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Guilde

association ou coopération de personnes pratiquant une activité commune au Moyen-Âge De Wikipédia, l'encyclopédie libre

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Une guilde, ou ghilde ou gilde désignait au Moyen Âge (XIe – XIVe siècles) une association ou coopération de personnes pratiquant une activité commune, généralement des marchands, qui, s'étant dotés de règles et de privilèges spécifiques, demandaient protection aux autorités d'une ville ou d'un État. De nos jours, ce terme, quelque peu désuet, désigne une association privée ayant un but précis.

Ce mot provient du vieux norrois gildi signifiant « coopération » ou « assemblée » ou « troupe » (autour d'un repas ou d'une trinquerie, beuverie, potacio[1]) et par extension, accord, entente, de personnes entre elles. D'autres orthographes sont signalées en ancien français ou néerlandais : guild ou ghilde. Est attesté le déterminant issu du latin médiéval ancré dans le langage juridique saxon à partir de gilda, gildum, geldum, à savoir : prestation, tribut, service[2].

Les premières guildes se mettant au service de marchands, apparues en Allemagne du Nord sous le règne de Henri Ier de Germanie, précèdent la Ligue hanséatique[3].

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Histoire

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Les premiers échos qui font mention de guildes remontent au règne de Charlemagne. Des groupes organisés en confrérie (membres d'une même lignée familiale ou non) assurent la sécurité du transport de marchandises, se promettent assistance mutuelle et soins en cas de catastrophes. Au fil du temps, les guildes vont se mettre au service des monopoles commerciaux détenus par des villes.

Les guildes corporatives (se regroupant donc par corps de métiers) réunissaient des artisans d'une même profession. Elles étaient très hiérarchisées et comprenaient des apprentis et des compagnons, puis les maîtres et patrons parmi lesquels étaient choisis les représentants de la corporation, appelés jurés, qui prêtaient serment de respecter les règlements du métier, d'où l'appellation de jurande. Leurs règlements devinrent de plus en plus stricts, fixant les prix, les modalités de fabrication, les conditions de travail et les usages afin d'éviter toute concurrence.

Le commerce n'est pas le seul domaine concerné, les métiers d'armes peuvent avoir leur guilde, telle la guilde des arbalétriers de Bruxelles depuis 1213, chargée de la sureté, sous serment[4].

En Russie de l'Ancien régime, il s'agissait de corporations de riches marchands, ayant leurs propres droits. Elles constituaient donc un Ordre qui était divisé, suivant les biens, en trois classes : marchand de la première Guilde, de la deuxième Guilde, de la troisième Guilde et était transmissible héréditairement, à la réforme de Pierre Ier de Russie, jusqu'en 1917[réf. souhaitée].

Récemment, le terme désigne une association privée ayant un but précis. Exemples : la Guilde du rire, association belge, regroupe des personnes de tous horizons dans l'objectif commun de rigolades collectives ; la Guilde du raid est une association française reconnue d'utilité publique depuis 1981, qui regroupe des aventuriers, écrivains, médecins, journalistes, réalisateurs, etc., pour l'organisation de missions sportives, humanitaires ou scientifiques[5].

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Guildes de jeux en ligne

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Général

Aujourd'hui, une guilde de joueurs est un terme largement utilisé dans le domaine des jeux vidéo. Une guilde est une communauté regroupée autour d’un ou plusieurs jeux et régie par une organisation hiérarchique. Les jeux qui peuvent avoir des guildes sont le plus souvent des jeux qui peuvent se jouer sur Internet, et particulièrement ceux qui se jouent uniquement sur internet comme les jeux de rôle en ligne massivement multijoueur.

Intérêts

Les guildes ont pour but de regrouper un certain nombre de joueurs (membres) pour créer une véritable petite communauté.

Cette communauté peut servir à :

  • aider les joueurs les plus faibles ;
  • faire du commerce ou du troc ;
  • atteindre des objectifs impossibles à faire individuellement ;
  • appartenir à une communauté puissante et reconnue dans l'univers du jeu en question ;
  • ou tout simplement se faire un groupe d’amis avec qui jouer.

L'orientation d'une guilde en est définie par les créateurs.

Dans certains jeux, la prise en compte des guildes est très importante et des options spéciales sont développées comme la possibilité d’acheter des bâtiments réservés à la guilde.

Organisation

Le plus souvent, les guildes ont une hiérarchie claire et définie avec un chef et plusieurs rangs hiérarchiques. La montée dans la hiérarchie peut donner de nouveaux droits tels qu'accepter de nouveaux membres.

La manière d’entrer dans une guilde est très variable selon les guildes. Certaines acceptent tous les joueurs en faisant la demande (voire demandent aux joueurs de rentrer), d’autres sont très élitistes et n’acceptent un joueur qu’après que celui-ci a fait ses preuves (dans le jeu ou non) et qu’il ait fait une série d’actions particulière (exemples : lettre de motivation, participation au forum de la guilde pendant un certain temps…).

Les grosses guildes ont souvent un site Internet dédié et utilisent beaucoup les forums.

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Moyen-Âge et début de l'époque moderne

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Insigne traditionnel de guilde de vitrier, forgé à la main, en Allemagne . On retrouve ces enseignes dans de nombreuses villes européennes anciennes, où les membres de la guilde indiquaient leurs lieux de travail. Plusieurs d'entre elles ont survécu au passage du temps ou ont connu une période de renouveau à l'ère industrielle. Aujourd'hui, elles sont restaurées ou reconstituées, notamment dans les quartiers historiques des villes.

Il existait plusieurs types de guildes, dont les deux principales catégories : les guildes marchandes et les guildes d'artisans [6],[7], mais aussi des guildes religieuses[8]. Les guildes sont apparues au Haut Moyen Âge, lorsque des artisans s'unirent pour protéger leurs intérêts communs. À Augsbourg, en Allemagne, les guildes d'artisans sont mentionnées dans la charte de la ville dès 1156 [9]

Le système des guildes et des marchands est arrivé en Angleterre après la conquête normande. Des sociétés de marchands constituées en corporation dans chaque ville détenaient alors le droit exclusif d'y exercer leurs activités. Dans de nombreux cas, elles devinrent l'organe directeur d'une ville. Par exemple, le Guildhall de Londres devint le siège du Conseil communal de la Corporation de la Cité de Londres, la plus ancienne administration locale élue sans interruption au monde [10], dont les membres doivent encore aujourd'hui être des citoyens libres de la ville [11]. Le droit de cité de Londres, en vigueur du Moyen Âge jusqu'en 1835, conférait le droit de commercer et n'était accordé qu'aux membres d'une guilde ou d'une livrée [12].

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Armoiries des guildes d'une ville de la République tchèque affichant les symboles de divers métiers et artisanats médiévaux européens

Les premières communautés égalitaires appelées « guildes » furent dénoncées par le clergé catholique pour leurs « conjurations » : les serments contraignants prêtés par leurs membres pour s'entraider dans l'adversité, tuer des ennemis spécifiques et se soutenir mutuellement dans les querelles ou les affaires. Ces serments avaient pour occasion des banquets arrosés organisés le 26 décembre. En 858, l'évêque franc-occidental Hincmar tenta en vain de christianiser les guildes [13].

Au début du Moyen Âge, la plupart des organisations artisanales romaines, initialement constituées en confréries religieuses, avaient disparu, à l'exception des tailleurs de pierre et parfois des verriers, principalement des personnes possédant des compétences qui servaient à leurs communautés locales. Grégoire de Tours raconte l'histoire miraculeuse d'un constructeur dont l'art et les techniques l'ont soudainement quitté, mais ont été restaurés par une apparition de la Vierge Marie en rêve. Michel Rouche [14] remarque que l'histoire témoigne de l'importance du savoir-faire transmis de manière pratique, souvent d'un maître à son apprenti.

En France, les guildes étaient appelées corps de métiers . Selon Viktor Ivanovitch Rutenburg, « au sein même de la guilde, la division du travail était très faible, et celle-ci tendait plutôt à s'opérer entre les guildes. Ainsi, selon le Livre des Métiers d' Étienne Boileau, au milieu du XIIIe siècle, on comptait pas moins de 100 guildes à Paris, chiffre qui atteignait 350 au XIVe siècle. » [15] La division et la spécialisation des guildes était telle qu'il existait différentes guildes de métallurgistes : les maréchaux-ferrants, les couteliers, les serruriers, les forgerons de chaînes ou encore les cloutiers. Dans des grades villes comme Paris, il y avait encore plus de subdivisons, qui formaient souvent des corporations distinctes ; les armuriers étaient divisés en fabricants de casques, d'écussons, de harnais; de polisseurs de harnais, etc. [16] Dans les villes catalanes, notamment à Barcelone, les guildes ou gremis étaient un élément essentiel de la société : une guilde de cordonniers est mentionnée aussi tôt qu'en 1208[17].

En Angleterre, plus précisément au sein de la City of London Corporation, plus de 110 guildes[18], appelées compagnies de livrée, survivent encore aujourd'hui[19], la plus ancienne ayant 870 ans[20]. D'autres groupes, comme la Worshipful Company of Tax Advisers, ont été formés beaucoup plus récemment. L'adhésion à une compagnie de livrée est attendue des personnes participant à la gouvernance de la City, en tant que Lord-maire et Remembrancer .

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Le bâtiment médiéval de la guilde des marchands à Vyborg, en Russie

Le système des guildes atteint sa pleine maturité en Allemagne c.1300 et perdura dans les villes allemandes jusqu'au XIXe siècle, avec des privilèges spécifiques pour certaines professions encore en vigueur aujourd'hui. Au XVe siècle, Hambourg comptait 100 guildes, Cologne 80 et Lübeck 70[21]. Les dernières guildes à se développer en Europe occidentale furent les gremios d'Espagne : par exemple, Valence (1332) ou Tolède (1426).

Toutes les économies des villes n’étaient pas contrôlées par des guildes ; certaines villes étaient « libres ».

Là où les guildes étaient au pouvoir, elles façonnaient le travail, la production et le commerce ; elles exerçaient un contrôle strict sur le capital éducatif et les concepts modernes de progression tout au long de la vie, de l'apprenti à l'artisan, puis du compagnon à la maîtrise et au grand maître reconnus, commencèrent à émerger. Pour devenir maître, un compagnon devait entreprendre un voyage de trois ans appelé « Wanderjahre » . [ citation nécessaire ] La pratique des Wanderjahre existe toujours en Allemagne et en France, bien qu'elle n'y soit pas obligatoire.

À mesure que la production est devenue plus spécialisée, les guildes de métiers ont été divisées et subdivisées, suscitant des querelles de juridiction qui ont produit les documents par lesquels les historiens de l'économie retracent leur développement : les guildes de métallurgie de Nuremberg étaient divisées en des dizaines de métiers indépendants dans l'économie en plein essor du XIIIe siècle, et il y avait 101 métiers à Paris en 1260[22]. À Gand comme à Florence, l' industrie textile de la laine s'est développée comme un conglomérat de guildes spécialisées. L'apparition des guildes européennes était liée à l'émergence de l'économie monétaire et à l'urbanisation . Avant cette époque, il n'était pas possible de gérer une organisation axée sur l'argent, car la monnaie-marchandise était le moyen normal de faire des affaires.

Les guildes étaient au cœur de l'organisation de l'artisanat européen jusqu'au XVIe siècle. En France, leur résurgence dans la seconde moitié du XVIIe siècle témoigne de la volonté de Louis XIV et de Jean-Baptiste Colbert d'imposer l'unité, de contrôler la production et de bénéficier d'une structure transparente afin de rendre plus efficace la taxation[23].

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Un centre de gouvernement urbain: le Guildhall, Londres (gravure, c.1805 )

Les guildes étaient des organisations bénéficiant de certains privilèges (lettres patentes), généralement délivrées par le roi ou l'État et supervisées par les autorités commerciales locales (une sorte de chambre de commerce). Elles étaient les précurseurs du système moderne des brevets et des marques . Les guildes maintenaient également parfois des fonds pour soutenir les membres infirmes ou âgés, ainsi que les veuves et les orphelins des membres des guildes, des indemnités funéraires et une allocation de « tramway » pour ceux qui devaient voyager pour trouver du travail. Avec le déclin du système des guildes de la Cité de Londres au XVIIe siècle, les Livery Companies se transformèrent en confréries d'entraide sur le même modèle.

Les guildes européennes imposaient de longues périodes d' apprentissage standardisées et rendaient difficile pour ceux qui manquaient de capitaux de s'installer. Il était également très difficile d'accéder aux matériaux et aux connaissances requises sans l'approbation de leurs pairs, ou de vendre sur certains marchés, un domaine qui dominait également les préoccupations des guildes. Ce sont là des caractéristiques déterminantes du mercantilisme en économie, qui a dominé la majeure partie de la réflexion européenne sur l'économie politique jusqu'à l'essor de l'économie classique .

Le système des guildes a survécu à l'émergence des premiers capitalistes, qui ont commencé à diviser leurs membres en « nantis » et « démunis ». Les luttes civiles qui ont caractérisé les villes du XIVe siècle étaient en partie des luttes entre les grandes guildes et les petites guildes artisanales, ces dernières dépendant du travail à la pièce . « À Florence, on les distinguait ouvertement : les Arti maggiori et les Arti minori il existait déjà un popolo grasso et un popolo magro »[24]. Des luttes plus acharnées opposaient les guildes, essentiellement conservatrices, à la classe marchande, qui contrôlait de plus en plus les moyens de production et les capitaux investis dans des projets d'expansion, souvent sous les règles de leurs propres guildes. Les historiens sociaux allemands retracent la Zunftrevolution, la révolution urbaine des membres des guildes contre un patriciat urbain autoritaire, y voyant parfois cependant des avant-goûts des luttes des classes du XIXe siècle.

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Serrurier, 1451

À la campagne, où les règles des guildes n'existaient pas, l'entrepreneur disposant de capitaux était libre d'organiser une industrie artisanale, un réseau de paysans qui filaient et tissaient dans leurs propres locaux pour son compte, et qui recevaient leurs matières premières, voire leurs métiers à tisser du capitaliste qui prenait une part des bénéfices. Un système aussi dispersé était plus difficile à contrôler là où existait un marché local pour les matières premières : la laine était facilement disponible dans les régions d'élevage de moutons, contrairement à la soie.

Organisation

À Florence, en Italie, il existait sept à douze « grandes guildes » et quatorze « petites guildes ». Les grandes guildes les plus importantes étaient celles des juges et des notaires, qui géraient les affaires juridiques de toutes les autres guildes et servaient souvent d'arbitres en cas de litige[25]. Parmi les autres grandes guildes, on trouve celles des lainiers, des soyeux et des changeurs de monnaie. Elles s'enorgueillissaient de leur réputation de travail de très haute qualité, accompagné par des prix élevés. Elles infligeaient des amendes à leurs membres qui dérogeaient aux normes. Parmi les autres grandes guildes figuraient celles des médecins, des pharmaciens et des fourreurs. Parmi les plus petites guildes, on trouvait celles des boulangers, des selliers, des ferronniers et d'autres artisans. Elles comptaient souvent un nombre important de membres, mais n'avaient pas assez de prestige et de pouvoir politique pour influencer les affaires de la ville[26].

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Un leg des guildes : le Windsor Guildhall, qui était à l'origine un lieu de rencontre pour les guildes, ainsi qu'un siège de magistrats et un hôtel de ville .

La guilde était composée d'experts expérimentés dans leur domaine d'artisanat. On les appelait maîtres artisans . Avant qu'un nouvel employé puisse atteindre un tel niveau de maîtrise, il devait suivre une période de formation, appelée apprentissage . Après cette période, il pouvait accéder au rang de compagnon . Les apprentis n'apprenaient généralement que les techniques les plus élémentaires jusqu'à ce que leurs pairs leur confient la garde des secrets de la guilde ou de l'entreprise.

Contrairement aux apprentis, les compagnons pouvaient travailler pour d'autres maîtres et étaient généralement payés à la journée. Après avoir été employé par un maître pendant plusieurs années et avoir réalisé un travail de qualité, l'apprenti obtenait le grade de compagnon et recevait des documents (lettres ou certificats de son maître et/ou de la guilde elle-même) le certifiant comme compagnon. En tant qu'ouvrier qualifié indépendant, il pouvait voyager dans d'autres villes et pays pour apprendre auprès d'autres maîtres. Ces pérégrinations pouvaient couvrir de vastes régions d'Europe et constituaient un moyen officieux de communiquer de nouvelles méthodes et techniques, bien que tous les compagnons ne les effectuaient pas – ils étaient plus fréquents en Allemagne et en Italie, et dans d'autres pays, les compagnons des petites villes se rendaient souvent dans la capitale de leur pays[27].

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La guilde des peintres de Haarlem en 1675, par Jan de Bray

Après plusieurs années d'expérience, un compagnon pouvait être reçu maître artisan, bien que dans certaines guildes, cette étape puisse être franchie directement après le stade d'apprenti. Cela nécessitait généralement l'approbation de tous les maîtres de la guilde, un don en argent et autres biens (qui étaient souvent omis pour les fils de membres actuels), et la production d'un « chef-d'œuvre » illustrant les compétences du futur maître artisan ; ce dernier était souvent conservé par la guilde[28].

Les guildes médiévales étaient établies par charte, lettre patente ou autre autorisation similaire de la ville ou du souverain. Elles détenaient généralement le monopole du commerce de son artisanat dans la ville où elles opéraient : la loi interdisait aux artisans d'exploiter une entreprise s'ils n'étaient pas membres d'une guilde, et seuls les maîtres pouvaient en faire partie. Avant que ces privilèges ne soient légiférés, ces groupes d'artisans étaient simplement appelés « associations d'artisans ».

Les autorités municipales pouvaient être représentées aux réunions des guildes et disposaient ainsi d'un moyen de contrôler les activités artisanales. C'était important, car les villes dépendaient très souvent de leur bonne réputation pour l'exportation d'une gamme restreinte de produits, dont dépendait non seulement la réputation de la guilde, mais aussi celle de la ville. Le contrôle de l'association de lieux physiques à des produits d'exportation réputés, par exemple le vin de Champagne et de Bordeaux, les faïences émaillées à l'étain de certaines villes de Hollande, la dentelle de Chantilly, etc., contribuait à asseoir la place d'une ville dans le commerce mondial – ce qui a donné naissance aux marques modernes.

Dans de nombreuses villes allemandes et italiennes, les guildes les plus puissantes exerçaient souvent une influence politique considérable et tentaient parfois de contrôler les autorités municipales. Au XIVe siècle, cela provoqua de nombreux soulèvements sanglants, au cours desquels les guildes dissolvèrent les conseils municipaux et emprisonnèrent les patriciens pour accroître leur influence. Dans le nord-est de l'Allemagne du XIVe siècle, les personnes d'origine wende, c'est-à-dire slave, n'étaient pas autorisées à adhérer à certaines guildes[29].

Empire russe

À l'époque de la Rus' de Kiev, les marchands étaient désignés par trois noms différents selon l'ampleur de leurs opérations : les « gosti » (littéralement « invités »), commerçants internationaux ou étrangers, les « kuptsy », commerçants locaux et les « torgovtsy » commerçants de petites marchandises. À la fin du XVIe siècle, les gostis étaient intégrés dans la hiérarchie moscovite en tant que chefs de grandes corporations avec certaines obligations envers le tsar et des privilèges leur étant donné par le tsar. Le commerce régional et local qui opérait en dehors de la capitale était mené respectivement par la gostinnaya sotnya (littéralement, la centaine des invités) et la sukonnaya sotnya (la centaine des merciers).

Depuis les réformes de Pierre le Grand au début du XVIIIe siècle jusqu'au Décret sur l'abolition des États, ces divisions étaient organisées hiérarchiquement en trois classes, enregistrées auprès de l'État moyennant une cotisation et bénéficiant de privilèges pour le commerce dans certains domaines et marchandises. L'adhésion était réservée aux hommes et n'était pas automatiquement héréditaire ; les proches bénéficiaient d'une reconnaissance spéciale pour mener des affaires au nom du membre de la guilde jusqu'à sa mort, les jeunes hommes adultes devant acquérir leur propre adhésion. Le Manifeste du 17 mars 1775 définissait plus précisément les exigences en matière de capital pour chaque rang[30].

La chute des guildes

Ogilvie (2004) soutient que les guildes ont eu un impact négatif sur la qualité, les compétences et l'innovation. À cause de ce que les économistes appellent aujourd'hui la « recherche de rentes », elles ont imposé des pertes sèches à l'économie. Ogilvie soutient qu'elles ont généré des externalités positives limitées et note que l'industrie n'a commencé à prospérer qu'après la disparition des guildes. Les guildes ont perduré au fil des siècles grâce à la redistribution des ressources aux marchands politiquement puissants. D'un autre côté, Ogilvie partage cet avis : les guildes ont créé un « capital social » de normes partagées, d'informations communes, de sanctions mutuelles et d'action politique collective. Ce capital social a bénéficié aux membres des guildes, même s'il a sans doute nui aux personnes extérieures selon elle[31].

Le système des guildes devint la cible de nombreuses critiques vers la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle. Les critiques affirmaient qu'il entravait le libre-échange, l'innovation technologique, le transfert de technologie et le développement des entreprises . Selon plusieurs témoignages de l'époque, les guildes s'engagèrent de plus en plus dans de simples luttes territoriales entre elles et contre les praticiens libres de leurs arts.

Jean-Jacques Rousseau et Adam Smith comptaient parmi les critiques les plus virulents du système des guildes. Partout en Europe, une tendance à s'opposer au contrôle gouvernemental sur les métiers, en faveur d'un système de libre-échange fondé sur le laissez-faire, s'est rapidement développée et a pénétré les systèmes politiques et juridiques. Nombre de participants à la Révolution française considéraient les guildes comme un dernier vestige du féodalisme . Le décret d'Allarde du 2 mars 1791 a supprimé les guildes en France[32]. En 1803, le Code Napoléon interdisait lui toute coalition d'ouvriers[33].

Dans son Manifeste communiste, Karl Marx critiquait également le système des guildes pour sa gradation rigide des rangs sociaux et ce qu'il considérait comme la relation oppresseur-opprimé qu'il impliquait. C'est aux XVIIIe et XIXe siècles que les guildes ont commencé à avoir une image négative auprès de la population, image qui subsiste encore aujourd'hui pour plusieurs personnes. L'opinion publique s'est retournée contre elles, partiellement à cause de leur incapacité à contrôler les comportements corporatifs indisciplinés, .

En raison de l'industrialisation et de la modernisation du commerce et de l'industrie ainsi que de l'essor d'États-nations puissants capables de délivrer directement des brevets et des droits d'auteur révélant souvent les secrets commerciaux le pouvoir des guildes s'est affaibli. Après la Révolution française, elles ont progressivement décliné dans la plupart des pays européens au cours du XIXe siècle, le système des guildes étant dissous et remplacé par des lois favorisant le libre-échange. À cause du déclin des guildes, de nombreux anciens artisans ont été contraints de chercher un emploi dans les industries manufacturières émergentes, n'utilisant plus des techniques jalousement gardées, autrefois protégées par les guildes, mais plutôt les méthodes standardisées contrôlées par les entreprises . L'intérêt pour le système médiéval des guildes a été ravivé à la fin du XIXe siècle, dans les cercles d'extrême droite. Entre autres, le fascisme italien a instauré le corporatisme, opérant au niveau national plutôt qu'au niveau municipal, pour tenter d'imiter le corporatisme du Moyen Âge.

Influence

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Cordonniers, 1568

Certains soutiennent que les guildes fonctionnaient davantage comme des cartels que comme des syndicats (Olson 1982) et on dit donc parfois que les guildes sont les précurseurs des cartels modernes. Cependant, les guildes peuvent aussi être considérées comme un ensemble d'artisans qualifiés indépendants possédant et contrôlant les matériaux et les outils dont ils avaient besoin pour produire leurs biens.

Le privilège exclusif d'une guilde de produire certains biens ou de fournir certains services était similaire dans son esprit aux systèmes de brevets originaux qui ont fait leur apparition en Angleterre en 1624. Ces systèmes ont joué un rôle dans la fin de la domination des guildes, car les méthodes de secret commercial ont été remplacées par des entreprises modernes révélant directement leurs techniques et comptant sur l'État et sur les lois sur les brevets pour faire respecter leur monopole légal.

Certaines traditions corporatives subsistent encore dans quelques métiers, notamment en Europe chez les cordonniers et les barbiers . Elles n'ont cependant pas une grande importance économique, si ce n'est pour rappeler les responsabilités de certains métiers envers la population.

On pourrait aujourd'hui dire que le droit droit de la concurrence moderne dérive en quelque sorte des premières lois par lesquelles les guildes ont été abolies en Europe.

Conséquences économiques

Les conséquences économiques des guildes ont suscité de vifs débats parmi les historiens de l'économie. D'un côté, certains spécialistes affirment que, puisque les guildes marchandes ont perduré pendant de longues périodes, elles devaient être des institutions efficaces (puisque les institutions inefficaces disparaissent). D'autres affirment qu'elles ont perduré non pas parce qu'elles bénéficiaient à l'ensemble de l'économie, mais parce qu'elles bénéficiaient aux propriétaires, qui usaient du pouvoir politique pour les protéger. Ogilvie (2011) affirme qu'elles réglementaient le commerce à leur profit, constituaient des monopoles, faussaient les marchés, fixaient les prix et restreignaient l'accès à la guilde[27]. Ogilvie (2008) soutient que leurs longs apprentissages étaient inutiles pour acquérir des compétences, et que leur conservatisme réduisait le taux d'innovation et appauvrissait la société. Elle affirme que leur objectif principal était la recherche de rente, c'est-à-dire transférer l'argent aux membres au détriment de l'ensemble de l'économie[34].

L'ouvrage d'Epstein et Prak (2008) réfute les conclusions d'Ogilvie[35]. Plus précisément, Epstein soutient que les guildes étaient des institutions de partage des coûts plutôt que de recherche de rentes. Elles repéraient et associaient maîtres et apprentis potentiels grâce à un apprentissage encadré. Il soutient que les nombreuses années d'apprentissage par l'expérience étaient nécessaires afin de parfaire leurs compétences[36].

La mesure dans laquelle les guildes ont pu monopoliser les marchés est également débattue[37].

Qualité du produit

Les guildes étaient souvent très soucieuses de la qualité de leurs produits. Elles émettaient des réglementations très strictes sur la qualité du travail de leurs membres et réprimaient les pratiques illicites chez les non-membres, ce qui permettait d'établir une norme à laquelle les consommateurs pouvaient se fier. Elles étaient très soucieuses de l'image du public. En octobre 1712, la guilde des perruquiers de Lyon adressa une pétition aux magistrats locaux. Selon cette pétition, les maîtres de guilde exigeaient des officiers de guilde qu'ils renforcent le contrôle des lois interdisant l'utilisation de cheveux décolorés ou de poils de chèvre et d'agneau sauvages. Leur véritable inquiétude était que la décoloration des cheveux altère la qualité de la perruque, la rendant trop fine pour être coiffée. Les officiers de guilde soulignaient que si le consommateur découvrait la mauvaise qualité, la guilde serait blâmée et le consommateur irait chercher ailleurs ses produits[38].

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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Gervase Rosser, « Crafts, Guilds and the Negociation of Work in the Medieval Town » in « Past & Present » no 154 (), p. 3-31

Liens externes

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Notes et références

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