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écrivain, philosophe et journaliste français De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Albert Camus, né le à Mondovi (aujourd'hui Dréan) dans le département de Constantine (wilaya d'El Tarf), en Algérie française, et mort par accident le à Villeblevin en France, est un philosophe, écrivain, journaliste militant, romancier, dramaturge, essayiste et nouvelliste français, lauréat du prix Nobel de littérature en 1957.
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Université d'Alger ( - |
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Fratrie |
Lucien Jean Étienne Camus (frère) |
Conjoints |
Simone Hié (d) (de à ) Francine Faure (de à ) |
Enfants |
A travaillé pour |
L'Express (- Combat (- Paris-Soir (- Le Soir républicain (- Alger républicain (- |
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Né sur la côte orientale de l'Algérie, à proximité de Bône (aujourd'hui Annaba), de parents pieds-noirs, Camus passe son enfance dans les quartiers pauvres et populaires. Grâce à son instituteur Louis Germain, il est reçu au Grand Lycée d’Alger et entre par la suite en hypokhâgne à l'Université, où Jean Grenier est son professeur de philosophie. Mais sa santé — dégradée par la tuberculose — ne lui permet pas d'accéder à une carrière universitaire. Après des débuts journalistiques et littéraires et la publication de deux de ses plus grandes œuvres : L'Étranger et Le Mythe de Sisyphe, il s'engage dans la Résistance française lors de l'Occupation, où il devient, fin 1943, rédacteur en chef du journal Combat.
Son œuvre comprend des pièces de théâtre, des romans, des nouvelles, des films, des poèmes et des essais dans lesquels il développe un humanisme sceptique et lucide fondé sur la prise de conscience de l'absurde, de la condition humaine et de la révolte, qui conduit à l'action, à la justice, et qui donne un sens au monde et à l'existence ; l'œuvre de Camus a par conséquent contribué à la montée de la philosophie de l'absurde. Rattaché à l'existentialisme, dans le sens où « l'absurde camusien » est aussi une réponse au nihilisme, l'écrivain a toujours refusé d'être étiqueté à ce courant.
Internationaliste réformiste, moraliste, abolitionniste et proche des courants libertaires, il prend notamment position sur la question de l'indépendance de l'Algérie et ses rapports avec le Parti communiste algérien, qu'il quitte après un court passage de deux ans. Il proteste également contre les inégalités et la misère qui frappent les indigènes d'Afrique du Nord tout comme la caricature du pied-noir exploiteur, tout en prenant la défense des Espagnols exilés antifascistes, des victimes du stalinisme ou encore des objecteurs de conscience. En marge des courants philosophiques, Camus est d'abord « témoin de son temps et ne cesse de lutter contre les idéologies et les abstractions qui détournent de l'humain »[1]. Il est ainsi amené à s'opposer aussi bien au libéralisme qu’à l'existentialisme et au marxisme. Lors de la sortie de L'Homme révolté en 1951, sa critique de la légitimation de la violence et son anti-soviétisme lui vaut les anathèmes des intellectuels communistes, ainsi que sa rupture avec Jean-Paul Sartre.
En janvier 1960, victime d'un accident de voiture brutal alors qu'il se rendait à Paris avec Janine, Anne et Michel Gallimard, il meurt sur le coup, à 46 ans, et laisse derrière lui une partie inachevée de son œuvre.
Albert Camus descend d'une famille d'origine modeste qui s'est installée au milieu du dix-neuvième siècle en Algérie française[S 1][S 2], annexée à la France à partir de 1834 et divisée en départements français à partir de 1848[2].
Sa famille paternelle est originaire de la métropole. Un bisaïeul, Claude Camus, ferblantier, né en 1809 à Bordeaux de père inconnu[3], épouse en 1839 à Marseille Thérèse Beleoud[4]. Il meurt en 1865 à Ouled Fayet (département d'Alger, actuelle wilaya d'Alger)[5]. Son autre arrière-grand-père, Mathieu Just Cormery, né en 1826 à Silhac (Ardèche), épouse Marguerite Léonard en 1852 à Ouled-Fayet. Elle est originaire d'Elange, actuel quartier de Thionville en Moselle[6]. Il meurt en 1873[7]. Son grand-père Jean-Baptiste Camus épouse la même année Marie Hortense Cormery[8].
Son père, Lucien Auguste Camus, né le 28 novembre 1885 à Oulet-Fayet, épouse le 28 novembre 1885 à Alger Catherine Sintès, née en 1882 à Birkhadem (département d'Alger, actuelle wilaya d'Alger)[9], d'une famille originaire de Minorque en Espagne. De leur union naissent deux enfants : Lucien Jean, né le 20 janvier 1910 à Alger[10] ; Albert, né le 7 novembre 1913 à Mondovi. Entre octobre 1906 et septembre 1908, il effectue son service militaire au sein du 1er régiment de zouaves et participe à la campagne du Maroc[11].
Lucien Camus est le premier homme de sa famille à s'extraire de l'analphabétisme. Orphelin dès l'âge d'un an, il apprend les rudiments de la lecture à l'orphelinat. Devenu ouvrier agricole, il approfondit la lecture et l’écriture auprès de Jules Ricôme, son employeur, négociant en vin d’Alger, grâce à qui il devint caviste. En 1913, à la naissance d'Albert, il est chargé d’un domaine viticole à Mondovi dans le hameau de Saint-Paul. En juillet 1914, le paludisme menace la petite famille. Catherine Hélène quitte la région avec ses deux jeunes enfants pour s’installer chez sa mère « despotique » et ses deux frères (Étienne — sourd, qui travaille comme tonnelier — et Joseph, cheminot) dans un appartement du quartier Belcourt au 17 rue de Lyon, dans les faubourgs d'Alger[S 3]. La pauvreté les éloignera davantage du centre de la ville, en 1921, les obligeant à déménager au 93 rue de Lyon (actuelle rue Mohamed Belouizdad).
Lucien Camus est mobilisé lors de la Grande Guerre comme 2e classe, de nouveau dans le 1er régiment de zouaves[11]. Blessé à la tête par un éclat d'obus, il meurt pour la France le 11 octobre 1914 à Saint-Brieuc[12] à l'hôpital auxiliaire rue Saint-Benoît[13]. Orphelins de père pour fait de guerre, les deux frères sont faits pupilles de la Nation[S 4].
De son père, Camus ne connaîtra que quelques photographies, les éclats d'obus que l'armée adressa à la veuve, les rapports de gestion des domaines vinicoles et les deux cartes postales qu’il adressa de la métropole, la première en août 1914 à Noisy-le-Sec, la seconde en septembre à l’hôpital de Saint-Brieuc. Il retiendra particulièrement deux messages appelant à la mesure et dénonçant la barbarie. Le premier marque l’indignation du père face à la cruauté revancharde lors de la guerre du Maroc : « Un homme, ça s'empêche »[14] ; le second est une dénonciation de la peine de mort : « Je me suis souvenu dans ces moments d'une histoire que maman me racontait à propos de mon père. Je ne l'avais pas connu. Tout ce que je connaissais de précis sur cet homme, c'était peut-être ce que m'en disait alors maman : il était allé voir exécuter un assassin. Il était malade à l'idée d'y aller. Il l'avait fait cependant et au retour avait vomi une partie de la matinée »[15].
Catherine Hélène Sintès, mère d’Albert, en partie sourde, ne sait ni lire, ni écrire : elle ne comprend un interlocuteur qu'en lisant sur ses lèvres, n'a qu'un très petit vocabulaire « de 400 mots » et communique en utilisant une gestuelle propre à sa famille, utilisée également par son frère Étienne. « Dépendante et perdue au quotidien, peu écoutée et peu comprise, condamnée aux échanges rudimentaires et banaux, elle est coupée du monde des autres et n’a accès ni à la culture ni au divertissement »[S 5],[16],[17]. L’expérience sera douloureuse pour Camus qui ne cessera de questionner ce mutisme terriblement angoissant. Son œuvre portera toujours la marque de l’indicible, de l’incapacité à dire ou de l’impuissance à faire entendre sa voix (Les Muets, L'Étranger, Le Malentendu et Le Renégat à qui on a coupé la langue). Le silence est mortel pour Jan, le personnage du Malentendu, tandis qu’il condamne Meursault à n’être qu’un coupable puni de la peine de mort. La vie à portée de mots se perd dans un terrifiant silence. Les sans-mots sont les premières victimes des tragédies camusiennes. La voix de la pauvreté est d’abord silencieuse.
Albert Camus est scolarisé à l’école de la rue d’Aumérat à Alger. Son instituteur, Louis Germain, lui apprend à lire et remarque très tôt ses heureuses dispositions : il est sportif, habile de ses mains et brillant en classe[18]. En cours moyen, il lui permet d’approfondir ses connaissances et lui donne des leçons gratuites pour le préparer en 1924 au concours des bourses, malgré la défiance de sa grand-mère qui souhaitait qu'il gagnât sa vie au plus tôt. Ancien combattant de la Première Guerre mondiale, où est mort le père du futur écrivain, Louis Germain lit à ses élèves Les Croix de bois de Roland Dorgelès, dont les extraits émeuvent beaucoup le petit Albert, qui y découvre l'horreur de la guerre. Camus gardera une grande reconnaissance à Louis Germain et lui dédiera son discours de prix Nobel :
« J'ai laissé s'éteindre un peu le bruit qui m'a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler de tout mon cœur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n'ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j'en ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. Je ne me fais pas un monde de cette sorte d'honneur. Mais celui-là est du moins une occasion pour vous dire ce que vous avez été, et êtes toujours pour moi, et pour vous assurer que vos efforts, votre travail et le cœur généreux que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers qui, malgré l'âge, n'a pas cessé d'être votre reconnaissant élève. Je vous embrasse de toutes mes forces. »
— Albert Camus à Louis Germain le 19 novembre 1957, apprenant que le prix Nobel de littérature lui avait été décerné (UNESCO, Rapport mondial sur l’éducation, 1998, p. 94)[n 1].
Reçu au Grand lycée et désormais lycée Émir Abdelkader, Albert Camus y est demi-pensionnaire. « J'avais honte de ma pauvreté et de ma famille […] Auparavant, tout le monde était comme moi et la pauvreté me paraissait l'air même de ce monde. Au lycée, je connus la comparaison », se souviendra-t-il[19],[S 6]. Il commence à cette époque à pratiquer le football et se fait une réputation de gardien de but au Racing Universitaire d'Alger. Après avoir été reçu à la première partie de son baccalauréat, il entre en classe de philosophie à l'automne 1930. Mais en décembre 1930, à la suite d'inquiétants crachements de sang, les médecins diagnostiquent une tuberculose, et il doit faire un bref séjour à l'hôpital Mustapha. C'est la fin de sa passion pour le football. Son oncle et sa tante Acault, qui tiennent une boucherie dans la rue Michelet (actuellement rue Didouche-Mourad), l'hébergent rue du Languedoc, où il peut disposer d'une chambre de 1931 à 1933. Gustave Acault l’ouvre à la culture, dans sa correspondance avec Jean Grenier, 17 ans plus tard en février 1946, déplorant la mort subite de cet oncle, Camus se montre reconnaissant : « C'était le seul homme qui m’ait fait imaginer un peu ce que pouvait être un père ». Ce père-là était « un passeur culturel », « un formidable initiateur à la grande littérature ». Il fut véritablement « le premier bienfaiteur dans la vie de Camus, celui qui l’orienta vers la culture et le développement des compétences littéraires »[S 4],[S 7],[20],[21],