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Franz Kafka

écrivain pragois de langue allemande De Wikipédia, l'encyclopédie libre

Franz Kafka
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Franz Kafka[N 1] (en allemand : /ˌfʁant͡s ˈkafka/[2], Son? Écouter [Fiche]), né le à Prague et mort le à Kierling, est un écrivain austro-hongrois de langue allemande[N 2],[3]. Il est considéré comme l'un des écrivains majeurs du XXe siècle[4].

Faits en bref Naissance, Décès ...

Surtout connu pour ses romans Le Procès (Der Prozeß), L'Amérique (Amerika) et Le Château (Das Schloß), ainsi que pour les nouvelles La Métamorphose (Die Verwandlung) et La Colonie pénitentiaire (In der Strafkolonie), Franz Kafka laisse cependant une œuvre plus vaste, caractérisée par une atmosphère cauchemardesque, sinistre, où la bureaucratie et la société impersonnelle ont de plus en plus de prise sur l'individu. Hendrik Marsman décrit cette atmosphère comme une « objectivité extrêmement étrange[5] ».

L'œuvre de Kafka, dans laquelle est mis en relief le problème du langage à nommer justement les choses[6], est parfois vue comme symbole de l'homme déraciné des temps modernes[7]. D'aucuns pensent cependant qu'elle est uniquement une tentative, dans un combat apparent avec les « forces supérieures[8] », de rendre l'initiative à l'individu, qui fait ses choix lui-même et en est responsable.

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Biographie

Résumé
Contexte

Famille et jeunesse

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Franz Kafka bébé, vers 1884.

Franz Kafka naît dans une famille juive à Josefov[9], quartier de la vieille ville de Prague, capitale du royaume de Bohême, composante de l'empire d'Autriche-Hongrie. Sa langue maternelle est l'allemand, comme pour près de 10 % de la population de Prague à l'époque[N 3].

Il est le fils de Hermann Kafka (de) (1852-1931) et de son épouse Julie, née Löwy (1856-1934), issue d'une riche famille de Poděbrady. Son grand-père paternel, Jacob Kafka, est venu d'Osek, ville tchèque de province, pour installer à Prague un petit commerce.

Le patronyme Kafka vient du mot tchèque kavka qui signifie « choucas ».

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Gabriele (Elli), Valerie (Valli) et Ottilie (Ottla) Kafka en 1898.

Franz a deux frères, Georg et Heinrich, morts en bas âge, et trois sœurs plus jeunes, Gabriele (Elli) (de) (1889-1942), Valerie (Valli) (de) (1890-1942) et Ottilie (Ottla) (1892-1943), qui durant la Seconde Guerre mondiale et l'occupation de la Bohême par l'Allemagne nazie, ont d'abord été déportées au ghetto de Łódź ; Elli et Valli ont probablement été assassinées à Chełmno au cours de l'automne 1942[10] et Ottla est morte à Auschwitz en septembre 1943[11].

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Photo de studio. Kafka, âgé de quatre[12] à six ans[13], « affublé d'un habit d'enfant étriqué, presque humiliant, chargé de passementeries, s'y tient dans une sorte de décor figurant un jardin d'hiver [...] Sûrement disparaîtrait-il dans cette mise en scène, si ses yeux, d'une incommensurable tristesse, ne dominaient ce paysage composé pour eux[13] »[N 4].

Kafka a une enfance solitaire. Il a des relations difficiles avec son père, qu'il décrira, ainsi que ses biographes, comme dominant et prétentieux. Kafka l'évoque plus tard dans une nouvelle (Der Geier, « Le Vautour ») sous la figure de ce grand rapace[14]. Bien qu'il n'ait pas un rapport intense avec sa mère, qui porte le deuil de ses deux fils plutôt que de s'intéresser à lui[15], il s'identifie fortement avec sa famille maternelle, réputée intellectuelle et spirituelle[pas clair], contrairement à celle de son père, commerçante.

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La maison "à la Minute", résidence des Kafka à Prague sur la place de la Vieille-Ville, de 1889 à 1896.

Entre 1889 et 1893, il fréquente l'école primaire du Fleischmarkt (aujourd'hui rue Masná), où il se révèle bon élève[16]. Le judaïsme familial le conduit à la célébration de sa Bar Mitsva à l'âge de treize ans. Il participe quatre fois par an aux services de la synagogue.

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Franz Kafka élève, avant 1900.

Il fait ses études secondaires au lycée d'État de Prague (Altstädter deutsches Gymnasium), établissement germanophone. Très tôt, il s'intéresse à la littérature, mais ses premiers écrits ont disparu, probablement détruits par Kafka lui-même, ainsi qu'aux idées socialistes. Il a alors pour amis Rudolf Illowy, Hugo Bergmann, Ewald Felix Pribram et Oskar Pollak (en). Il passe les vacances à la campagne, chez son oncle Siegfried, un médecin de Triesch. Il est reçu au baccalauréat en 1901.

Période des études supérieures (1901-1907)

Après le baccalauréat, Kafka voyage pendant l'été à Norderney et Heligoland en Allemagne.[réf. nécessaire]

À la rentrée, il commence ses études supérieures à l'université Charles. L'université, victime des tensions nationales entre les deux groupes linguistiques, est scindée en une « université allemande » et une « université tchèque ».

Après avoir suivi pendant deux semaines des cours de chimie, Kafka décide de se tourner vers le droit, tout en suivant en plus des cours de germanistique et d'histoire de l'art. Il voyage un peu[réf. nécessaire].

Il adhère au Lese- und Redehalle der deutschen Studenten Cercle de lecture et de conversation des étudiants allemands »), association étudiante qui, entre autres choses, organise des événements et des présentations littéraires[pas clair].

Dès 1901, il fait la connaissance du poète Max Brod (1884-1968), qui devient son ami le plus influent (après la mort de Kafka, c'est lui qui publiera la plus grande partie de son œuvre).

En 1906, il est reçu docteur en droit sous la direction du professeur Alfred Weber (1868-1958). Il effectue alors, en service civil[pas clair], un stage d'une année au tribunal de Prague[réf. nécessaire].

Carrière

Le , il entre au service des Assicurazioni Generali, compagnie d'assurances autrichienne (jusqu'en 1919). Après y avoir travaillé neuf mois, il donne sa démission () parce que, d'après ses dires, les longues heures de travail l'empêchent de se consacrer à sa grande passion, l'écriture.

Deux semaines plus tard, il entre au service de l’Arbeiter-Unfall-Versicherungs-Anstalt für das Königreich Böhmen (Compagnie d'assurance des accidents du travail du royaume de Bohême), où il travaillera jusqu'à sa retraite prématurée en 1922. Bien qu'il parle péjorativement de son travail comme d'un simple « gagne-pain », ses prestations sont évaluées positivement par son employeur, comme en témoignent ses promotions successives au cours de sa carrière.

Il a pour tâche de limiter les risques d'accident encourus par les ouvriers devant travailler sur des machines souvent dangereuses à l'époque ; dans ce but, il se rend dans des usines et écrit des manuels d'information. Il est de plus responsable de la classification des usines en groupes de risques. Le fait qu'il ait parfois à s'opposer à des demandes d'indemnisation lui donne mauvaise conscience, mais sa compagnie lui laisse souvent la possibilité d'être conciliant avec les victimes, parfois blessées et handicapées à vie[17].

En septembre 1909, en vacances à Riva del Garda en Italie avec Max Brod et son frère Otto, il apprend qu'un meeting aérien international va avoir lieu à Montichiari. Il décide de s'y rendre avec les Brod, car aucun d'eux n'a encore jamais vu d’aéroplane. Kafka y consacre un reportage : son texte intitulé Aéroplanes à Brescia est publié dans le no 269 de la revue Bohemia[18].

Entre 1909 et 1912, il fréquente les cercles anarchistes de Prague[19]. On peut voir une influence de la pensée anarchiste dans plusieurs des écrits de Kafka, notamment La Colonie Pénitentiaire et Le Procès[20].

À côté de son travail pour la société d'assurance, Kafka continue d'écrire. En 1909, ses premiers textes en prose sont publiés dans le magazine Hyperion, basé à Munich. Il vit selon un programme quotidien régulier : le matin, il travaille au bureau ; il va ensuite dormir quelques heures, puis se promener, manger avec des amis ou sa famille, et se met à écrire le soir, une activité qu'il prolonge jusque tard dans la nuit. C'est pendant l'une de ces nuits que, « comme ivre »,[réf. nécessaire] il rédige le récit Das Urteil (Le Verdict).

Relations

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Statue en bronze à l'effigie de Kafka, du sculpteur Jaroslav Róna en 2003, inspirée par sa nouvelle Description d'un combat (Beschreibung eines Kampfes), et située rue Dušní, devant la synagogue espagnole (Prague).

Ses amis proches sont Max Brod, le philosophe Felix Weltsch, le sioniste Hugo Bergmann et le pianiste Oskar Baum.

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Felice Bauer et Franz Kafka.

Kafka entretient des relations compliquées avec les femmes. En 1912, dans la maison de Max Brod, il rencontre la Berlinoise Felice Bauer (1887-1960), représentante d'une firme de dictaphones. Durant les cinq années qui suivent, une correspondance intense se développe entre Kafka et Felice. Ils se rencontrent de temps à autre, ce qui aboutit deux fois à des fiançailles. Du côté de Kafka, il s'agit surtout d'un amour platonique, qu'il entretient principalement par ses lettres. Petit à petit, il se rend compte à quel point une vie maritale traditionnelle est impossible avec Felice, beaucoup plus terre à terre, surtout avec sa tendance à s'enfermer dans son bureau ; cela conduit à la fin de leur relation en 1917.

En 1919, Kafka se fiance avec Julie Wohryzek (de) (1891-1944), une secrétaire de Prague, mais le père de Franz s'oppose fortement à cette relation. Elle se termine la même année  d'après ce que l'on sait, à l'initiative de Julie , mais le conflit fait que Kafka adopte une position encore plus antagonique à l'égard de son père, qui aurait bien vu son fils lui succéder dans son entreprise commerciale, et écrit la Lettre au père, sans la lui transmettre.

Au début des années 1920, une relation de courte durée, mais très intense, se développe entre Kafka et la journaliste et écrivaine anarchiste tchèque Milena Jesenská (1896-1944). De toutes les femmes de sa vie  il eut encore diverses liaisons , Milena a peut-être le mieux compris cet écrivain hypersensible et, au moins lors de leurs rares rencontres, elle l'aide à surmonter ses craintes. Mais finalement, il se sent mal à l'aise avec cette artiste flamboyante.

En 1923, il part pour quelque temps à Berlin, espérant pouvoir mieux se concentrer sur l'écriture, loin de l'ingérence de sa famille. C'est à cette époque qu'il rencontre Dora Diamant (1898-1952), une institutrice de maternelle âgée de vingt-cinq ans, originaire d'une famille orthodoxe juive polonaise. Dora devient la compagne de Kafka à Berlin et exerce une influence sur son intérêt croissant pour le Talmud. C'est auprès d'elle qu'il goûte finalement un peu de bonheur conjugal, alors qu'il ne le croyait plus possible. Ensemble, ils envisagent d'émigrer en Palestine. Sioniste convaincu  il apprend alors l'hébreu[21]  il avait vu la haine grandir contre les Allemands et les Juifs (« Juifs et Allemands sont des exclus[réf. nécessaire] »). C'est à cette époque que Kafka « se fait le défenseur d'un humanisme libéral »[22],[23].

L'hypothèse de son homosexualité a été avancée mais il est plutôt considéré aujourd'hui comme ayant essentiellement une relation compliquée avec les femmes et la sexualité en général[24]. La nature amoureuse ou exclusivement amicale de ses relations avec Oskar Pollak (en) reste un sujet de débat.

Problèmes de santé (1917-1924)

En , il commence à cracher régulièrement du sang et on pose le diagnostic de tuberculose. Cela conduit à une plainte de nature presque obsessionnelle dans ses lettres à Felice, et l'utilisation de sa maladie comme raison pour rompre ses fiançailles. Mais il voit aussi son statut d'écrivain comme un handicap pour une vie de famille « normale », ce qui serait devenu un énorme problème avec une Felice moins intellectuelle et plus débordante de vie.

Kafka, qui montre des signes d'hypocondrie, souffre, ainsi qu'on le pense maintenant, de dépression clinique et de phobie sociale, mais présente aussi des phénomènes vraisemblablement liés au stress, tels que des migraines, insomnies, constipations et furoncles, et manifeste des tics physiques parfois considérés comme caractéristiques du syndrome de Gilles de La Tourette[25]. Il se méfie de la médecine usuelle[26] et essaye de combattre ses maux avec des cures naturopathes, un régime végétarien et en buvant du lait non pasteurisé. Il profite de ses vacances pour suivre des cures de repos dans des sanatoriums, pour lesquelles son employeur lui octroie souvent des congés exceptionnels.

En 1922, l'écrivain part en préretraite, en raison de son état général de santé déficient.

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La tombe de Franz Kafka , à Prague, au nouveau cimetière juif (Nový židovský hřbitov).

Bien que la situation personnelle de Kafka se soit fortement améliorée après son déménagement à Berlin, et qu'il écrive à nouveau beaucoup, l'hiver marqué par l'inflation de 1923-1924 à Berlin se révèle à nouveau funeste pour sa santé déjà chancelante. Les biens de consommation essentiels se font rares et il doit en faire venir de Prague ; de plus, le froid dans le logement mal chauffé n'est pas favorable à sa guérison. Lorsqu'en , Brod vient lui rendre visite, l'état de Kafka s'est à ce point aggravé que son ami l’emmène avec lui à Prague ; en avril, on lui diagnostique une tuberculose du larynx.

Il est alors clair que Kafka n'a plus pour longtemps à vivre car on ne dispose pas à cette époque de médicaments efficaces contre la tuberculose, si bien qu'il s'alimente de plus en plus difficilement. Cet état présente des traits communs avec le personnage de Gregor Samsa dans La Métamorphose, et le personnage principal de sa nouvelle Un artiste de la faim (Hungerkünstler). Dans les derniers mois, il est soutenu par son médecin et ami, le jeune Robert Klopstock (d) Voir avec Reasonator, qui dirige les soins médicaux de Kafka au sanatorium de Matliary[27], mais la seule aide qui peut encore être apportée au patient consiste en des analgésiques.

Mort et funérailles

Kafka est admis au sanatorium de Kierling, près de Vienne, où il meurt le à l'âge de 40 ans, {{|vraisemblablement}} de malnutrition et de tuberculose, avec à ses côtés Dora Diamant[Qui ?].

Son corps est ramené à Prague, où il est inhumé le dans le nouveau cimetière juif du quartier de Žižkov (Prague-Strachnitz)

Son tombeau porte l'épitaphe suivante :
« Dr. FRANZ KAFKA
1883-1924
יום ג׳ ר״ח סיון תרפ״ד לפ״ק
ה״ל הבחור המפואר מה״ר אנשיל ע״ה
בן הנעלה ב״ה העניך קאפקא נ״י
[ושם אמו יטל[ה
ת׳ נ׳ צ׳ ב׳ ה׳ »
 Le mardi premier du mois de Siwan (5)684 du petit comput, voici pour toi le jeune homme magnifique, notre maître monsieur Anshel, le salut sur lui, fils de l’éminent, béni soit-il, ton pauvre Kafka, sa chandelle éclairera.
Et le nom de sa mère raccommodera.
Que son âme soit liée au faisceau de la vie. »).

Le métier d’écrivain

Kafka considère l'écriture comme une nécessité profondément intime, il s'agit pour lui d'« une activité atroce », qui implique « une ouverture totale du corps et de l'âme »[28]. Dans une lettre à son ami Oskar Pollak (en)[29], en , selon lui :

« Un livre doit être la hache qui fend la mer gelée en nous ; voilà ce que je crois. »

Il dit également, quelques lignes plus loin, que :

« Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d'un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire ? »

Pour Kafka, on doit écrire comme si l'on se trouvait dans un tunnel sombre, sans savoir encore comment les personnages vont se développer ultérieurement.

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À propos de l'œuvre

Résumé
Contexte
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Pages manuscrites de Kafka avec des mots en hébreu et en allemand, 1922.

Kafka écrit en allemand, si ce n'est quelques lettres adressées à sa maîtresse Milena Jesenská rédigées en tchèque.

Les éditions

Durant sa vie, Kafka n'a publié que quelques courts récits, ainsi que les nouvelles La Métamorphose (Die Verwandlung) et Le Verdict, donc une toute petite partie de son œuvre. Certains des textes publiés sont des fragments d'une œuvre plus longue qui demeure inachevée et inédite à sa mort comme Le Soutier, fragment de son premier roman L'Amérique, ou Devant la loi (Vor dem Gesetz), fragment de son second, Le Procès (Der Prozeß). Autre roman inachevé et demeuré inédit de son vivant, son troisième et dernier, Le Château (Das Schloß).

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Max Brod au Zwinger de Dresde, 1914.

Avant sa mort, Kafka charge par écrit son ami et exécuteur testamentaire Max Brod de détruire tous ses manuscrits.

« Voici, mon bien cher Max, ma dernière prière : Tout ce qui peut se trouver dans ce que je laisse après moi (c'est-à-dire, dans ma bibliothèque, dans mon armoire, dans mon secrétaire, à la maison et au bureau ou en quelque endroit que ce soit), tout ce que je laisse en fait de carnets, de manuscrits, de lettres, personnelles ou non, etc. doit être brûlé sans restriction et sans être lu, et aussi tous les écrits ou notes que tu possèdes de moi ; d'autres en ont, tu les leur réclameras. S'il y a des lettres qu'on ne veuille pas te rendre, il faudra qu'on s'engage du moins à les brûler. À toi de tout cœur[30]. »

 Franz Kafka

Cependant, Brod décide de ne pas respecter les dernières volontés de Kafka. Il connaît et apprécie l'œuvre de Kafka comme nul autre et avait en fait averti son ami à plusieurs reprises qu'il ferait de son mieux pour transmettre son œuvre à la postérité[31]. Peu après, une discussion se déclenche au sujet de ce double sens supposé par Brod du « testament » de Kafka (rien d'autre qu'une courte missive). On ne saura jamais avec certitude si Kafka souhaitait réellement que toute son œuvre non publiée soit détruite. En revanche, c'est l'écrivain lui-même qui a détruit ou a fait brûler par son amie Dora divers manuscrits, parmi lesquels un grand nombre de récits et au moins une pièce de théâtre. Il aurait cependant pu brûler le reste, mais ne l'a pas fait.

En ce qui concerne les manuscrits de Kafka que Brod n'a pas eus en mains avant la guerre, la Gestapo se charge de satisfaire les dernières volontés de l'écrivain, début 1933, après la prise de pouvoir par Hitler, en saisissant environ vingt journaux et trente-cinq lettres dans l'appartement berlinois de Dora. Malgré les interventions actives de l'ambassade tchèque à Berlin, ces manuscrits ainsi que d'autres pièces qui tombèrent dans les mains des nazis ne furent pas retrouvés et sont considérés comme perdus à jamais.

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Plaque commémorative reliant Kafka à Brod à Vienne.

Brod, en contradiction avec les instructions de son ami, se charge de la publication posthume de la plus grande partie de son œuvre. Il publie les grands romans de Kafka dès les années 1920. Il ne peut collationner et publier le reste des œuvres, principalement les nombreux journaux et lettres, avant le début de la Seconde Guerre mondiale. La nuit où les nazis occupent Prague en mars 1939, Brod réussit à s'enfuir pour Tel Aviv, alors en Palestine mandataire, avec les manuscrits de Kafka qu'il possède. L'œuvre peut y être publiée progressivement.

Max Brod fait ainsi connaître cet auteur qui, de son vivant, n'avait pas attiré l'attention des critiques. Les éditions de Brod sont plutôt contestées, Kafka étant mort avant d'avoir pu préparer ses manuscrits pour la publication. Quelques-uns des textes sont inachevés, dont Le Château qui se termine en plein milieu d'une phrase, de même que Le Procès, dont les chapitres ne sont pas numérotés et qui est incomplet. Quant à son dernier roman, Le Château, dont le contenu est assez ambigu, il semble que Brod a pris des libertés pour adapter l'œuvre de Kafka à son goût : il déplace quelques chapitres, modifie des phrases et des mots et modifie la ponctuation dans certains passages. Les éditions par Brod de l'œuvre de Kafka ne sauraient être considérées comme des éditions définitives.

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Un mémorial à Kafka, à l'emplacement de sa maison natale, place Franz-Kafka.

C'est l'écrivain Alexandre Vialatte qui révèle le génie de Kafka au public français. Après avoir découvert Le Château en 1926, il entreprend de traduire en français Le Procès, La Métamorphose ainsi que les Lettres à Milena. Il publie quelques articles importants sur l'écrivain pragois, réunis en volume sous le titre Mon Kafka[32]. Ce sont ses traductions qui, avec celles de Claude David, font autorité dans l'édition de la Bibliothèque de la Pléiade publiée à partir de 1976. Depuis 2018, c'est Jean-Pierre Lefebvre, professeur de littérature allemande et traducteur germaniste qui traduit Kafka dans la nouvelle édition de la Pléiade[33].

L’œuvre complète de Kafka est pour la première fois éditée en France en 1962 par Claude Tchou, dans une édition établie et annotée par Marthe Robert. C’est en grande partie grâce à cette publication en langue française que Kafka est connu et traduit dans d’autres pays, en particulier de langues romanes.[réf. nécessaire]

Selon l'éditeur[34] de l'édition en anglais du Château[35], Malcolm Pasley a réussi en 1961 à rassembler la plus grande partie des manuscrits de Kafka à la Bodleian Library de l'université d'Oxford. Le texte original du Procès est acheté plus tard en vente publique et se trouve maintenant conservé dans les archives de littérature allemande[36] à Marbach. Pasley, après avoir rassemblé les manuscrits de Kafka, met sur pied une société (avec, entre autres, Gerhard Neumann, Jost Schillemeit et Jürgen Born) chargée de rétablir les romans dans leur état original. Les éditions S. Fischer Verlag publient les romans reconstruits[37]. Pasley est le rédacteur final de Das Schloß (Le Château) de 1982 et Der Prozeß (Le Procès) de 1990. Jost Schillemeit est le rédacteur final de Der Verschollene (le titre de Kafka, Max Brod l'appela Amerika) de 1983[N 5],[38].

Thématiques

Après la mort de Kafka, son œuvre est analysée, critiquée, louée. Kafka est désormais considéré comme un écrivain majeur d'avant-garde[39].

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Lettre de Franz Kafka à son père.

Ses écrits reflètent les sentiments de la société du début du XXe siècle. Ses personnages évoluent dans un monde où les rapports et les relations qui les régissent leur sont incompréhensibles, où ils sont livrés, impuissants, à des forces inconnues, comme dans un cauchemar. La vie est un mystère irrésolu, un labyrinthe dont on ne connaît pas la sortie et ce qui nous y attend. Kafka étudie la psychologie de ses personnages face à des situations extraordinaires, dont ils ne connaissent pas les tenants et les aboutissants, et leur relation avec leur entourage.

Kafka aborde les thèmes de la solitude, des rêves, des peurs et des complexes. Le personnage est perdu, déboussolé, il ne saisit pas tout ce qui l'entoure, le lecteur est dans la même situation. L'atmosphère particulière des romans et nouvelles de Kafka a donné naissance à un adjectif  en allemand kafkaesk, traduit par kafkaïen en français  qui est même devenu une référence[40], et qui renvoie à quelque chose d'absurde et d'illogique, de confus et d'incompréhensible.

Mais, de l’ensemble de l’œuvre, il ressort aussi une réflexion à la fois critique et éclairante sur la famille, la société et la lutte que l’individu mène contre lui-même s’il veut y trouver sa place.

Bien qu'il soit juif, Kafka accorde peu de place  voire aucune  dans son œuvre au sionisme, alors même que ce courant politique est très présent chez ses coreligionnaires d'Europe centrale au début du XXe siècle. Quelques jours après son décès, l'écrivain Felix Weltsch, qu'il a côtoyé de son vivant, écrit dans le Selbstwehr Jüdisches Volksblatt que « Kafka était sioniste » depuis longtemps, même s'il ne l'a pas exprimé publiquement[41].

Interprétation critique littéraire

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Buste de l'écrivain pragois de langue allemande, œuvre de 2014 de David Černý, composée de 42 plaques mobiles reliées à un système de rotation, et située au-dessus de la station de métro Národní třída à Prague (République tchèque).

Les critiques ont essayé de placer l'œuvre de Kafka dans divers courants littéraires tels que le modernisme et le réalisme magique. Le manque d'espoir et l'absurdité, que l'on retrouve dans toute son œuvre, sont des traits typiques de ce qui sera repris plus tard par l'existentialisme, de même que le thème de la responsabilité de l'individu. Quelques critiques pensent trouver dans son œuvre une influence du marxisme, surtout dans ses prises de position critiques vis-à-vis de la bureaucratie. D'autres encore, comme Michael Löwy, voient (au contraire) dans cette position anti-bureaucratique et sur la responsabilité que l'individu doit reprendre, face à la culpabilité de classes hostiles à ses libertés, l'influence de telle tendance individualiste ou anarchiste[42], originale et difficile à cerner. Il est d'autre part fait appel au judaïsme et, autour de la figure paternelle et autoritaire, ainsi que d'une notion d'héritage, il est de même fait appel à l'influence de Freud. Thomas Mann et Max Brod voyaient cependant dans l'œuvre de Kafka une recherche métaphysique et ambivalente de Dieu.

Dans Le Procès, on retrouve explicitement le thème de la faute. La faute chez Kafka ne doit cependant pas être comprise dans l'acception commune. Lorsque les gardiens du personnage principal, Joseph K, disent que « les autorités sont attirées par la faute, telle qu'elle se retrouve dans la loi », la faute doit plutôt être comprise dans le sens juif, c'est-à-dire dans l'imperfection matérielle de l'humain. Le fait que les personnages de Kafka sont continuellement dérangés dans leur « vie habituelle » est lié à cela ; la faute de l'homme a pour but de le faire bouger, de le pousser à être activement à la recherche du sens de son existence. « La loi que tous recherchent » de la parabole de la Loi dans Le Procès représente, en revanche, vraisemblablement, la perfection dont l'homme qui la cherche peut voir un reflet :

« mais maintenant il voit bien un reflet dans le noir, qui transparaît inextinguible par la porte de la loi. »

Les thèmes de l'aliénation et de la persécution sont fondamentaux dans l'œuvre de Kafka, de façon si intense qu'un mouvement d'opposition en est né. Beaucoup de critiques[Qui ?] pensent que l'œuvre de Kafka n'est pas seulement le produit d'un écrivain tourmenté et solitaire, mais aussi, en cohérence, réfléchi et rebelle, et qu'elle ne peut être ramenée à des sortes de complexes psychologiques de l'auteur. Cependant, la Lettre au père (qu'il n'envoya jamais) est considérée par certains[Qui ?] comme la clef de ses œuvres ; le complexe relatif au père y est clairement exprimé.

La critique a aussi remarqué que son œuvre témoignait d’une grande attention aux personnages secondaires ; dans une page de son Journal, Kafka prétendait d’ailleurs s’identifier à eux[43].

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Buste de Franz Kafka à Kielce (Pologne).

Actuellement, on met plus l'accent sur le fait que Kafka et ses amis, ainsi qu'on peut le voir dans les notes de ces derniers, riaient à la lecture de ses histoires absurdes. Simon Vestdijk[44] décrit comment l'auteur et Marsman se tordaient de rire à la lecture du premier chapitre du Procès. On dit aussi que l'écrivain riait à gorge déployée quand il lisait ce chapitre à ses amis. À travers tout le tragique transparaît beaucoup d'humour juif, un esprit assez mordant et d'une noirceur désespérée, que l'on retrouve aussi dans les histoires du rabbin Baal Shem Tov, telles qu'elles ont été rassemblées par Martin Buber, des récits que Kafka aimait lire. D'aucuns pensent que Kafka ne s'est jamais rendu compte à quel point ses histoires étaient une sorte de prévision de la réalité et à quel point cette force d'actualité fait plutôt que nous ne pourrions (selon eux) plus en rire[7].

Dans les Discussions avec Kafka, de Gustav Janouch (de), apparaît l'image d'un homme qui était terriblement conscient des suites possibles de chaque mot et qui était donc très prudent et très précis dans leur usage. Ce faisant, les signes avant-coureurs du futur proche ne lui sont pas étrangers ; dans ce livre, Kafka prédit la destruction de l'Allemagne, près de vingt années avant la Seconde Guerre mondiale.

Influence

Littérature

Le style et le symbolisme de Kafka ont influencé la littérature de son époque, notamment dans les registres de la nouvelle et de la pièce de théâtre radiophonique

Dans la littérature néerlandaise de l'après-guerre, c'est le cas, entre autres, Ferdinand Bordewijk, Willem Brakman ou Willem Frederik Hermans.

Milan Kundera cite l'humour [dans "Les testaments trahis"] de Kafka[Où ?] comme la source d'inspiration principale d'écrivains et de réalisateurs tels que Federico Fellini, Gabriel García Márquez, Carlos Fuentes ou Salman Rushdie  García Márquez dit qu'à la lecture de La Métamorphose, il a réalisé « qu'il était possible d'écrire d'une autre façon. »

Guliano da Empoli dans son ouvrage l'« Heure de prédateurs » fait des parallèles saisissants entre les évolutions rapides et dramatiques du monde actuel et les récits de Kafka « Le Procès » et surtout « Le Château ». L'écrasante superiorité des algorithmes de l'Intelligence artificielle est en train de prendre le pouvoir sur le jugement des politiques et des grands managers[45] :

« Le Château n'est, pour l'instant, qu'une hypothèse pour les classes aisées, alors qu'il est déjà une réalité pour ceux qui se trouvent en bas de l'échelle. Les livreurs, par exemple, n'ont plus aucun contacts avec un être humain dans le déroulement de leur travail »

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Arts visuels

Au début des années 1950, alors qu'il est capitaine de navire dans la marine marchande[46], Flavio Costantini réalise ses premiers dessins, en noir et blanc, inspirés de la lecture de Franz Kafka[47].

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Œuvres

Œuvres publiées de son vivant

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Die Verwandlung (La Métamorphose), illustration de Tatjana Hauptmann.

Œuvres publiées à titre posthume

Correspondance

  • Correspondance (1902-1924), trad. de l'allemand et préfacé par Marthe Robert, Paris, Gallimard, 1965.
  • Comment ne pas éduquer les enfants. Lettres sur la famille et autres monstruosités, Paris, éd. L'Orma, 2020.

Prose

  • Description d'un combat (fragment de manuscrit, 1904).
  • Recueillement (1908-1912, éd. du livre 1913, 1915).
  • Le jugement (1908-1912, éd. du livre 1912, 1915).
  • Le chauffeur (1912, éd. du livre 1913, 1916, 1918).
  • La métamorphose (1912, éd. du journal 1915, éd. du livre 1916, 1918).
  • Le Procès (1914-1915, éd. livre 1925, éd. critique en 2 vol. 1983).
  • Lettre au père (Manuscrit. 1919, éd. 1952).
  • Écrits et fragments de la succession I. (éd. cris. en 2 vol. 1992).
  • Écrits et fragments de la succession II. (éd. critique en 2 vol. 1993).
  • Œuvres imprimées du vivant de l'auteur (éd. critique en vol. 1996).

Fragments de romans

  • Le Procès (Der Prozess, 1925, écrit en 1914-1915).
  • Le Château (Das Schloß, 1926, écrit en 1922).
  • Amérique sous le titre Le Disparu ("Amerika", under dem Titel "der Verschollene", 1927, paru en 1913).
  • Publication des Gesammelte Schriften (7 volumes, 1935-1937, avec biographie de M. Brod).
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Adaptations et transpositions

Au cinéma

A la télévision

Au théâtre et à l'opéra

Dans la littérature

En bande dessinée

Livres audio

Jeu vidéo

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Notes et références

Voir aussi

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