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Chronologie De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le siège de Paris de 1870-1871 est un épisode de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, sa chronologie permet d'appréhender l'histoire de ce siège par les événements selon leur ordre temporel dans la ville de Paris mais également dans l'ensemble des départements d'Île-de-France[1],[2].
Date |
au |
---|---|
Lieu | Paris, France |
Issue | Capitulation française |
Royaume de Prusse Grand-duché de Bade Royaume de Bavière Royaume de Wurtemberg Royaume de Saxe |
France |
Guillaume Ier d'Allemagne Helmuth von Moltke |
Louis Jules Trochu Joseph Vinoy |
240 000 soldats | 200 000 soldats 200 000 miliciens et marins |
12 000 morts ou blessés | 24 000 morts ou blessés 146 000 capturés 47 000 civils |
Batailles
Cette chronologie s'appuie principalement sur les rapports extraits du Journal officiel de la République, mais également des nombreux mémoires de, journal de… .
Septembre 1870
4 septembre – 5 septembre – 6 septembre – 7 septembre – 8 septembre – 9 septembre – – – – – – – – – – – – – – 23 septembre – 24 septembre – 25 septembre – 26 septembre – 27 septembre – 28 septembre – – 30 septembre
Octobre 1870
1er octobre – 2 octobre – 3 octobre – 4 octobre – 5 octobre – 6 octobre – 7 octobre – 8 octobre – 9 octobre – 10 octobre – 11 octobre – 12 octobre – 13 octobre – 14 octobre – 15 octobre – 16 octobre – 17 octobre – 18 octobre – 19 octobre – 20 octobre – 21 octobre – 22 octobre – 23 octobre – 24 octobre – 25 octobre – 26 octobre – 27 octobre – 28 octobre – 29 octobre – 30 octobre – 31 octobre
Novembre 1870
1er novembre – 2 novembre – 3 novembre – 4 novembre – 5 novembre – 6 novembre – 7 novembre – 8 novembre – 9 novembre – – 11 novembre – 12 novembre – 13 novembre – 14 novembre – 15 novembre – 16 novembre – 17 novembre – – 19 novembre – – 21 novembre – 22 novembre – 23 novembre – 24 novembre – – – – 28 novembre – – 30 novembre
Décembre 1870
1er décembre – 2 décembre – 3 décembre – 4 décembre – 5 décembre – 6 décembre – 7 décembre – 8 décembre – 9 décembre – – 11 décembre – 12 décembre – 13 décembre – 14 décembre – 15 décembre – 16 décembre – 17 décembre – – 19 décembre – – 21 décembre – 22 décembre – 23 décembre – 24 décembre – 25 décembre – 26 décembre – – 28 décembre – – 30 décembre – 31 décembre
Janvier 1871
1er janvier – 2 janvier – 3 janvier – 4 janvier – 5 janvier – 6 janvier – 7 janvier – 8 janvier – 9 janvier – 10 janvier – 11 janvier – 12 janvier – – 14 janvier – 15 janvier – 16 janvier – 17 janvier – 18 janvier – 19 janvier – 20 janvier – 21 janvier – 22 janvier – 23 janvier – – 25 janvier – 26 janvier – 27 janvier – 28 janvier – 29 janvier – 30 janvier – 31 janvier
Février 1871
4 février – 6 février – 7 février – 8 février – 11 février – 15 février – 19 février – 21 février – 24 février – 25 février – 26 février – 27 février
Mars 1871
1er mars – 2 mars – 3 mars – 6 mars – 8 mars – 10 mars – 11 mars – 15 mars – 16 mars – 18 mars
La défense de Paris
Les fortifications – Le génie – L'artillerie – Le ministère des travaux publics
Les troupes de défense
La Marine – L'armée active – Garde mobile, Garde nationale, Corps francs – Récapitulatif des forces françaises
Bibliographie – Articles connexes – Liens externes – Notes et références
Après la capitulation de Sedan, les armées prussiennes et leurs alliés déferlent sur le Nord de la France et se déploient afin de mettre le siège devant Paris. Dans la capitale, la nouvelle parvient dans l'après-midi du .
L'opposition parlementaire à Napoléon III, menée par Léon Gambetta met alors en place un gouvernement provisoire, dit de la Défense nationale. La République est proclamée le 4 septembre, au balcon de l’hôtel de ville de Paris, et le gouvernement de la Défense nationale est formé.
« Citoyens de Paris!
La République est proclamée.
Un gouvernement a été nommé d'acclamation.
Il se compose des citoyens Emmanuel Arago, Crémieux, Jules Favre, Jules Ferry, Gambetta, Garnier-Pagès, Glais-Bizoin, Pelletan, Picard, Rochefort, Jules Simon, représentants de Paris
Le général Trochu est chargé des pleins pouvoirs militaires pour la défense nationale. Il est appelé à la présidence du gouvernement.
Le gouvernement invite les citoyens au calme; le peuple n'oubliera pas qu'il est en face de l'ennemi.
Le gouvernement est avant tout un gouvernement de défense nationale[5]. »
Après la capitulation de Napoléon III, Victor Hugo rentre à Paris et reçoit un accueil triomphal. Par la suite, il participe activement, tout au long du siège, à la défense de Paris.
Étienne Arago est nommé maire de Paris avec comme adjoints Charles Floquet et Henri Brisson.
« Aux gardes nationaux, aux gardes mobiles de la Seine et aux gardes mobiles des départements.
Jamais aucun général d'armée n'a eu sous les yeux le grand spectacle que vous venez de me donner.
Trois cents bataillons de citoyens, organisés, armés, encadrés par la population tout entière acclamant dans un concert immense la défense de Paris et la liberté.
Que les nations étrangères qui ont douté de vous, que les armées qui marchent sur vous ne l'ont elles entendu !
Elles auraient eu le sentiment que le malheur a plus fait en quelques semaines pour élever l'âme de la nation que de longues années de jouissance pour l'abaisser.
L'esprit de dévouement et de sacrifices vous a pénétrés, et déjà vous lui devez le bienfait de l'union de cœur qui va vous sauver.
Avec notre formidable effectif, le service journalier de la garde de Paris ne sera pas de moins de 70 000 hommes en permanence. Si l'ennemi, par une attaque de vive force, ou par surprise, ou par la brèche ouverte, perçait l'enceinte, il rencontrerait les barricades dont la construction se prépare, et ses têtes de colonnes seraient renversées par l'attaque de dix réserves échelonnées.
Ayez donc confiance entière et sachez que l'enceinte de Paris, défendue par l'effort persévérant de l'esprit public et par trois cent mille fusils, est inabordable.
Gardes nationaux de la Seine et gardes mobiles :
Au nom du gouvernement de la Défense nationale, dont je ne suis devant vous que le représentant, je vous remercie de votre patriotique sollicitude pour les chers intérêts dont vous avez la garde.
À présent, à l'œuvre dans les neuf sections de la défense!
De l'ordre partout, du calme partout, du dévouement partout.
Et rappelez vous que vous devenez chargés, je vous l'ai déjà dit, de la police de Paris pendant ces jours de crise.
Préparez vous à souffrir avec constance. À cette condition vous vaincrez.
Trochu . »
Les régiments de cavalerie commandés par les généraux Gustave Coste de Champéron et Jean-Henry Reyau qui avaient été dirigés sur Meaux avec ordre de harceler l'ennemi avaient fait mouvement de repli.
Les troupes de la division Champéron étaient rentrées dans Paris et bivouaquaient dans le bois de Vincennes et sur le Champ-de-Mars.
Les troupes de la division Reyau avaient quant à elles regagné Versailles puis s'étaient dirigées vers les armées en formation au-delà de la Loire.
La région parisienne est recouverte d’un brouillard intense et froid empêchant toute observation.
« Mon cher général,
Je vous remercie avec effusion, vous et la garde nationale, dont vous êtes le digne chef, du concours que vous venez de nous prêter. Au premier signal, vos bataillons sont accourus et, par leurs acclamations patriotiques, ont protesté contre les imprudents qui cherchent à nous diviser devant l'ennemi. Vous leur avez prouvé qu'ils n'y réussiront pas. Nous resterons unis pour combattre et pour vaincre. Nous le serons encore après, car tous nous n'avons qu'une volonté fonder une République durable, décrétée par la nation dans sa souveraineté. C'est pour l'accomplissement de cette double tâche que nous sommes debout, ne formant qu'un faisceau, maintenant avec fermeté le gouvernement établi le 4 septembre, ne demandant d'autre récompense que l'honneur insigne de remettre à la France, délivrée par l'héroïsme de ses enfants, les pouvoirs que nous avons reçus pour la défendre.
Agréez, mon cher général, l'expression de mes sentiments affectueux et dévoués. »
— Le Vice-Président du Gouvernement,
Le Ministre de l'Intérieur par intérim,
Jules Favre.
Il fait toujours très froid.
Sans dépêches ni rapports militaires.
Sans dépêches ni rapports militaires.
Lettre du roi de Prusse Guillaume Ier en réponse au courrier de l'ex-impératrice, Eugénie de Montijo, réfugiée en Angleterre.
Sans dépêches ni rapports militaires.
Sans dépêches ni rapports militaires.
Sans dépêches ni rapports militaires.
Sans dépêches ni rapports militaires.
Ruptures des négociations concernant l'armistice[133].
« Les quatre grandes puissances neutres, l'Angleterre la Russie, l'Autriche et l'Italie, avaient pris l'initiative d'une proposition d'armistice à l'effet de faire élire une assemblée nationale.
Le gouvernement de la Défense nationale avait posé ses conditions, qui étaient :
le ravitaillement de Paris et le vote pour l'assemblée nationale par toutes les populations françaises.
La Prusse a expressément repoussé la condition du ravitaillement ; elle n'a d'ailleurs admis qu'avec des réserves le vote de l'Alsace et de la Lorraine.
Le gouvernement de la Défense nationale a décidé à l'unanimité, que l'armistice ainsi compris devait être repoussé. »
Sur toute la ligne, l'ensemble de nos forts ou ouvrages avancés a bombardé les avant-postes et positions fortifiés de l'ennemi. Il y a eu une canonnade très vive de la part de la redoute du Moulin Saquet et de l'ouvrage des Hautes Bruyères appuyés par les forts de Charenton, d'Ivry et de Montrouge contre les postes prussiens situés au sud de Paris.
« Malgré les ordres les plus formellement exprimés par la voie des journaux et par celle de l'affichage, pour que les avant-postes ne soient dans aucun cas dépassés, des habitants de Paris sortent de la ville, se répandant par masses de tous les côtés à la fois dans la campagne. Ils s'avancent ainsi jusqu'à la portée la plus rapprochée des lignes prussiennes, encouragés par l'attitude de l'ennemi, qui les avait rarement inquiétés.
Celui-ci, au mépris de tout sentiment d'humanité, tire maintenant d'une manière continue sur des hommes sans armes, même sur des femmes et des enfants. Il y a eu des morts et des blessés. Le gouverneur de Paris, profondément ému d'une situation à laquelle les avant-postes sont impuissants à remédier, en raison de l'étendue de nos lignes extérieures, porte ces faits à la connaissance de tous les habitants et les adjure, de ne plus enfreindre des ordres dont l'inexécution a de si douloureuses conséquences. »
« Le général Gouverneur de Paris,
Considérant que l'affichage, les placards ou tous autres moyens analogues de publication de journaux, feuilles publiques ou écrits politiques, constituent une violation des lois sur l'affichage ; Que ces infractions sont fréquentes ; Considérant que, d'autre part, les lois de l'état de siège imposent aux chefs militaires le devoir d'interdire les publications de nature à exercer sur l'armée et les citoyens une influence pernicieuse.
ARRÊTE
Article 1er : Sont interdits tous affichage et placards de journaux, feuilles publiques ou écrits politiques de même nature.
Article 2 : Le préfet de police, les commandants militaires et les officiers de la garde nationale sont chargés de faire arracher, détruire et supprimer les publications affichées en violation de l'interdiction ci-dessus.
Article 3 : Les contrevenants seront poursuivis conformément aux lois. Ils pourront être déférés à la justice militaire.
Article 4 : Le préfet de police est chargé de l'exécution du présent arrêté.
Fait à Paris, le 20 novembre 1870. »
Dans la nuit du 27 au 28 novembre, on réunit à gauche du fort de Rosny la division d'Hugues avec son artillerie divisionnaire :
En avant du fort, 3 000 marins, 200 sapeurs du génie ou auxiliaires.
À droite du fort, la division Bellemare avec son artillerie divisionnaire et 3 batteries de 12, tirées de la réserve du 3e corps d’armée.
La division d'Hugues est suivie de deux batteries de 12, 6 pièces de 24 courts, 6 pièces de 7 et sur des voitures bien attelées : 1 500 pelles, 1 500 pioches, 200 haches, 20 scies (dites passe-partout), 20 masses, 50 dames, 8 sacs de poudre de 15 kg chacun, 20 000 sacs de terre[18].
« Citoyens de Paris,
Soldats de la garde nationale et de l'armée,
La politique d'envahissement et de conquête entend achever son œuvre. Elle introduit en Europe et prétend fonder en France le droit de la force. L'Europe peut subir cet outrage, mais la France veut combattre, et nos frères nous appellent au dehors pour la lutte suprême.
Après tant de sang versé, le sang va couler de nouveau. Que la responsabilité en retombe sur ceux dont la détestable ambition foule aux pieds les lois de la civilisation moderne et de la justice. Mettant notre confiance en Dieu, marchons en avant pour la patrie. »
— Le gouverneur de Paris, Général Trochu.
« Soldats de la 2e armée de Paris,
Le moment est venu de rompre le cercle de fer qui nous enserre depuis trop longtemps et menace de nous étouffer dans une lente et douloureuse agonie ! A vous est dévolu l'honneur de tenter cette entreprise : vous vous en montrerez dignes j'en ai la certitude.
Sans doute nos débuts seront difficiles ; nous aurons à surmonter de sérieux obstacles ; il faut les envisager avec calme et résolution, sans exagération et sans faiblesse.
La vérité, la voici : dès nos premiers pas, touchant nos avant-postes, nous trouverons d'implacables ennemis, rendus audacieux et confiants par de trop nombreux succès. Il y aura donc là à faire un vigoureux effort, mais il n'est pas au-dessus de vos forces : pour préparer votre action, la prévoyance de celui qui nous commande en chef a accumulé plus de 400 bouches à feu, dont deux tiers au moins du plus gros calibre ; aucun obstacle matériel ne saurait y résister, et, pour vous élancer dans cette trouée, vous serez plus de 150 000, tous bien armés, bien équipés, abondamment pourvus de munitions, et, j'en ai l'espoir, tous animés d'une ardeur irrésistible.
Vainqueurs dans cette première période de la lutte, votre succès est assuré, car l'ennemi a envoyé sur les bords de la Loire ses plus nombreux et ses meilleurs soldats ; les efforts héroïques et heureux de nos frères les y retiennent.
Courage donc et confiance ! Songez que, dans cette lutte suprême, nous combattrons pour notre honneur, pour notre liberté, pour le salut de notre chère et malheureuse patrie et, si ce mobile n'est pas suffisant pour enflammer vos cœurs, pensez à vos champs dévastés, à vos familles ruinées, à vos sœurs, à vos femmes, à vos mères désolées !
Puisse cette pensée vous faire partager la soif de vengeance, la sourde rage qui m'animent, et vous inspirer le mépris du danger.
Pour moi, j'y suis bien résolu j'en fais le serment devant vous, devant la nation tout entière je ne rentrerai dans Paris que mort ou victorieux ; vous pourrez me voir tomber, mais vous ne me verrez pas reculer. Alors, ne vous arrêtez pas, mais vengez-moi.
En avant donc ! En avant, et que Dieu nous protège ! »
— Le général en chef de la 2e armée de Paris, Auguste Ducrot.
Un froid intense s'installe à tel point que la Seine gèle. Les températures les plus basses atteindront -20°.
Recensement de la population des 20 arrondissements de Paris, en date de décembre 1870, qui comprend les réfugiés[157].
Arrondissement | Population | Commentaires |
---|---|---|
1er arrondissement | 77 831 habitants | |
2e arrondissement | 77 671 habitants | |
3e arrondissement | 96 442 habitants | |
4e arrondissement | 96 341 habitants | |
5e arrondissement | 98 213 habitants | |
6e arrondissement | 90 803 habitants | |
7e arrondissement | 68 883 habitants | |
8e arrondissement | 75 880 habitants | |
9e arrondissement | 102 215 habitants | |
10e arrondissement | 141 485 habitants | |
11e arrondissement | 183 723 habitants | |
12e arrondissement | 100 077 habitants | |
13e arrondissement | 79 828 habitants | |
14e arrondissement | 82 100 habitants | |
15e arrondissement | 92 807 habitants | |
16e arrondissement | 44 034 habitants | |
17e arrondissement | 120 064 habitants | |
18e arrondissement | 154 517 habitants | |
19e arrondissement | 113 716 habitants | |
20e arrondissement | 108 229 habitants | |
Total | 2 005 700 habitants |
Vers 6 heures du soir, il était télégraphié la dépêche officielle suivante :
« Grande victoire sous Paris!
Sortie du général Ducrot, qui occupe la Marne. »
Cette triomphante nouvelle de Paris débloqué, Dieu sait avec quelle joie immense la province l'accueillit! « Le général Ducrot occupe la Marne » disait-on; il a donc pu faire une sortie victorieuse vers Vincennes et le chemin de Lyon. Les Prussiens, battus, ont donc abandonné le terrain; la capitale, débloquée sur ce point, est donc enfin en communication avec le reste de la France!
Hélas, bientôt la vérité fut connue : le général Ducrot avait manqué sa sortie. Son grand mouvement stratégique n'avait été qu'un grand mouvement oratoire, et Paris avait vu rentrer bien portant celui qui promettait de revenir ou mort ou victorieux.
Proclamation du général Ducrot faite à Vincennes :
« Soldats !
Après deux journées de glorieux combats, je vous ai fait repasser la Marne, parce que j'étais convaincu que de nouveaux efforts, dans une direction où l'ennemi avait eu le temps de concentrer ses forces et de préparer tous ses moyens d'action, seraient stériles.
En nous obstinant dans cette voie, je sacrifiais inutilement des milliers de braves, et, loin de servir l’œuvre de la délivrance, je la compromettais sérieusement, et je pouvais même vous conduire à un désastre irréparable.
Mais, vous l'avez compris, la lutte n'est suspendue que pour un instant ; nous allons la reprendre avec résolution : soyez donc prêts, complétez en toute hâte vos munitions, vos vivres, et surtout élevez vos cœurs à la hauteur des sacrifices qu'exige la sainte cause pour laquelle nous ne devons pas hésiter à donner notre vie. »
— Le général en chef de la 2e armée, A. Ducrot
« Le gouvernement de la Défense nationale porte à la connaissance de la population les faits suivants :
Hier au soir le gouverneur a reçu une lettre dont voici le texte :
« Versailles, ce .
« Il pourrait être utile d'informer Votre Excellence que l'armée de la Loire a été défaite hier près d'Orléans et que cette ville est réoccupée par les troupes allemandes.
Si toutefois Votre Excellence jugera à propos de s'en convaincre par un de ses officiers, je ne manquerai pas de le munir d'un sauf-conduit pour aller et venir.
Agréez, mon général, l'expression de la haute considération avec laquelle j'ai l'honneur d'être votre très humble et très obéissant serviteur. »
— Le chef d'état-major, « Comte von Moltke. »
« Le gouverneur a répondu
« Votre Excellence a pensé qu'il pourrait être utile de m'informer que l'armée de la Loire a été défaite près d'Orléans et que cette ville est réoccupée par les troupes allemandes.
« J'ai l'honneur de vous accuser réception de cette communication, que je ne crois pas devoir faire vérifier par les moyens que Votre Excellence m'indique.
« Agréez, mon général, l'expression de la haute considération avec laquelle j'ai l'honneur d'être votre très humble et très obéissant serviteur. »
« Cette nouvelle qui nous vient par l'ennemi, en la supposant exacte, ne nous ôte pas le droit de compter sur le grand mouvement de la France accourant à notre secours. Elle ne change rien ni à nos résolutions ni à nos devoirs.
Un seul mot les résume : Combattre ! Vive la France ! Vive la République ! »
« Aux habitants de Paris.
Hier, des bruits inquiétants répandus dans la population ont fait affluer les consommateurs dans certaines boulangeries.
On craignait le rationnement du pain.
Cette crainte était absolument dénuée de fondement.
La consommation du pain ne sera pas rationnée.
Le Gouvernement a le devoir de veiller à la subsistance de la population ; c'est un devoir qu'il remplit avec la plus grande vigilance. Nous sommes encore fort éloignés du terme où les approvisionnements deviendraient insuffisants.
La plupart des sièges ont été troublés par des paniques. La population de Paris est trop intelligente pour que ce fléau ne nous soit pas épargné.
Paris, le 12 décembre 1870. »
— Signé : Jules Favre, Jules Ferry, Jules Simon, Eugène Pelletan, Ernest Picard, Garnier-Pagès, Emmanuel Arago.
Le 25 décembre, à six heures du matin, le thermomètre indiquait 12 degrés au-dessous de zéro et à midi, 8 degrés 7 dixièmes au-dessous de zéro. Le baromètre indiquait 754 mm 7, sans correction.
Monsieur Bonvalet, offrit un dîner à 20 convives le soir du réveillon, servi au restaurant Noël Peter’s 95, rue de Richelieu - 24, passage des Princes[193] pour fêter son élection en tant que maire du 3e arrondissement de Paris.
Le menu était composé de :
Du mardi 27 décembre, au dimanche 1er janvier, les Prussiens ont envoyé 25 000 projectiles.
Les Prussiens envoient 6 000 bombes par jour.
Le 3 janvier à minuit, le thermomètre centigrade de l'ingénieur Ducray-Chevalier, au Pont-Neuf, marquait 4 degrés 2 dixièmes au-dessous de zéro.
Le 4 janvier à six heures du matin, le thermomètre indiquait 3 degrés 3 dixièmes au-dessous de zéro et à midi, 0 degré. Le baromètre, indique 766 mm 4, sans correction.
Le bombardement de Paris commence.
Le gouvernement de la Défense nationale fait une déclaration afin de remonter le moral des troupes et de la population.
« Le bombardement de Paris est commencé.
L'ennemi ne se contente pas de tirer sur nos forts, il lance ses projectiles sur nos maisons, il menace nos foyers et nos familles.
Sa violence redoublera la résolution de la cité qui veut combattre et vaincre.
Les défenseurs des forts couverts de feux incessants ne perdent rien de leur calme, et sauront infliger à l'assaillant de terribles représailles.
La population de Paris accepte vaillamment cette nouvelle épreuve. L'ennemi croit l'intimider, il ne fera que rendre son élan plus vigoureux. Elle se montrera digne de l'armée de la Loire qui a fait reculer l'ennemi, de l'armée du Nord qui marche à notre secours.
Vive la France! Vive la République! »
— Les membres du gouvernement.
Après le gouvernement de la Défense nationale c'est au tour du gouverneur de Paris de faire une déclaration afin de remonter le moral des troupes et de la population.
Le gouverneur de Paris a adressé la proclamation suivante aux habitants de Paris :
« Au moment où l'ennemi redouble ses efforts d'intimidation, on cherche à égarer les citoyens de Paris, par la tromperie et la calomnie. On exploite contre la défense nos souffrances et nos sacrifices. Rien ne fera tomber les armes de nos mains. Courage, confiance, patriotisme !
Le gouverneur de Paris ne capitulera pas.
Paris, le . »
— Le gouverneur de Paris,
Général Trochu
La nouvelle de la victoire de Bapaume par l'armée du Nord du général Faidherbe redonne de l'espoir aux Parisiens.
Journal officiel de la République du 9 janvier 1871 :
« Après un investissement de plus de trois mois, l'ennemi a commencé le bombardement de nos forts le 30 décembre, et, six jours après, celui de la ville. Une pluie de projectiles, dont quelques uns pesant 94 kilogrammes, apparaissant pour la première fois dans l'histoire des sièges, a été lancée sur la partie de Paris qui s'étend depuis les Invalides jusqu'au Muséum. Le feu a continué jour et nuit, sans interruption, avec une telle violence, que, dans la nuit du 8 au 9 janvier, la partie de la ville située entre Saint Sulpice et l'Odéon recevait un obus par chaque intervalle de deux minutes.
Tout a été atteint : nos hôpitaux regorgent de blessés, nos ambulances, nos écoles ; les musées et les bibliothèques, les prisons, l'église Saint-Sulpice, celles de la Sorbonne et du Val-de-Grâce, un certain nombre de maisons particulières. Des femmes ont été tuées dans la rue, d'autres dans leur lit ; des enfants ont été saisis par des boulets dans les bras de leur mère. Une école de la rue de Vaugirard a eu quatre enfants tués et cinq blessés par un seul projectile.
Le musée du Luxembourg, qui contient les chefs-d'œuvre de l'art moderne, et le jardin où se trouvait une ambulance qu'il a fallu faire évacuer à la hâte, ont reçu vingt obus dans l'espace quelques heures. Les fameuses serres du Muséum, qui n'avaient point de rivales dans le monde, sont détruites. Au Val-de-Grâce, pendant la nuit, deux blessés, dont un garde national, ont été tués dans leur lit. Cet hôpital, reconnaissable à la distance de plusieurs lieues par son dôme que tout le monde connaît, porte les traces du bombardement dans ses cours, dans ses salles de malades, dans son église, dont la corniche a été enlevée.
Aucun avertissement n'a précédé cette furieuse attaque. Paris s'est trouvé tout à coup transformé en champ de bataille, et nous déclarons avec orgueil que les femmes s'y sont montrées aussi intrépides que les citoyens. Tout le monde a été envahi par la colère, mais personne n'a senti la peur.
Tels sont les actes de l'armée prussienne et de son roi, présent au milieu d'elle. Le gouvernement les constate pour la France, pour l'Europe et pour l'histoire. »
Décret du gouvernement de la Défense nationale :
« Considérant que les devoirs de la République sont les mêmes à l'égard des victimes du bombardement de Paris qu'à l'égard de ceux qui succombent les armes à la main pour la défense de la patrie,
DÉCRÈTE
Tout Français atteint par les bombes prussiennes est assimilé au soldat frappé par l'ennemi.
Les veuves de ceux qui auront péri par l'effet du bombardement de Paris, les orphelins de pères ou de mères qui auront péri de même, sont assimilés aux veuves et aux orphelins des soldats tués à l'ennemi. »
Décret - Tout Français atteint par les bombes est assimilé au soldat.
Le gouvernement de la Défense nationale adresse la proclamation suivante aux habitants de Paris :
« Citoyens,
L'ennemi tue nos femmes et nos enfants ; il nous bombarde jour et nuit ; il couvre d'obus nos hôpitaux. Un cri: Aux armes ! est sorti de toutes les poitrines.
Ceux d'entre nous qui peuvent donner leur vie sur le champ de bataille marcheront à l'ennemi ; ceux qui restent, jaloux de se montrer dignes de l'héroïsme de leurs frères, accepteront au besoin les plus durs sacrifices comme un autre moyen de se dévouer pour la patrie.
Souffrir et mourir, s'il le faut, mais vaincre.
Vive la république ! »
— Les membres du gouvernement.
La population parisienne apprend que le général Chanzy, après de brillantes batailles, a dû se replier derrière la Mayenne.
« C'est avec fierté que le commandant supérieur de la Garde nationale rend hommage, par la voie de l'ordre, au courage dont ont fait preuve les régiments de Paris engagés dans la bataille du 19 janvier. Il a eu la satisfaction de l'entendre louer, sur le terrain même, par les divers chefs de l'armée sous les ordres desquels ces régiments ont combattu.
Engagés dès le point du jour, ils ont soutenu avec ardeur une lutte que l'état de l'atmosphère rendait plus difficile, jusqu'à une heure avancée de la nuit qui seule a mis fin au combat.
N'ayant pas encore reçu des chefs de corps les renseignements nécessaires, le commandant supérieur ne peut faire connaître, aujourd'hui les noms des officiers, sous‑officiers et gardes qui ont succombé, ou de ceux qui se sont particulierement distingués. Mais, dès aujourd'hui, il ne craint pas de dire ce mot qui sera répété par la France entière : « Dans la journée du 19 janvier, la garde nationale de Paris, comme l'armée et comme la mobile, a fait dignement son devoir. » »
— Le général commandant supérieur,
Clément-Thomas
Ordre du jour du général Vinoy à l'Armée de Paris.
« Le gouvernement de la Défense nationale vient de me placer à votre tête. Il fait appel à mon patriotisme et à mon dévouement ; je n'ai pas le droit de me soustraire. C'est une charge bien lourde, je n'en veux accepter que la péril, et il ne faut pas se faire d'illusions.
Après un siège de plus de quatre mois, glorieusement soutenu par l’armée et par la garde nationale, virilement supporté par la population de Paris, nous voici arrivés au moment critique.
Refuser le dangereux honneur du commandement dans une semblable circonstance, serait ne pas répondre à la confiance qu'on a mise en moi. Je suis soldat et ne sais pas reculer devant les dangers que peut entraîner cette grande responsabilité.
À l'intérieur, le parti du désordre s'agite et cependant le canon gronde. Je veux être soldat jusqu’au bout, j'accepte ce danger, bien convaincu que le concours des bons citoyens, celui de l'armée et de la garde nationale ne me feront pas défaut pour le maintien de l'ordre et le salut commun. »
— Général Vinoy.
L'activité de l'armée assiégeante se remarque sur tous les points de la ligne d'investissement.
Une brume épaisse règne toute la journée.
de la route de Pierrefite.
Pour sa 30e journée de bombardement, le fort de Rosny a reçu 45 obus.
« Tant que le gouvernement a pu compter sur l’arrivée d'une armée de secours, il était de son devoir de ne rien négliger pour prolonger la défense de Paris.
En ce moment, quoique nos armées soient encore debout, les chances de la guerre les ont refoulées, l'une sous les murs de Lille, l'autre au-delà de Laval ; la troisième opère sur les frontières de l'est. Nous avons dès lors perdu tout espoir qu'elles puissent se rapprocher de nous, et l'état de nos subsistances ne nous permet plus d'attendre.
Dans cette situation, le gouvernement avait le devoir absolu de négocier. Les négociations ont lieu en ce moment. Tout le monde comprendra que nous ne pouvons en indiquer les détails sans de graves inconvénients. Nous espérons pouvoir les publier demain. Nous pouvons cependant dire dès aujourd'hui que le principe de la souveraineté nationale sera sauvegardé par la réunion immédiate d'une assemblée; que l’armistice a pour but la convocation de cette assemblée ; que, pendant cet armistice, l'armée allemande occupera les forts, mais n'entrera pas dans l'enceinte de Paris ; que nous conserverons notre garde nationale intacte et une division de l'armée, et qu'aucun de nos soldats ne sera emmené hors du territoire.
Paris, . »
Le général Vinoy aux Commandants de tous les forts. 26 janvier, 9 h 35 du soir.
Suspension d'armes à minuit.
Cessez le feu sur toute la ligne.
Exécutez rigoureusement cet ordre.
« Citoyens,
La convention qui met fin à la résistance de Paris n'est pas encore signée, mais ce n'est qu'un retard de quelques heures.
Les bases en demeurent fixées telles que nous les avons annoncées hier :
L'ennemi n'entrera pas dans l'enceinte de Paris.
La garde nationale conservera son organisation et ses armes.
Une division de douze mille hommes demeure intacte ; quant aux autres troupes, elles resteront dans Paris, au milieu de nous, au lieu d'être, comme on l'avait d'abord proposé, cantonnées dans la banlieue. Les officiers garderont leur épée.
Nous publierons les articles de la convention aussitôt que les signatures auront été échangées, et nous ferons en même temps connaître, l'état exact de nos subsistances.
Paris veut être sûr que la résistance a duré jusqu'aux dernières limites du possible. Les chiffres que nous donnerons en seront la preuve irréfragable, et nous mettrons qui que ce soit au défi de les contester.
Nous montrerons qu'il nous reste tout juste assez de pain pour attendre le ravitaillement, et que nous ne pouvions prolonger la lutte sans condamner a une mort certaine deux millions d'hommes, de femmes et d'enfants.
Le siège de Paris a duré quatre mois et douze jours. Le bombardement, un mois entier. Depuis le 15 janvier, la ration de pain est réduite à 300 grammes ; la ration de viande de cheval, depuis le 15 décembre, n'est que de 30 grammes. La mortalité a plus que triplé. Au milieu de tant de désastres, il n'y a pas eu un seul jour de découragement.
L'ennemi est le premier à rendre hommage à l'énergie morale et au courage dont la population parisienne tout entière vient de donner l'exemple.
Paris a beaucoup souffert ; mais la République profitera de ses longues souffrances, si noblement supportées. Nous sortons de la lutte qui finit, retrempés pour la lutte à venir. Nous en sortons avec tout notre honneur, avec toutes nos espérances, malgré les douleurs de l'heure présente ; plus que jamais nous avons foi dans les destinées de la patrie.
Paris, 28 janvier 1871. »
Une convention d'armistice est arrêtée entre Otto von Bismarck, et Jules Favre, ministre des affaires étrangères du gouvernement de la Défense nationale :
« CONVENTION Entre M. le comte de Bismarck, chancelier de la Confédération germanique, stipulant au nom de S. M. l'empereur d'Allemagne, roi de Prusse, et M. Jules Favre, ministre des affaires étrangères du gouvernement de la Défense nationale, munis de pouvoirs réguliers,
Ont été arrêtées les conventions suivantes :
- ARTICLE PREMIER.
Un armistice général, sur toute la ligne des opérations militaires eu cours d'exécution entre les armées allemandes et les armées françaises, commencera pour Paris aujourd'hui même, pour les départements dans un délai de trois jours ; la durée de l'armistice sera de vingt et un jours, à dater d'aujourd'hui, de manière que, sauf le cas où il serait renouvelé, l'armistice se terminera partout le 19 février, à midi.
Les armées belligérantes conserveront leurs positions respectives, qui seront séparées par une ligne de démarcation. Cette ligne partira de Pont I'Ëvèque, sur les côtes du département du Calvados, se dirigera sur Lignières, dans le Nord-Est du département de la Mayenne, en passant outre Briouze et Fromentel en touchant au département de la Mayenne à Lignières, elle suivra la limite qui sépare ce département de celui de l'Orne et de la Sarthe, jusqu'au nord de Morannes, et sera continuée de manière à laisser à l'occupation allemande les départements de la Sarthe, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, du Loiret, de l'Yonne, jusqu'au point où, à l'Est de Quarré-les-Tombes, se touchent les départements de la Côte-d'Or, de la Nièvre et de l'Yonne. À partir de ce point, le tracé de la ligne sera réservé à une entente qui aura lieu aussitôt que les parties contractantes seront renseignées sur la situation actuelle des opérations militaires en exécution dans les départements de la Côte-d'Or, du Doubs et du Jura. Dans tous les cas, elle traversera le territoire composé de ces trois départements, en laissant à l'occupation allemande les départements situés au Nord, à l'armée française ceux situés au Midi de ce territoire.
Les départements du Nord et du Pas de Calais, les forteresses de Givet et de Langres, avec le terrain qui les entoure à une distance de dix kilomètres, et la péninsule du Havre jusqu'à une ligne à tirer d'Étretat, dans la direction, de Saint Romain, resteront en dehors de l'occupation allemande.
Les deux armées belligérantes, et leurs avant postes de part et d'autre, se tiendront à une distance de dix kilomètres au moins des lignes tracées pour séparer leurs positions.
Chacune des deux armées se réserve le droit de maintenir son autorité dans le territoire qu'elle occupe, et d'employer les moyens que ses commandants jugeront nécessaires pour arriver à ce but.
L'armistice s'applique également aux forces navales des deux pays, en adoptant le méridien de Dunkerque comme ligne de démarcation, à l'Ouest de laquelle se tiendra la flotte française, et à l'est de laquelle se retireront, aussitôt qu'ils pourront être avertis, les bâtiments de guerre allemands qui se trouvent dans les eaux occidentales. Les captures qui seraient faites après la conclusion et avant la notification de l'armistice, seront restituées, de même que les prisonniers qui pourraient être faits de part et d'autre, dans des engagements qui auraient en lieu dans l'intervalle indiqué.
Les opérations militaires sur le terrain des départements du Doubs, du Jura et de la Côte-d'Or, ainsi que le siège de Belfort, se continueront indépendamment de l'armistice, jusqu'au moment ou l'on se sera mis d'accord sur la ligne de démarcation dont le tracé à travers les trois départements mentionnés a été réservé à une entente ultérieure.
- ARTICLE 2.
L'armistice ainsi convenu a pour but de permettre au gouvernement de la Défense nationale de convoquer une Assemblée librement élue qui se prononcera sur la question de savoir : si la guerre doit être continuée, ou à quelles conditions a paix doit être faite. L'Assemblée se réunira dans la ville de Bordeaux.
Toutes les facilités seront données par les commandants des armées allemandes pour l'élection et la réunion des députés qui la composeront.
- ARTICLE 3.
Il sera fait immédiatement remise à l'armée allemande, par l'autorité militaire française, de tous les forts formant le périmètre de la défense extérieure de Paris, ainsi que de leur matériel de guerre. Les communes et les maisons situées en dehors de ce périmètre ou entre les forts pourront être occupées par les troupes allemandes, jusqu'à une ligne à tracer par des commissaires militaires. Le terrain restant entre cette ligne et l'enceinte fortifiée de la ville de Paris sera interdit aux forces armées des deux parties. La manière de rendre les forts, et le tracé de la ligne mentionnée formeront l'objet d'un protocole à annexer à la présente convention.
- ARTICLE 4.
Pendant la durée de l'armistice, l'armée allemande n'entrera pas dans la ville de Paris.
- ARTICLE 5.
L'enceinte sera désarmée de ses canons, dont les affûts seront transportés dans les forts à désigner par le commissaire de l'armée allemande (*).
(*) Dans le protocole, cette condition du transport des affûts dans les forts a été abandonnée par les commissaires allemands, sur la demande des commissaires français.
- ARTICLE 6
Les garnisons (armée de ligne, garde mobile et marins) des forts de Paris seront prisonnières de guerre, sauf une division de douze mille hommes que l'autorité militaire dans Paris conservera pour le service intérieur.
Les troupes prisonnières de guerre déposeront leurs armes, qui seront réunies dans des lieux désignés et livrées suivant règlement par des commissaires suivant l'usage. Ces troupes resteront dans l'intérieur de la ville, dont elles ne pourront pas franchir l'enceinte pendant l'armistice. Les autorités françaises s'engagent à veiller à ce que tout individu appartenant à l'armée et à la garde mobile reste consigné dans l'intérieur de la ville. Les officiers des troupes prisonnières seront désignés par une liste à remettre aux autorités allemandes.
À l'expiration de l'armistice, tous les militaires appartenant à l'armée consignée dans Paris, auront à se constituer prisonniers de guerre de l'armée allemande, si la paix n'est pas conclue jusque-là.
Les officiers prisonniers conserveront leurs armes.
- ARTICLE 7.
La garde nationale conservera ses armes. Elle sera chargée de la garde de Paris et du maintien de l'ordre. Il en sera de même de la gendarmerie et des troupes assimilées, employées dans le service municipal, telles que la garde républicaine, les douaniers et les pompiers ; la totalité de cette catégorie n'excède pas trois mille cinq cents hommes[11],[12].
Tous les corps de francs-tireurs seront dissous par une ordonnance du gouvernement français.
- ARTICLE 8.
Aussitôt après les signatures des présentes et avant la prise de possession des forts, le commandant en chef des armées allemandes donnera toutes facilités aux commissaires que le gouvernement français enverra, tant dans les départements qu'à l'étranger, pour préparer le ravitaillement et faire approcher de la ville les marchandises qui y sont destinées.
- ARTICLE 9.
Après la remise des forts et après le désarmement de l'enceinte et de la garnison, stipulés dans les articles 5 et 6, le ravitaillement de Paris s'opérera librement par la circulation sur les voies ferrées et fluviales. Les provisions destinées à ce ravitaillement ne pourront être puisées dans le terrain occupé par les troupes allemandes, et le gouvernement français s'engage à en faire l'acquisition en dehors de la ligne de démarcation qui entoure les positions des armées allemandes, à moins d'autorisation contraire donnée par les commandants de ces dernières.
- ARTICLE 10.
Toute personne qui voudra quitter la ville de Paris devra être munie de permis réguliers délivrés par l'autorité militaire française, et soumis au visa des avant postes allemands. Ces permis et visas seront accordés de droit aux candidats à la députation en province et aux députés à l'Assemblée.
La circulation des personnes qui auront obtenu l'autorisation indiquée, ne sera admise qu'entre six heures du matin et six heures du soir.
- ARTICLE 11.
La ville de Paris payera une contribution municipale de guerre, de la somme de deux cents millions de francs. Ce payement devra être effectué avant le quinzième jour de l'armistice. Le mode de payement sera déterminé par une commission mixte, allemande et française.
- ARTICLE 12
Pendant la durée de l'armistice, il ne sera rien distrait des valeurs publiques pouvant servir de gages au recouvrement des contributions de guerre.
- ARTICLE 13.
L'importation dans Paris d'armes, de munitions ou de matières servant à leur fabrication, sera interdite pendant la durée de l'armistice.
- ARTICLE 14.
Il sera procédé immédiatement à l'échange de tous les prisonniers de guerre qui ont été faits par l'armée française depuis le commencement de la guerre. Dans ce but, les autorités françaises remettront, dans le plus bref délai, des listes nominatives des prisonniers de guerre allemands aux autorités militaires allemandes à Amiens, au Mans, à Orléans et à Vesoul. La mise en liberté des prisonniers de guerre allemands s'effectuera sur les points les plus rapprochés de la frontière. Les autorités allemandes remettront en échange, sur les mêmes points, et dans le plus bref délai possible, un nombre pareil de prisonniers français, de grades correspondants, aux autorités militaires françaises.
L'échange s'étendra aux prisonniers de condition bourgeoise, tels que les capitaines de navires de la marine marchande allemande, et les prisonniers français civils qui ont été internés en Allemagne.
- ARTICLE 15
Un service postal pour des lettres non cachetées sera organisé entre Paris et les départements, par l'intermédiaire du quartier général de Versailles.
En foi de quoi les soussignés ont revêtu de leurs signatures et de leur sceau les présentes conventions.Fait à Versailles, le vingt huit janvier mil huit cent soixante et onze. »
— Signé : Jules Favre - Bismark
« Le gouvernement a annoncé qu'il donnerait la preuve irréfragable que Paris a poussé la résistance jusqu'aux extrêmes limites du possible. Hier encore il y avait inconvénient grave à publier des informations de ce genre. Aujourd'hui que la convention relative à l'armistice est signée, le gouvernement a pu remplir sa promesse.
Il faut d'abord se remettre en mémoire ce que trop de personnes semblent avoir oublié : c'est qu'au début de l'investissement les plus optimistes n'osaient pas croire à un siège de plus de six ou sept semaines.
Lorsque, le 8 septembre, le Journal officiel répétant une déclaration affichée sur les murailles par M. Magnin, ministre du commerce, affirmait que les approvisionnements en viandes, liquides et objets alimentaires de toute espèce, seraient largement suffisant pour assurer l'alimentation d'une population de deux millions d'âmes pendant deux mois, cette assertion était généralement accueillie par un sourire d'incrédulité. Or, quatre mois et vingt jours se sont écoulés depuis le 8 septembre.
Au milieu des plus dures privations, devenues, pendant ces dernières semaines, de cruelles souffrances, Paris a résisté aussi longtemps qu'il a pu raisonnablement espérer le secours des armées extérieures, aussi longtemps qu'un morceau de pain lui est resté pour nourrir ses habitants et ses défenseurs. Il ne s'est arrêté que lorsque les nouvelles venues de province lui ont arraché tout espoir ; en même temps que l'état de ses subsistances lui montrait la famine imminente et inévitable.
Le 27 janvier, c'est-à-dire huit jours après la dernière bataille livrée sous nos murs et presque au moment où nous apprenions les insuccès de Chanzy et de Faidherbe, il restait en magasin 42 000 quintaux métriques de blé, orge, seigle, riz et avoine, ce qui, réduit en farine, représente, à cause du faible rendement de l'avoine, 35 000 quintaux métriques de farine panifiable. Dans cette quantité sont compris 41 000 quintaux de blé et 6 000 quintaux de riz, cédés par l'administration de la guerre, laquelle ne possède plus que dix jours de vivres pour les troupes, si on les traite comme des troupes en campagne savoir, 12 000 quintaux de riz, blé et farine et 20 000 quintaux d'avoine. Telle était la situation de nos approvisionnements en céréales à l'heure de l'ouverture des négociations.
En temps ordinaire, Paris emploie à sa subsistance 8 000 quintaux de farine par jour, c'est-à-dire 2 000 000 de livres de pain ; mais, du 22 septembre au 18 janvier, sa consommation a été réduite à une moyenne de 6 360 quintaux de farine par jour, et depuis le 18 janvier, c'est-à-dire depuis le rationnement, cette consommation est descendue à 5 300 quintaux soit un sixième de moins environ que la quantité habituelle, nous pourrions dire nécessaire.
En partant de ce chiffre de 5 300 quintaux, le total de nos approvisionnements représente une durée de sept jours.
À ces sept jours, on peut ajouter un jour d'alimentation fournie par la farine actuellement distribuée aux boulangers ; trois ou quatre jours auxquels subviendront les quantités de blé enlevées aux détenteurs par tous les moyens qu'il a été possible d'imaginer, et l'on arrive ainsi à reconnaître "que nous avons du pain pour huit jours au moins, pour douze jours au plus".
Il n'est pas inutile de dire que depuis trois semaines, il n'existe plus de provision en farine. Nos moulins ne fournissent chaque jour que la farine nécessaire au lendemain. Il eût suffi de quelques obus, tombant sur l'usine Cail[219], pour mettre instantanément en danger l'alimentation de toute la ville.
En ce qui concerne la viande, la situation peut se caractériser par un seul mot. Depuis l'épuisement de nos réserves de boucherie, nous avons vécu en mangeant du cheval. Il y avait 400 000 chevaux à Paris. Il n'en reste plus que 33 000, en comprenant dans ce chiffre les chevaux de la guerre.
Ces 33 000 chevaux, d'ailleurs, ne sauraient être tous abattus sans les plus graves inconvénients. Plusieurs services, indispensables à la vie, seraient suspendus : ambulances, transport des grains, des farines et des combustibles ; services de l'éclairage et des vidanges, pompes funèbres, etc. Il nous faudra, d'autre part, beaucoup de chevaux pour le camionnage, quand la ravitaillement commencera. En réalité, une fois ces diverses nécessités satisfaites, le nombre des animaux disponibles pour la boucherie ne dépassera pas 22 000 environ.
En ce moment nous consommons, avec l'armée, 650 chevaux par jour, soit 25 à 30 grammes par habitant, après le prélèvement des hôpitaux, des ambulances et des fourneaux. Vingt cinq grammes de viande de cheval, trois cents grammes de pain, voilà la nourriture dont Paris se contente à l'heure qu'il est. Dans dix jours, quand nous n'aurons plus de pain, nous aurons consommé 6 509 chevaux de plus, et il ne nous en restera que 26 500. Nous pouvons, il est vrai, y joindre 3 000 vaches réservées pour le dernier moment, parce qu'elles fournissent du lait aux malades et aux nouveau-nés. Mais, alors, comme il faudra remplacer le pain absent, la ration de la viande devra être quadruplée, et nous serons obligés de tuer 3 000 chevaux par jour. Nous vivrions ainsi pendant une semaine environ.
Mais nous n'en viendrons pas à cette extrémité, précisément parce que le gouvernement de la Défense nationale s'est décidé à négocier. On dira peut-être : Pourquoi avoir tant tardé ? Pourquoi n'avoir pas révélé plus tôt ces vérités terribles ? » A cette question, il y a à répondre que le devoir était, de prolonger la résistance jusqu'aux dernières limites, et que la révélation de semblables détails eût été la fin de toute résistance.
Mais le ravitaillement marchera assez vite pour que nous ne restions pas un seul jour sans pain. Toutes les mesures que la prudence pouvait suggérer ont été prises, et, pourvu que, chacun comprenne son devoir, pourvu que les agitations intérieures ne viennent pas troubler la reprise de l'activité industrielle et commerciale, de nouveaux approvisionnements nous arriveront juste au moment où nous aurons épuisé ceux qui nous restent. Nous avons le ferme espoir, nous avons la certitude que la famine sera épargnée à deux millions d'hommes, de femmes, de vieillards et d'enfants. Le devoir sacré de pousser la résistance aussi loin que les forces humaines le comportent, nous a obligés de tenir tant que nous avons eu un reste de pain. Nous avons cédé, non pas à l'avant dernière heure, mais à la dernière.
Paris, 29 janvier 1871. »
« Soldats, marins et gardes mobiles,
Tant qu'une bouchée de pain a été assurée à Parts, vous avez défendu cette grande cité, qui a été, pendant cinq mois, le boulevard de la France. Vous l'avez défendue au prix de votre sang, qui a coulé à pleins bords.
Aujourd'hui que des malheurs inouïs, que votre courage et vos sacrifices n'ont pu conjurer, vous ramènent dans son enceinte, de nouveau devoirs, non moins sacrés que ceux que vous avez accomplis déjà, vous sont imposés. À tout prix vous devez donner à tous l'exemple de la discipline, de la bonne tenue, de l'obéissance. Vous le devez par respect de vous mêmes, par respect pour notre patrie en deuil, dans l'intérêt de la sécurité publique.
Vous ne faillirez pas, j'espère, à cette obligation sacrée. Y manquer serait plus qu'une faute, ce serait un crime.
Officiers, sous-officiers et soldats, restez unis dans un sentiment commun de patriotisme passionné soutenez vous, fortifiez vous les uns les autres, alors qu'après avoir versé tant de sang pour l'honneur de Paris et les plus grands intérêts de la patrie, vous méritiez qu'on dise de vous : Ils ne sont pas seulement de braves soldats, ils sont aussi de bons citoyens.
Paris, le 30 janvier 1871. »
— Le ministre de la guerre
« Français,
Paris a déposé les armes à la veille de mourir de faim.
On lui avait dit : Tenez quelques semaines, et nous vous délivrerons. Il a résisté cinq mois, et, malgré d'héroïques efforts, les départements n'ont pu le secourir.
Il s'est résigné aux privations les plus cruelles. Il a accepté la ruine, la maladie, l'épuisement. Pendant un mois, les bombes l'ont accablé, tuant les femmes, les enfants. Depuis plus de six semaines, les quelques grammes de mauvais pain qu'on distribue, à chaque habitant suffisent à peine à l'empêcher de mourir.
Et quand, ainsi vaincue par la plus inexorable nécessité, la grande cité s'arrête pour ne pas condamner deux millions de citoyens à la plus horrible catastrophe ; quand, profitant de son reste de forces, elle traite avec l'ennemi au lieu de subir une reddition à merci, au dehors, on accuse le gouvernement de la Défense nationale de coupable légèreté, on le dénonce, on le rejette.
Que la France nous juge, nous et ceux qui nous comblaient hier de témoignages d'amitié et de respect, et qui aujourd'hui nous insultent :
Nous ne relèverions pas leurs attaques si le devoir ne nous commandait de tenir jusqu'à la dernière heure, d'une main ferme, le gouvernail que le peuple de Paris nous a confié au milieu de la tempête. Ce devoir, nous l'accomplirons.
Lorsqu'à la fin de janvier, nous nous sommes résignés à essayer de traiter, il était bien tard. Nous n'avions plus de farine que pour dix jours, et nous savions que la dévastation du pays rendait le ravitaillement tout à fait incertain. Ceux qui se lèvent aujourd'hui contre nous ne connaîtront jamais les angoisses qui nous agitaient.
Il fallait cependant les cacher, aborder l'ennemi avec résolution, paraître encore prêts à combattre et munis de vivres.
Ce que nous voulions, le voici :
Avant tout, n'usurper aucun droit. À la France seule appartient celui de disposer d'elle-même. Nous avons voulu le lui réserver. Il a fallu de longues luttes pour obtenir la reconnaissance de sa souveraineté. Elle est le point le plus important de notre traité.
Nous avons conservé à la garde nationale sa liberté et ses armes.
Si, malgré nos efforts, nous n'avons pu soustraire l'armée et la garde mobile aux lois rigoureuses de la guerre, an moins les avons nous sauvées de la captivité en Allemagne et de l'internement dans un camp retranché, sous les fusils prussiens.
On nous reproche de n'avoir pas consulté la délégation de Bordeaux ! On oublie que nous étions enfermés dans un cercle de fer que nous ne pouvions briser.
On oublie d'ailleurs, que chaque jour rendait plus probable la terrible catastrophe de la famine, et, cependant, nous avons disputé le terrain pied à pied, pendant six jours, alors que la population de Paris ignorait et devait ignorer sa situation véritable, et qu'entrainée par une généreuse ardeur elle demandait à combattre.
Nous avons donc cédé à une nécessité fatale.
Nous avons, pour la convocation de l'Assemblée, stipulé un armistice, alors que les armées qui pouvaient nous venir en aide étaient refoulé loin de nous.
Une seule tenait encore, nous le croyions du moins. La Prusse a exigé la reddition de Belfort. Nous l'avons refusée, et, par là même, pour protéger la place, nous avons pour quelques jours réservé la liberté d'action de son armée de secours. Mais, ce que nous ignorions, il était trop tard. Coupé en deux par les armées allemandes, Bourbaki, malgré son héroïsme, ne pouvait plus résister, et, après l'acte de généreux désespoir auquel il s'abandonnait, sa troupe était forcée de passer la frontière.
La convention du 28 janvier n'a donc compromis aucun intérêt, et Paris seul a été sacrifié.
Il ne murmure pas. Il rend hommage à la vaillance de ceux qui ont combattu loin de lui pour le secourir. Il n'accuse pas même celui qui est aujourd'hui si injuste et si téméraire M. le ministre de la guerre, qui a arrêté le général Chanzy voulant marcher au secours de Paris, et lui a donné l'ordre de se retirer derrière la Mayenne.
Non ! Tout était inutile, et nous devions succomber. Mais notre honneur est debout, et nous ne souffrirons pas qu'on y touche.
Nous avons appelé la France à élire librement une Assemblée qui, dans cette crise suprême, fera connaître sa volonté.
Nous ne reconnaissons à personne le droit de lui en imposer une, ni pour la paix ni pour la guerre.
Une nation attaquée par un ennemi puissant lutte jusqu'à la dernière extrémité ; mais elle est toujours juge de l'heure à laquelle la résistance cesse d'être possible.
C'est ce que dira le pays consulté sur son sort.
Pour que son vœu s'impose à tous comme une loi respectée, il faut qu'il soit l'expression souveraine du libre suffrage de tous. Or, nous n'admettons pas qu'on puisse imposer à ce suffrage des restrictions arbitraires.
Nous avons combattu l'empire et ses pratiques. Nous n'entendons pas les recommencer en instituant des candidatures officielles par voie d'élimination.
Que de grandes fautes aient été commises, que de lourdes responsabilités en dérivent, rien n'est plus vrai. Mais le malheur de la patrie efface tout sous son niveau, et, d'ailleurs, en nous rabaissant au rôle d'hommes de parti pour proscrire nos anciens adversaires, nous aurions la douleur et la honte de frapper ceux qui combattent et versent leur sang à nos côtés.
Se souvenir des dissensions passées quand l'ennemi foule notre sol ensanglanté, c'est rapetisser par ses rancunes la grande œuvre de la délivrance de la patrie. Nous mettons les principes au-dessus de ces expédients.
Nous ne voulons pas que le premier décret de la convocation de l'Assemblée républicaine en 1871 soit un acte de défiance contre les électeurs.
A eux appartient la souveraineté ; qu'ils l'exercent sans faiblesse, et la patrie pourra être sauvée.
Le gouvernement de la Défense nationale repousse donc et annule au besoin le décret illégalement pendu par là délégation de Bordeaux, et il appelle tous les Français à voter, sans catégories, pour les représentants qui leur paraîtront les plus dignes de défendre là France.
Vive la République ! Vive la France
Paris, le 4 février 1871. »
— Les membres du gouvernement,
Général Trochu, Jules Favre, Louis-Antoine Garnier-Pagès, Eugène Pelletan, Ernest Picard, Emmanuel Arago.
Les ministres,
Pierre-Frédéric Dorian, Général Le Flo, Pierre Magnin, Ferdinand Hérold
« Ma conscience me fait un devoir de résigner mes fonctions de membre du gouvernement avec lequel je ne suis plus en communion d'idées ni d'espérance.
J'ai l'honneur de vous informer que j'ai remis ma démission aujourd'hui même, en vous remerciant du concours patriotique et dévoué que j'ai toujours trouvé en vous pour mener à bonne fin l'œuvre que j'avais entreprise.
Je vous prie de me laisser vous dire que mon opinion profondément réfléchie est qu'à raison de la brièveté des délais et des graves intérêts qui sont en jeu, vous rendrez un suprême service à la République en faisant procéder aux élections du 8 février, et vous réservant, après ce délai, de prendre telles déterminations qui vous conviendront. Je vous prie d'agréer l'expression de mes sentiments fraternels.
Bordeaux, le , 3 heures. »
— Léon Gambetta.
« Le membre du gouvernement, maire de Paris,
ARRÊTE :
Art.1er : A dater du 10 février, le rationnement du pain cessera d'avoir lieu.
En conséquence, l'arrêté du 18 janvier est rapporté.Art 2 : Sont également rapportés les arrêtés du maire de Paris, du 3 décembre 1870, limitant les livraisons de la caisse de la boulangerie ; du 12 décembre, défendant la vente des farines ; du 5 janvier 1871 défendant la sortie du pain du 12 janvier, interdisant la fabrication et la vente de pain de luxe, et le blutage des farines par les boulangers.
Le commerce des farines, la fabrication et le colportage du pain, sous quelque forme que ce soit, ne seront désormais soumis à aucune restriction, sauf la taxe municipale, qui est maintenue jusqu'à nouvel ordre.Art. 3. Le pain sera désormais taxé au prix de 47 centimes 1/2 le kilogramme, comme avant l'arreté du 18 janvier dernier.
Fait à Paris, le 8 février 1871 »
— Le maire de Paris,
Jules Ferry
« Les soussignés, munis de pouvoirs en vertu desquels ils ont conclu la convention du 28 janvier, considérant que par ladite convention il était réservé à une entente ultérieure de faire cesser les opérations militaires dans les départements du Doubs, du Jura et de la Côte-d'Or, et devant Belfort, et de tracer la ligne de démarcation entre l'occupation allemande et les positions de l'armée française à partir de Quarré-les-Tombes, dans le département de l'Yonne, ont conclu la convention additionnelle suivante :
Art. 1er La forteresse de Belfort sera rendue au commandant de l'armée de siège avec le matériel de guerre faisant partie de l'armement de la place.
La garnison de Belfort sortira de la place avec les honneurs de la guerre, en conservant ses armes, ses équipages et le matériel de guerre appartenant à la troupe, ainsi que les archives militaires.
Les commandants de Belfort et de l'armée de siège se mettront d'accord sur l'exécution des stipulations qui précèdent, ainsi que sur les détails qui n'y sont pas prévus, et sur la direction et sur les étapes dans lesquelles la garnison de Belfort rejoindra l'armée française au-delà de la ligne de démarcation.Art. 2. Les prisonniers allemands se trouvant à Belfort seront mis en liberté.
Art 3. La ligne de démarcation, arrêtée jusqu'au point où se touchent les trois départements de l'Yonne, de la Nièvre et de la Côte-d'Or, sera continuée le long de la limite méridionale du département de la Côte-d'Or jusqu'au point où le chemin de fer qui, de Nevers, par Autun et Chagny, conduit à Chalon-sur-Saône, franchit la limite dudit département. Ce chemin de fer restera en dehors de l'occupation allemande, de manière que la ligne de démarcation, en se tenant à la distance d'un kilomètre de la ligne ferrée, rejoindra la limite méridionale du département de la Cote-d’Or à l'Est de Chagny, et suivra la limite qui sépare le département de Saône-et-Loire des départements de la Côte-d'Or et du Jura.
Après avoir traversé la route qui conduit de Louhans à Lons-le-Saulnier, elle quittera la limite départementale à la hauteur du village de Melleret, d'où elle se continuera de manière à couper le chemin de fer de Lons-le-Saulnier à Bourg, à une distance de onze kilomètres sud de Lons-le-Saulnier, se dirigeant de là sur le pont de l'Ain, sur la route de Clairveaux, d'où elle suivra la limite nord de l'arrondissement de Saint-Claude jusqu'à la frontière suisse.Art. 4. La forteresse de Besançon conservera un rayon de dix kilomètres à la disposition de sa garnison.
La place forte d'Auxonne sera entourée d'un terrain neutre de trois kilomètres, à l'intérieur duquel la circulation sur les chemins de fer qui, de Dijon conduisent à Gray et à Dôle, sera libre pour les trains militaires et d'administration allemands.
Les commandants de troupes, de part et d'autre, regleront le ravitaillement des deux forteresses et des forts qui, dans les départements du Doubs et du Jura, se trouvent en possession de troupes françaises et la délimitation des rayons de ces forts, qui seront de trois kilomètres chacun. La circulation sur les routes ou chemins de fer qui traversent ces rayons sera libre.Art. 5 Les départements du Jura, du Doubs et de la Côte-d'Or seront compris dès à présent dans l'armistice conclu le 28 janvier, en y appliquant, pour la durée de l'armistice et pour les autres conditions, la totalité des stipulations consignées dans la convention du 28 janvier dernier. Versailles le 15 février 1871. »
Chiffres comparatifs de la mortalité constatée à Paris, chaque semaine, pendant la période de l'investissement soit du 18 septembre 1870 jusqu'au 25 février 1871. Cette colonne est suivie des chiffres de la semaine correspondante relevés l'année précédente[69],[221].
Semaine | Décès constatés à Paris du 18 septembre 1870 au 25 février 1871 | Décès de la semaine correspondante de l'année précédente |
---|---|---|
Du au | 1 272 | 820 |
Du au | 1 344 | 713 |
Du au | 1 483 | 747 |
Du au | 1 610 | 752 |
Du au | 1 746 | 825 |
Du au | 1 878 | 880 |
Du au | 1 762 | 921 |
Du au | 1 885 | 877 |
Du au | 2 064 | 900 |
Du au | 1 927 | 933 |
Du au | 2 023 | 846 |
Du au | 2 455 | 882 |
Du au | 2 728 | 955 |
Du au | 2 728 | 980 |
Du au | 3 280 | 921 |
Du au | 3 680 | 1108 |
Du au | 3 982 | 998 |
Du au | 4 465 | 980 |
Du au | 4 376 | 1 044 |
Du au | 4 671 | 1 005 |
Du au | 4 451 | 1 139 |
Du au | 4 103 | 1 292 |
Du au | 3 941 | 1 362 |
Total | 64 154 | 21 978 |
Afin de prévenir tout débordement, et de tenter de calmer les esprits et les ardeurs, Adolphe Thiers, nouvellement nommé chef du pouvoir exécutif de la République Française, et son gouvernement adressent aux habitants de Paris la proclamation suivante :
« Le gouvernement fait appel à votre patriotisme et à votre sagesse ; vous avez dans les mains le sort de Paris et de la France elle-même. Il dépend de vous de les sauver ou de les perdre.
Après une résistance héroïque, la faim vous a contraints de livrer vos forts à l'ennemi victorieux ; les armées qui pouvaient venir à votre secours ont été rejetées derrière la Loire. Ces faits incontestables ont obligé le gouvernement et l'Assemblée nationale à ouvrir des négociations de paix.
Pendant six jours, vos négociateurs ont disputé le terrain pied à pied. Ils ont fait tout ce qui était humainement possible pour obtenir les conditions les moins dommageables. Ils ont signé des préliminaires de paix qui vont être soumis à l'Assemblée nationale.
Pendant le temps nécessaire à l'examen et à la discussion de ces préliminaires, les hostilités auraient recommencé et le sang aurait inutilement coulé sans une prolongation d'armistice.
Cette prolongation n'a pu être obtenue qu'à la condition d'une occupation partielle et très momentanée d'un quartier de Paris. Cette occupation sera limitée au quartier des Champs-Élysées. Il ne pourra entrer dans Paris que 30 000 hommes, et ils devront se retirer dès que les préliminaires de paix auront été ratifiés, ce qui ne peut exiger qu'un petit nombre de jours.
Si cette convention n'était pas respectée, l'armistice serait rompu : l'ennemi, déjà maître des forts, occuperait de vive force la cité tout entière. Vos propriétés, vos chefs-d'œuvre, vos monuments, garantis aujourd'hui par la convention cesseraient de l'être.
Ce malheur atteindrait toute la France. Les affreux ravages de la guerre, qui n'ont pas encore dépassé la Loire, s'étendraient jusqu'aux Pyrénées.
Il est donc absolument vrai de dire qu'il s'agit du salut de Paris et de la France. N'imitez pas la faute de ceux qui n'ont pas voulu nous croire, lorsqu'il y a huit mois nous les adjurions de ne pas entreprendre une guerre qui devait être si funeste.
L'armée française qui a défendu Paris avec tant de courage occupera la gauche de la Seine pour assurer la loyale exécution du nouvel armistice. C'est à la garde nationale à s'unir à elle pour maintenir l'ordre dans le reste de la cité.
Que tous les bons citoyens qui se sont honorés à sa tête et se sont montrés si braves devant l'ennerni reprennent leur ascendant, et cette cruelle situation d'aujourd'hui se terminera par la paix et le retour de la prospérité publique.
Paris, le 27 février 1871. »
— Adolphe Thiers chef du pouvoir exécutif de la République française.
Jules Favre, ministre des affaires étrangères
Ernest Picard, ministre de l'intérieur.
La base préliminaire d'un traité de paix définitif entre l'Empire allemand et la France est signé, le 26 février[222]. Guillaume Ier et Otto von Bismarck exigent la cession de l'Alsace, sous prétexte que cette région était une ancienne possession du Saint-Empire romain germanique, avant les traités de Westphalie et la conquête de Louis XIV ainsi que la partie Nord de la Lorraine avec la place forte de Metz, correspondant à l'actuel département de la Moselle, sur simple demande chef d'état-major von Moltke.
Aux revendications territoriales, une indemnité de guerre de cinq milliards de francs[223] est ajoutée.
Adolphe Thiers obtient que la place forte de Belfort, non prise et défendue par le colonel Denfert-Rochereau reste à la France en échange du droit pour les Allemands de défiler dans Paris.
« Teneur des préliminaires de paix, dont lecture été faite à l'Assemblée nationale et dont l'instrument authentique reste déposé aux archives du ministère des affaires étrangéres. Entre le chef du pouvoir exécutif de la République française, M. Thiers, et le ministre des affaires étrangères, M. Jules Favre, représentant la France, d'un côté,
Et de l'autre, le chancelier de l'empire germanique, M. le comte Otto de Bismarck Schonhauson, muni des pleins pouvoirs de S. M. l'empereur d'Allemagne, roi de Prusse;
Le ministre d'Etat et des affaires étrangères de S. M. le roi de Bavière, M. le comte Otto von Bray-Steinburg
Le ministre des affaires étrangères de S. M. le roi de Wurtemberg, M. le baron August von Wächter (de);
Le ministre d'Etat, président du conseil des ministres de S. A. R. Mgr le grand-duc de Bade, M. Jules Jolly ; Représentant l'Empire germanique.
Les pleins pouvoirs des deux parties contractantes ayant été trouvés en bonne et due forme, il a été convenu ce qui suit pour servir de base préliminaire à la paix définitive à conclure ultérieurement.ARTICLE PREMIER.
La France renonce en faveur de l'Empire allemand à tous ses droits et titres sur les territoires situés à l'est de la frontière ci-après désignée :La ligne de démarcation commence à la frontière Nord-Ouest du canton de Cattenom, vers le Grand-Duché de Luxembourg, suit, vers le sud, les frontières occidentales des cantons de Cattenom et Thionville, passe par le canton de Briey en longeant les frontières occidentales des communes de Montois-la-Montagne et Roncourt, ainsi que les frontières orientales des communes de Sainte-Marie-aux-Chênes, Saint-Ail, atteint la frontière du canton de Gorze qu'elle traverse le long des frontières communales de Vionville, Chambley et Onville, suit la frontière sud-ouest et sud de l'arrondissement de Metz, la frontière occidentale de l'arrondissement de Château-Salins jusqu'à la commune de Pettoncourt dont elle embrasse les frontières occidentale et méridionale, pour suivre la crête des montagnes entre la Seille et Moncel, jusqu'à la frontière de l'arrondissement de Sarrebourg au sud de Lagarde.
La démarcation coïncide ensuite avec la frontière de cet arrondissement jusqu'à la commune de Tanconville dont elle atteint la frontière au Nord. De là elle suit la crête des montagnes entre les sources de la Sarre blanche et de la Vezouze jusqu'à la frontière du canton de Schirmeck, longe la frontière occidentale de ce canton, embrasse les communes de Saales, Bourg-Bruche, Colroy-la-Roche, Plaine, Ranrupt, Saulxures et Saint-Blaise-la-Roche du canton de Saales, et coïncide avec la frontière occidentale des départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin jusqu'au canton de Belfort dont elle quitte la frontière méridionale non loin de Vourvenans pour traverser le canton de Delle, aux limites méridionales des communes de Bourogne et Froidefontaine, et atteindre la frontière Suisse, en longeant les frontières orientales des communes de Joncherey et Delle.
L'empire allemand possédera ces territoires à perpétuité en toute souveraineté et propriété. Une commission internationale, composée de représentants des hautes parties contractantes, en nombre égal des deux côtés, sera chargée, immédiatement après l'échange des ratifications du présent traité, d'exécuter sur le terrain le tracé de la nouvelle frontière, conformément aux stipulations précédentes.
Cette commission présidera au partage des biens fonds et capitaux qui jusqu'ici ont appartenu en commun à des districts ou des communes séparés par la nouvelle frontière. En cas de désaccord sur le tracé et les mesures d'exécution les membres de la commission en référeront à leurs gouvernements respectifs.
La frontière, telle qu'elle vient d'être décrite, se trouve marquée en vert sur deux exemplaires conformes de la carte du territoire formant le gouvernement général d'Alsace publiée, à Berlin, en septembre 1870, par la division géographique et statistique de l'état-major général, et dont un exemplaire sera joint à chacune des deux expéditions du présent traité.
Toutefois, le tracé indiqué a subi les modifications suivantes, de l'accord des deux parties contractantes :
Dans l'ancien département de la Moselle, le village de Sainte-Marie-aux-Mines, près de Saint-Privat-la-Montagne, et de Vionville, à l'ouest de Rezonville, seront cédés à l'Allemagne.
Par contre la ville et les fortifications de Belfort resteront à la France avec un rayon qui sera déterminé ultérieurement.ARTICLE 2
La France payera à S. M. l'empereur d'Allemagne la somme de cinq milliards de francs. Le payement d'au moins un milliard de francs aura lieu dans le courant de l'année 1871, et celui de tout le reste de la dette, dans un espace de trois années, à partir de la ratification des présentes.ARTICLE 3
L'évacuation des territoires français occupés par les troupes allemandes commencera après la ratification du présent traité par l'Assemblée nationale, siégeant à Bordeaux.
Immédiatement après cette ratification, les troupes allemandes quitteront l'intérieur de la ville de Paris, ainsi que les forts situés sur la rive gauche de la Seine, et, dans le plus bref délai possible fixé par une entente entre les autorités militaires des deux pays, elles évacueront entièrement les départements du Calvados, de l'Orne, de la Sarthe, d'Eure-et-Loir, du Loiret, de Loir-et-Cher, d'Indre-et-Loire, de l'Yonne, et, de plus, les départements de la Seine-Inférieure, de l'Eure, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, de l'Aube et de la Côte-d'Or, jusqu'à la rive gauche de la Seine. Les troupes françaises se retireront en même temps derrière la Loire qu'elles ne pourront dépasser avant la signature du traité de paix définitif.
Sont exceptées de cette disposition, la garnison de Paris dont le nombre ne pourra pas dépasse quarante mille hommes, et les garnisons indispensables à la sûreté des places fortes. L'évacuation des départements situés entre la rive droite de la Seine et la frontière de l'est par les troupes allemandes, s'opérera graduellement après la ratification du traité de paix définitif, et le payement du premier demi-milliard de la contribution stipulée par l'article 2, en commençant par les départements les plus rapprochés de Paris, et se continuera au fur et à mesure que les versements de la contribution seront effectués.
Après le premier versement d'un demi-milliard, cette évacuation aura lieu dans les départements suivants :
Somme, Oise, et les parties des départements de la Seine-Inférieure, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne, situés sur la rive droite de la Seine, ainsi que la partie du département de la Seine et les forts situés sur la rive droite.
Après le payement de deux milliards, l'occupation allemande ne comprendra plus que les départements de la Marne, des Ardennes, de la Haute-Marne, de la Meuse, des Vosges, de la Meurthe ainsi que la forteresse de Belfort avec son territoire, qui serviront de gage pour les trois milliards restants, et où le nombre des troupes allemandes ne dépassera pas cinquante mille hommes.
Sa Majesté l'empereur sera disposée à substituer à la garantie territoriale, consistant dans l'occupation partielle du territoire français, une garantie financière si elle est offerte par le gouvernement français dans des conditions reconnues suffisantes par Sa Majesté l'empereur et roi pour les intérêts de l'Allemagne. Les trois milliards dont l'acquittement aura été différé porteront intérêt à cinq pour cent à partir de la ratification de la présente convention.ARTICLE 4
Les troupes allemandes s'abstiendront de faire des réquisitions, soit en argent, soit en nature, dans les départements occupés. Par contre, l'alimentation des troupes allemandes qui resteront en France aura lieu aux frais du gouvernement français, dans la mesure convenue par une entente avec l'intendance militaire allemande.ARTICLE 5
Les intérêts des habitants des territoires cédés, par la France, en tout ce qui concerne leur commerce et leurs droits civils, seront réglés aussi favorablement que possible lorsque seront arrêtées les conditions de la paix définitive. Il sera fixé à cet effet un espace de temps pendant lequel ils jouiront de facilités particulières pour la circulation de leurs produits. Le gouvernement allemand n'apportera aucun obstacle à la libre émigration des habitants des territoires cédés, et ne pourra prendre contre eux aucune mesure atteignant leurs personnes ou leurs propriétés.ARTICLE 6
Les prisonniers de guerre qui n'auront pas déjà été mis en liberté par voie d'échange seront rendus immédiatement après la ratification des présents préliminaires. Afin d'accélérer le transport des prisonniers français, le gouvernement français mettra à la disposition des autorités allemandes, à l'intérieur du territoire allemand, une partie du matériel roulant de ses chemins de fer, dans une mesure qui sera déterminée par des arrangements spéciaux, et aux prix payés en France par le gouvernement français pour les transports militaires.ARTICLE 7
L'ouverture des négociations pour le traité à paix définitif à conclure sur la base des présents préliminaires aura lieu à Bruxelles immédiatement après la ratification de ces derniers par l'Assemblée nationale et par S. M. l'empereur d'Allemagne.ARTICLE 8
Après la conclusion et la ratification du traité de paix définitif l'administration des départements devant encore rester occupés par les troupes allemandes sera remise aux autorités françaises, mais ces dernières seront tenues de se conformer aux ordres que le commandant des troupes allemandes croirait devoir donner dans l'intérêt de la sûreté, de l'entretien et de la distribution des troupes.
Dans les départements occupés, la perception des impôts, après la ratification du présent traité, s'opérera pour le compte du gouvernement français et par le moyen de ses employés.ARTICLE 9
Il est bien entendu que les présentes ne peuvent donner à l'autorité militaire allemande aucun droit sur les parties du territoire qu'elles n’occupent point actuellement.ARTICLE 10
Les présentes seront immédiatement soumises à la ratification de l'Assemblée nationale française siégeant à Bordeaux et de Sa Majesté l'empereur d'Allemagne.
En foi de quoi les soussignés ont revêtu le présent traité préliminaire de leurs signatures et de leurs sceaux.
Fait à Versailles, le
von Bismarck - A Thiers - Jules Favre
Les royaumes de Bavière et de Wurtemberg et le grand-duché de Bade ayant pris part à la guerre actuelle comme alliés de la Prusse et faisant partie maintenant de l'empire germanique, les sous-signés adhèrent à la présente convention au nom de leurs souverains respectifs.
Versailles, . »
— Comte Otto von Bray-Steinburg - Baron August von Wächter (de) - Mittnacht - Jolly.
Dans la soirée, le gouvernement reçoit, en provenance de Bordeaux, la dépêche relative à la ratification des préliminaires de la paix :
Pour la ratification : 546 voix.
Contre la ratification : 107 voix.
L'Assemblée nationale a ratifié les préliminaires de paix.
L'Assemblée confirme également la déchéance de Napoléon III et de sa dynastie.
Devant l'émoi suscité, le ministre de l'intérieur, Ernest Picard, adresse la proclamation suivante aux habitants de Paris :
« L'armée allemande a évacué ce matin, à 11 heures, les quartiers où elle avait pénétré. Pendant son séjour, la tenue de Paris a été au-dessus de tout éloge ; partout, les lieux publics, les établissements industriels, les magasins des commerçants se sont fermés spontanément.
Des cordons de ligne et de garde de nationale, soigneusement disposés, ont formé, entre les troupes allemandes et la population, des frontières provisoires qu'ils ont fait respecter.
Les occupants, laissés à eux-mêmes, ont pu comprendre que si le droit succombe parfois devant la force, il n'est pas si facile de dompter les âmes, et que la torture de la guerre ne domine pas seule le monde.
Nous devons un juste tribut de reconnaissance aux habitants des arrondissements qui ont supporté la présence de l'étranger, ils ont racheté leurs concitoyens, préservé la cité de malheurs imminents et conservé Belfort à la France.
Les municipalités des 8e, 16e et 17e arrondissement ont fait leur devoir avec autant de zêle que d'abnégation. Paris n'aura jamais assez de respect pour ces magistrats dévoués qu'il trouve auprès de lui à toutes les heures de danger et de douleur.
Le gouvernement de la République les remercie, comme il comptera toujours sur eux, comme il compte sur la population pour faire que Paris reste l'une des premières villes du monde.
Paris le 3 mars 1871. »
— Le ministre de l'intérieur, Ernest Picard.
Au moment où le siège de Paris semble inéluctable, le gouvernement engage un immense effort de travaux de défense qui a fait, en quelques semaines, d'une ville jugée hors d'état de se défendre une place véritablement imprenable. Le génie militaire, l'artillerie, le ministère des Travaux publics, auxiliaire du génie et de l'artillerie, y ont concouru[230].
En 1840, Adolphe Thiers, alors président du Conseil fit entourer Paris d'une enceinte continue, bastionnée, que renforçaient, à une distance jugée alors assez considérable, un certain nombre de forts détachés.
L'enceinte comprenait 94 bastions et avait une longueur de 34 kilomètres.
Circulairement, à une distance de 1 400 à 3 500 mètres et à intervalles inégaux, était disposée une ligne de forts, dont certains n'étaient à proprement parler que des redoutes. C'étaient la Briche, la Double-Couronne, les forts de l'Est, d'Aubervilliers, de Romainville, de Noisy, de Rosny, de Nogent, les redoutes de la Faisanderie et de Gravelle qui fermaient la boucle de la Marne, les forts de Charenton, d'Ivry, de Bicêtre, de Montrouge, de Vanves, d'Issy et enfin la forteresse du Mont-Valérien[231].
Le périmètre donné ainsi atteignait 70 kilomètres et on ne supposait pas alors qu'il fût possible de l'investir. Les travaux furent terminés en 1844 et à cette époque, les portées ordinaires étaient de 1 600 mètres pour l'artillerie de siège, de 800 mètres pour l'artillerie de campagne et de 400 mètres pour le fusil.
Mais ce qui, en 1840, avait pu paraître suffisant pour protéger la ville soit contre un investissement, même contre un bombardement, cessait trente ans après de présenter les mêmes garanties devant les perfectionnement considérables de l'artillerie et la masse des armées envahissantes.
Le général de Palikao comprenant que cette situation était dangereuse, fit faire des travaux d'aménagement et garnit les forts d'artillerie. Des appareils destinés à éclairer le terrain au moyen de la lumière électrique avait été installés dans tous les forts. Les forts ainsi que tous les établissements militaires étaient reliés par un réseau télégraphique.
En même temps, le général de Palikao donna des ordres pour qu'on construisit en hâte des ouvrages destinés à combler les vides existant entre les forts et à prendre pied sur les positions qui étaient dangereuses pour eux. C'est ainsi que la redoute de Gennevilliers[232], complétée par des batteries annexes à Colombes, au Petit-Nanterre[233], à Charlebourg[234], à Saint-Ouen[235], à Villeneuve-la-Garenne, etc. devaient boucher la trouée couverte seulement par la boucle de la Seine, qui se trouvait entre Saint-Denis et le Mont-Valérien.
Sur le plateau du Sud-Ouest ou les hauteurs très rapprochées des forts des étaient particulièrement menaçantes, on ébaucha des redoutes à Montretout, aux Brosses, dans le parc de Saint-Cloud, au Brimborion au-dessus de Sèvres, à Meudon.
Un fort fut commencé à la pointe Nord-Est du plateau de Châtillon. Il devait être flanqué de deux ouvrages au Moulin-de-pierre[note 5],[26],[27] et au sud de Bagneux.
On établit également des redoutes au Hautes-Bruyères et au Moulin de Saquet, afin de prendre pied sur le plateau de Villejuif.
Du côté de Saint-Denis, on avait seulement relié par des parapets en terre les trois forts de la Briche, de la Double-Couronne et de l'Est.
Le secteur Est allant de Romainville à Nogent et naturellement plus protégé, on l'avait laissé tel quel.
La défense Paris est composée de 94 bastions, 6 forts sur la rive gauche, 8 forts sur la rive droite ainsi que 3 forts à Saint-Denis[236].
Mais comme c'est souvent le cas, on n'établit pas à l'avance une corrélation suffisante entre les moyens dont on disposait et la nature des travaux à exécuter. Le général Ducrot indique à ce sujet : « La plupart de ces ouvrages (Montretout, Gennevilliers, Châtillon, Hautes-Bruyères) devaient dans le principe avoir deux étages de pièces de gros calibre avec casemate. Pour cela il aurait fallu du temps et des hommes. Mais après Sedan, nous ne trouvions plus d'ouvriers, et d'heure en heure, l'ennemi était attendu. Il aurait donc fallu sur le champ ne plus songer aux ouvrages de grande fortification et se consacrer entièrement à établir de solides ouvrages de campagne[237]. Laissant de côté les voûtes et les traverses en pierre on auraient dû faire les plafonds, les abris, avec de la terre, des troncs d'arbres, des rails. Il n'en fut pas ainsi ; l'état-major du génie voulut continuer à élever de majestueux ouvrages réguliers et permanents. Le 16 septembre, la veille de l'arrivée des Allemands on travaillait encore dans les redoutes de Montretout et de Châtillon à faire des traverses en maçonnerie ».
Le 19 septembre constatant leur état précaire, le général Trochu donnait l'ordre d'abandonner tous ceux du secteur Sud, en sorte que, quelques jours plus tard lorsque la nécessité s'imposa de donner de l'air à la défense qui étouffait dans les étroites limites où on l'avait confinée, il fallut reprendre de vive force les redoutes des Hautes-Bruyères et du Moulin Saquet. Les autres restèrent aux mains de l'ennemi dont l'abandon nous fut préjudiciable.
Après les désastres de l'armée du Rhin, l'immense enceinte de la capitale était non seulement dépourvue de tout armement, mais elle n'avait ni abris, ni magasins à poudre, ni traverses. Sa zone militaire était couverte de constructions innombrables, et 69 avenues dont quelques-unes atteignaient jusqu'à 80 m de largeur, la traversaient de part en part. Quant aux forts, ils n'étaient pas non plus en état de défense, et les ouvrages extérieurs étaient, pour la plupart, effacés par le temps.
La nécessité de mettre Paris en état de défense n'était jamais apparue au précédent gouvernement, même après les premiers revers, qu'à une échéance plus ou moins lointaine. Aussi pour compléter la défense extérieure, les stratèges proposaient d'établir 4 forts permanents en maçonnerie à Gennevilliers, à Montretout, aux Hautes-Bruyères et à Châtillon. Mais à peine l'exécution avait elle commencé, qu il fallut, par suite de la rapidité des événements, y renoncer et substituer des redoutes enterré aux travaux maçonnés.
L'investissement de la place, au 18 septembre, ne permit d'achever que les redoutes des Hautes-Bruyères et du Moulin-Saquet.
Dans les forts, il n'y avait ni abris, ni plates formes, ni magasins, ni casemates, ni embrasures, ni aucune des défenses aux abords des ouvrages. Dans les six forts occupés par la marine[238], les travaux d'armement et de terrassement ont été exécutés par les marins eux-mêmes.
11 000 ouvriers fermèrent les 69 portes, de l'enceinte de Paris, établirent des ponts levis, barrèrent les 4 canaux et placèrent des estacades dans la Seine.
Les bois de Boulogne et de Vincennes étaient abattus en partie[81] et 3 nouvelles batteries étaient créées à Saint-Ouen, à Montmartre et aux buttes Chaumont.
Sur les remparts et dans les forts le génie militaire construisit des traverses, des abris, 70 magasins voûtés destinés à recevoir les poudres et le matériel de la défense et installé 2 millions de sacs à terre pour couronner les parapets.
La partie de l'enceinte correspondant au Point du Jour, totalement ouverte en août 1870, fut l'objet d'énormes travaux exécutés en avant dans le village de Billancourt avec 2 retranchements intérieurs devenant l'un des points les plus forts de la place en octobre.
« Ces travaux ont été complétés par l'exploration des nombreuses carrières qui se développent en tous sens sur notre front et que les dispositions les plus sages, appuyées de la surveillance la plus vigilante, mettent désormais à l'abri de toute tentative de l'ennemi, par la transformation des égouts en fourneaux de mines sous le sol de Boulogne, de Billancourt, de Neuilly, Clichy, etc., par la construction d'appareils électriques d'une grande puissance dans tous les forts, et d'un systeme d'observatoires militaires qui se complète de jour en jour, par la construction de barrages destinés à maintenir le niveau de l'eau dans la ville, à assurer en amont et en aval l'action des canonnières blindées de la marine et le fonctionnement de la pompe de Chaillot, enfin par l'occupation très solide des villages qui avoisinent l'enceinte. »[230]
« De Vitry à Issy d'une part, entre Saint-Denis et le canal de l'Ourcq d'autre part, les maisons ont été crénelées, les rues barricadéesn; une ligne continue relie maintenant les redoutes de Gravelle et de la Faisanderie aux forts qui se succèdent jusqu'à Saint-Denis.
En avant de cette ligne, les villages de Noisy, Rosny, Nogent, ont été également retranchés. On travaille à une ligne nouvelle qui s'étendra de la Seine (au point correspondant au barrage de Port-à-l'Anglais) à la Marne, en passant par Maisons-Alfort.
Plus de 80 000 travailleurs ont coopéré à cette œuvre immense, qui représente des mouvements de terre incalculables.
En même temps que la place se renforçait, le rayon de la défense s'étendait de jour en jour.
Ainsi, tandis que le 19 septembre, après l'affaire de Châtillon, nous étions réduits à la ligne des forts, nous avons aujourd'hui reconquis sur l'ennemi, en avant de nos ouvrages, Vitry, Villejuif, Arcueil, Cachan, Issy (dont l’ennemi occupait le parc au 19 septembre et où nous avons aujourd'hui des défenses formidables), Suresnes, Puteaux, Courbevoie, désormais à l'abri de ses incursions, Asnières, repris depuis trois jours, Villetaneuse, une partie de Pierrefitte, Stains, La Courneuve, Fontenay-sous-Bois et Nogent-sur-Marne, où les assiégeants pénétraient à leur aise et que nous avons couverts de barricades.
Enfin, nous possédons vers l'est une tête de pont à Joinville et à l'ouest nous disposons, dans sa totalité, de la presqu'île de Gennevilliers. »[230],[28]
D'après les règles établies en 1867, l'armement des forts et de l'enceinte devait se composer de 7 pièces par bastion. Au début de la guerre, le matériel de l'artillerie n'était, pour les forts, que de 3 pièces par bastion, et il n'existait pas une seule pièce en batterie sur les remparts de l'enceinte. Il n'y avait pas non plus de bouches à feu de réserve de Paris, celles-ci ayant été envoyées à Metz et à Strasbourg.
Jusqu'au 8 août, on se borne à y placer quelques canons, plutôt pour satisfaire l'opinion publique qu'en prévision d'un siège qui semblait impossible.
Avant le début du siège, les munitions ne représentaient que dix coups par pièce. Les boites à mitraille manquaient à peu près complètement. L'approvisionnement en poudre à canon n'était que de 540 000 kg. Le personnel de l’artillerie était composé d'une dizaine d'officiers qui étaient répartis sur l'étendue de l'enceinte. Dans quelques forts, le service de l'artillerie était représenté par un simple gardien de batterie.
En octobre les officiers retraités ou démissionnaires sont rappelés à l'activité, des artilleurs de la garde mobile de la Seine, de Seine-et-Oise, de la Drôme, du Rhône, de la Loire-Inférieure et du Pas-de-Calais, sont mobilisés et des compagnies de canonniers auxiliaires recrutés parmi les anciens militaires sont créés. La marine fourni ses amiraux, ses officiers, ses artilleurs, en même temps
que 7 000 marins. Le personnel de l'artillerie de la place arrive alors au chiffre de 13 000 officiers, sous-officiers et soldats.
À la mi-octobre, l'artillerie dispose, sur l'enceinte ou dans les forts, de 2 140 bouches à feu.
De 10 coups par pièce, l'approvisionnement a été porté à 400 coups, et jusqu'à 500 pour les canons des forts.
Le service de l'artillerie qui s'occupait de la fabrication des cartouches d'infanterie, a porté de 390 cartouches par homme à 2 millions de cartouches par semaine.
Tous les forts de la rive droite, à l'exception d'Aubervilliers, de Vincennes et de Nogent, ont reçu des canons d'un puissant calibre. Le Mont Valérien, Charenton, Gravelle, la Faisanderie, la Double Couronne, ainsi que divers points saillants de l'enceinte en ont reçu une bonne quantité. Ces puissantes pièces ont servi à former les batteries des buttes Chaumont et des buttes Montmartre, qui battent tout le terrain de Gennevilliers à Romainville, ainsi que les importantes batteries du parc de Saint-Ouen qui protègent le fort de la Briche et qui portent leurs projectiles jusqu'au versant qui domine la Seine à droite d'Argenteuil.
L'armement des forts de la rive gauche et de l'enceinte qui les avoisine a été fortifié de la même manière, de façon à protéger le Point-du-Jour, la vallée de la Seine en amont, le confluent de la Marne et l'entrée dans Paris du chemin de fer d'Orléans.
L'artillerie de la défense de Paris a, par l'usage des pièces à longue portée, obligé l'ennemi à reporter au loin le rayon d'investissement.
La commission du génie civil veille à l'exécution des commandes de matériel et des munitions, émanées du ministère des travaux publics, et dont voici les principales :
On doit encore à la commission du génie civil l'organisation d'un service spécial d'inspection des secours à prendre contre l'incendie, et, dans le voisinage des musées et des établissements publics, l'établissement des appareils permettant de dominer, à l'origine, tous les sinistres.
Du 5 septembre jusqu'au 12 octobre, ont été distribués par les soins du ministère de l'intérieur :
Pendant cette période de temps, l'administration de la guerre, de son côté, délivrait directement aux gardes mobiles un grand nombre d'effets d'habillement et d'équipement, et tous les objets de campement, tels que demi couvertures, tentes, ustensiles, etc.
Les troupes dont disposait la défense se composaient d'éléments assez hétérogènes, les uns excellents, d'autres moins, mais formant un total formidable et bien supérieur à celui de l'ennemi.
La Marine, dont le rôle dans la seconde partie de la guerre a été considérable et précieux, avait fourni un contingent de 14 000 hommes et qui fut l'élément le plus solide et le plus sûr de la défense de Paris[241]. Le régiment d'artillerie de marine et des troupes d'infanterie de marine et de gendarmerie maritime furent également appelés à Paris[242].
Grâce aux grosses pièces amenées des arsenaux de Brest de Cherbourg et de Lorient et aux canonniers expérimentés qui les servaient, les forts ont pu lutter jusqu'à la fin. Aucun d'eux ne fut jamais réduit, ni même entouré, malgré la position désavantageuse où ils se trouvaient pour la plupart, malgré leurs courtines démodées et leurs larges terre-pleins qui en faisaient de vrais nids à obus.
Le 7 août, après les premières défaites françaises en Alsace et en Lorraine, l'amiral Rigault de Genouilly, ministre de la marine, avait fait décider par la régente, l'impératrice Eugénie, que les équipages de la flotte non utilisés pour le service de mer seraient appelés à Paris et exclusivement chargés de la défense des forts de Romainville, de Noisy, de Rosny, d'Ivry, de Bicêtre, de Montrouge, ainsi que des batteries de Montmartre et de Saint-Ouen et qu'une flottille, formée de bateaux légers et de canonnières, opérerait sur la Seine.
En même temps, le chemin de fer amenait à Paris le régiment d'artillerie de marine, les troupes d'infanterie restées dans les dépôts, une partie de la gendarmerie maritime et un nombreux personnel composé d'ingénieurs, de commissaires, de médecins, etc. Huit officiers généraux de la marine sous les ordres de l'amiral de la Roncière de Noury se partagèrent le commandement de ces forces et prirent chacun la direction d'un des secteurs qui formait l'enceinte de la place.
Quant à la flottille de la Seine, placée sous le commandement du capitaine de vaisseau Thomasset, elle comprenait :
Le tout portant trente-trois canons et huit pierriers.
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Quant aux fusiliers de la marine, ils furent, après le 10 novembre, groupés en trois bataillons de 600 à 700 hommes de manière à être disponibles pour toutes les expéditions.
Les troupes d'infanterie de l'armée de ligne étaient représentées à Paris par les 13e et 14e corps d'armée.
On arriva ainsi à mettre sur pied environ 80 000 hommes d'infanterie de ligne, parmi lesquels on ne pouvait compter que le quart ou au plus le tiers de véritables soldats[245].
La cavalerie se composait de la division Champéron, à trois brigades formées de régiments de marche et de régiments de gendarmes à cheval[11],[12]. Elle comprenait environ 5 000 cavaliers.
L'artillerie ne comptait au début du siège que les 30 batteries des 13e et 14e corps, dont 7 seulement étaient d'ancienne formation.
Le génie comptait 9 compagnies auxquelles il faut adjoindre 2 compagnies de pontonniers-artilleurs et un détachement de pontonniers de marine.
Telle était la composition de l'armée active. À côté de celle-ci se trouvaient d'autres forces qui, mieux employées, auraient certainement pu donner des résultats plus satisfaisants que ceux qui ont été atteints. C'était la garde mobile, la garde nationale et les corps francs.
La garde nationale mobile n'existait, en juillet 1870, que sur le papier. Ses soldats était appelés familièrement Mobiles ou Moblots.
Grâce à l'activité déployé par Henri Chevreau, les hommes de 14 divisions militaires, qui un mois avant n'étaient ni enrégimentés, ni équipés, furent pourvus du nécessaire minimum. C'était 100 000 hommes bien intentionnés, mais mal instruit, qui arrivaient pour renforcer l'armée de ligne.
Mais à côté d'eux se trouvaient 15 000 gardes mobiles du département de la Seine que le général Trochu avait fait rappeler du camp de Châlons et qui ne brillait absolument pas ni par la discipline, ni par l'esprit de combat. Ramenés au camp
de Saint-Maur, ils refusèrent, le 12 septembre, d'aller aux avant-postes parce que la position leur paraissait trop exposée. Le 20 septembre, ils évacuaient
le Mont-Valérien et laissait la forteresse sans défenseurs au risque de la voir tomber aux mains de l'ennemi.
115 000 hommes de cette garde nationale mobile furent, dans le principe, réunis en régiments de trois bataillons. Ces régiments étaient répartis en quatre groupes sous les ordres des généraux de Liniers,
Berthaut, Corréard et de Beaufort. Mais le 6 novembre, cette organisation était modifiée, et les bataillons de mobile incorporés dans les divisions actives qui constituaient les deux
armées de la défense de Paris. Leurs pertes furent peu considérables puisqu'au moment de l'armistice il en restait encore 102 000 sous les armes[246]. Il faut dire que beaucoup d'entre eux ne
virent jamais le feu.
La garde nationale sédentaire était une milice citoyenne, qui comme le disait avec humour Henry Monnier « est fait autant pour protéger nos institutions que pour les combattre », qui se montait au moment de la déclaration de la guerre, le , à 60 000 hommes. C'était plus qu'il n'en fallait pour assurer le service des remparts et la police intérieure de la ville. Mais on créa tout de même 60 nouveaux bataillons puis encore 60 autres[249], en raison du manque de confiance de l'opposition envers l'armée active impériale. Si bien qu'on en vint à donner un fusil, un équipement et 1,50 franc par jour[20] à tout homme qui se présentait, quels que fussent ses antécédents et ses références. Des étrangers, des enfants, des vieillards, des vagabonds et des repris de justice[250]. La garde nationale finit par compter 350 000 hommes. Quant aux officiers, nommés à l'élection, il fallut, pendant la durée du siège, en destituer 495 seulement[251].
Il fallut convenir bientôt que cette force pseudo-militaire était plus gênante pour la défense que redoutable pour l'ennemi. Alors vers la mi-novembre 1870, on forma dans chaque bataillon à l'aide de volontaires, célibataires ou veufs sans enfants, des compagnies de guerre destinées à coopérer aux opérations extérieures et à monter la garde hors des remparts[252].
Les bataillons devaient être formés par les arrondissements ci-après :
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Certains bataillons avaient été formés avec le personnel de quelques industries ou grandes administrations, tels, par exemple, les bataillons de la Compagnie du gaz, des Petites Voitures (CGPV), des Omnibus, des Chemins de fer de l'Est, du Nord, d'Orléans, etc. Les effectifs de ces 254 bataillons étaient des plus divers et allaient de350 à 2 600 hommes
Ces bataillons de mobilisés sortirent pour la première fois du 20 au 25 novembre. Le général Ducrot écrit dans ses mémoires : « Nous ne pouvons nous rappeler sans tristesse le désordre qui régnait dans leurs rangs. Nous ne parlerons que pour mémoire du fameux bataillon de Belleville, qui dût être licencié pour avoir abandonné son poste devant l'ennemi aux tranchées de Maisons-Alfort[255] » Le bataillon de Belleville commandé par Flourens s'est débandé jusqu'à six fois devant l'ennemi[256]. D'autres exigeaient qu'on les relevât des avant-postes avant même d'y avoir reçu un coup de fusil[257].
Le général Thoumas[252] indique toutefois : « La Commune et le second siège de Paris ont prouvé incontestablement que ces mêmes fédérés qui, pendant le premier siège, n'avaient fait que troubler la défense étaient capables de bien se battre au dehors. Si durant le premier siège, les compagnies soldées servant de garde prétorienne à Pyat, Delescluzes, Flourens, Blanqui et consorts, le général Trochu les avaient mises camper en dehors des remparts et accoutumées peu à peu à de petites rencontres à la vue de l'ennemi on aurait eu des troupes aussi bonnes que les autres. »
Outre les 266 bataillons mobilisés et constituant la première armée, aux ordres du général Clément Thomas, la garde nationale comptait une légion d'artillerie sous les ordres du colonel Schœlcher, qui rendit quelques services aux remparts et une légion de cavalerie sous les ordres du colonel Quiclet, qui n'en rendit aucun.
Les corps francs, troisième et dernière incarnation des forces improvisées au moment de la guerre, absorbaient à Paris comme en province, un effectif considérable.
Pour l'infanterie, il y avait 33 corps de francs-tireurs qui s'équipaient eux-mêmes à leur guise. Les corps francs ne jouèrent généralement aucun rôle militaire que celui que leur assignait leur bon plaisir[258].
Plusieurs exceptions doivent cependant être faites en faveur de corps francs qui s'étaient imposé une mission spéciale et qui, grâce au recrutement, à leur organisation, à leurs chefs et à l'esprit qui les animait, ont été pour l'armée active des auxiliaires précieux qui ne se bornèrent pas, comme tant d'autres, à parader avec des galons, des bottes et des plumets. Parmi ceux qui firent, au contraire, une besogne utile on peut citer :
En septembre 1870, enfermés dans les murs de Paris, il y avait[259]:
Le , l'armée est recomposée en 3 armées chargées de la défense de Paris
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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