations nationales et internationales, comme l’IFLA, l’ALA, la CFLA-FCAB et la CBPQ, ont récemment intégré à leur mission des objectifs de développement durable[12] qui participent à améliorer la société à travers leurs services et leurs espaces. Alliés aux huit arguments en faveur de l’utilité des bibliothèques de R. David Lankes dans Exigeons de meilleures bibliothèques. Plaidoyer pour une bibliothéconomie nouvelle, il est possible d’inscrire les artothèques dans ce rôle communautaire et social attribué aux bibliothèques[13].

En effet, qu’elles soient intégrées à une bibliothèque ou non, les artothèques incarnent des actions soulignées par Lankes. Elles agissent intrinsèquement comme un service d’achats regroupés, un centre d’apprentissage, et comme gardiennes du patrimoine culturel. La mise en commun des ressources rend possibles le prêt et la circulation des œuvres de la même manière que pour les livres. En démocratisant l’accès à l’art, ce service renforce la cohésion communautaire et enrichit à la fois le quotidien et le bien-être de ses utilisateurs. C’est ainsi que les artothèques font leur part dans le patrimoine culturel et répondent à certains objectifs de développement durable.

C’est d’ailleurs cet argument en faveur des artothèques qui a mené à leur développement, malgré plusieurs faux départs au XXe siècle. Tel qu’illustré plus haut, l’historique de ce système a connu des succès et des embûches. Cela dit, les valeurs de ces artothèques, qu’elles soient intégrées à une bibliothèque ou indépendantes, restent les mêmes. Elles visent à mettre de l’avant les artistes ainsi que la production en tissant des liens à travers diverses communautés.

Sven-Olof Svensson rapproche également les fonctions d’une artothèque et celle d’une bibliothèque, car les œuvres, comme les livres, sont bénéfiques à leur spectateur, tout autant qu’à un lecteur. C’est pour cette raison qu’il revendique la quantité, la qualité et le renouvellement de l’art au sein de ce service. Être fréquemment exposé à de l’art travaille le muscle de la sensibilité à cette discipline, d’où le rôle des artothèques qui incite cela en dehors du cadre muséal ou en galerie. L’éducation artistique peut ainsi se continuer à domicile, voire au travail ou à l’hôpital. Emprunter, c’est aussi explorer et multiplier ses expériences, ce que l’artothèque rend possible en offrant un contact avec l’art et la vision des artistes[14].

Le prêt d’œuvre d’art opère un grand changement dans la relation entre le public et l’œuvre d’art en la désacralisant. Contrairement au musée qui offre une présentation de l’œuvre préétablie, sur un socle ou sous une plaque de plexiglas, l’artothèque offre à l’emprunteur l’opportunité de manipuler l’œuvre, de la placer où il le veut et de la manière qu’il le souhaite dans son espace privé[15]. L’action de toucher l’œuvre est, dans plusieurs cas, une grande étape à franchir. Toutefois, désacraliser l’œuvre d’art ne signifie pas lui retirer sa valeur. Ce n’est pas l’œuvre en tant que telle qui est importante, c’est la relation que l’emprunteur développe avec celle-ci. Cette proximité avec l’œuvre d’art opère en continuité avec la notion d’emprunt de livre et décoince le rapport que les spectateurs auraient avec une œuvre d’art dans un contexte muséal[16].

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Constitution d'une collection d'œuvres d'art

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Contrairement au personnel travaillant dans un musée d’art ou autre organisme culturel, les membres du personnel travaillant dans une bibliothèque ne sont pas spécifiquement formés à la sélection d’œuvres d’art dans le but d’en concevoir une collection. Deux solutions se dégagent cependant pour y palier : faire appel à des experts externes ou se fier à un cadre de référence élaboré par une autorité gouvernementale[17]. Dans le premier cas, des partenariats avec des institutions culturelles locales permettent des échanges entre les organismes et la complémentarité de leurs collections au niveau local[18]. Dans le second, des cadres de références comprenant des indicateurs et des critères permettant d’orienter la sélection d’œuvre par un personnel non qualifié en la matière mais qui comprend cependant certains inconvénients[19].

Un cadre de référence utilisé par toutes les artothèques d’un pays ou d’une région augmente sérieusement le risque d’uniformisation des collections de celles-ci, affectant ainsi la variété des œuvres. Par ailleurs, un des outils mis en place par le CNAP (Centre national des Arts Plastiques) dans les années 1970 en France était une liste d’artistes contemporains parmi lesquels choisir des œuvres[20]. Cette liste d’artistes préapprouvés a cependant causé un nouveau problème : la sur-représentation de certains artistes et la sous-représentation de nombreux autres artistes, en l’occurrence, des artistes femmes. Ainsi, parmi les 194 artistes sélectionnés par le CNAP, seulement 15 étaient des femmes[19]. L’institution ou l’autorité qui règlemente les artothèques se doit donc de s’assurer que le cadre de référence qu’elle propose soit représentatif et paritaire en plus de se renouveler fréquemment, au rythme du développement du monde de l’art.

Au niveau de la sélection Sven-Olof Svensson identifie trois critères pour orienter les choix : la quantité, la qualité et le renouvellement des œuvres de la collection et ce, dans le but d’attirer des emprunteurs de façon régulière. La quantité comprend la notion de nombre mais également de variété d’œuvres à choisir. La qualité implique une sélection attentive d’œuvres à proposer à ses emprunteurs afin de contribuer à ce que Svensson désigne comme la « littératie visuelle » ainsi que la promotion de l’éducation artistique du public adulte[21]. Enfin, le renouvellement touche certes l’idée de variété mais se veut surtout être garant de proposer des œuvres actuelles et de remplir sa mission de promotion de l’art contemporain[9].

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Liste des artothèques

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Canada

Belgique

France

En 2024, le nombre d’artothèques en France dépasse la trentaine, montant à une cinquantaine si l'on intègre au décompte l'ensemble des lieux associatifs ou privés proposant du prêt d’œuvres[22].

Artothèques du réseau de l'ADRA

Davantage d’informations Institution, Période d'activité ...

Autres artothèques françaises

Suisse

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Références

Voir aussi

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